Le droit de l'environnement et les conflits armés( Télécharger le fichier original )par Karim KARIM KAPITENE Université Catholique du Graben Butembo - Licence en faculté de droit public 2012 |
B. Action contre le crime environnementalLe crime de l'environnement, étant un crime de guerre, est porté parfois, devant les juridictions internationale et nationale répressives à caractère militaire. Or, si l'on se situe bien, ces juridictions ne maîtrisent pas en soi l'environnement et les techniques environnementales, encore le droit de l'environnement. Pour statuer, elles doivent toujours faire appel à des techniciens et experts de l'environnement. Chose qui ne met pas ces juridictions en marge d'erreurs matérielles. Pour cela, il faut un juge assez attentif et ententif pour le crime contre l'environnement. 1. Les juridictions répressivesDans l'arsenal normatif de la RDC, les juridictions militaires, à commencer par le tribunal militaire de garnison jusqu'à la haute cour militaire, ont compétence pour connaitre des crimes de guerre, inclus le crime contre l'environnement130(*) ; chose qui n'est pas aisée parce que, même en rendant ou en statuant sur des affaires purement militaires, elles commettent d'énormes erreurs matérielles qui laissent à désirer et, qui conduisent parfois à des nouveaux troubles, instaurant ainsi une instabilité et une insécurité perpétuelles dans le pays. Comment alors expliquer que de telles juridictions qui ne maîtrisent même pas le droit qu'elles sont censées appliquer parviennent à faire de l'excellence en matière d'environnement. Même si elles peuvent être assistées par des spécialistes, il n'est pas biaisé ou garantie qu'elles rendront des décisions satisfaisantes en la matière. Plus d'ailleurs, elles seront réduites à des bouches des experts qu'à des véritables technocrates. C'est dans ce sens que Jerôme Lassere Capdeville mentionne que si le juge a l'interdiction de punir pour des faits qui ne sont pas prévus par la loi, conséquence du principe « nullum crimen, nulla poena sine lege », il serait incohérent de lui donner le pouvoir de punir pour des faits qui, n'étant pas formellement prévus par la loi, le seraient suite à l'interprétation qu'il pourrait faire du texte. Concernant les textes répressifs relatifs à l'environnement, il résulte de la particulière complexité des textes que leur interprétation par le juge est très délicate. Ainsi rédigés par des spécialistes, certains passages de ces textes sont, parfois, difficilement compréhensibles pour des juristes qui ne sont ni biologistes, ni chimistes, ni encore moins ingénieurs. Mettre en oeuvre les sanctions propres au droit de l'environnement peut dès lors, pour le juge répressif, s'apparenter à un vrai « casse-tête chinois ». En effet, une fois qu'il est parvenu à déterminer le ou les textes applicables, il lui faut encore, avant de les interpréter, s'efforcer de les comprendre ce qui l'amènera souvent à demander l'avis d'un expert, le juge étant alors réduit au rôle peu séduisant de chambre d'enregistrement des conclusions d'expertises scientifiques. Il ne sera ainsi, au mieux, qu'un coordinateur d'opinion d'experts131(*) Sur le plan international, la CPI est compétente pour connaître de crimes de guerre notamment des crimes environnementaux commis en temps de guerre. C'est la résultante de l'art.5 du statut lorsqu'il mentionne : « La compétence de la cour est limitée aux crimes plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale. En vertu du présent statut, la cour a compétence à l'égard des crimes suivant : a. Le crime de génocide b. Le crime contre l'humanité c. Le crime de guerre d. Le crime d'agression » Parmi les crimes de guerre, l'article 8, point 2, b, iv range les attaques délibérées qui causent des dommages étendus, durables et graves à l'environnement naturel et qui sont manifestement excessifs par rapport à l'ensemble de l'avantage militaire concret et direct attendu. Par conséquent, peu de juristes, et donc de magistrats, étant à l'heure actuelle compétents en matière de droit pénal de l'environnement, on peut penser que cela en affaiblit la garantie de la répression, tout en la rendant arbitraire133(*). C'est ainsi que, malgré cette compétence de plus attribuée à ces juridictions, internes et internationales, le constat est qu'elles ne font parfois pas référence au crime environnemental ou aux problèmes causés par les atrocités à l'environnement. Par exemple, pour des juridictions militaires internes, nulle part dans la jurisprudence ont fait recours au crime et/ ou atteinte portée à l'environnement par des belligérants. Ceux-ci sont poursuivis pour d'autres faits parmi lesquels pillages, désertion, etc., mais jamais pour des atteintes qu'ils ont causées à l'environnement. Or il est connu de tous que, pour des raisons d'économie de guerre et de stratégie de nuire à l'ennemi, ils utilisent, dévastent, polluent l'environnement. Il en est de même de la CPI qui, de par toutes les causes et actions pendantes devant elle, elle fait semblant d'ignorer la question environnementale. Aucune des accusations en charge de prévenus portés jusque là devant cette cour ne mentionne des problèmes et conséquences que subit l'environnement en temps de guerre. Dans l'Affaire Thomas Lubanga, par exemple, nulle part le procureur moins la cour n'a fait référence aux crimes et conséquences environnementaux causés par les troupes de Lubanga, l'UPC. La Cour n'a retenu que le crime d'enrolement d'enfants dans l'UPC, le crime de viol et bien d'autres qui ne touche pas l'environnement. Une constatation s'impose. L'environnement ne préoccupe réellement les hommes. Les organes censés faire et imposer l'application des règles protectrices de l'environnement en temps de guerre semblent les ignorer et n'y font même pas référence. Tout cela est la conséquence logique de leur inexpérience et non maîtrise des conséquences environnementales qui peuvent résulter des guerres et conflits armés. Ce qui conduit à penser qu'il faut mettre en jour des juridictions spécialisées en matière d'environnement, où ne peuvent siéger que des spécialistes et expert en ce domaine. * 130 Lire article 164 à 186 de la loi n°024-2002 du 18 novembre 2002 portant code pénal militaire congolais. * 131132 J.L. CAPDEVILLE, op. cit., pp.39-40. * 133 Ibidem, p.40. |
|