CHAPITRE II
DETERMINANTS DU DEVELOPPEMENT FINANCIER
ET PRESENTATION DU SECTEUR FINANCIER DES PAYS DE LA ZONE
FRANC
SECTION 1. LES DETERMINANTS DU DEVELOPPEMENT
FINANCIER
La recherche et l'évaluation de l'impact du
développement financier sur la croissance conduit à rechercher
d'abord les facteurs qui sous-tendent le développement financier afin de
pouvoir mettre sur pied une politique de développement du système
financier. On est alors amené à se demander quels sont les
facteurs qui conditionnent le développement financier, et quelles sont
en conséquence, les mesures ou les politiques en termes de finance
capables de favoriser la croissance économique. Une approche formelle
basée sur les règles de droit et de leur application et une autre
sur les facteurs sociaux et culturels permettront de statuer sur les facteurs
déterminants du développement financier. Ces approches mettent en
jeu l'ensemble des institutions et facteurs qui coordonnent les
activités des agents économiques. L'efficience d'un
système financier se juge à la façon dont il participe
à l'optimisation des comportements des agents économiques dans
l'économie.
Paragraphe 1 : l'approche juridique et institutionnelle
L'approche juridique et institutionnelle explique le
développement financier par la présence des institutions mais
aussi par les règles de droit et leur application. On en distingue entre
autres :
33
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
? Le cadre juridique et réglementaire
Le cadre juridique et réglementaire est perçu
dans le monde financier comme le facteur le plus important à la
réalisation des transactions financières. La qualité du
cadre juridique est donc très nécessaire pour réaliser des
opérations financières. Un système financier est avant
tout une affaire de contrats. Le cadre juridique est un facteur essentiel pour
que les apporteurs de capitaux soient en mesure de faire respecter leurs
intérêts en cas de conflits avec les utilisateurs de ces capitaux
à l'instar des entreprises par exemple. Dès lors, la
réglementation des intermédiaires et des marchés
financiers apparaissent comme des déterminants majeurs du
développement financier. La réglementation financière est
reconnue à deux niveaux lorsqu'il s'agit des opérations de
marchés. Il s'agit d'une part d'obliger les entreprises qui utilisent
les capitaux à fournir des informations aux investisseurs ou apporteurs
de capitaux comme la présentation des comptes, la communication sur
certaines opérations et la gouvernance par exemple ainsi que des
possibilités de contestation auprès de juridictions
compétentes des décisions des dirigeants ou des actionnaires
majoritaires. Il s'agit dans un second temps de prendre en compte le statut et
l'étendue des pouvoirs de l'autorité de régulation : son
indépendance, ses pouvoirs d'investigation, les sanctions qu'elle peut
imposer. Cette théorie soutient que dans les pays ou le système
judiciaire facilite les contrats entre les agents privés, et
protège les droits de propriété et les droits des
investisseurs, les épargnants sont plus enclins à investir dans
les entreprises, contribuant ainsi à l'expansion des marchés
financiers. A l'inverse, un système financier qui protège
très peu les droits de propriété et les droits des
investisseurs aura tendance à freiner le développement financier.
Les travaux de La Porta et al (2005), concluent que ce sont la qualité
des informations diffusées par les entreprises ainsi que les recours
dont disposent les investisseurs contre leur insuffisance ou leur
caractère erroné qui expliqueraient le niveau des
émissions, ou l'accessibilité du marché aux petites et
moyennes entreprises.
Par la suite, Levine et Beck (1999) montrent que les
intermédiaires financiers se développent davantage lorsque le
système juridique permet aux créanciers d'obtenir la
totalité du remboursement de leurs prêts en cas de faillite. Mais
cette théorie a été contestée par plusieurs
auteurs. Le caractère non liquide des actifs des établissements
financiers rend instables ces établissements financiers lequel fait
naître un aléa de moralité : une incitation à
prendre des risques excessifs puisque ceux-ci sont au moins partiellement pris
en charge par
34
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
l'institution d'assurance ou monétaire qu'elle soit
privée ou publique lorsqu'ils se matérialisent. Une
réglementation est donc nécessaire pour permettre la conclusion
et le respect de contrats équitables entre les banques d'une part, les
déposants et l'institution d'assurance des dépôts d'autre
part.
? La règle de « l'origine légale
»
D'après la règle de l'origine légale,
c'est l'origine historique des systèmes juridiques qui explique les
écarts de niveau de développement financier entre les pays.
L'origine légale du système juridique peut expliquer les
différences entre pays en matière de protection des droits des
investisseurs, de contrats et de niveaux de développement financier. Ce
courant connu sous l'expression « law and finance », est
initié à la suite des travaux de (LLSV)1 et explique
les facteurs déterminants du développement financier par
l'origine légale des systèmes juridiques. La mise en place d'un
cadre juridique respectueux des droits de propriété
c'est-à-dire des intérêts des investisseurs est la
condition nécessaire sinon suffisante du développement financier
et donc de la croissance.
Le système anglo-saxon de « common law »
faciliterait le recours des entreprises aux financements de marchés ;
privilégie le respect des droits de propriété
privés parce qu'il préserve mieux les intérêts des
apporteurs de capitaux et parce qu'il est plus souple et mieux adapté
aux innovations. Contrairement au système anglo-saxon, on pense que les
systèmes juridiques français à partir de leur histoire ont
été initiés pour renforcer le pouvoir de l'Etat par
rapport aux intérêts particuliers. La nature des sources du droit
est plus essentielle que le contenu des lois ; ce sont donc les fondements
mêmes des systèmes juridiques qui sont déterminants. Ceci
dit, il est impossible d'implanter un régime juridique de façon
artificielle sans égard pour la culture, les valeurs ou le
système institutionnel du pays concerné. La protection des
investisseurs et des créditeurs serait mieux expliquée par les
modèles culturels avec lesquels elle s'accorde, que par le principe de
l'origine légale.
1 La Porta, Lopez de Silanes,
Shleifer, Vishny (1997) et (1998).
35
DEVELOPPEMENT FINANCIER ET CROISSANCE ECONOMIQUE DANS LES PAYS
DE LA ZONE FRANC.
|