Introduction générale
Paroles, gestes, signaux de fumée, tam, tam, dessins
pariétaux, hiéroglyphes, textes écrits ....tous ces
supports ont été utilisés par l'homme, afin de lui
permettre de communiquer et d'informer.
Ceci prouve que l'acte d'échanger est
multiséculaire et donc indissociable de l'histoire de
l'humanité.
Les spécialistes en sciences de l'information et de la
communication ont classé chronologiquement ces supports selon trois
âges successifs : âge oral /parole ; âge de
l'écrit/écriture manuscrite, imprimée tapuscrit ;
âge de « l'inscrit »/ image, photo, films, disque, radio,
téléphone, télévision, internet1.....
autrement dit, tout ce qui fait appel à des techniques d'inscription
physico-chimique, électromagnétique ou électronique.
Ainsi, cette trajectoire, dont l'aboutissement sont, donc, les nouvelles
technologies de l'information et de la communication -NTIC-nous a-t-elle permis
d'atteindre l'objet de notre recherche « la radio », circonscrite
sous l'angle suivant : « Gestion de l'information à la Radio
nationale algérienne-étude comparative entre les stations
chaîne 1 et chaîne 3-janvier 2013- ».
Tel est l'intitulé de notre sujet. Motivations et
intérêts
Ce qui a motivé ce choix, réside dans le fait
que les études sur la radio, en général ne sont pas
très nombreuses, paradoxalement à celles consacrées
à la télévision. Ainsi, le son et le texte radiophoniques,
ont été peu cernés. Même la numérisation
sonore qui a révolutionné l'univers de la radio, a peu
intéressé les chercheurs, contrairement à l'image, qui a
fait très tôt l'objet de recherches, de conception de ses outils
d'analyse, ainsi que de débats autour de leur fiabilité et de
leur efficacité.
1 -Estival Robert, Schéma et
schématisation, revue, Paris, années 80.
« De tous les travaux consacrés à la radio,
les recherches historiques sont, de loin, dominantes, comme si ce medium
appartenait au passé », soulignera, le professeur Jean
François Tetu2.
Quant aux investigations sur la radio algérienne,
celles-ci sont indigentes.
Mentionnons, par ailleurs, qu'être journaliste depuis
vingt ans au sein de cette institution a été également,
à l'origine de cette motivation, cette fois ci d'ordre professionnel.
Aussi, souhaiterions-nous que notre modeste contribution
constitue un point de départ, un relais à des recherches futures
beaucoup plus exigeantes sur la radio en général et sur la radio
algérienne en particulier.
L'intérêt présenté par ce
médium, est qu'il soit issu, comme tout autre moyen de communication
nouveau, d'un besoin conjoncturel collectif nouveau de
communication3 au sein d'une totalité sociale donnée,
ici de l'Europe du XIXe siècle.
Ce besoin n'est que le résultat d'une « pression
de communication » qui n'est elle-même que l'émanation de
bouleversements politiques, économiques, idéologiques, culturels
de cette totalité sociale, dans un Contexte, marqué, à
l'époque, par l'avènement de la première Révolution
industrielle, synonyme de l'outil mécanisé.
« Pression de communication » -besoins conjoncturel
collectif nouveau de communication - nouveau moyen de communication.
De ce schéma dialectique, où le rapport de
causalité impose sa nécessité à travers
l'imbrication inter-relationnelle de plusieurs
phénomènes,4 apparait, donc, en aval, la Radio,
grâce, également à la réunion de
moyens techniques adéquats--Electricité,
ondes électromagnétiques, systèmes de
transmissions....
2 Jean François Tetu, professeur a
l'institut d'études politique de Lyon : Manuscrit auteur publié
dans Hermes - journal of language and communication studies, 2004
3 Nadia El Kenz, Contribution à une
théorie des cinématiques : la cinémathèque
algérienne-1965-1970, thèse de doctorat, Bordeaux III (France)
,1993.
4 Henri Jean Martin signale que beaucoup
d'inventions techniques relatives, notamment, à la presse sont
nées durant la phase de resserrement économique,
« dite », » phase B » comme l'imprimerie, au XVème
siècle, marqué par des bouleversements agricoles, industriels,
des troubles sociaux, in : Le livre et la civilisation écrite, Paris :
Ed. E.N.S.P, 1970.
L'autre intérêt du sujet est que la Radio
algérienne, en tant que moyens de communication, n'a pas
échappé également aux lois dynamiques de la
réalité causale. Elle a, aussi emprunté
l'itinéraire représenté par le schéma ci-dessus. En
effet, dans les années 50 du siècle dernier, au sein du magma des
évènements politiques, économiques,
idéologiques.... liés à la Guerre de libération
nationale, nait « une pression de communication » chez la
globalité sociale algérienne d'alors, se manifestant par un
besoin collectif nouveau de communication.
Besoin qui donnera lieu à la création de la
légendaire radio « La Voix de l'Algérie combattante »
du parti en lutte armée, le Front de Libération nationale-
FLN-.
Cet outil permettra au peuple algérien, dans sa
détermination à se départir du joug colonial, de mieux
saisir, de suivre le déroulement, d'être informé
ponctuellement et de faire connaitre sa Révolution, à
l'échelle internationale.
Notre attention à été portée
également sur la Radio, car son intérêt se situe aussi,
dans le fait qu'on puisse l'investir de multifonctions : elle peut être
le « livre sonore » du savoir, de la connaissance, de la distraction,
de l'expression artistique .... Elle peut aussi être un moyen
d'éveil, de formation des consciences nationales, de militantisme au
service de causes idéologiques nobles.... Elle peut être,
également, une redoutable arme de pression, de propagande,
d'endoctrinement, d'uniformisation aux seules idées politiques, celles
des pouvoirs dictatoriaux, à l'autorité absolue.
- La chaîne 3 diversifie le contenu de ses journaux
sonores et le module en fonction de l'importance de l'actualité
nationale et internationale, d'où, par conséquent, une
ouverture
Problématique
Ce mémoire s'articule autour de la problématique
suivante : « le discours informatif de la radio algérienne est- il
identique dans sa conception, son traitement, son contenu- manifeste et/ou
latent- et son mode de présentation entre les chaînes 1 et 3 ?
».
En d'autres termes, comment, et ce, à travers une
approche comparative, chacune de ces deux chaînes procède- t-elle
à la collecte, à la sélection, à la gestion et
à la façon d'émettre les informations de ses
éditions ou journaux parlés ?
Ne prétendant pas réaliser un travail exhaustif
dans le cadre du Master, nous avons obligatoirement délimité
notre sujet, au plan thématique et temporel, à un choix
d'étude de traitement de trois évènements marquants -deux
nationaux et un international- qui se sont déroulés au cours du
mois de janvier 2013, riche en faits importants.
Il s'agit de : -l'attaque terroriste contre la base
pétrolière de Tiguentourine à In Amenas ; -la grève
des postiers ;
-l'intervention de la France au Nord du Mali.
Par ailleurs, d'autres questionnements sous- tendent notre
problématique : quelle place occupe l'information institutionnelle dans
les éditions des lardites chaînes ? Ces dernières
reçoivent- elles des orientations et directives éditoriales
spécifiques, relatives à cette gestion informationnelle ?
Des hypothèses ou essais de réponse tentent,
avant leur vérification, d'élucider ces questionnements par des
assertions provisoires :
-La chaîne 1 se considère comme une chaîne
nationale et officielle de l'Etat. Elle favorise l'information
institutionnelle, à laquelle elle s'y consacre pleinement, par rapport
aux autres types informations.
variée de ses éditions, en correspondance avec
cette démarche, lui permettant de se soustraire aux annonces des titres,
« anglées »sur l'institutionnel.
- Les journalistes de la chaîne 1 recourent à une
« écriture » radiophonique, exclusivement en arabe classique,
qui, selon des observateurs, est qualifié de pompeux, d'emphatique,
voire de grandiloquent, par un ton et une inflexion adoptées, qui
demeurent invariables. Cette forme n'est pas forcement accessible à tous
les auditeurs.
Aussi, l'impression dégagée est-elle celle d'une
forme de discours informatif, donc, figé,
stéréotypé, caractéristique de ce qu'est
appelé la « langue de bois ». Ainsi, nous estimons que la
thématique récurrente sur l'institutionnel ainsi que ce ton
affecté,artificiel, choisi comme mode de présentation ou de
diffusion journalistique, entachent la crédibilité de ce discours
manifeste, devenant non fiable, suspect...., aux yeux d'un certain nombre
d'auditeurs.
- A Contrario de la chaîne 1, les informations
diffusées sur les ondes de la chaîne 3, semblent, d'après
nous, épouser un mode de lecture, qui semble naturel, spontané ,
accessible et direct .... à même de revêtir le contenu
journalistique de plus de crédibilité, constate-t-on.
Les objectifs assignés à cette recherche sont de
:
-Cerner analytiquement et comparativement la manière
dont chacune des chaînes à entrepris la couverture
médiatique des évènements suscités ;
-Souligner l'existence ou non, entre les deux chaînes,
de la notion de promptitude- pourtant jugée capitale par les
médias étrangers- dans la prise en charge immédiate de ces
évènements, même les plus sensibles. Quel est donc
l'obstacle qui empêche, notamment, la chaîne 1 de cultiver le
crédo de l'exclusivité et du scoop ?
Il est question également de :
-Faire ressortir le choix des sources et mettre en
évidence l'équitabilité ou non dans le traitement de
l'information entre les deux chaînes, c'est-à-dire d'observer si
elles privilégient exclusivement une seule source, celle de la partie
officielle ou ouvrent- elles aussi leur micro à la partie adverse :
syndicat, dans le cas par exemple de la grève des postiers.
D'autres objectifs sous- tendent cette étude et nous
conduisent à :
-Mesurer, auprès des auditeurs, le degré de
fiabilité et de crédibilité qu'ils accordent, dans ce cas,
aux discours informatifs radiophoniques de chacune des chaînes ;
-Saisir, à l'aide de ces données, le fond,
c'est-à-dire le contenu de ces discours, en tentant de décrypter,
à partir du contenu manifeste, explicite, un éventuel contenu
latent, c'est-à-dire, un sens caché, implicite, orienté
;
- montrer que les contenus sont présentés lors
des éditions journalistiques, selon un mode de lecture différent
entre les deux chaînes ;
-observer, en fonction de ces données, si la radio
algérienne, en l'occurrence, la chaîne 1 demeure un instrument
dévoué au pouvoir en place qui, l'inféodaliserait à
sa vision idéologique et à ses projets de
pérennité, par le biais de la faveur accordée à la
médiatisation des propos officiels et institutionnels. La chaîne 1
sert- elle un pouvoir, essayant de prouver que sa politique gouvernementale est
au service des intérêts de l'Etat et de l'ensemble des citoyens
?
Cette étude s'appuie sur une méthodologie
d'investigations ou grille d'analyse recourant aux démarches
hypothético-détectives et inductives, ainsi qu'a la
méthode comparative. Ces stratégies de recherche, qui partent,
respectivement, des hypothèses à la confrontation des faits, des
faits aux énoncés généraux, des parallèles
aux ressemblances ou dissimilitudes, intègrent divers outils :
observation, sondage d'opinion, enquête de terrain, analyse de contenu,
interviews, échantillons d'enregistrement de journaux sonores...
Tout ceci nous permettra de constituer un corpus, sur lequel
nous nous fondrons, pour la réalisation de notre étude,
axée sur des réponses aux questions posées, ainsi que sur
la vérification, la confirmation éventuelle,
l'entérinement de l'exactitude ou non des hypothèses de
départ, sur la base des résultats obtenus.
Quant à la méthodologie de recueil des
matériaux, elle consiste à entreprendre des recherches à
partir de sources bibliographiques assez fournies : ouvrages de
référence, livres, articles de journaux et de revues, document
sonores, administratifs, législatifs, sites internet.
Dans ce même chapitre, nous nous pencherons, ensuite sur
l'aspect historique, statutaire et organique de la radio nationale, notamment,
sur le rapport causal, à l'origine de sa naissance.
Le plan, « charpente » éclairant le lecteur
sur le cheminement de la pensée de tout auteur, structure ce travail en
deux axes :
Un axe théorique et un axe pratique ou recherche
proprement dite.
Le premier englobe un chapitre : « approche de
l'information radiophonique », scindé en trois sections :
-L'histoire et les caractéristiques succinctes de la
radio, nous permettront de situer chronologiquement ce medium et de
déterminer les spécificités qui lui intrinsèques
;
-La théorie de gate keeping sur l'analyse du proces de
sélection et de traitement des informations, ou plutôt trois de
ses modèles : celui de Manning White, d'Abraham Bass et de John Dimmick
nous tiendront lieu d'illustrations, de cadre de références,
où viendront se cranter et se confronter, nos observations sur la
gestion informationnelle, inhérente à chacune des deux
chaînes ;
-Les valeurs, sources, genres, formats et écriture
radiophoniques définissent successivement, les critères, quoique
divergents, qualifiant la nouvelle...., ,les différentes origines de
l'information, à travers une catégorisation, elle aussi,
controversée entre sources officielles et officieuses, sources vives et
mortes. Il sera également question de genres ou typologie de textes
médiatiques, destinés à être communiqués,
ainsi que de la spécificité du graphisme radiophonique.
-Le second axe est constitué de deux chapitres : -Gestion
de l'information à la radio algérienne -Analyse des
éditions des deux chaînes
Le premier chapitre se divise en quatre sections :
Ici, il s'agit de restituer l'itinéraire de la
politique de l'audiovisuel en Algérie, qui, depuis l'indépendance
a relégué, à coup de lois et de codes, la radio et la
télévision au rang de relais amplificateurs des discours
officiels. Aussi, est -il attendu, l'application prometteuse de la loi
organique, de 2012, qui va ouvrir le champ audiovisuel au privé national
algérien.
Il s'ensuivra la mise en évidence du procès de
traitement de l'information au niveau des deux chaînes, en nous
référant à la chaîne de communication de la
théorie de gate keeping, c'est-à-dire à ses
différentes étapes, que nous qualifierons de « portes »
: « première porte » ou « conférence de
rédaction » ; « deuxième porte » ou breifing avec
le directeur de la Radio, etc.
Dans le second chapitre, fractionné en deux sections,
en nous appuyant sur la méthodologie d'analyse adoptée, nous
aborderons, enfin, l'étude précise des éditions des
journaux parlés ciblés des deux chaînes, concernant chacun
des évènements suscités, qui ont marqué, comme il a
été précisé, le mois de janvier 2013.
A travers l'appréhension journalistique de ces
événements, quel est l'itinéraire de traitement informatif
entrepris par chacune de ces deux chaînes, sur le plan de la collecte, de
la sélection, de l'exploitation, du genre et de l'écriture
informatifs adoptés ?
Serait-il identique entre elles ? Y aurait-il des
dissemblances, des distorsions , des défaillances au niveau de cet
itinéraire ?.
C'est ce à quoi ce mémoire s'efforcerait de
répondre, avec tous les efforts et l'objectivité qui
s'imposent.
Mais, avant, nous avions fait précéder cette
section, par celle, sur le sondage d'opinion, d'un échantillon «
accidenté » de 50 habitants de la périphérie d'Alger,
pour connaitre leurs opinions, en tant qu'auditeurs, leurs critiques.....leurs
penchants, leurs suggestions ....se rapportant aux journaux sonores de chacune
des deux chaînes.
Cependant avant d' « immerger » dans le vif de nos
investigations, il nous a semble opportun de fournir, au préalable, la
définition des concepts constituant les clés abstractifs du
sujet.
-Radiodiffusion : Le dictionnaire de
journalisme et des medias définit ce mot comme suit : « Entreprise
de radio diffusion de programmes d'information et/ou de
divertissement5 ».
-Radiodiffusion nationale : Radio
Algérienne, officiellement : L'Entreprise nationale de
radiodiffusion sonore, abrégée en (ENRS) est l'organisme public
algérien de radiodiffusion,
créé en 1986, lorsque son
prédécesseur « Radiodiffusion
Télévision Algérienne »(RTA), fondé en
1962, s'est scindé en deux entreprises distinctes : la
Télévision
5 Jaques Bohec, dictionnaire du journalisme et des
medias, Presses Universitaires de Rennes, 2010.
et la Radiodiffusion. Cette dernière dispose
actuellement de trois stations nationales (Chaîne 1, Chaîne 2 et
Chaîne 3), de trois stations thématiques (Radio Coran, Radio
Culture, Jil FM), d'une station internationale (Radio Algérie
Internationale) et de 48 stations régionales. L'ENRS est membre de
l'Union européenne de radiotélévision.
-Gestion de l'information : Le dictionnaire
de L'information l'explique ainsi : « processus couvrant le cycle de vie
de l'information, c'est-à-dire la production interne , le
repérage et l'évolution des sources internes et externes ,la
collecte ,le traitement ,l'analyse ,la diffusion ,la conservation et la
distribution éventuelle de l'information par rapport à des
besoins identifiés et qualifiés et a l'aide de méthodes ou
d'outils appropriés, en général ,cela se traduit par
l'existence au sein de l'organisme de plusieurs systèmes, d'information
comptables et financiers, de la gestion, de la documentation, technique, etc...
» .6
En appliquant le mot « gestion » à l'objet de
notre sujet, nous dirons que celui-ci désigne la façon dont est
prise en charge et traité l'information audiovisuelle publique en
Algérie au sein de la chaîne 1 et la chaîne 3, en montrant
l'influence des responsables sur cette gestion de l'information. Aussi, sa
sélection, son organisation et sa diffusion, autrement dit, la
chaîne communicationnelle qui la caractérise
n'évoque-t-elle pas pour nous celle de la théorie de gate keeping
?
6Dictionnaire de l'information op.cit p114 -115.
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