Section 2 : Une réforme incertaine
La réforme de la CIJ, notamment en sa fonction
consultative, se situe dans le cadre général de la réforme
du système des Nations-Unies. L'incertitude de son aboutissement tient
d'abord à la rigidité de la procédure de modification de
la Charte et de son Statut (Paragraphe 1) et aux contraintes d'ordre
institutionnel et politique (Paragraphe 2).
Paragraphe I : La lourdeur de la procédure de
modification.
La révision du statut de la Cour obéit suivant
les dispositions de son chapitre V aux mêmes règles
observées pour la modification de la Charte158. Cette
procédure de révision (A) et d'amendement (B) se
révèle assez rigide dans sa mise en oeuvre.
157 L'effet relatif de l'avis fait référence
à l'organe politique qui en prend acte par une résolution et
l'Etat contestateur qui ne peut logiquement s'y opposer.
158 Cf. Articles 69 et 70 du Statut de la Cour.
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A- La procédure de révision
La procédure de révision mise en place par la
Charte des Nations-Unies s'apparente à celle rencontrée au plan
interne dans le cadre des constitutions dites rigides. Cette rigidité de
la constitution a pour but essentiel d'empêcher des modifications
inopportunes, hâtives et souvent irréfléchies.
Prévue à l'Article 109 de la Charte des
Nations-Unies, la procédure de révision de la Charte se veut
spécifique. Aux termes de cet article, pour entreprendre une
révision de la Charte, la compétence de révision est
confiée à un organe spécial appelé
conférence générale159de révision
convoquée sous l'initiative conjointe de l'Assemblée
générale et du Conseil de sécurité.
La procédure mise en place à l'Article 109 de la
Charte n'est pas en effet aisée à mettre en oeuvre. Elle confirme
l'improbabilité d'un aboutissement de la réforme de la Charte et
donc de la Cour, organe judiciaire principal de l'organisation mondiale. Cette
procédure est en effet la même pour entreprendre une
réforme des organes principaux de l'ONU. L'actualité en la
matière est assez éloquente si on considère les
difficultés que rencontre la réforme du Conseil de
sécurité de l'organisation160.
La convocation de la conférence générale
de révision est sérieusement encadrée. La
conférence générale de révision ne peut, en effet,
se réunir que sur un vote de l'Assemblée Générale
à la majorité des deux tiers des membres et par un vote de neuf
quelconque des membres du Conseil de sécurité. On se rend compte
qu'au niveau de l'Assemblée générale d'abord, la
procédure est encore plus durcie. En effet, contrairement aux exigences
de l'article 18 de la Charte où les questions jugées importantes
sont prises à la majorité des deux tiers des membres
présents et votants, l'Article 109 exige la même majorité
mais sur l'ensemble des Etats membres de l'organisation.
159 Certains auteurs ont estimé à la
lumière de cet article qu'il s'agit d'un organe important au point de
figurer dans la liste des organes de l'ONU dressée à l'article 7
de la Charte pas certainement comme organe principal ni comme organe
subsidiaire mais, de toutes les façons, un organe dont la
dénomination reste à préciser. Vr. à cet effet,
KELSON (H.) dans son ouvrage intitulé, The Law of the United
Nations.
160 Voir. SANGBANA (K.), Réflexion sur la
réforme du Conseil de Sécurité des Nations-Unies,
mémoire DEA, Université de Lomé, juillet 2008.
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On se mettra ainsi d'accord sur le souci d'encadrer la
révision de la Charte même si au niveau du Conseil il apparait un
certain assouplissement161.
Mais cet assouplissement est rapidement recadré
s'agissant non plus de la convocation de la conférence mais de la mise
en oeuvre de la modification recommandée par la conférence
à la majorité des deux tiers. Ici, il est exigé pour la
mise en oeuvre de la modification, la ratification des deux tiers des membres
des Nations-Unies y compris tous les membres permanents du Conseil de
sécurité. Cette dernière exigence rend improbable
l'aboutissement de la procédure de la révision de la Charte dans
un monde des plus instable guidé par les intérêts
particuliers des plus « forts »162.
La procédure mise en place pour l'amendement de la
Charte n'est pas non plus d'un maniement facile quoiqu'elle soit de loin la
plus sollicitée dans l'histoire des
Nations-Unies163.
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