Piraterie ou contrefaçon des oeuvres musicales: facteurs explicatifs, modes opératoires et impact sur les artistes-musiciens à Yaoundé( Télécharger le fichier original )par Joel Christian NKENG à NKENG Université de Yaoundé 1 - Master 2 en Sociologie 2010 |
CHAPITRE IILES MODES OPERATOIRES DE LA PIRATERIE « L'observateur doit être le photographe des phénomènes, son observation doit représenter exactement la nature. Il faut observer sans idée préconçue ; l'esprit de l'observateur doit être passif, c'est-à-dire se taire ; il écoute la nature et écrit sous sa dictée ». Claude BERNARD, Introduction à l'étude de la médecine expérimentale, Paris, Garnier-Flammarion, 1865, p. 55. I- LES VISAGES DE LA PIRATERIE A YAOUNDE Il s'agit à présent de montrer le sort qui est réservé aux oeuvres musicales aujourd'hui dans la société camerounaise, ou mieux, de montrer comment, en marge des principes généraux du droit d'auteur et de la propriété intellectuelle, le public de la nouvelle société de l'information dont le statut passif de consommateur s'est progressivement mué, grâce à l'avènement des TIC, en une position d'ambivalence face au processus de mondialisation des échanges et au mode d'inclusion dans la configuration sociale émergeante. En effet, il semble que le consommateur devienne de plus en plus acteur de sa propre consommation, acteur auquel on demande d'opérer des choix dans les produits consommés (culturels, alimentaires ...) et dans leur mode de consommation, (notamment, pour ce qui nous concerne, dans le choix de l'optique licite ou non). Nous entrons par là même de plein pied dans l'aspect sociologique de ce travail et de la réflexion qui en découle. En effet, pour cerner les modes opératoires de ce phénomène et leur ancrage contextuel, ses facteurs explicatifs ainsi qui ses implications, il convient d'opter pour une approche pragmatique et d'adopter une grille de lecture sociologique. Cet angle d'attaque nous conduira en premier lieu à opérer une typologie des pirates et une catégorisation des formes de piraterie observées à Yaoundé.
I.1- Typologie des pirates ou des contrefacteursA la question de savoir qui pirate ou contrefait les oeuvres musicales à Yaoundé, notre observation du phénomène sur le terrain a permis d'établir une typologie des contrefacteurs à trois niveaux spécifiques, à savoir : le niveau individuel, le niveau micro-social et le niveau macro-social.
I.1.1- Niveau individuelLe niveau individuel constitue le premier degré de la piraterie, en ce sens que les personnes qui sont identifiées dans cette catégorie de pirates sont des infracteurs, du fait qu'ils ne respectent pas les prescriptions légales relatives au droit d'auteur : soit parce qu'elles empruntent les supports auprès des connaissances afin d'en réaliser des copies destinées à leur usage personnel, soit parce qu'elles téléchargent illicitement des fichiers musicaux via des sources diverses (Internet, graveurs, MP3, MP4, Ipod, Ipad, clé USB, etc.). Ce qu'il y a lieu de retenir ici, c'est que l'on se situe à un niveau particulier qui concerne la personne individuelle. Généralement, la copie dans ce cas, n'est pas réalisée dans un but mercantile, mais plutôt pour satisfaire un intérêt personnel, qui est notamment le plaisir d'écouter des musiques que l'on aime. Il faut noter que le pirate ici n'a souvent pas conscience que son comportement porte sérieusement préjudice à l'auteur de l'oeuvre musicale concernée. Toutefois, dans cette catégorie, figurent également des individus qui agissent en connaissance de cause, et qui considèrent que leur acte aussi illégale soit-il, n'en est pas moins légitime. Pour eux, de tels comportements relèvent simplement des ``incivismes quotidiens''128(*), pour reprendre l'expression de KELLENS, G. Le niveau individuel de la piraterie a été exacerbé avec l'émergence rapide des TIC, qui a pratiquement consacré l'ère du ``tout gratuit'', en ne parvenant plus à montrer la limite entre ce qui est permis et ce qui est prohibé. La conséquence en est que les utilisateurs des graveurs de CD ont pensé que toutes les formes d'utilisation de ceux-ci étaient possibles. * 128. KELLENS G., Punir-Pénologie &droit des sanctions pénales, Liège, Editions juridiques de l'Université de Liège, 2000, p.400. |
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