3. Médias et temporalité :
périodicité, flux, sédimentation.
« Le Concorde traverse l'Atlantique en trois heures et
demi, mais il faudra toujours quinze jours pour lire Guerre et Paix»
Régis Debray, Cours de médiologie
générale.
3.1. Singularité du Pure-player
Nous suivrons dans ce travail la définition canonique
de ce qu'est un pure-player. Un pure-player, dérivé de
l'expression anglaise pure-play, renvoie à une organisation se
spécialisant dans une seule activité. Son « activité
» (play) est de ce fait « uniforme, homogène » (pure).
Les médias en ligne ont cette caractéristique
d'une activité homogène, à l'inverse des autres
médias (que nous appellerons par commodité « médias
traditionnels »), lui valant l'appellation de pure-player. En effet, les
deux formes de médias partagent tous deux l'activité
première de création d'écrits (production et mise en page)
autour de l'information. Ce qui distingue le pure-player des médias
traditionnels est le fait que les pure-players ne fournissent pas le support de
lecture ou de diffusion. Les pure-players ne fournissent qu'une seule
activité, l'écriture, qu'ils virtualisent par la suite, et c'est
aux lecteurs d'actualiser les écrits sur des supports qui leur
appartiennent22. Ainsi, les pure-players ont une activité
détachée de tout support, en ce sens que le support de lecture
n'est pas exclusif ou dédié au média, ni produit par
lui.
Pour clarifier la singularité, si nous prenons
l'exemple des médias traditionnels, nous pouvons voir qu'ils sont bel et
bien liés aux supports qui les reçoivent : les médias
télévisuels doivent produire une activité de diffusion
vers les postes de télévision, et sont donc limités sur le
nombre de poste pouvant les recevoir. Les journaux et magazines papiers sont
imprimés sur un certain nombre de supports et sont donc liés au
nombre de supports existant. Il en va de même pour la radio23.
Ces formes canoniques de médias sont donc dépendantes du support,
de la durée de vie du papier, du nombre de télévisions
branchées, de la quantité de postes de radio en marche, etc. La
singularité du pure-player est qu'il n'a aucune dépendance aux
supports, il n'en produit pas et ne diffuse pas à destination d'un
support dédié ou prédéfini. Un pure-player produit
de l'écrit virtuel, pouvant être actualisé sur une
pluralité de supports, et sur un nombre potentiellement infini de
supports, une quantité potentiellement infinie de fois : smartphone,
ordinateurs, tablettes, peuvent actualiser sur eux-même un nombre infini
de pages d'un ou de plusieurs pure-player(s), le partager et le diffuser. La
singularité d'un pure-player est donc cette absence de présence
quantifiable de support, et des contraintes qui peuvent y être
liées.
22 Nous verrons dans la suite de ce travail plus en
détail ce qu'est la virtualisation et l'actualisation des textes dans
les pure-players.
23 Nous excluons volontairement, à titre
d'exemple, le fait qu'aujourd'hui la plupart des médias
développent leur activité sur le web également, devenant
des plurimédias, à ne pas confondre avec un pure-player.
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Colin FAY
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