La poursuite des crimes internationaux devant les juridictions militaires congolaises: analyse des garanties procédurales( Télécharger le fichier original )par Jean Paul MUSHAGALUSA RWABASHI Université catholique de Bukavu - Licence en droit 2011 |
§2. Le crime de génocideLa convention de l'ONU du 09 décembre 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide le définit comme étant «l'un quelconque des actes ci-après, commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel : a. Meurtre des membres du groupe, b. Atteinte grave à l'intégrité physique ou mentale des membres du groupe, c. Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d'existence devant entrainer sa destruction physique totale ou partielle, d. Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe, e. Transfert forcé d'enfants d'un groupe à un autre35(*). En tant que crime de droit des gens36(*), le génocide apparait comme une espèce particulière du genre humain que représente le crime contre l'humanité. Il fait partie du droit international coutumier comme l'a rappelé la Cour Internationale de Justice : « la norme interdisant le génocide constituait assurément une norme impérative (jus cogens) »37(*). Comme le crime de guerre, le législateur congolais n'est pas resté indifférent en matière du crime de génocide. La R.D.C. étant partie à la convention de 1948, le législateur, tout en mentionnant le génocide dans la définition des crimes contre l'humanité, en a donné une définition particulière. Par génocide, il faut entendre la destruction totale d'un groupe ethnique, religieux ou politique.38(*) Cette définition critiquable de l'ancien code a été énoncée par l'article 164 du code pénal militaire de 2002.39(*) Le génocide s'apparente donc au crime contre l'humanité sans aucun doute le plus grave. On retrouve en effet dans les mêmes infractions, la même gravité extrême des actes commis, l'atteinte à la vie n'étant qu'une variété parmi d'autres atteintes portées à l'homme, l'intention de l'auteur étant de collaborer à une politique systématique d'anéantissement physique ou morale.40(*) C'est donc des motifs discriminatoires, à ceci prêt que ces motifs sont plus nombreux dans le crime contre l'humanité (raciaux, ethniques, religieux, sociaux, politique, culturels...) que dans le génocide (nationaux, ethniques et religieux seulement).41(*) Ensuite, nous y constatons la même indifférence à la qualité de l'auteur qui peut être un gouvernant, un fonctionnaire ou un particulier42(*). §3. Les crimes contre l'humanitéCe terme apparut premièrement dans le vocabulaire international, bien avant de recouvrir une réelle signification juridique, plus précisément pénale. C'est ainsi que l'on peut relever, l'intervention de Robespierre en faveur de la condamnation à mort du roi Louis XVI en tant que« criminel envers l'humanité», ou celle de ce personnage révolutionnaire français haut en couleur que fut Louise Michel.43(*) Selon le statut du Tribunal militaire de Nuremberg, « les crimes contre l'humanité, c'est-à-dire, l'assassinat, l'extermination, la réduction en esclavage, la déportation et tout autre acte inhumain commis contre toutes les populations civiles, avant ou pendant la guerre, ou bien les persécutions pour les motifs raciaux ou religieux, lorsque ces actes ou persécutions, qu'ils aient été perpétrés, ont été commis à la suite de tout crime rentrant dans la compétence du tribunal ou en liaison avec ce crime».44(*) Dans la foulée, un certain nombre d'instruments internationaux reprirent la production des crimes contre l'humanité notamment les traités signés par les alliés avec l'Italie, Roumanie, Hongrie, Bulgarie, et la Finlande.45(*) La première mention de ces crimes se trouve donc dans la ferme condamnation par la France, le Royaume-Uni et la Russie des massacres d'arméniens dans l'empire Otman.46(*) C'est pourquoi il a été imaginé des tribunaux spéciaux pour juger ces crimes sans localisation géographique précise, depuis la guerre des puissances européennes de l'axe.47(*) C'est ainsi qu'à la demande de l'assemblée générale, l'organisation des Nations Unies, la commission du droit international adopta les principes de Nuremberg qui définissent les crimes contre l'humanité en tant que crime de droit international.48(*) Dans le nouveau code pénal militaire congolais, le crime contre l'humanité est défini comme étant des« violations graves du droit international humanitaire commises contre toutes populations civiles avant ou pendant la guerre »49(*), d'où, il résulte une confusion d'avec les crimes de guerre. Ainsi, cette matière n'est plus nouvelle dans l'arsenal juridique congolais car elle est réglementée. * 35 Art.2 de la Convention de 1948, voire également l'Art.6 du Statut de la C.P.I. * 36 A. HUET et alii, Op.cit., p.101, Art.1 de la Convention sur la prévention et la répression du crime de génocide. * 37 Affaire Bosnie-Herzégovine c/Serbie et Monténégro, Application de la convention pour la prévention et la répression du génocide. * 38 Art. 530 Code de justice militaire de 1972. * 39L'article 164 du code pénal militaire corrige pour l'essentiel les lacunes de la définition précédente. * 40 A. HUET, Op.cit., p101. * 41 Ibidem. * 42 Art. 4 de la convention de 1948. * 43 P.CURRAT, Les crimes contre l'humanité dans le statut de la CPI, LGDJ, 2006, p. 33. * 44 Art. 6(c) du statut du tribunal militaire international de Nuremberg. * 45 A.CASSESSE, International, crimil low, Ed. Apedone, Paris, p. 74. * 46 Le 28 Mai 1991, ces gouvernements publièrent une déclaration commune par laquelle ils affirmèrent la responsabilité du gouvernement Otman dans ces massacres. * 47 A.HUET et Alli, Op.cit, p. 98. * 48 L'article 6 du statut du TMIN met le crime contre l'humanité parmi ces crimes punis en tant que crime de droit international. * 49 Art.165 du code pénal militaire. |
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