CHAPITRE I : PROBLEMATIQUE DE L'ETUDE
I-1 Problématique
Instituteur de formation, nous avons pratiqué ce
métier une dizaine d'années durant en classe. En tant que
titulaire d'une classe du Cours Moyen deuxième année (CM2),
cumulativement directeur d'école, nous avons empiriquement
appliqué le travail en groupe avec un effectif de vingt-cinq (25)
élèves. Nous les avons regroupés en trois groupes dont
deux de huit (8) élèves et un de neuf (9) élèves.
Le critère majeur était la moyenne obtenue à un test
effectué pour la circonstance, permettant de repérer ceux ayant
obtenu plus de huit sur dix (8/10), par rapport à ceux ayant entre six
et huit sur dix (6 et 8/10) et d'autres ayant moins de six sur dix (6/10).
Chaque groupe était composé de deux bons élèves
(ayant plus de 8 sur 10), deux élèves moyens (ayant entre 6 et 8
sur 10) et quatre ou cinq élèves faibles (ayant moins de 6 sur
10). Ainsi, le groupe n°3 avait cinq (5) élèves faibles. Le
travail de groupe se faisait uniquement l'après-midi et chaque groupe
choisissait sa position soit en classe soit sous les arbres.
Pour un travail de groupe, nous donnons la tâche
à effectuer, ainsi que les consignes à respecter avant que les
élèves ne se regroupent pour l'activité : bien lire
l'énoncé, discuter et s'entendre sur les résultats
obtenus. Pour un exercice de trente minutes, nous passons une fois dans chaque
groupe mais après leur avoir laissés au moins dix minutes de
débat. Nous intervenons quelques fois pour mieux élucider la
tâche ou la consigne quand elle est mal comprise, ou si une zone d'ombre
empêche le groupe d'avancer. Après les trente minutes, chaque
groupe présente son travail dans un cahier de groupe prévu pour
la circonstance. La correction se fait collectivement en classe et au tableau,
puis nous annotons les cahiers avec les remarques nécessaires pour les
prochaines fois.
Par cette technique, nous avons obtenu à l'examen de
fin d'année (CEP) vingt (20) admis soit un taux de 80% de succès.
Peut-on l'appliquer dans une classe à large effectif et avec quelles
améliorations dans les prestations du maître et des
élèves ?
Le travail de groupe ne peut se faire sans interactions
c'est-à-dire sans l'influence des uns sur les autres dans le cadre de
leur apprentissage. Les interactions sont très importantes dans la
réussite de l'oeuvre éducative. L'efficacité du travail de
groupe à l'école primaire, dans le cadre d'une évaluation
des compétences, a été étudiée par le
professeur B. REY
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(2004) et des chercheurs de l'Université Libre de
Bruxelles(ULB). Il ressort de leur étude que le travail de groupe permet
un apprentissage de la vie sociale et démocratique, une motivation dans
l'apprentissage et aussi le développement des apprentissages cognitifs
individuels. L'aspect du travail de groupe selon eux qui favorise la
résolution des tâches complexes, c'est le fait que le groupe donne
lieu à des contradictions entre les individus, à des
échanges d'hypothèses, à l'obligation pour chaque individu
d'expliquer sa position aux autres et de la justifier. Cependant, C. KI (2011)
souligne que les enseignants n'ignorent pas l'intérêt
pédagogique du travail en groupe mais ils éprouvent de nombreuses
difficultés dans son application.
C'est pour cela que nous pensons qu'avec les effectifs qui ne
font que grandir d'année en année, l'école court un grand
risque en restant toujours collée à ces anciennes pratiques
pédagogiques à savoir les cours magistraux par exemple. Ce danger
se ressent à travers les notes des élèves aux
différentes évaluations comme les examens scolaires et les
compositions trimestrielles. Les résultats suivants sous formes de
tableaux traduisent l'ampleur du phénomène qu'il faudra bien
résorber. Aucune classe de ces dites écoles ne pratique le
travail de groupe.
Tableau n°1 : Résultats de fin
d'année de l'école de X dans la Boucle du
Mouhoun
Classes
|
Effectifs
|
Promus
|
Redoublants
|
Exclus ou abandons
|
CP1
|
64
|
58
|
04
|
02
|
CP2
|
71
|
61
|
05
|
05
|
CE1
|
63
|
54
|
06
|
03
|
CE2
|
68
|
54
|
09
|
05
|
CM1
|
65
|
56
|
05
|
04
|
CM2
|
55
|
31
|
19
|
05
|
Effectif école
|
386
|
314
|
48
|
24
|
Source : propositions de fin d'année 2011-2012 de
ladite école
Dans cette école, soixante-douze (72)
élèves soit 18,65% n'ont pas pu s'adapter aux conditions de
travail de la classe. C'est un pourcentage d'échec qui interpelle les
acteurs que sont les enseignants titulaires de ses classes.
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Tableau n°2 : Ecole de Y dans le
Centre- Ouest
Classes
|
Effectifs
|
Promus
|
Redoublants
|
Exclus ou abandons
|
CP1
|
81
|
72
|
08
|
01
|
CP2
|
90
|
75
|
11
|
04
|
CE1
|
71
|
57
|
09
|
05
|
CE2
|
75
|
64
|
08
|
03
|
CM1
|
92
|
79
|
10
|
03
|
CM2
|
77
|
42
|
30
|
05
|
Effectif école
|
486
|
389
|
76
|
21
|
Source : propositions de fin d'année 2011-2012 de
ladite école
Cette école avec des effectifs plus grands
présente aussi des mauvais résultats avec quatre-vingt-dix-sept
(97) élèves en situation d'échec ou de difficultés
scolaires, soit 20% environ. Toutes les deux écoles pratiquent des cours
magistraux donc de l'enseignement individuel. Plus l'effectif de l'école
est grand, plus le taux d'échec augmente.
Partant de ces constats, nous pensons que l'enseignant doit
faire appel au travail de groupe afin de rehausser le niveau de ses
élèves donc leurs résultats scolaires. Avec J.J. ROUSSEAU
(1762), nous avons appris que l'enfant n'est pas un petit adulte mais un
être à part entière avec ses propres émotions, ses
besoins, ses intérêts, ses motivations... Dans cette conception de
l'enfant, un aspect nous paraît important à étudier : sa
présence au sein d'un groupe de pairs, est-il toujours le même ?
Ne subit-il pas l'influence des autres membres du groupe ? N'influence-t-il pas
lui aussi le groupe dans sa dynamique d'évolution? Comment donc
favoriser l'apprentissage par le biais d'une bonne gestion des interactions
entre pairs dans le cadre d'un travail à effectuer en groupe ?
D'où une bonne gestion de la classe s'impose. Elle est d'une importance
capitale si l'enseignant veut produire de bons résultats. W. DOYLE
(1986) parle de deux tâches majeures que l'enseignant doit
exécuter dans sa classe afin de mieux la gérer. La
première renvoie à l'enseignement des contenus, couvrir le
programme, s'assurer que les divers éléments sont
maîtrisés, donner le goût de l'étude des diverses
matières, etc. La seconde concerne les fonctions de gestion de la classe
: l'enseignant doit organiser ses groupes, établir des règles et
procédures, réagir aux comportements inacceptables,
enchaîner les activités etc. Ce sont donc les deux dimensions
fondamentales de l'enseignement ou le double agenda de l'enseignant (G.
LEINHARDT, 1990 ; L.S.
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SHULMAN, 1986) qui constitue le coeur de la vie de la classe
(L.S. SHULMAN, 1986). Ces deux fonctions correspondent à : instruire et
éduquer.
De plus, une bonne motivation de l'élève
influence positivement son apprentissage. Lorsqu'il est satisfait d'appartenir
à un groupe, il se voit en sécurité et peut du même
coup participer activement aux recherches du groupe dans le but de
répondre à leur objectif commun. Pour L. VYGOTSKY (1978),
l'apprentissage ne se fait pas de façon isolée mais par le biais
de situations sociales où le langage est utilisé dans le
processus de dialogue. Nous pensons que l'enfant possède ce langage qui
puisse permettre à ses pairs de mieux comprendre et d'appréhender
la notion à acquérir.
Cependant, nous constatons que les éducateurs ne sont
pas toujours attentifs aux préoccupations des enfants. Comment l'enfant
se représente l'école ? Comment se sent-il au milieu de ses
camarades ? Que pensent ou disent les autres de lui ? Des questions auxquelles
l'éducateur ne prête pas attention mais qui pourtant influencent
fortement l'action pédagogique. Les relations
maître-élèves et élèves-élèves
sont très importantes pour la réussite des apprentissages
scolaires. Si ces relations sont mal entretenues, l'enfant pourrait être
moins créatif s'il venait à se renfermer sur lui-même. Dans
l'action éducative, le maître s'intéresse plus à sa
propre valorisation qu'à la relation qui le lie à son
élève. Il néglige la dynamique qui puisse exister entre
lui et les élèves et aussi entre les élèves
eux-mêmes. B. KAYE et I. ROGERS (1971 p. 33) dans «
Pédagogie de groupe » ont souligné la relation
élèves-élèves en ces termes : « La
réussite du travail de groupe dépend dans une très grande
mesure de l'attitude du maître et de la façon dont il remplit son
rôle à l'égard de cette méthode. ». C'est
dire combien le rôle du maître est capital dans le travail de
groupe des élèves.
En face des réalités actuelles de
l'école, comment le maître fera-t-il pour favoriser une
interdépendance positive entre les élèves d'un même
groupe de travail ? Quelles habiletés intellectuelles chaque
élève développera-t-il dans son groupe de travail ? Dans
le but d'améliorer les résultats de ses élèves en
pratiquant l'enseignement coopératif, quel sera le rôle du
maître au cours d'un tel apprentissage ?
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