B. EXAMEN DES FAITS ET DE
LA PROCEDURE
1) Présentation
des faits
Il est poursuivi pour des crimes imputés aux miliciens
sous son commande-ment en 2002, plus d'un milieu de civils ont
été massacrés en 2002 dans le village de NYANKUNDE et de
MUSEZO à une quarantaine de Km de Bunia, des écoles,
hôpitaux et églises ont été incendiés, des
villages ont été pillés et des victimes ont
été violées et réduites en esclavage.
Actes constituant le mouvement insurrectionnel, crime de
guerre par meurtre, par attaque contre les populations civiles, par attaque
contre les biens protégés, par pillage, par attaque contre les
localités non défendues, par viols, traitement inhumain, cruel et
esclavage sexuel.
A. PRETENTIONS DES
PARTIES
La défense du prévenu tend à faire croire
que le prévenu KAKADO BARNABA YONGA TSHOPENA n'avait ni autorité,
ni pouvoir de contrôle sur les combattants du FRPI, en invoquant quelques
témoignages faits par devant la CPI lors de l'audience de confirmation
des charges dans l'affaire le Procureur c/Germain KATANGA et Matthieu NGUDJOLO,
alors que le ministère public lui invoque dans son réquisitoire
cette responsabilité.
B. POSITION DU
PROBLEME
Le tribunal a affirmé sa compétence sur base de
l'art. 246 al1 du CJM, bien que le prévenu soit extérieur
à l'armée en invoquant que les règles de procédure
sont d'ordre public. De même, il a renvoyé comme dans le jugement
précédent à l'art.11, in fine du CJM et à l'art 161
du CPM.
En droit et quant au fond, le tribunal a retenu 8
préventions dans cette cause notamment les crimes de guerre, le crime
contre l'humanité.
Quant aux prétentions des parties, le tribunal
militaire de garnison a dit que les faits pour lesquels le procureur poursuit
les 2 suspects (Germain KATANGA et Matthieu NGUDJOLO) devant la CPI ne sont pas
les mêmes que ceux dont est entrain de répondre devant nous le
prévenu KAKADO.
C.
DISPOSITIF
Vu le statut de Rome instituant la CPI entré en vigueur
le 1 juillet 2002, en ses articles 1, 5, 8, 25, 28 et 77.
Vu la constitution congolaise en ses articles 2 et 150
Vu le décret-loi n° 0013/2002 du 30 mars 2002
autorisant la ratification du statut de Rome PAR la RDC,
Vu les éléments de la procédure et de
preuves de la CPI du 10/04/2002
Vu les conventions de Genève et leurs Protocoles
additionnels
Vu le Code d'OCC
Vu le CJM en ses art 3, 4, 21, 51, 76, 80, 18, 98, 111 in
fine, 12 point 7, 200, 204, 214, 222 et 246.
Vu le CPM en ses art 7, 10, 26, 27, 33, 63, 136-139, 173 et
174
Vu le CCC III en ses art 258 et 260
Vu le décret-loi d'organisation judiciaire
n°04/079 du 21 Août 2004 portant nomination des magistrats
militaires
Disant droit,
Condamne le prévenu comme suit :
- A la peine de servitude pénale à
perpétuité pour crime de guerre par meurtre.
- A la peine de servitude pénale à
perpétuité par attaque contre les personnes civiles
- A la peine de servitude pénale à
perpétuité par attaque contre les biens
- A la peine de servitude pénale à
perpétuité par pillage
- A la peine de servitude pénale à
perpétuité pour attaque contre les localités non
défendues.
- A 20 ans de SPP et une amende de 100.000FC pour crime de
guerre par viol en ce qui concerne la victime Albertine.
- A 20 ans de SPP pour crime de guerre par esclavage sexuel en
ce qui concerne la victime Béatrice.
- Prononce par l'effet conjugué des infractions en
concours matériel et idéal et ce, conformément à
l'art 7 du CPM, la peine de servitude pénale à
perpétuité, unique peine la plus forte.
- Ordonne la restitution des crânes au MP pour
inhumation
- Met les frais d'instance à charge du prévenu
KAKADO de l'ordre de 50.000FC payable à la huitième et à
défaut, il subira trois mois de contrainte par corps (CPC).
F.COMMENTAIRE
L'analyse de cet arrêt révèle que les
garanties procédurales ont du moins été respectées
non pas seulement du côté des victimes mais aussi de
l'accusé. Les parties ont été entendues dans les langues
de leur choix (swahili et lingala) et ce, grâce au service d'un
interprète (droits affirmé par l'art 67 du statut de la CPI, par
la constitution et les lois congolaises de même que le pacte
international relatif au droit civils et politique.
D'autre part, l'on constate que la qualité de ce
jugement est renforcée par la référence faite au statut de
Rome quant à la bonne définition des incriminations et par les
preuves probantes que sont les crânes exhibés.
Ainsi, il y a eu lieu, comme la constitution l'impose
application directe du statut de Rome. Dans leur motivation, les juges sont
allés plus loin en invoquant les décisions de la CPI et des
juridictions nationales pertinentes pour appuyer leur thèse.
Cependant, nous déplorons le fait que dans cette
affaire, les juges ont méconnu le devoir d'instruction
complémentaire après l'extension des poursuites pour crime de
guerre par esclavage sexuel.
D'ailleurs, il est à signaler qu'il s'agit là
d'un point d'échappement, commun à toutes les procédures
conduites en RDC en matière des crimes internationaux.
Une autre faiblesse de cet arrêt est que si KAKADO a
été arrêté en qualité de supérieur
hiérarchique, aucune procédure n'a jamais été
initiée pour les auteurs directes des ces crimes comme ce fut le cas
dans l'affaire Gédéon.
Enfin, le fait que sans motivation, le juge ait rejeté
la responsabilité civile de l'Etat, place les victimes dans une
situation incertaine quant à leur indemnisation.
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