Paragraphe 2 : Les vrais « faux »
ou faux « vrais » paradis fiscaux :
La théorie des vrais « faux » ou faux «
vrais » paradis fiscaux est l'idée selon laquelle la base commune
à tous ces Etats membres est la faiblesse (volontaire ou non) des
charges fiscales qui incombent aux contribuables, mais leurs agissements dans
le cadre internationale, certaines de leurs dispositions législatives ou
encore les relations entretenus avec des Etats luttant contre l'évasion
fiscale font que l'on en vienne à se demander s'il ne s'agirait pas de
« faux paradis fiscaux ».
A. Les Bahamas, une place paradisiaque de l'offshore
:
![](Les-mecanismes-offshores-entre-optimisation-et-evasion-fiscale11.png)
Il s'agit d'une ancienne colonie dont le nom complet est le
Commonwealth des Bahamas (de son nom officiel).
Les Bahamas1 est le paradis fiscal par excellence.
1 :http://www.impots.gouv.fr/
2 :http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMAnalyse?codeAnalyse=1293
Les seules2 dispositions fiscales dans ce pays se
résument à une déduction de 3,4 % de la
rémunération (un taux qui ne mérite aucune comparaison
avec la France: entre la CSG, CRDS, déduction forfaitaire de 10%).
Concernant les travailleurs indépendants, ils doivent
payer eux-mêmes la totalité du montant.
Pour les expatriés, il peut être possible d'obtenir
un remboursement de cotisations à la retraite, mais seulement s'ils
retournent dans leur pays d'origine et cela dépendra aussi du temps
durant lequel ils ont travaillé dans le pays.
Il existe aussi un droit de timbre qui est un impôt qui
pourrait être dû dans un certain nombre de circonstances, notamment
sur les achats de biens immobiliers et pour l'envoi de grandes quantités
de devises à l'étranger.
Le plus faible taux de droit de timbre est de 2%, mais le plus
grand est de 8% sur les transactions immobilières de plus de 100.000 $.
Ces frais sont normalement partagés entre l'acheteur et le vendeur. Une
charge de 1% est appliquée aux prêts hypothécaires et
payés par l'emprunteur. Les frais pour l'envoi d'argent à
l'étranger sont calculés à 0,25%.
L'inscription des Bahamas sur la première liste des
paradis fiscaux de l'OCDE en 2000, a entrainé le développement de
l'idée selon laquelle les années 2000 allaient sonner le glas de
la fin du statut de régime fiscale privilégié. Sensibles
à la pression de la communauté internationale en raison de leur
dépendance aux revenus touristiques, ils s'engagent dès lors
à améliorer leur réputation. Ils prennent des mesures
concrètes afin de diminuer le nombre de sociétés utilisant
leur territoire à des fins d'évasion fiscale ce qui a
entrainé le fait que Les Bahamas ont été retirées
de la "liste grise" des paradis fiscaux par l'Organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE)
après avoir signé 18 accords d'échange d'informations
fiscales.
Mais il n'en reste pas moins que même si des mesures
drastiques ont été prises afin de limiter cet « exode fiscal
», « paradis fiscal » est une dénomination qui va bien
à cet archipel en ce qu'il n'existe aucun impôt sur les personnes
physiques aux Bahamas et aucun droit de succession.
Le décret n° 2010-1509 du 8 décembre 2010
portant publication de l'accord sous forme d'échange de lettres entre le
Gouvernement de la République française et le Gouvernement du
Commonwealth des Bahamas, ne vise pas à fustiger la fiscalité
quasi inexistante aux Bahamas mais vise avant tout à plus
d'échange d'information pour que l'Administration fiscale
française puisse rattraper les évadés fiscaux.
En effet, l'accord signé entre les deux parties obligent
les deux Etats à une obligation mutuelle quelle que soit l'origine du
ressortissant faisant l'objet du contrôle « les renseignements
doivent être fournis conformément au présent Accord par
l'autorité compétente de la Partie requise, que les
renseignements portent ou non sur un résident, un ressortissant ou un
citoyen d'une Partie contractante ».
Concernant les impôts en jeu lors de l'échange
d'information, cela concerne les impôts existants prévus par les
dispositions législatives et réglementaires des parties
contractantes, c'est-à-dire que si l'Administration fiscale
soupçonne une entreprise d'évasion fiscale en matière
d'impôt sur les sociétés, elle pourra très bien
recueillir les informations nécessaires auprès des
autorités des Bahamas pour savoir si le but à réellement
été d'éluder l'IS en s'installant dans cet Etat.
L'accord prévoit aussi la fourniture d'information sur
demande car l'autorité compétente devra fournir des informations
dès que l'autre partie le lui demandera. Ces renseignements doivent
être échangés, que la Partie requise ait, ou non, besoin de
ces renseignements à ses propres fins fiscales ou indépendamment
du fait que l'acte faisant l'objet de l'enquête aurait constitué,
ou non, une infraction pénale au regard du droit de la Partie requise
s'il s'était produit dans la Partie requise.
Les Bahamas restent donc une place emblématique de
l'offshore, les accords en matière d'échanges d'informations
fiscales venant simplement se poser comme mesure de dissuasion. La
jurisprudence du Conseil d'Etat témoigne de ce constat.
On citera à titre d'exemple jurisprudentiel le cas de
banque française, dont la filiale implantée aux Bahamas qui
exerce une activité de banque privée internationale consistant en
la collecte de fonds de clients particuliers nord-américains
intéressés dans le placement de leurs avoirs aux Bahamas et dont
l'implantation sur ce territoire lui a permis d'acquérir une
clientèle spécifique qui n'aurait pas réalisé ses
placements en France. Cette banque française apporte la preuve qui lui
incombe en vertu de l'article 209 B du CGI que l'implantation dans un pays
à régime fiscal privilégié de cette filiale,
n'avait pas, pour elle, principalement pour objet d'échapper à
l'impôt français1. L'on comprend que cette
société française à réussi à
échapper à l'article 209 B car elle a prouvé que
l'intérêt de son installation aux Bahamas était avant tout
marketing (captation d'une nouvelle clientèle) et non fiscal.
Au même titre que les Bahamas, la fiscalité des
Bermudes est sans nul doute celle d'un pays à fiscalité
privilégiée, pourtant ce pays a été retiré
de la liste des ETNC.
1 :CE 26 décembre 2012 n° 349070, 9e s.-s.,
min. c/ Sté BNP Paribas : RJF 3/13 n° 271
![](Les-mecanismes-offshores-entre-optimisation-et-evasion-fiscale12.png)
B. Le retrait injustifié des Bermudes de la
liste des Etats non coopératifs :
Parmi les Etats et territoires non coopératifs : la liste
au 1er janvier 2014 qui se limite à huit pays uniquement est
tombée, on ne retrouve pas les Bermudes. Le journal le Monde
précise qu'Elisabeth Guigou (présidente PS de la commission des
affaires étrangères de l'Assemblée) et Christian Eckert
(rapporteur général PS du budget à l'Assemblée)
ont dénoncé ce retrait dans un communiqué commun. Ces
derniers trouvent injustifiée la sortie de Jersey et des Bermudes de la
liste « au regard des derniers travaux du Forum mondial sur la
transparence, organisés sous l'égide de l'OCDE, publiés
à la suite de la réunion de Jakarta les 21 et 22 novembre
derniers, un tel retrait n'est pas justifié, précisent-ils.
On parle de retrait injustifié des Bermudes car les
caractéristiques fiscales de ce pays sont celle d'un paradis fiscal en
tant que tel.
Parmi ces caractéristiques on citera le fait :
· Qu'il n'y ait pas d'impôt sur le revenu aux
Bermudes et qu'il n'y ait aussi pas d'impôt sur les
sociétés.
· Logiquement, il n'y a pas de déclarations
d'impôt sur le revenu ce qui attire les
célébrités.
· Les travailleurs indépendants doivent
s'inscrire auprès de l'administration fiscale dans les 7 jours à
compter de la création de l'entreprise afin que cette taxe puisse
être mise en oeuvre. Si ces paiements sont effectués en retard
alors des amendes seront appliquées.
On voit à travers ces minces dispositions fiscales que les
Bermudes, sont certes dotés de dispositifs fiscaux mais aucune
comparaison n'est possible avec la fiscalité française, de ce
fait, il est aujourd'hui cohérent d'affirmer que les Bermudes sont bel
et bien un pays à fiscalité privilégiée, une place
où l'évasion fiscale est envisageable.
![](Les-mecanismes-offshores-entre-optimisation-et-evasion-fiscale13.png)
C. Le Luxembourg, un pseudo paradis fiscal à
l'européenne
Le Luxembourg appartient à l'UE et ne fait donc par partie
de la liste des Etats non-coopératifs, par rapport aux autres Etats le
Luxembourg dispose d'une fiscalité appliquée aux personnes
physiques et morales qui est beaucoup plus lourde que celle des Bermudes ou des
Bahamas, mais qui reste attractive par rapport aux taux français ce qui
fait que l'on ne peut pas parler de paradis fiscal mais de pays à
fiscalité attractive.
Concernant l'impôt sur les sociétés, les
sociétés considérées comme résidentes
(c'est-à-dire ayant leur siège statutaire ou leur administration
centrale) au Luxembourg sont imposables sur leurs bénéfices
mondiaux.
Les sociétés étrangères ne imposables
au Luxembourg qu'à raison de leurs revenus de source luxembourgeoise :
revenus immobiliers ; dividendes ; plus-values ; intérêts...
Taux d'imposition effectif
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28.8%
Contre 33,1/3% en France
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Impôt minimal forfaitaire (sachant qu'en France l'IFA a
été supprimé)
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1500€
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Impôt sur la fortune
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0.5% de l'actif net
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En matière d'impôt sur les sociétés,
le Luxembourg attire par ces taux plus faibles que la France (28,80% contre
33,1/3%). Tout comme en France, il existe une multitude de taxation sur les
opérations financières comme la taxation des plus-values
caractérisée par l'imposition au taux standard de l'impôt
sur les sociétés, sachant qu'il existe une exonération de
la plus-value si la société-mère luxembourgeoise
détient au moins 10% du capital de sa fille depuis au moins 12 mois
(régime mère-fille luxembourgeois).
Concernant l'imposition des personnes physiques, l'imposition sur
les revenus se caractérise de la sorte :
Revenu annuel imposable en euros :
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Taux :
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Jusqu'à 11 265 €
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0% (alors qu'en France on serait dans la tranche à
5.5%)
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De 11 265€ à
13 173€
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8% (alors qu'en France on serait dans la tranche à
14%)
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De 13 173€ à
41 793€
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Augmentation de 2% par tranche de 1908 € (en France on
serait entre la tranche à 30% et 41%)
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Plus 41 739 €
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39% (en France nous sommes à 45% pour la fraction
supérieure à 151.200 euros.)
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Contribution au fond pour l'emploi
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4% pour les revenus inférieurs à 150 000€
et 6 % au-delà.
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Ainsi, en 20081, le pays est placé sur la liste
grise des paradis fiscaux de l'Organisation de coopération et
développement économiques (OCDE), il rectifie aussitôt le
tir. Il accepte que l'échange d'information ne passe plus
nécessairement par la voie judiciaire, mais directement entre les
administrations. Quelques semaines auparavant, le pays s'y opposait encore.
Le Luxembourg, qui a le statut de « paradis fiscale
d'Europe », même s'il a été retiré de la
liste grise de l'OCDE, était attaché au secret bancaire ce qui
faisait de lui un Etat duquel l'Administration fiscale française se
méfiait. Or, depuis le 20 mars 2014 le Luxembourg va devoir lever le
secret bancaire au mépris de sa qualification
d' « european offshore place » que les journalistes du
Figaro et du Monde lui ont donné.
Ainsi, le Luxembourg et l'Autriche ont donné leur feu vert
jeudi à la loi européenne sur la fiscalité. Ce texte, en
souffrance depuis 2008, doit permettre d'étendre l'échange
automatique d'informations fiscales aux versements effectués par des
trusts ou des fondations, et non pas seulement par des personnes physiques. Il
constitue donc un élément important de l'arsenal de l'Union pour
lutter contre l'évasion fiscale et le secret bancaire, même s'il
n'est pas le seul.
1 : Evasion fiscale. Après la Suisse, le
Luxembourg va lever le secret bancaire/ Journal Le Parisien/ Rubrique
Economie
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