La participation électorale au Burkina Faso( Télécharger le fichier original )par Jean-Pierre VOGNA Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature - Administrateurs Civils 2010 |
LA PARTICIPATION ELECTORALE AU BURKINA FASO Mémoire pour l'obtention du
diplôme Présenté et soutenu publiquement par: VOGNA Jean Pierre Sous la direction de: Pr Luc Marius IBRIGA, enseignant de droit public à l?UFR/SJP, Université de Ouagadougou. Juin 2010 ENAM 03 BP 7024 Ouagadougou 03
E-mail:
enam@cenatrin.bf i Avertissement L'Ecole Nationale d'Administration et de Magistrature n'entend donner aucune approbation ou improbation aux idées émises dans le présent mémoire qui doit être considéré comme propre à son auteur. ii Dédicace Mes défunts père et grand-père, VOGNA Yétan Frédéric et VOGNA Nikièbo, Ma mère, veuve prématurée, SAMPOE Dofinwahi Catherine, Mon grand-frère, VOGNA Lamoussa Honoré, Mon épouse VOGNA/BORO Siè Florence Je dédie ce travail. iii Remerciements Aux nombreuses personnes dont les conseils, orientations et concours ont permis la production de ce document, je voudrais ici leur témoigner ma reconnaissance et leur adresser mes sincères remerciements. Je voudrais particulièrement réitérer mes vifs remerciements à: - Mon Directeur de mémoire, le Docteur Luc Marius IBRIGA, Enseignant-chercheur à l'UFR/SJP de l'Université de Ouagadougou qui, malgré ses multiples charges a bien voulu diriger le présent travail; - Le corps professoral de l'ENAM; - Monsieur Salou SIDIBE, Secrétaire Général de la CENI; - Le Professeur Basile L. GUISSOU, Directeur Général du CNRST; - Monsieur Julien NATIELSE, au CGD; - Monsieur Tuansi Bruno LOYA, enseignant vacataire à l'ENAM; - Mesdames et messieurs les documentalistes de bibliothèque de l'Assemblée Nationale, du CGD, de Conseil Constitutionnel, de la CENI, du GERDDES, de l'ENAM et de l'université de Ouagadougou pour les faveurs exceptionnelles qui m'ont parfois été accordées. - Mes amis BOLY Ibrahim, Dramane, Kader, HAYORO Lamoussa et OUROU Victor pour leur soutien inconditionnel; - Tous les compagnons d'étude et singulièrement, Ahmat Abdallah, BAYILI Jean Marc et TRAORE Ouo Bibata. iv LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS - ADF/RDA, Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain; -AMP, Alliance pour la Majorité Présidentielle; - AN, Assemblée nationale; - CDP, Congrès pour la démocratie et le progrès; - CENI, Commission électorale nationale indépendante; - CES, Conseil économique et social; - CGD, Centre pour la gouvernance démocratique; - CNOE, Commission nationale d'organisation des élections; - CNPP/PSD, Convention nationale des patriotes progressistes / parti social démocratie; - CODMPP, Collectif des organisations démocratiques de masses et de partis politiques; - CSC, Conseil supérieur de la communication; - CSFA, Conseil supérieur des forces armées; - CSLP, Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté; - FP, Front populaire; - GAP, Groupe d'action populaire; - GMP, Gouvernement militaire provisoire; - GRN, Gouvernement du renouveau national; - JOBF, Journal officiel du Burkina Faso; - JORHV, Journal officiel de la république de Haute Volta; - MLN, Mouvement de libération nationale; - PAI, Parti africain de l'indépendance; - PNB, Produit national brut; - PNBG, Politique nationale de bonne gouvernance; - PRA, Parti pour le regroupement africain; - OBU, Opposition burkinabè unie; - ODP/MT, Organisation pour la démocratie populaire / mouvement du travail; - UDVB, Union des verts du Burkina; - UDV/RDA, Union démocratique voltaïque / Rassemblement démocratique africain; - UNDD, Union nationale pour la défense de la démocratie; - UNI, Union nationale des indépendants; - UPV, Union progressiste voltaïque; 1 SOMMAIRE INTRODUCTION 2 TITRE I: ANALYSE DIAGNOSTIQUE DE LA PARTICIPATION ELECTORALE. 6 Chapitre I: Le niveau de la participation électorale 6 Section I: Le niveau de participation électorale dans les scrutins majoritaires 6 Section II: Le niveau de participation électorale dans les scrutins proportionnels 13 Chapitre II: Les déterminants de la participation électorale 20 Section I: Les règles favorables à la mobilisation électorale 20 Section II: Les obstacles à la participation électorale 25 TITRE II: LA PORTEE DE LA FAIBLE PARTICIPATION ELECTORALE 32 Chapitre I: Les implications de la faible participation électorale 32 Section I: Les implications sur le pouvoir politique 32 Section II: Les implications sur l'ancrage de la gouvernance démocratique 37 Chapitre II: Les conditions d'une bonne participation électorale. 42 Section I: La création d'un environnement électoral favorable 40 Section II: L'approfondissent de la culture démocratique 48 CONCLUSION 54 BIBLIOGRAPHIE 56 TABLE DES MATIERES 58 2 INTRODUCTIONL'Etat moderne en Afrique est un produit importé et imposé à la suite de la pénétration coloniale. Il contraste avec les formes traditionnelles d'organisation politique qui existaient sur le continent. Avec l'indépendance, le Burkina Faso, à l'instar des autres nouveaux Etats, va assurer la continuité du système juridique hérité de la colonisation tout en adoptant de nouvelles politiques juridiques1 au nombre desquelles le mode électoral. En effet, le peuple burkinabè, jadis voltaïque, a toujours proclamé son attachement aux principes de la démocratie et des droits de l'Homme en souscrivant, dans les préambules des différentes Constitutions qu'il s'est établies, à la Déclaration universelle des droits de l'Homme de 1948. C'est ainsi que l'élection fera l'objet de réappropriation en ce sens qu'elle est le seul moyen légal de dévolution du pouvoir dans les Etats démocratiques. Mais, la mise en pratique de ce mode de dévolution du pouvoir sera rapidement soumise aux aléas de l'instabilité politique avec une succession récurrente de coups d'Etat militaires. Cette situation a longtemps caractérisé la Haute Volta aujourd'hui Burkina Faso2. De son indépendance en 1960 à l'adoption de la Constitution du 02 juin 1991, le Burkina Faso a connu plusieurs régimes d'exception3. En effet, le régime de parti unique, de facto, de la 1ère République n'a pas résisté au soulèvement populaire du 03 janvier 1966, en réaction à la gabegie et la gestion personnalisée du pouvoir par le Président Maurice YAMEOGO4. Les régimes constitutionnels intermittents de la 2ème République (1970-1974) et de la 3ème République (1977-1980) vont à leur tour connaître chacune une durée éphémère. Cette évolution démocratique en dents de scie n'aura donc pas permis un ancrage suffisant de la pratique électorale dans les moeurs politiques burkinabè. Cependant, l'avènement de la 4ème République en 1991 offre, à nouveau, l'opportunité aux citoyens burkinabè de rompre avec une décennie de soubresauts politiques5 pour renouer avec la démocratie. 1 LOADA (A.M.G) et IBRIGA (L.M), Droit constitutionnel et institutions politiques, Ouagadougou, Presses Africaines, 2007, p.16 2 Ce changement de nom est intervenu en aout 1984 sous le régime du CNR. 3 Ce sont au total six 06 régimes d'exception, notamment le GMP, le MNR, le CMRPN, le CSP, le CNR et le FP. 4 Il s'agit du premier président de la Haute Volta dont le régime s'est rapidement mué en dictature. 3 La Constitution de la 4ème République, à l'instar de celles des trois précédentes Républiques consacrera le suffrage direct et universel. L'objectif est de conférer au citoyen le droit de participer aux affaires de la société et de l'Etat. Ce droit de suffrage que lui reconnaît la constitution6 lui permet de donner son opinion sur le choix d'un homme (élection) ou d'une décision (référendum). C'est dans ce sens que Philippe ARDANT affirme que «le citoyen est la clé de voûte de la démocratie» et par conséquent, il n'y a «pas de citoyen sans démocratie, pas de démocratie sans citoyen»7. Il en découle que le citoyen est la seule source de légitimité de tout pouvoir démocratique, c'est-à-dire que tout pouvoir politique reste fondé sur la volonté du peuple exprimée à la faveur d'élections libres, tenues périodiquement au suffrage universel égal et secret. C'est ainsi qu'avec le rétablissement de l'ordre constitutionnel en 1991, le Burkina Faso a organisé dix (10) élections dont sept (7) nationales8 et trois (3) locales. Ce qui constitue une avancée significative par rapport aux régimes constitutionnels précédents qui n'ont connu que trois (3) consultations électorales9 de types concurrentiels. Cette régularité des élections constitue une dimension importante de tout processus démocratique; c'est pourquoi, elles doivent surtout faire l'objet d'une appropriation sociale. Cette appropriation doit se traduire par la bonne participation des citoyens aux différents scrutins électoraux qui se déroulent dans le pays. Dit autrement, les pouvoirs publics doivent garantir une bonne participation des citoyens aux élections qui se succèdent. Force est, cependant, de constater que depuis le référendum constitutionnel de 1970 à nos jours, les consultations électorales suscitent peu d'engouement au sein de l'électorat burkinabè. A ce titre, certains analyses et commentaires sur le système démocratique burkinabè semblent indiquer un faible ancrage de la démocratie au regard des obstacles qui l'entourent. Pourtant, la démocratie ne peut survivre que si elle est participative. C'est pourquoi, il importe d'éclaircir, avant tout propos, la notion de participation. En effet, cette notion est difficile à appréhender parce qu'elle touche à toutes les dimensions de la 5 De 1980 à 1991, le Burkina Faso a expérimenté quatre 04 régimes d'exception à savoir le CMRPN, le CSP, le CNR et le FP. 6 Article-12 de la constitution du 02 juin 1991. 7 ARDANT (Ph.), Institutions politiques et droit constitutionnel, Paris, LGDJ, 1999, p.151. 8 Il s'agit de trois (3) élections présidentielles et de quatre (4) élections législatives. 9 Apres le référendum constitutionnel du 14 juin 1970, il n'eut que les élections législatives car la constitution disposait que les fonctions présidentielles sont exercées par le plus ancien militaire dans le grade le plus élevé, en l'occurrence le Général LAMIZANA et ce pour une période de quatre (4) ans. Le référendum constitutionnel du 27 novembre 1977 fut suivi d'élections législatives et présidentielles. 4 société : l'économie, la politique, le social et le culturel. Le plus souvent, elle se réfère au partage du pouvoir, des revenus, de l'emploi ou de la production. Mais dans le cadre de la présente étude, c'est la dimension politique qui sera considérée : il s'agira donc de la participation politique. Toutefois, cette dimension de la participation reste encore vaste puisqu'elle renferme deux formes qui sont: la participation non conventionnelle et la participation conventionnelle qui comprend la participation électorale (exercice du droit de vote) et la participation partisane. Il sera, ici, question de la participation électorale dont le niveau varie d'une votation à l'autre et d'un pays à l'autre et même, à l'intérieur d'un pays, d'une localité à une autre. C'est ce qui a justifié le choix du présent thème intitulé : «la participation électorale au Burkina Faso». De façon assez large, elle inclut divers actes allant de l'inscription sur une liste électorale au vote en passant par la participation aux campagnes électorales, meetings et autres réunions politiques. Pour les besoins de cette étude, la participation électorale sera appréhendée comme l'exercice du droit de vote reconnu à tout citoyen burkinabè, remplissant les conditions définies par la loi fondamentale et le code électoral. C'est aussi et surtout le fait pour un citoyen de se décider à s'inscrire sur une liste électorale et de jouir de son droit de vote en toute liberté lors de toute consultation électorale. La participation électorale s'entend, enfin, comme l'opportunité offerte à tout Burkinabè, satisfaisant aux conditions requises par la loi, de se porter librement candidat à un poste électif. L'objectif principal de la présente étude est d'évaluer le niveau de participation des citoyens aux consultations électorales. Il sera ensuite possible d'en dégager les facteurs déterminants de la participation. Enfin, l'intérêt se focalisera sur la portée politique de la faible participation à travers l'analyse des risques sociopolitiques y relatifs et des conditions d'une bonne participation. Au regard de l'objectif ci-dessus, il semble indiqué d'articuler la problématique de cette recherche autour des questions suivantes : Quel est l'état de la participation électorale au Burkina Faso? Quel sont les risques que pourrait engendrer une faible participation sur le système politique? Enfin comment parvenir à une participation électorale satisfaisante du point de vue démocratique? 5 A cet effet, la première hypothèse consiste à dire qu'une forte participation des citoyens aux consultations électorales est consécutive à l'existence d'un consensus politique et à la mise en oeuvre de règles pragmatiques. La seconde hypothèse serait qu'une faible participation de l'électorat résulte, par contre, de facteurs socio-économiques mais aussi d'une faiblesse caractéristique de la classe politique. Enfin, une faible participation des citoyens aux élections comporte des risques de fragilisation du processus démocratique au Burkina Faso. La présente étude se rapporte à l'ensemble des scrutins, exception faite à ceux tenus sous la 1ère République, organisés dans le cadre des régimes constitutionnels qu'a connus le Burkina Faso. Le motif de ce choix s'explique par le fait que sous la 1ère République «le système électoral reposait sur la candidature unique aux élections présidentielles et, lors des élections législatives, sur le système de listes nationales de candidats arrêtées par les instances du parti...»10. Pour la vérification des hypothèses de travail, il a été privilégié la recherche documentaire ainsi que quelques entretiens avec des personnes ressources qui contribueront à enrichir ce travail. Une telle démarche impose de scruter les différents processus électoraux qu'a connus le Burkina Faso depuis le référendum constitutionnel du 14 juin 1970 à nos jours. Ce qui conduit à organiser la présente étude autour de deux axes fondamentaux. Le premier axe consiste en une analyse diagnostique de la participation électorale (titre I) où il sera question de rendre compte du niveau de la participation des citoyens aux différents scrutins organisés au Burkina Faso et d'identifier les facteurs qui sous-tendent la participation des uns face à la désaffection des autres. Le second axe portera sur les conditions relatives à une bonne participation des citoyens aux élections eu égard aux implications d'une faible participation (titre II). Il s'agira, à cet effet, d'examiner les risques sociopolitiques de la faible participation électorale sur le projet de construction démocratique en cours et de prospecter les mécanismes à mettre en oeuvre pour garantir une bonne participation. 10 KIEMDE (P), «Réflexions sur le référendum constitutionnel et les élections présidentielle et législatives de 1991 et 1991 », in Le Burkina entre révolution et démocratie (1983-1993):ordre politique et changement social en Afrique subsaharienne, Paris, Karthala, 1996, p. 355. 6 |
|