Observatoire des risques naturels au cameroun relation pluies-inondation et plan orsec : le cas des villes côtières de kribi, douala et limbé( Télécharger le fichier original )par Sadrack Bertrand Matanda Universite de Paris 12 Creteil -France & Universite de Yaounde 1 -Cameroun - Master: Diplôme inter-universitaire de Formation en Médecine des Catastrophes et la Qualification de formateur d?experts en Médeci 2000 |
CHAPITRE 2 : LES INONDATIONS - CAUSES ET BILANS ANTERIEURSA- LES CAUSES DES INONDATIONS 1) - Les causes naturelles La ville de Limbé Le contexte géomorphologique de cette ville caractérisée par deux unités principales de relief: « Le corridor de collines d'altitudes moyenne 260m au Sud-Est, Est et Nord-Est interrompu au Nord par le plateau monotone et continue au Nord - Ouest et à l'Ouest; le petit bassin côtier où se trouve concentré l'essentiel de la ville de Limbé et la côte rocheuse de Limbé »1, l'expose aux inondations qui peuvent survenir de la mer ou du continent. En provenance du continent, les eaux de pluies intenses causes des inondations quand les cours d'eau dont le principal ici est connu sous la dénomination de Limbé deviennent vite incapables d'évacuer le surplus de la pression hydrique vers la mer. Cette situation pourrait aussi être aggravée par les phénomènes de laves torrentielles « qui partiraient de l'amont des rivières et suivraient le lit des cours d'eau en pente pour se déverser sur les vallées en déposant des blocs de basalte altéré »2 ne favorisant pas une infiltration des eaux mais plutôt leurs stagnations à plus d'un mètre comme ce fut le cas de la vallée de Mabeta new Layout et du quartier Liwanda-Congo lors des inondations catastrophiques de Juin 2001 de Limbé. Les eaux pourraient aussi partir de la mer en direction des 1 Extrait du rapport mission A/S INONDATIONS et Mouvements de terrain survenus à Limbé D.P.C. MINAT Juillet 2001. 2 Op citaré 18 abords de la ville, quand les pluies sont intenses et accompagnées des vents violents issus de l'atlantique suivant le mouvement des marrées en ras de sol et poussant les flots sur la côte. C'est le cas typique du quartier Down Beach qui subit cette situation presque chaque année mais les bilans différents compte tenu des intensités du phénomène. La ville de Douala La capitale économique du Cameroun n'est pas tellement différente sur le plan physique de la ville de Limbé. Cette cité est «naturellement propice aux inondations et ce à cause de la faiblesse de son altitude moyenne dans plusieurs quartiers populaires, Bépanda, Makepe, Bonabéri... sont pratiquement en dessus du niveau de la mer »1 sa géomorphologie présentent de pente « moins d'1 % à Bonabéri, Ndokpassi et Ngangue »2 et un sol constitué des éléments de sédiments très peu consolidés, en conséquence facilement érodant, d'où la rétention de l'eau pendant un maximum de temps sans évacuation possible à travers les cours d'eau dont les plus connus sont Mboppi et Ngoua qui, couvertes des sédiments transforment les pentes en dénivellation favorisant plutôt la montée sur place des eaux comme il a été question en Août 2000 avec la pluviométrie abondante qui a provoqué panique et désolation parmi les habitants. Les zones basses se trouvant en dessous du niveau des eaux du fleuve Wouri peuvent subir l'assaut de l'Océan avec la bénédiction des 1 Fédération internationale des Sociétés CR/CR : DRAC inondations de Douala Cameroun Appel 5 Août 2000. 2 Op citaré. 19 courants marins qu'accompagnent généralement les pluies intenses, c'est ce qui arrive souvent à la zone d'Akwa Nord. La ville de Kribi Les amonts des cours d'eau Kienké, Nyong et Lobe charrient les sédiments qui se stockent tout le long en aval au large des embouchures avant de laisser circuler l'eau dans la mer. Ces sédiments qui se sont accumulés depuis environ «quarante deux ans»1 époque où a eu lieu les dernières inondations graves, favoriseraient la montée subite des eaux après une pluie intense et longue comme ce fut le cas de celle du 13 au 16 Août 1998 qui a poussé la Kienké à déborder et à se diriger dans les quartiers dont le caractéristique principal est leurs situations dans les zones planes. Les eaux de la Kienké n'arrivant plus à suivre son cours normal, ce sont dont « signalées au quartier Mokolo, ... le quartier Dombé devenait de plus en plus inaccessible... Les inondations prenaient de l'ampleur à New-Bell ... Le quartier Zaïre était à son tour touché »2. La situation au niveau 0 de la mer prédispose aussi la ville de Kribi aux inondations des eaux qui proviennent de l'Océan Atlantique poussées par les vagues qu'accompagnent les vents violents associés aux pluies intenses. En somme les causes naturelles des inondations dans nos cités sont essentiellement dues à la latitude du relief et la situation proche de l'Océan Atlantique néanmoins les causes anthropiques qui seront étudiées à la 1 Extrait du miroir : mensuel d'information de la Délégation Provinciale Communication Sud N°16 Août 1998 2 Op citaré. 20 prochaine étape constituant aussi les mobiles déterminants dans la survenue des inondations dans les villes de Kribi, Douala et Limbé. 2) - Les causes Anthropiques : La ville de Limbé L'urbanisation accélérée de la ville pétrolière du Cameroun qui héberge environ 90.000 habitants est caractérisée par une occupation de tous les espaces possibles. C'est ainsi qu'une franche non négligeable de cette population s'est installée dans des fonds de vallée de Mabeta New Layout, Mowo Quarter, Casava farm, Liwanda - Congo, il est «question d'une occupation anarchique de la plaine inondable par un habitat spontané »1. Ces endroits planes ne peuvent qu'attendrent les pluies intenses et longues pour héberger davantage ce liquide à lui destiner tout en causant malheur et désarroi l'exemple de Juin 2001 en dit long. Par ailleurs la population qui ne cesse de croître dans cette ville sans structures d'accompagnement en équipement de salubrité, pose les problèmes d'assainissement urbain avec l'obstruction des drains par les ordures ménagères après une pluie intense traînée par les cours d'eau également dosés des sédiments. C'est le cas des quartiers « Church Street, Class quarter »2 où la population ignore les bacs à ordures communaux et préfère larguer les déchets dans les rivières environnantes. L'autre facteur à évoquer ici est le bitumage de cette ville qui rend imperméable une grande partie de la surface empêchant ainsi une quantité 1 Extrait rapport mission A/S : Inondations et Mouvement de terrain survenus à Limbé DPC MINAT 2 Op citaré 21 consistante d'eau à s'infiltrer. Ce cas a souvent été vérifié lors des pluies abondantes sur la route bitumée longeant la marche Central de cette ville. En outre l'érosion anthropique de la puzolaine (type de rocher noire) pour les besoins de fabrication de Bitume et le remplissage des fondations des maisons en construction favorise la course de l'eau de mer en direction du continent après des pluies abondantes couplées aux vents violents qui ne trouvent plus un quelconque obstacle. Le phénomène du déboisement de la côte de Limbé pour la recherche du bois de chauffage utilisé dans le séchage du poisson, permet une non infiltration des eaux abondantes de pluies qui ne trouvent pas en place la mangrove, le canal naturel qui laisse la place aux ruissellements capables de faire monter ces eaux. Ces deux (2) dernières analyses s'illustrent constamment au quartier Down Beach qui subit l'assaut des eaux chaque année sans aucune résistance possible. La ville de Douala Le facteur humain dans les causes des inondations dans la deuxième ville du Cameroun. Douala est d'une grande importance. Les inondations ici sont essentiellement le fruit des activités liées à l'urbanisation qui sont entre autre: La construction des habitations dans les talwegs et obstructions des drains (Bépanda, Makepe, Mboppi, Camp Yabassi) Le rejet des ordures et objets encombrants dans les cours d'eau (Mboppi, Ngoua ...). 22 La construction d'un "polder" dans la rive gauche du Wouri qui abrite de nos jours la base elf. Ces réalisations humaines couplées aux pluies intenses aboutissent toujours au pire. Un autre aspect non négligeable des causes de la montée exagérée de l'eau après une longue pluie est «l'augmentation de l'imperméabilisation des surfaces urbaines (bitume, parking, bétonnage du sol) ... qui favorise le ruissellement de l'eau au détriment de son infiltration vers les nappes souterraines »1, la ville de Douala qui regorge les infrastructures urbaines les plus modernes du Cameroun épouse cet aspect. La destruction de la mangrove « type de côte basse des zones forestières équatoriales, caractérise par un facies vaseux dans lequel s'implantent les racines - échasses des palétuviers »2 pour les besoins de construction des bâtisses et le bois destiné aux activités ménagères favorise l'ascension de l'eau au niveau de la côte après une pluie consistante. Ce déboisement qui ne dit pas son nom est d'autant néfaste que l'on ne se soucis point au reboisement après le retrait de cette importante biomasse, qui jadis servait de barrière naturelle à la résurgence des eaux vers le continent. Parmi les causes anthropiques ici nous pouvons ajouter la réduction de temps des bassins versants qui est le temps mis par l'eau de pluie pour arriver à la rivière. Ce phénomène se réalise aisément à Douala avec l'aménagement des quartiers comme Makepe qui a contribué à la destruction de l'environnement, le changement du paysage. Poussant ainsi l'eau issue des pluies à se diriger le plus rapidement possible dans la 1 Extrait : rapport préliminaire de terrain: prospection, inventaire et cartographie des zones à risques au Cameroun projet PNUD - DPC juil/Août 1998 2 Dictionnaire de l'écologie et de l'environnement Larousse Octobre 1980 23 rivière Mbanya sans infiltration préalable. De quoi prendre de cours la population et causer des dégâts graves La ville de Kribi L'exploitation forestière qui bat son plein dans la province du Sud en général et le département de l'Océan dont Kribi est le Chef lieu .en particulier dépeuple les bords de cours d'eau comme le Nyong qui se jette dans la mer de ses « mangroves.... formations sempervirentes...de bordure de l'Océan atlantique sur trente (30) Km de profondeur...»1 qui serviraient à canaliser le surplus des eaux vers les sous-sols en cas de pluies abondantes. « De plus, à cause du tourisme, on a beaucoup construits près de la mer en zones inondables ... »2 ceci s'illustre aisément avec des poussées des hôtels qui se bâtissent à un rythme effréné le long de la côte de Kribi avec « les inconvénients du bétonnage massif du territoire qui empêchent le sol de jouer son rôle d'éponge naturelle et l'imperméabilisent »3 ce qui aboutit à la rétention des eaux en surface lors des pluies diluviennes et leurs acheminement dans les zones plus basses comme cela se réalisa en mi-août 1998 avec l'envahissement des quartiers New-Bell et Ngoye réserve par les bombes d'eau qui n'ont pas pu se diriger vers leurs destinations naturelles. En outre « l'urbanisation multiplie l'impact potentiel des inondations. Les habitants des bidonvilles dépourvus d'égouts sont spécialement vulnérables, compte tenu... des risques... ils sont exposés et encore moins 1 Manuel de photo - interprétation forestière T.S.F. Oct 1988 2 Extrait de facteurs humains des inondations : http://www.multimania.com/tubes/expose-innond.htm 3 Op citaré 24 aptes à prendre les mesures nécessaires pour s'en prémunir »1, ceci est le miroir reflétant la situation des résidants des quartiers Mokolo et Dombe qui sont bâtis sans plan précis et qui hébergent des hommes et femmes ne maîtrisant par la notion de risques. Quand ces derniers se déclenchent le bilan lourd est souvent d'ordre matériel comme humain. B - LES BILANS ANTERIEURS1) - Les Bilans humains Les inondations catastrophiques dans la zone côtière (Kribi, Douala et Limbé) ont ces dernières années laissées des dégâts humains non négligeables. D'une part nous nous attelons à évoquer le nombre des morts et celui des déplacés. D'autre part nous verrons un des aspects souvent oublié lors des évaluations du Bilan humain: le bilan psychologique et nous allons terminer avec les conséquences sur la santé humaine. a) - Les morts et les déplacés Les inondations catastrophiques ont de tout temps crées désolation et pleurs, de Limbé à Kribi en passant par Douala, il y a eu en moyenne un mort par catastrophe. Le tableau ci-après expose en détail les cas de décès disparus, de déplacés, les dates de survenus et les lieux de ces désastres. 1 Rapport sur les catastrophes dans le monde 1993 FISCR/CR 25 TABLEAU I: Victimes des trois grandes inondations dans la côte camerounaise.
Source D.P.C. MINAT - Yaoundé b) - Le bilan psychologique L'aspect psychologique a toujours fait l'objet d'oublié mais il devient de plus en plus important car: «d'une part la mort de certains a provoqué la souffrance des autres. La mort d'un proche n'est jamais sans conséquence morale sur l'individu. D'autre part, on rencontre également des traumatismes dus aux événements eux-mêmes : la brusque montée des eaux a fait vivre à certains des heures d'angoisse sur un toit ou accroché à un pylône à contempler ce spectacle tragique en attendant les secours»1. 1 Inondation in : http: www multimania. com/tubes/expose-inond-http. 26 Cette analyse illustre sans ambages la triste situation souvent vécus par les impliqués et victimes indirectes qui ne sont souvent pas pris en charge par manque d'organisation adéquate et absence de services spécialisés pouvant le faire. c) - Conséquences sur la santé humaine Au terme des inondations catastrophiques en tout temps dans la côte camerounaise, il s'est toujours posé des problèmes pouvant affecter la santé humaine comme il a été évoqué lors du sinistre de Kribi où «la ville manquait d'eau potable, les vivres étaient rares et les risques d'une épidémie de diarrhée étaient à redouter... »1. Cette situation pourrait se compliquer car: « une fois l'inondation résorbée l'eau domestique peut en effet être contaminée par les cadavres d'humains et d'animaux, ou par suite de rupture des canalisations d'égouts... »2. 2) - Les destructions matérielles En plus des pertes humaines enregistrées au cours des inondations catastrophiques, il convient de signaler les destructions matérielles qui sont aussi graves. « Ma maison a été emportée par la Kienké... j'ai vu des valises, des frigos et un autre toit passer dans ce fleuve... »3. Des récits comme celui-ci ont été relatés par milliers au cours des graves inondations survenues à Kribi, Douala et Limbé, mais difficile à chiffrer, ces pertes ont souvent été 1 Tiré de l'article inondation à Kribi : près d'un millier de sans abris : LE MIROIR N°16 Août 1998. 2 Rapport sur les catastrophes dans le monde 1993 p72-73 FISCR/CR 3 Extrait du miroir : mensuel d'information de la Délégation Provinciale de la Communication du SUD N° 16 Août 1998 27 sous-évaluées ou surévaluées par les commissions chargées de le faire. Plus loin, nous pouvons mentionner : «des pénuries alimentaires en particulier lorsque les récoltes... n'ont pas été mis à l'abri, faute d'alerte anticipé...parmi les conséquences les plus fréquentes... La rupture des voies de communication... et infrastructures de transmission »1 ces assertions se sont parfaitement illustrées lors des inondations de Kribi et Douala : Où primo en ce qui concerne la dernière ville; au lieu dit « Ndogpassi III axe lourd ... s'est affaissé le pont ... »2 empêchant la circulation des hommes et les biens entre Yaoundé et Douala. Secundo parlant de « ces pluies incessantes qui tombent .... ayant isolé Kribi des arrondissements d'Akom II, Bipindi et Campo, en emportant les ponts et en rendant impraticables les routes... »3 causant une perte en infrastructure souvent difficile à évaluer. En quelques mots, il ressort que les inondations graves causent des pertes de la base au sommet, autrement dit de la cellule familiale au niveau étatique en passant par la communauté qui est rendue plus vulnérable surtout si elle est défavorisée. 1 Rapport sur les catastrophes dans le monde 1993 p72-73 FISCR/CR 2 Inondation de Douala - Cameroun Août 2000 FISCR/CR DRAC Yaoundé 3 Extrait du miroir : mensuel d'information de la Délégation Provinciale de la Communication du SUD N°16 Août 1998 28 |
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