TITRE I : ANALYSE DIAGNOSTIQUE DE LA PARTICIPATION
ELECTORALE.
Pour appréhender la participation des citoyens aux
scrutins, il paraît nécessaire d'aborder deux points importants
que sont l'examen du niveau de la participation (chapitre I) et les
déterminants qui concourent à l'explication des différents
niveaux de participation (chapitre II).
Chapitre I : Le niveau de la participation
électorale
L'étude du niveau de la participation des citoyens aux
scrutins électoraux sera organisée, ici, en deux volets.
Il s'agira notamment d'examiner ce niveau de participation
dans les scrutins majoritaires d'une part (section I) et d'autre part dans les
scrutins proportionnels (section II).
Section I : Le niveau de participation électorale
dans les scrutins
majoritaires.
L'analyse de cette rubrique sera ordonnée autour de
deux points. Avant d'examiner le niveau de participation des Burkinabè
au cours des scrutins majoritaires à deux tours (§II), il importe
de se pencher sur leur participation aux scrutins référendaires
(§I).
Paragraphe I : Au cours des scrutins
référendaires
Au Burkina Faso, le processus classique de
démocratisation est toujours intervenu «sous tutelle
militaire»11. Les référendums de 1970 et
1977 (A) furent préparés et organisés respectivement par
le Gouvernement Militaire Provisoire (GMP) et le Gouvernement du Renouveau
National (GRN) et celui de 1991 (B) par le Front Populaire (FP).
A- Les référendums de 1970 et 1977
La période de transition militaire qui a suivi la chute
de la 1ère République le 03 janvier 1966, devait
permettre à l'armée d'organiser le retour à une vie
constitutionnelle normale.
11 MUASE (C.K), Syndicalisme et
démocratie en Afrique noire: l'expérience du Burkina Faso,
Paris, Karthala, 1989, p.126
7
A cet effet, un projet de Constitution fut
élaboré par un Comité Consultatif12
composé uniquement des membres du Conseil Supérieur des Forces
Armées (CSFA).
L'opinion publique nationale prise de court par ce projet de
Constitution l'accueille favorablement, estimant qu'il améliorait le
système précédent13.
C'est ainsi que l'ensemble des acteurs politiques ont
invité leurs militants et sympathisants à voter pour le
«Oui» au référendum du 14 juin 1970, au sortir
duquel la nouvelle Constitution est adoptée à 98,41% des
suffrages exprimés. La participation du corps électoral qui
comptait 2.390.735 électeurs inscrits s'élevait à
75,92%.
Mais le blocage institutionnel né des rivalités
au sein du RDA14 allait finir par emporter la 2ème
République après quatre (4) ans de vie15.
L'avènement de la 3ème
République a été le résultat de la pression des
syndicats sur le Gouvernement du Renouveau National (GRN) qui avait mis fin
à la 2ème République16. En effet, le
GRN contraint d'écourter son règne a entrepris des consultations
avec les différentes composantes de la société afin
d'étudier le contexte politique et proposer un avant-projet de texte
constitutionnel. A ce titre, une commission spéciale de trente deux (32)
membres fut mise en place par décret N°76-133/PRES du 22 avril
1976.
L'avant-projet de Constitution élaboré par cette
commission spéciale est ensuite examiné par une Commission
Constitutionnelle de neuf (09) membres créée par décret
N°77-121/PRES du 14 avril 197717.
Toutefois, il faudra l'ordonnance N°77-38/PRES du 30
septembre 1977, abrogeant l'ordonnance N°74-35/PRES du 30 mai 1974 portant
dissolution des partis politiques en Haute Volta18, pour
libéraliser les activités politiques avec la précision que
les partis politiques devaient se constituer ou se reconstituer
légalement avant le 10 novembre 1977 pour pouvoir participer à la
campagne référendaire19. C'est ainsi qu'à la
date du 10
12 Le Comité Consultatif a été
créé par décret N°66-37/PRES du 8 décembre
1966.
13 MUASE (C.K), op. cit, p.126
14 LOADA (A.M.G) & IBRIGA (L.M), op. cit, p.332
15 Dans sa déclaration du 8 février
1974, le Général LAMIZANA en sa qualité de «Chef
de l'armée et des Forces de l'ordre» suspend les institutions
de la 4ème République et annonce la naissance d'un
Mouvement pour le Renouveau.
16 Les dysfonctionnements de la
2ème République, suite à la menace de blocage
des institutions du fait de la crise éclatée au sein du parti
majoritaire (UDV-RDA), avaient conduit le Président LAMIZANA à
mettre fin à l'expérience du multipartisme pour tenter
l'instauration d'un régime d'exception à parti unique.
17 YAMBA (D.H), Régimes constitutionnels et
Etats d'exception au Burkina Faso, ENAM, 1992, p.39
18 Cf. J.O.H.V N°45 du 10 novembre 1977
(Numéro spécial).
19 Article 1er de l'ordonnance
N°77-39/PRES du 21 octobre 1977, fixant un délai pour la
déclaration des partis politiques et portant dérogations
provisoires à certaines dispositions de la loi N°18AL/59 du 31
août 1959 qui stipule que: «pourront seuls participer à la
propagande en vue du référendum constitutionnel, les partis
politiques qui auront
8
novembre 1977, sept (07) partis politiques étaient
reconstitués et reconnus20. Il appartenait à ces
formations politiques d'expliquer aux électeurs le projet de
Constitution et les institutions qu'elle mettait en place afin que leur
participation au scrutin et leur vote soient conséquents.
A l'issue du scrutin qui est intervenu le 27 novembre 1977, le
projet de Constitution fut adopté à 98,70% des suffrages
exprimés avec une participation des inscrits égale à
71,45%. Pour ce scrutin les régions du Centre-Est, de l'Est et du
Centre-Nord ont respectivement enregistré 78,73%; 76,11% et 73,76% de
taux de participation tandis que la ville de Ouagadougou, les régions
des Hauts-Bassins et du Centre ont respectivement enregistré les plus
faibles taux de participation qui sont de 50,73%; 65,11% et
66,65%21. Il ressort donc que les régions du Centre et des
Hauts-Bassins qui abritent les plus importants centres urbains où
l'activité politique est plus développée enregistrent
paradoxalement les taux de participation les moins élevés.
Cet aperçu sur les référendums
constitutionnels de 1970 et 1977 fait ressortir une participation massive des
inscrits (plus de 70%). Si ces scrutins se sont déroulés dans des
conditions similaires, au regard des animateurs de la vie politique, il n'en a
pas été de même pour le scrutin référendaire
du 02 juin 1991 qui s'est déroulé dans un contexte de
renouvellement quasi-total de la classe politique.
|