Chapitre I : LES PLUIES : FACTEURS ET DONNEES
A- Les facteurs des pluies
1 - La proximité de la mer
Les villes de Limbé, Douala et Kribi ont leur rebord
occidental pratiquement immergé par l'Océan Atlantique. Cette
situation au degré 0 du niveau de la mer favoriserait une condensation
rapide après une insolation intense, mettant ainsi, au gros plan les
travaux de Bernard Palissy1 sur le cycle de l'eau entre les
océans, l'atmosphère et les continents.
Globalement parlant, l'atmosphère qui reçoit une
abondante vapeur d'eau réagit dans le circuit ininterrompu en
déversant des pluies consistantes. Cela est d'autant vérifiable
que la zone qui héberge nos trois (3) cités détient par sa
situation proche océanique le taux d'humidité relative: compris
comme « le rapport exprimé en pourcentage de la quantité
d'eau contenue dans un volume d'air donné à la quantité
d'eau qui serait contenue dans ce même volume à la
température du territoire camerounais qui est de 83 % en moyenne dans la
ville de Douala »2. La proximité de la mer toute seule
ne peut être un facteur des pluies, les autres éléments
naturels que sont les mouvements de masse d'air et le relief pourraient
également favoriser les précipitations.
2 - Le relief et les mouvements de masse d'air
Ce double facteur est d'autant important qu'il est une
conséquence directe de la nature physique de nos trois (3) villes.
1 Climatologue français du 20e
siècle
2 Lexique, République Unie du Cameroun, Atlas
Jeune Afrique éditions J.A 1979
8
a)- Le relief
Limbé, Douala et Kribi sont essentiellement lotis dans
les surfaces planes d'où découle l'appellation
géographique de l'ensemble de la région : la plaine
côtière qui « couvre une étendue ne dépassant
pas 150 Km de large entre l'océan et le plateau Sud-Camerounais... le
mont Cameroun brise cette continuité...»1. L'influence
sur la pluviométrie est double.
- Primo avec ces plaines côtières qui favorisent
un écoulement lent des cours d'eau entraînant une présence
quasi permanente de l'eau qui avec la bénédiction de l'insolation
intense signalée plus haut de toute cette région située
à 0 m en moyenne au-dessus de la mer, s'évapore rapidement pour
accéder dans le cycle de l'eau (comme illustré à l'annexe)
et aboutir plus tard aux pluies.
- Secundo avec la présence du plus haut sommet de
l'Afrique en miniature : le mont Cameroun, avec ses 4100 m dont le versant
occidental baigne sous l'océan atlantique et « exposés aux
flux humides ... plus arrosés»2 obéissant au
phénomène de forlin qui veut que « l'air humide d'origine
océanique subit une ascendance forcée sur le versant
montagneux... se décharge de son humidité et se refroidit de
05° tous les 100 m... »3 évolue en nuages et tombe
sous forme de pluies avec les plus culminantes dans la banlieue-Ouest de
Limbé au lieu dit Debundscha (10000 mm) reconnu comme le second endroit
le plus pluvieux du monde.
1 Serge Morin dans ; Relief et hydrographie: Atlas
République Unie du Cameroun édition Jeune Afrique 1979
2 0p citaré
3 La circulation atmosphérique dans
Géographie du temps présent collection Grecs classique Hachette
1982.
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b)- Les mouvements de masses d'air
Le Cameroun dans l'ensemble est sous « l'influence de
deux (2) masses d'air provenant de zones de haute pression... l'harmattan ou
alizé du Nord-Est...leur rencontre au front inter tropical(FIT)
»1 entraîne un déplacement en latitude vers le
septentrion provoque une invasion d'air humide sur tout le pays: c'est la
saison des pluies qui atteignent le maximum sur la côte Sud-Ouest
(Debundscha). « Ce mouvement de masses d'air apporte une influence sur le
plan climatique avec les nuances régionales climatiques dont nos
cités: Limbé, Douala et Kribi subissent la nuance
camerouniène »2 très humide et chaud qui
s'étale sur toute la cote océanique du triangle national avec des
pluies abondantes de 2 m à 11 m. Ce régime particulier connu sous
l'appellation de mousson équatoriale est caractérisé par
une courbe pluviométrie à un maximum. Une saison sèche
moins marquée, une baisse de températures et une augmentation de
l'insolation sont les principales variations de ce type.
Le relief et les masses d'air ainsi analysés pourraient
donner accès à un autre facteur non négligeable qu'est le
réchauffement de la planète.
3 - Le réchauffement de la planète
« Un rapport en Janvier 2001 par le groupe
intergouvernemental d'experts pour l'étude du changement climatique
(O.M.M/PNUD) confirme que ces dernières années ont
été marquées par une augmentation des cas de
précipitations abondantes et extrêmes et il prévoit que ces
phénomènes
1 Paul Moby ETIA: Climat: Atlas République Unie
du Cameroun édition Jeune Afrique 1979
2 0P Citaré
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s'accéléreront avec le réchauffement de
la planète»1. Phénomène mondial ayant des
répercutions au niveau local, le réchauffement de la
planète dû aux activités humaines de tout bord
(industrialisation, déforestation, agriculture intensive...) qui
libèrent les gaz à effet de serre tels que: la vapeur d'eau
(H2O), le gaz carbonique (CO2), le méthane (CH4), les
chlorofluorocarbones(CFC), le peroxyde d'azote (N2O), l'ozone
troposphérique (03) qui ont la capacité extrême de
piéger la chaleur au niveau de l'atmosphère. Or cette chaleur
ainsi bloquée se répercute au niveau de la terre toute
entière et surtout sur son étendu aquatique qui représente
71 % de sa surface totale. Ces eaux qui sont sous l'emprise de la pression
calorifique élevée, naturellement connaissent le
phénomène
d'évaporation et provoquent des situations
atmosphériques extrêmes aboutissant aux ouragans tels que mitch
et les pluies intenses. Il est à noter que le Cameroun par le biais de
la zone côtière (Douala, Limbé et Kribi) contribue à
ce phénomène mondial avec ses industries d'une certaine
«époque » qui continuent à libérer les gaz
mentionnés plus haut et ceci est accentué par la
déforestation accélérée de cette zone qui est
dépeuplée de sa «mangrove »2 qui pouvait
aider au recyclage de ces gaz qui vont s'installer dans l'atmosphère, et
favoriser le déclenchement des pluies dont une étude sur les
données occupe la deuxième grande partie de notre chapitre 1.
1 Extrait de l'article "le réchauffement de
la planète" de Fred peace dans revue trimestrielle Croix-Rouge/Croissant
Rouge numéro 2-2001
2 Letouzey dans étude
phytogéographique du Cameroun précise que ce type de formation
végétale se retrouve dans la bordure de l'océan atlantique
sur 30 Km de profondeur et serait menacé par une exploitation abusive
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B - Les données sur les pluies
1 - Les structures de collectes de données.
Au Cameroun en général et dans les villes de
Limbé, Douala et Kribi en particulier, les données
pluviométriques font l'objet de collecte à travers des structures
dont la hiérarchie au niveau national et étatique est la
direction de la météorologie du Ministère des Transports.
L'on notera qu'il existe aussi des structures de collectes privées comme
celles de certaines sociétés agricoles: La CDC à
Limbé par exemple. En outre il est plausible de signaler que la plupart
de ces structures qui sont : Les stations météorologiques et les
postes pluviométriques datent de l'époque coloniale et ont
été construit par la coopération italienne comme celui de
Kribi.
Sur le plan opérationnel sur le terrain dans les villes
de notre zone d'étude nous avons la situation suivante cas par cas:
LlMBE : Cette ville dispose deux
stations météorologiques privées situées à
Debundscha et Botaland et des stations publiques de TIKO et EKONA qui sont
à un rayon de 30km dans le même département que
Limbé : le Fako. L'on mentionnera aussi les postes
pluviométriques dans cette ville et ses environs (lsongo et Mile
four).
DOUALA: Grande cité des
questions météorologiques avec la Direction nationale qu'elle
héberge, le centre de prévision situé au niveau de
l'aéroport international de cette ville et une dizaine de postes
pluviométriques tant étatiques que privées.
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KRIBI: Le chef lieu du
département de l'Océan dispose également d'une station
météorologique au niveau central de la ville et des postes
pluviométriques en périphérie. Il convient de signaler
à N'yeté une bourgade agricole au Sud de Kribi une station
météorologique privée appartenant à une structure
agricole: la Société Hévécam.
2 - Le Processus d'acheminement des données
Les données pluviométriques sont
collectées au Cameroun en général et dans notre zone
d'étude en particulier à l'aide du matériel scientifique
confectionné à cet effet, il s'agit des pluviomètres:
Depuis 1999 le type à «lecture directe »1 est
utilisé en remplacement du type par association opérationnel
depuis l'époque coloniale. En plus des quantités de pluies qui ne
sont prises qu'au pluviomètre, il est à noter que les autres
éléments concourant à l'aboutissement de la chute de l'eau
à savoir: les vents, l'état du ciel (nuages) la
température (qui déduit l'humidité, la tension vapeur et
le point rosée) favorisant la mesure de la situation d'air sont
relevés quotidiennement au niveau des stations
météorologiques. Le scenario est universel, ces données
sont prises cinq fois par jour à 15 minutes des heures suivantes
06.00T.U - 09.00T.U - 12.00T.U - 15.00T.U - 18.00T.U et calculer sur place.
«Ces cinq(5) messages synoptiques »2 sont acheminés
à Douala au niveau de la Direction nationale de la
météorologique via le téléphone quotidiennement.
La voie postale est également chargée de
véhiculer les données
1 Les pluviomètres à lecture directe
ont été remis à l'Etat camerounais en 1999 par la
coopération chinoise pour renforcer ses capacités en
matière de collecte des pluies.
2 Entretien avec Chef station
météorologique de TIKO (FAKO).
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issues des postes pluviométriques une fois par mois
auprès de la structure centrale à la capitale
économique.
Par ailleurs, les structures météorologiques
privées comme la CDC qui récoltent les données trois fois
par jour (06.00 -T.U, 11.00 T.U et 18.00 T.U) n'acheminent pas les
données quotidiennes à un niveau central mais peuvent faire
parvenir un rapport mensuel des activités à leur
hiérarchie c'est le cas de la station météorologique de la
CDC située à Debundscha qui récolte les données et
les acheminent mensuellement au Centre météo central à
TIKO pour traitement et élaboration de la prévision. Cette
dernière activité à savoir la prévision en ce qui
concerne les stations et postes pluviométriques étatiques n'est
pas faite sur place mais au lieu d'acheminement qui est le centre
météorologique de l'aéroport de Douala qui ne renvoie pas
ces données traitées aux stations et postes d'origine.
PHOTO I : Station météorologique de Debundscha
(Limbe)
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3 - Les utilisateurs de ces données
Les données sur les pluies traitées dans le cadre
de la prévision sont utilisées dans notre zone d'étude
pour quatre(4) types de besoins à savoir : - le transport ;
- l'agriculture;
- les travaux publics;
- l'information publique.
a) - TRANSPORT
C'est le volet aérien qui sollicite permanemment les
données pour bien organiser les déplacements des aéronefs.
Le domaine du transport aérien s'arroge tellement de ces données
que le centre national de prévision est situé dans les
installations de l'aéroport et dirigé des mains de maîtres
par I'ASECNA. Cette structure reçoit quotidiennement les données
et les exploites à ses fins. Les transports maritimes sollicitent
souvent les données météorologiques, mais nous ne
disposons pas des informations assez nettes sur sa gestion.
b) - AGRICULTURE
Des structures agricoles de grandes envergures qui sont
situées dans les villes de Limbé, Douala et Kribi et leurs
environs, disposent généralement de leurs stations
météorologiques et utilisent les données pour une
rentabilité et une performance agricoles accrues. La C.D.C. prend soin
du volet prévision pluviométrique dans la zone de Limbé
avec l'installation à Debundscha et Botaland des Centres
expérimentaux qui permettent de planifier, les saisons de germinations
futures des jeunes
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plants de palmiers, du thé et de cueillettes de ces
produits tout comme la variation pluviométrique favorise le jugement des
quantités de latex contenues dans les hévéas de la
Société Hévécam située dans les environs de
Kribi.
c) - LES TRAVAUX PUBLICS
Les données prévisionnelles sont
sollicitées par moment quand une société de construction
de réhabilitation ou d'aménagement d'une route veut engager ses
travaux, c'est le cas de la société KETCH quand elle fut
chargée d'aménager la route Douala - Edéa en
1999*.
Les travaux qui sont généralement le
terrassement, le bitumage etc. peuvent être perturbés par une
pluie subite causant des pertes énormes à la
société qui a engagé des ressources consistantes pour la
réalisation d'un ouvrage et ses accessoires.
d) - INFORMATION DU PUBLIC
Le grand public aussi suit et est informé sur les
données pluviométriques à travers les prévisions
météorologiques diffusées par la radio provinciale du
Littoral (CRTV Douala), l'unique qui le fait dans la République du
Cameroun*, ceci est dû semble t-il à la
proximité géographique avec la direction nationale de la
météorologie et à la capacité de cette chaîne
de consacrer quelques minutes par jour pour la diffusion de ces informations
importantes. Ce qui n'est pas le cas au niveau de la chaîne nationale de
Radio et Télévision dont les services sollicités pour
l'information quotidienne sur les prévisions météo
à l'intention du peuple
* Entretien avec responsable station météo
Edéa le 18/02/2002.
* Le Cameroun compte environ 40 chaînes de radio dont 12
étatiques.
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camerounais, ont demandé une contre partie
financière*.
Au terme de ce recensement des utilisateurs des données
pluviométriques, nous notons qu'a aucun niveau l'autorité
administrative du commandement (le Préfet) n'est informé
quotidiennement par les besoins de prise de décision où le
déclenchement d'alerte lorsqu'une situation s'avérerait
dangereuse. Cette attitude est un manquement grave qu'il faudrait combler pour
éviter une gestion à l'emporte pièce des cas qui
pourraient survenir comme ce fut souvent avec les inondations catastrophiques
dont les causes et les bilans antérieurs font l'objet du chapitre deux
(2) de notre travail.
* Entretien avec l'ingénieur ONDOUA: Chef Service de la
prévision à la Direction nationale de la
météorologie a Douala lie 19/0212002.
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