La poursuite des crimes internationaux devant les juridictions militaires congolaises: analyse des garanties procédurales( Télécharger le fichier original )par Jean Paul MUSHAGALUSA RWABASHI Université catholique de Bukavu - Licence en droit 2011 |
§4. La place accordée au statut de Rome : question de son applicabilité.La place accordée au statut de Rome dans les poursuites des crimes internationaux en R .D.C. se fonde sur son régime moniste tel que le montre la jurisprudence en ce domaine. En effet, la R.D.C. en tant qu'Etat moniste n'exige aucune loi de transposition pour qu'un traité acquière la qualité de norme juridique dans son arsenal juridique.71(*) C'est ainsi que la constitution du 18 février 2006 établit la primauté des traités internationaux sur les lois nationales en disposant à son art.215 qu'une fois ratifiés, les traités bénéficient d'une force supérieure à celle de la loi. Ainsi, consciente d'avoir été le drame de nombreuses guerres successives, depuis les années 1994 environ ; la R.D.C. a compris que mettre fin à l'impunité est une racine pivotante sinon un fond baptismal d'un Etat de droit72(*). Cet Etat se fonde sur l'application et le respect des dispositions constitutionnelles et de toutes les lois de la République. Or, le gouvernement congolais et les mouvements rebelles congolais ont toujours reconnu la commission d'actes criminels dont les poursuites ne peuvent jamais donner lieu à l'oubli73(*). Pour assurer la poursuite de ces actes, la RDC ratifia le statut de Rome par un décret-loi n°003/2002 par le biais du Président de la République le 30 mars 2002. L'étude de la jurisprudence fait foi que certains tribunaux militaires congolais, confrontés aux contentieux des crimes internationaux, tels que réglementés par les arts 161-175 du CPM, ont décidé d'appliquer les dispositions du statut de Rome au lieu du code pénal militaire national. Dans leur motivation, les juges ont justifié ce choix soit sur base de l'art. 217 de la constitution, soit sur la clarté du statut de Rome dans la définition des crimes et enfin, soit sur le principe selon lequel, le droit pénal est favorable au prévenu (le CPM retenant la peine de mort alors que le statut de la CPI l'écarte)74(*). Il est important de retenir que pareille décision s'inspire de celle du Tribunal Militaire de Garnison de Mbandaka qui a été la toute première juridiction à suivre cette voie dans un jugement avant dire droit et portant précisément sur cette question dans l'affaire MUTINS de MBANDAKA. Ce raisonnement fut confirmé par la décision sur le fond et même en appel devant la Cour Militaire de l'Equateur75(*). Dans l'affaire SONGO MBOYO, l'applicabilité directe du statut de Rome a de nouveau été prononcée devant le Tribunal précité et confirmée en appel devant la même Cour76(*).A la même période, le TGM de l'Ituri s'engageait sur cette voie dans l'affaire Blaise BONGI. Au vu de cette jurisprudence, nous affirmons que les juges militaires congolais accordent une place importante au statut de Rome. Cependant, les juges devraient également faire bénéficier aux prévenus de ces crimes de tous les doits leur reconnus à l'art 67 du même statut et dans les autres instruments internationaux ratifiés par la RDC. * 71 T.M.G.de l'Ituri, affaire Blaise BONGI, Décision du 24 Mars 2006(régime moniste). * 72 B.KARHWERHWE MULENGA, Les juridictions congolaises et la garantie des droits humais et libertés fondamentales, mémoire, UCB, Droit, 2009-2010, p.24, inédit. * 73 http : //www.mémoireonline.com/06/10/3601/m De-la-garantie-des-droits-fondamentaux-en-R-D-C, cas- de-la-province-du-Sud-Kivu, html, consulté, le 10 Mai 2012 à 11h30'. * 74 Tribunal Militaire de Kipushi, Affaire Gédéon et consorts/RP 0134/047 et 0162/09, question sur la loi applicable publiée par ASF, Recueil des décisions de justice et des notes de plaidoirie en matière des crimes internationaux, décembre 2010, Kinshasa, pp 7-193. * 75 C.M de l'Equateur, affaire Mutins de MBANDAKA, 15/06/2007, RPA, 615/2006. * 76 TM de Mbandaka, affaire Songo Mboyo et vr CM de l'Equateur, affaire Songo Mboyo/07/06/2006, RPA 014/06. |
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