Le crime d'agression en droit international pénal, portée et enjeux de la révision de Kampala( Télécharger le fichier original )par Olivier Lungwe Fataki Université Catholique de Bukavu - Licence 2016 |
b. L'agression et le Pacte Briand-KellogEn date du 6 avril 1927, Aristide Briand, ministre français des Affaires étrangères et délégué de la France à la SdN de 1924 à 1932, avait proposé à son homologue américain Frank B. Kellogg un pacte bilatéral par lequel les deux pays s'engageaient à renoncer à la guerre comme moyen politique. Ainsi, le Secrétaire d'État américain aux affaires étrangères suggéra d'élargir ce pacte à toutes les nations qui souhaiteraient y adhérer32(*). Le Pacte de renonciation à la guerre, signé à Paris, le 27 Août 1928, également connu sous l'appellation de Briand-Kellog33(*), était conçu avec la volonté de mettre définitivement la guerre hors la loi pour le règlement des différends internationaux ...34(*). Son objectif, renseigne Robert Kolb, était de boucher les fissures du Pacte de la Société des Nations qui n'interdisait pas la guerre de manière générale35(*). Ainsi, l'article premier du Pacte de Paris dispose que « les Hautes Parties contractantes déclarent solennellement au nom de leurs peuples respectifs qu'elles condamnent le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et y renoncent en tant qu'instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles ». Le Pacte de Briand-Kellog est, avant la deuxième guerre mondiale, le texte qui marque le pas le plus décisif sur la voie de l'interdiction de la guerre d'agression. Selon Maurice Kamto, le Pacte a, sur ce point, seulement consacré une règle de droit coutumier au reste étayée par quelques éléments d'une pratique internationale qui s'est imposée progressivement36(*). Mais il a également préparé l'étape suivante : celle de la condamnation du recours à la guerre pour résoudre les différends internationaux et l'obligation de régler tout différend ou conflit par des moyens pacifiques. Néanmoins, Le Pacte de 1928 contient certes encore diverses lacunes. Par exemple, il n'interdit que la guerre, mais non pas l'utilisation de la force en général : dès lors, il est incertain si des opérations utilisant la force armée mais ne tombant pas sous la qualification formelle de guerre ; parmi de telles opérations, on peut citer des représailles armées, des interventions armées, etc. Au rang de ces lacunes, Robert Kolb ajoute que même la portée de l'épithète « comme instrument de politique nationale » a donné lieu à diverses interprétations, dont certaines ont tenté d'élargir l'espace laissé à l'utilisation légale de la violence37(*). Certains Etats, dont Bolivie, El Salvador, Uruguay et Argentine, n'étaient pas parties38(*) au pacte de Paris, mais, reconnaissaient tout de même l'obligation de ne pas recourir à la guerre et ont adhéré d'ailleurs à d'autres instruments qu'on qualifiera d'analogue au Pacte de Paris. Cette multiplication des pactes de non-agression conduira à une situation d'accords bilatéraux et multilatéraux entre Etats pour se protéger contre les agressions mutuelles. C'est le cas notamment du Pacte Saavedra-Lamas de 1933 et du Pacte de non-agression entre la France et l'Union soviétique, conclu le 29 Novembre 1932, a parlé de « l'agression terrestre, maritime ou aérienne »39(*). En dépit de l'absence de définition du crime d'agression, le Traité de Versailles marquait déjà une tendance vers les poursuites des individus pour guerre d'agression. * 32 M. SIBERT, Op. cit, p. 351. * 33Disponible en ligne sur https://www.uni-marburg.de/icwc/dateien/briandkelloggpact.pdf. Visité le 1er décembre 2015. * 34 P. D'ARGENT, Les réparations de guerre en droit international public, Bruxelles/Paris,Bruylant/LGDJ, 2002, p. 433. * 35 R. KOLB, Considérations générales sur la violence et le droit international, In RGDIP, 2009, p. 36. Disponible en ligne sur http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/2_27-44.pdf. Visité le 23 janvier 2016. * 36 M. KAMTO, Op., cit., p. 8. * 37 R. KOLB, Op., cit., p. 37. * 38Idem., p. 36. * 39 B. BROMS, Op. cit., p. 332. |
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