L'effet de standstill des droits fondamentaux dits de la deuxième génération vu par le juge constitutionnel belge( Télécharger le fichier original )par Richard TSHIENDA MUAMBI Facultés universitaires Saint- Louis - Master complémentaire en droits de l'homme 2012 |
ABREVIATIONSDESC Droits économiques, sociaux et culturels Pidesc Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels Doc. parl., Document parlementaire SPAQuE Société Publique d'Aide à la Qualité de l'Environnement ISSeP l'Institut scientifique de service public SOMMAIREChapitre I : l'obligation de standstill dans le domaine des droits economiques,.........4 sociaux et culturels Section Ière : L'obligation de standstill : Notions 2 Section 2ème La Nature juridique de l'obligation de standstill 2 chapitre ii : la cour constitutionnelle et l'obligation de standstill déduite de.........11 l'article 23 alinéa 3, 2°et 4° de la constitution belge Section Ière : Le droit à l'aide sociale 2 Section 2ème : Le droit à la protection d'un environnement sain 2 INTRODUCTIONOn a l'habitude de distinguer, au sein de l'ensemble des droits de l'homme, actuellement consacrés ou discutés, trois « générations » ou catégories. Cette dernière expression n'est pas dépourvue d'ambigüité, car elle pourrait donner à penser que, certains droits sont subordonnés aux autres et revêtiraient une importance moindre1(*). Si l'on a pu dire que les droits sociaux constituent une deuxième génération de droits de l'homme, cela a finalement été avant tout dans une optique chronologique. La notion de droits de l'homme est unique, et, comme l'a écrit le poète de la lumière du soleil, elle « se divise et demeure entière ainsi que l'amour maternel »2(*). L'évolution historique des droits de l' homme a mis en lumière que la protection et le respect de la dignité humaine ne peuvent être assurés que par une protection renforcée non seulement des droits civils et politiques mais également, et surtout, des droits économiques, sociaux et culturels. Comme l'affirme Jacques Fierens, les droits économiques, sociaux et culturels (ci-après : DESC) sont avant tout destinés à donner à chacun les moyens de la liberté. Ce sont les droits qui permettent à l'homme de demander à la collectivité dont il relève la protection de la santé, l'emploi, l'instruction, les éléments d'un niveau de vie décent. Leur noyau dur est constitué par le droit du travail, le droit à la sécurité sociale et à l'aide sociale, et le droit à des conditions d'existence décentes. C'est la raison pour laquelle les DESC sont devenus, aujourd'hui, la préoccupation de la société civile elle-même3(*). Il importe, néanmoins, de souligner que la question de l'exigibilité et de la justiciabilité se pose en lien avec la nature et la portée particulière des droits économiques, sociaux et culturels. Rappelons ici que la justiciabilité d'un droit ne veut pas dire reconnaissance du bien-fondé de toute plainte déposé à ce sujet. Elle indique plutôt la possibilité d'obtenir qu'un organe indépendant et impartial examine une violation alléguée d'un droit. En d'autres termes, elle exige qu'une telle plainte ne soit pas exclue à priori. Le résultat final d'un procès dépend du fond de l'affaire et, le cas échéant, des preuves administrées. Même si l'organe indépendant et impartial déclare une plainte recevable, il peut décider que le plaignant a tort du point de vue soit du droit, soit des faits4(*). Ceux qui affirment que les droits économiques, sociaux et culturels ne sont pas justiciables ont tendance à supposer que le contenu de ces droits et les obligations qu'ils imposent sont toutes très semblables. Or, l'analyse des droits économiques, sociaux et culturels généralement reconnus conduit à penser le contraire ; en effet, les devoirs qu'ils imposent diffèrent, l'Etat devant, notamment : · octroyer certaines libertés ; · assumer des obligations à l'égard de tiers ; · adopter des mesures ou aboutir à un résultat particulier5(*). Pour surmonter, en tout ou partie, cette critique formulée contre les DESC, nous avons exploré une piste, parmi tant d'autres, qui nous a permis de tempérer un tant soit peu le discrédit dans lequel ceux-ci sont classiquement plongés. Il s'agit, en effet, de l'obligation de standstill qui, occupe une place de choix dans la liste des mécanismes pouvant assurer une effectivité des droits sociaux fondamentaux. Apprivoisée avec les droits-créances consacrés par le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et l'article 23 de la constitution belge, l'obligation de standstill serait enfin là pour enrayer la spirale infernale du marché, en interdisant de revenir sur ce qui avait été6(*). Pour les besoin de ce travail, nous définissons l'obligation de standstill, à la suite de Hugues Dumont, comme un principe de droit qui interdit aux Etats, en l'absence de motifs impérieux, de diminuer le plus haut niveau de protection qu'ils ont conféré aux droits fondamentaux depuis le moment où la norme internationale ou constitutionnelle qui les consacre s'impose à eux, chaque fois que ces droits impliquent de leur part des prestations positives7(*). L'on comprend de lors que cette obligation de standstill interdit aux autorités publiques de légiférer à rebours des droits garantis, de diminuer le niveau de protection déjà atteint par les droits fondamentaux considérés. L'objet de la présente étude est l'examen de l'effet de standstill des droits fondamentaux dits de la deuxième génération tel qu'il se dégage de la jurisprudence de cette haute juridiction qu'est la Cour constitutionnelle belge. Mais dès que l'on entame l'examen de cette obligation de standstill, une série de questions se multiplient. Qu'est-ce une obligation de standstill ? Qui en est le débiteur? Qui en est le créancier ? Quelle en est la portée réelle ? Est-elle absolue ou relative ? Quelle est sa nature juridique ? Chacune de ces interrogations, proprement juridiques, va être abordée. Il n'est pas sans intérêt de signaler que nous n'allons pas analyser tous les droits économiques, sociaux et culturels garantis par l'article 23 de la constitution précité, moins encore examiner toute la jurisprudence de la Cour constitutionnelle qui s'y rapporte. Seuls feront l'objet de notre examen le droit à l'aide sociale et le droit à la protection d'un environnement sain, et ce par le truchement deux arrêts de la Cour constitutionnelle. Il convient, dès lors, de faire remarquer que le droit à un environnement sain bien qu'appartenant à la troisième génération de droits, reçoit en droit constitutionnel belge, comme dans certains traités internationaux, une protection identique à ceux de la deuxième génération8(*). Pour mener à bien cette étude, nous allons recourir à la technique juridique ou dogmatique juridique. Celle-ci vise à déterminer le contenu d'une règle à partir de la prise en compte des sources formelles du droit. La technique juridique vise à exposer l'état du droit tel qu'il existe et à en déterminer le contenu. Il s'agit donc d'établir et d'interpréter une règle juridique, non de l'évaluer ou de la critiquer9(*). Cette méthode nous est d'un apport notable dans l'interprétation et la compréhension des textes relatifs aux droits sociaux fondamentaux. Ce travail de fin d'études va s'articuler au tour de deux chapitres. Le premier sera consacré à l'obligation de standstill dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels. A ce propos, dans une première section, nous verrons la notion de l'obligation de standstill (Section Ière) et dans une deuxième section, la nature juridique de cette obligation (Section IIème). Le second chapitre, quant à lui, se focalisera sur la Cour constitutionnelle et l'obligation de standstill déduite de l'article 23, alinéa 3, 2° et 4° de la Constitution belge. Il s'agira du droit à l'aide sociale qui constituera la première section (Section Ière) et du droit à la protection d'un environnement sain qui sera examiné dans la seconde section (Section IIème). * 1 Jacques Fierens, Droit et Pauvreté, Bruylant, Bruxelles, 1992, p.66. * 2 Julia Iliopoulos-Strangas, La protection des droits sociaux fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne : Etude de droit comparé, Bruylant, 2000, préface VII. * 3 Maribel Wolf, Les droits économiques, sociaux et culturels, DESC, exigences de la société civile, Responsabilité de l'Etat, Terre des Hommes France, Karthala, 2003, p.36. * 4 Christian Courtis, « Les tribunaux et l'application des droits économiques, sociaux et culturels », Commission internationale de juristes, Genève, 2008, p.10. * 5 Christian Courtis, « Les tribunaux et l'application des droits économiques, sociaux et culturels », op.cit., p.10-11. * 6 Isabelle Hachez, Le principe de standstill dans le droit des droits fondamentaux : une irréversibilité relative, Athènes, Bruxelles, Bruylant, 2008, p.3. * 7 Isabelle Hachez, Le principe de standstill dans le droit des droits fondamentaux : une irréversibilité relative, op.cit., p. IX. * 8 La Constitution Belge, article 23, Texte coordonné du 17 février 1994. * 9 Olivier Corten, Méthodologie du droit international public, Editions de l'Université de Bruxelles, 2009, p. 23. |
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