§2.Observations
Le recours ayant donné lieu à l'arrêt sous
examen de la Cour constitutionnelle avait pour l'objet l' annulation des
articles 92, 93, 95 et 96 du décret-programme de la Région
wallonne du 22 juillet 2010 « portant des mesures diverses en
matière de bonne gouvernance, de simplification administrative,
d'énergie, de logement, de fiscalité, d'emploi, de politique
aéroportuaire, d'économie, d'environnement, d'aménagement
du territoire, de pouvoirs locaux, d'agriculture et de travaux publics
».
A l'estime des requérants, les articles 92 et 95 du
décret-programme de la Région wallonne précité lus
isolément ou en combinaison avec les articles 5 et 6 de la directive
2004/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 «
sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la
prévention et la réparation des dommages environnementaux »,
avec l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme
violent les articles 10, 11 et 23 de la Constitution, lus en combinaison avec
l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.
Les requérants observent que les dispositions
attaquées ont été adoptées afin de permettre
l'application du décret du 5 décembre 2008 en dépit du
retard pris par l'administration en ce qui concerne l'agrément des
laboratoires prévu par ce décret et en ce qui concerne
l'élaboration du « Code wallon de Bonnes Pratiques »
prévu par l'arrêté du Gouvernement wallon du 27 mai 2009.
Ils estiment que, sauf à heurter la sécurité juridique, la
carence de l'administration ne peut constituer un motif d'intérêt
général justifiant la réduction sensible du niveau de
protection de l'environnement découlant des dispositions
attaquées.
En outre, la partie requérante expose que les
dispositions attaquées violent les articles 5 et 6 de la directive
2004/35/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 «
sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la
prévention et la réparation des dommages environnementaux »,
parce que la Région wallonne ne veille pas à être
informée des menaces imminentes pour l'environnement et n'oblige pas
l'exploitant d'un site pollué à prendre des mesures
préventives ou des mesures de réparation au sens de cette
directive.
Les requérants soutiennent aussi que la dispense de
constitution d'une sûreté prévue par l'article 92bis,
§ 1er, du décret du 5 décembre 2008 viole l'article 14 de la
même directive.
A.4.2. Le Gouvernement wallon répond que cette
directive a été transposée par les articles D.93 et
suivants du Code de l'Environnement, et non par les dispositions
attaquées du décret du 5 décembre 2008.
Il ajoute que, compte tenu de la manière dont
l'article D.103 de ce Code limite le champ d'application de ses dispositions
transposant la directive du 21 avril 2004, l'article 92bis du décret du
5 décembre 2008, qui ne concerne que le terrain affecté d'une
pollution historique, ne risque pas d'empêcher l'application de ces
dispositions.
Invitée à examiner la compatibilité des
articles 92 et 95 du décret-programme de la Région wallonne sus
indiqué avec les articles 10 et 11 de la Constitution pris isolement ou
conjointement avec l'article 23, la Cour précise qu'in casu, le respect
de l'obligation de standstill inhérente à l'article 23 doit
s'apprécier en tenant compte des obligations imposées par
l'article 14, paragraphe 1, de la directive 2004/35/CE du Parlement
européen et du Conseil du 21 avril 2004 « sur la
responsabilité environnementale en ce qui concerne la prévention
et la réparation des dommages environnementaux.»
Procédant à l'évaluation de la
constitutionnalité du recul invoqué, la cour rappelle
reproché aux dispositions attaquées de retirer aux riverains d'un
site pollué la garantie que l'assainissement de ce site sera
envisagé.
L'article 18 du décret du 5 décembre 2008
relatif à la gestion des sols crée, entre autres, une obligation
de procéder à une étude d'orientation, une obligation de
procéder, le cas échéant, à une étude de
caractérisation, ainsi qu'une obligation de procéder, le cas
échéant, à l'assainissement du sol pollué
visé par les études précitées. Ces obligations
naissent dans les conditions décrites par les articles 19 à 21 du
même décret. Les titulaires de ces obligations sont
identifiés par les articles 22 à 26 du même décret.
Sans qu'il soit nécessaire de vérifier si,
avant l'adoption des dispositions attaquées, le décret du 5
décembre 2008 offrait aux riverains d'un site pollué la garantie
que l'assainissement de celui-ci serait envisagé, il y a lieu d'observer
que les dispositions attaquées ne suppriment pas les obligations
précitées et ne modifient nullement les règles relatives
à leur naissance et à l'identification de leurs titulaires.
Le juge constitutionnel termine son raisonnement en
replaçant les articles 92 et 95 du décret litigieux
précité dans leur contexte normatif pour conclure, en
l'espèce, à l'absence sensible, et donc au respect de
l'obligation de standstill.
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