Conclusion
L'objet de ce chapitre était d'étudier les
origines internes des mutations financière au Cameroun. L'issue de cette
analyse conduit à révéler que les origines internes des
mutations financières trouvent leur explication à travers deux
éléments majeurs. D'une part, la crise de l'intermédiation
financière et, d'autre part, les mesures d'ajustement financier. La
crise de l'intermédiation financière a été
marquée par la dégradation des dépôts, le
rationnement bancaire du crédit et, la mutation de la carte bancaire.
Ses causes peuvent être approchées théoriquement en
distinguant pour ce qui est de leurs effets sur la sphère Camerounaise,
les causes nées de l'absence de relations structurelles entre banques et
l'économie, des causes introduites par la politique économique.
Les mesures d'ajustement financier ont été mises en place par les
pouvoirs publics, à la suite des problèmes causés par la
crise financière sur l'économie et, à cause de
l'inefficacité du marché à résorber les
déséquilibres constatés. Le gouvernement a
été obligé d'intervenir avec l'aide des bailleurs de fonds
pour mettre en place un programme d'ajustement financier. De ce programme, a
résulté des mesures monétaires, des mesures
financières et des mesures juridico-institutionnelles.
Cet ensemble de mesures a probablement eu un impact sur les
circuits de financement qu'il convient d'évaluer dans la seconde partie
de cette étude. Le coefficient d'emploi des dépôts en
crédits non mobilisables(ne devant pas dépasser 25% pour les
dépôts à vue et 50% pour les dépôts à
terme), a été supprimé en 1990 car il n'était pas
respecté. L'économie de l'intermédiation financière
de manière générale a beaucoup évolué au
cours du temps. A la suite de multiples chocs, on est progressivement
passé des systèmes répressifs aux systèmes
libéralisés. Ces chocs ont été à l'origine
de la remise en cause du paradigme fondamental keynésien sur le
contrôle et la surveillance étatique. Dans les pays africains et
en particulier au Cameroun, la mise en oeuvre d'un tel paradigme a conduit
à une forme plus exacerbée de l'interventionnisme étatique
qui a entrainé un ralentissement du processus de développement
financier enclenché dans la décennie 1970. La
colinéarité des phénomènes d'approfondissement
financier et de croissance de l'activité
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Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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économique a donné une orientation
précise à notre analyse. L'existence d'une corrélation
possible entre les variables financières et les variables réelles
nous suggère de nous intéresser désormais au sens de la
causalité entre les deux phénomènes. Bien plus, elle nous
exige d'identifier la nature de la relation causale ainsi que sa
durée.
Mais, avant il est crucial pour nous d'établir le cadre
théorique d'une telle relation en situant notre travail dans un
paradigme. L'analyse néoclassique de la croissance nous semble la plus
pertinente même si elle reste très normative. Ainsi, la question
à laquelle nous essaierons de répondre dans notre deuxième
partie porte sur la dualité de la dynamique finance-croissance.
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
![](Croissance-et-mutations-du-systeme-financier-au-cameroun10.png)
DEUXIEME PARTIE :
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE
ECONOMIQUE
«La modestie est au mérite ce que les
ombres sont aux figures dans un tableau : elle lui donne de la force et du
relief. »
Jean de La Bruyère
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
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Concept étroitement associé aux processus de
globalisation financière et d'accélération d'innovations
financières, les mutations financières sont à l'origine
des profondes transformations qu'ont connues les systèmes bancaires et
financiers depuis les années 1970. L'abaissement de barrières
réglementaires et techniques a en particulier favorisé
l'émergence de nouveaux acteurs et, durci les conditions de la
concurrence au sein de la sphère bancaire et financière.
Parallèlement, l'accélération du processus d'innovations
financières a largement contribué à améliorer la
complétude des marchés et l'adéquation entre les besoins
et capacités de financement des agents économiques
(Demartini, 2004). Ainsi, la mutation financière a dans
une certaine mesure contribuée à rendre le fonctionnement des
systèmes bancaires et financiers plus efficient. Pour autant, l'analyse
du phénomène par Demartini (2004)
révèle très rapidement que ses conséquences sur la
sphère financières sont loin d'être univoques, les gains
d'efficience ainsi obtenus ayant eu pour contrepartie une instabilité
accrue. Demartini (2004) va élaborer des
éléments susceptibles d'étayer cette thèse. En
particulier, si de nombreuses innovations financières ont répondu
à une demande latente de couverture des agents économiques contre
les risques, force est de constater qu'en pratique, loin d'avoir disparu, ces
derniers se sont simplement déplacés.
Par ailleurs, dans un contexte de mobilité croissante
des capitaux, l'augmentation du degré de concurrence entre les
institutions financières au niveau international, induite par le
mouvement de libéralisation et de déréglementation, a
parfois pu conduire à des prises de risques excessives, notamment de la
part des banques, alimentant l'instabilité financières
(Demartini, 2004). Ainsi, les changements intervenus dans la
sphère financière camerounaise à la suite de la crise
économique ont un certain nombre de composantes principales : un essor
de la micro finance, une crise de l'intermédiation bancaire et une
tendance à l'innovation financière quoi que peu
diversifiée et de qualité médiocre. Ces principales
composantes traduisent globalement un recul de la banque dans son rôle
d'intermédiaire financier et une émergence d'adaptations
inspirées des habitudes sociales des populations. Les mutations ayant
dès lors affectées le fonctionnement du système financier
camerounais, il sera question dans cette partie de savoir si le financement de
l'économie s'est amélioré. Pour cela, avant d'analyser
l'évolution du financement de l'économie ainsi que les
implications de politique économique (chapitre IV), il
sera évalué l'impact de la libéralisation et de la
répression financières sur le secteur bancaire (chapitre
III).
Croissance et mutations du système financier
au Cameroun. IRIC/BMFI
![](Croissance-et-mutations-du-systeme-financier-au-cameroun11.png)
CHAPITRE III :
LA LIBERALISATION ET LA REPRESSION
FINANCIERES
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