Section 2 : Emergence des institutions de
microfinance
Cette section sur l'émergence des institutions de
microfinance porte sur l'historique et la typologie des institutions de
microfinance, leur intérêt au plan international, leurs
caractéristiques, leur environnement légal et modes de
financement, ainsi que sur l'analyse de secteur des institutions de
microfinance au Sénégal.
Paragraphe 1 : Historique et typologie
A- Historique
L'histoire de la micro finance remonte à plusieurs
décennies, notamment dans les années 1960.
Dans les années antérieures déjà,
dans la moitié du 19e siècle, l'octroi des
crédits subventionnés était effectué la plupart du
temps par des non spécialistes. Ces crédits subventionnés
se caractérisaient en gros par l'importance accordée au
remboursement, à la fixation d'un taux d'intérêt couvrant
le coût de la prestation du crédit et au ciblage de groupes de
clients n'ayant le plus souvent pour seule autre source de crédit que
l'informel.
A partir des années 80 la micro finance a
véritablement commencé à se développer, bien que
les premières expérimentations remontent à une dizaine
d'année plus tôt, au Bangladesh en particulier (Grameen Bank) et
dans quelques autres pays.
Cependant, il est intéressant de noter que de grandes
banques, encore présentes aujourd'hui, telles que Raiffeisen en
Allemagne, les banques populaires, la Rabobank néerlandaise ou le
Crédit Agricole étaient ancrées dans le mouvement
coopératif rural qui avait été lancé par l'Allemand
W.F. Raiffeisen et s'est propagé rapidement dans toute l'Europe de
l'Ouest à la fin du 19e siècle.
En Afrique, les pratiques de la micro finance sont encore plus
anciennes, surtout celles qui relèvent de la collecte et de la petite
épargne. La microfinance à pris de l'ampleur avec
l'émergence des ONG et associations dans les années 80. Les
populations s'organisaient en associations villageoises, tontines, gardes
monnaies ou banques ambulantes. Les pratiques étaient informelles, et
concernaient surtout l'épargne et le crédit.
Au sein du secteur financier, les institutions de micro
finance englobent aujourd'hui une grande variété
d'organisations, diverses par leur taille, leur degré de structuration
et leur statut juridique (ONG, association, mutuelle/coopérative
d'épargne et de crédit, société anonyme, banque,
établissement financier etc.). Elles sont selon les pays, soit
réglementées, soit supervisées par des autorités
monétaires ou d'autres entités, pouvant collecter
l'épargne de leur clientèle et celle du grand public.
En Afrique de l'ouest précisément au
Sénégal les institutions de micro finance sont supervisées
par la BCEAO, les structures ministérielles logées au niveau du
ministère des finances ainsi que par les commissions bancaires de
l'UEMOA.
Le terme d'institution de micro finance (IMF) recouvre
différentes définitions. Certains le comprennent dans un sens
plus strict, d'autres l'utilisent pour parler d'organisations et de
méthodes de travail très différentes.
Au sens large, une institution de micro finance peut
être définie comme une organisation qui offre des services
financiers à des personnes à revenus modestes qui n'ont pas
accès, ou qui ont difficilement accès au secteur financier
formel. L'image que l'on se fait le plus souvent d'une institution de micro
finance est celle d'une ONG « financière », une organisation
totalement et presque exclusivement dédiée à l'offre de
services financiers de proximité visant à assurer l'auto
promotion économique et sociale des populations à faibles
revenus. Pour beaucoup de personnes et pour le grand public en particulier, la
micro finance se confond avec le microcrédit. Elle désigne les
dispositifs permettant d'offrir de très petits crédits
«microcrédit » à des familles très pauvres pour
les aider à conduire des activités productives ou
génératrices de revenus leur permettant ainsi de
développer leurs microentreprises. Avec le temps et le
développement de ce secteur particulier de la finance partout dans le
monde, y compris dans les pays développés, la micro finance s'est
élargie pour inclure désormais une gamme de services plus large
(crédit, épargne, assurance, transfert d'argent etc.) et une
clientèle plus étendue également. Dans ce sens, la micro
finance ne se limite plus aujourd'hui à l'octroi de microcrédit
aux pauvres mais bien à la fourniture d'un ensemble de produits
financiers à tous ceux qui sont exclus du système financier
classique ou formel.
Ainsi, le terme d'institution de micro finance (IMF) est
devenu courant pour designer tous les types d'institution officielles ou semi-
officielles qui proposent des services de micro finance.
Au Sénégal, selon la loi PARMEC , loi
régissant les institutions mutualistes et coopératives
d'épargne et de crédit, sont considérée comme
institution mutualiste ou coopérative d'épargne et de
crédit, un groupement de personnes, doté de la
personnalité morale, sans but lucratif et à capital variable,
fondé sur les principes d'union, de solidarité et d'entraide
mutuelle et ayant principalement pour objet de collecter l'épargne de
ses membres et de leur consentir du crédit. Les IMF sont des
institutions mises en place par un Etat, une organisation non gouvernementale
(ONG) ou des bailleurs de fonds en vue de participer à la promotion et
à la croissance de l'initiative privée.
Ces institutions ont pour rôle d'attribuer des
crédits à court terme à des particuliers (ménages)
ou à des PME. Elles permettent de palier la difficulté
liée à l'accès aux banques qui en général,
sont très formalistes et possèdent des procédures plus ou
moins longues, tout ceci est couronné par une étude de
crédibilité de fond en comble du dossier objet de la demande de
crédit.
Notons cependant que depuis un certain temps, on assiste
à un phénomène qui consiste à monter des
institutions ou des groupements de micro finance destinés uniquement au
financement et au soutien de l'entreprenariat féminin d'où un
élargissement du catalogue des IMF du Sénégal.
B- Typologie
La typologie des institutions de micro finance est définie
suivant leur mode d'intervention et leur forme juridique. Cela permet de
distinguer :
1) Le courant coopératif
Comme l'indique le terme
« coopératif », ce courant a cherché à
mettre en place ou à renforcer des organisations populaires où
les micros entrepreneurs étaient à la fois épargnants et
emprunteurs du système. Sa spécificité est de vouloir
construire des institutions à partir de leurs
bénéficiaires, c'est en cela qu'on y retrouve un
côté coopératif plus affirmé. Il est
nécessaire de devenir membre de ces institutions pour pouvoir
bénéficier de leurs services. Ce principe de
propriété le différencie des autres courants.
Certaines coopératives proposent entre autres
prestations du crédit à leurs membres. De plus, il arrive qu'un
groupe forme une union de crédit, généralement dans le but
de gérer l'épargne et de fournir du crédit à leurs
membres. Les unions de crédit sont à but non lucratif
appartenant et contrôlé par les membres ; elles incitent
toujours leurs membres à ouvrir des comptes d'épargne parce que
c'est leur principale source de capital.
Les unions de crédits dépendent
généralement d'un organe suprême central qui encourage les
caisses primaires de crédit mutuel et qui offre une formation tout en
un.
Ce type de coopérative a été
développé en Allemagne dans la seconde moitié du 19e
siècle et a mené également aux banques
coopératives.
De la sorte, Les banques coopératives fournissent des
micros prêts à leurs membres, mais peuvent aussi proposer des
prêts plus importants et d'autres services financiers ; elles
travaillent généralement depuis leurs bureaux et les membres s'y
rendent pour obtenir des prêts et effectuer leurs
remboursements. Toutefois, certaines d'entre elles envoient leur personnel
directement chez les clients.
Les banques coopératives n'ont pas recours à des
groupes de solidarité. Il faut en général trouver
quelqu'un qui apporte une Co-garantie ; ce dernier doit être membre
de la même banque et partager la responsabilité d'un prêt.
Les banques coopératives sont implantées aussi
bien en zone rurale qu'urbaine.
2) Les sociétés de micro
crédit
Ce sont des sociétés non régies par la
loi qui sont engagées dans des activités de microfinance. Il est
illustré par les banques conventionnelles situées en zone rurale
qui, contrairement aux institutions du premier courant sont des banques
privées à vocation commerciale orientée vers la micro
finance pour des raisons de stratégies propres.
Elles appartiennent à une famille ou à un groupe
de gens ayant investi leur capital dans cette affaire et prêtent à
toute personne vivant dans la communauté qu'elles couvrent. De plus,
elles demandent des cautions. Ce courant a consisté à transformer
une banque existante ou une partie de cette banque de manière à
la spécialiser en direction des micros entrepreneur.
3) Les ONG de développement et autres organismes
intermédiaires de microfinance à but non
lucratif
Le troisième a mis sur pied des organisations non
gouvernementales (ONG) ayant pour vocation de réaliser
elles-mêmes l'intermédiation financière. Elles ont
clairement ouvert la voie au développement de la micro finance ;
Poursuivant des objectifs sociaux, en plus de la micro finance, elles sont
souvent dépendantes des bailleurs de fonds, surtout en ce qui concerne
les plus petites organisations non gouvernementales dont beaucoup ont
été lancées avec l'appui de ces derniers. Leurs structures
de gestion sont inadaptées pour l'assurance de responsabilités
fiduciaires, puisque les membres des conseils d'administration ne
représentent pas, du point de vue des finances, les actionnaires ou les
membres fondateurs.
Ainsi on a vu, la création d'organisations non
gouvernementales de micro financement qui, après s'être
procuré des fonds, soit au travers de donations soit au travers
d'emprunts, octroyaient elles-mêmes des crédits aux
micro-entrepreneurs. Mais, dans ce dernier cas, l'accent a surtout
été mis sur l'octroi de crédit et la collecte de
l'épargne étant généralement interdite aux
organisations non gouvernementales.
La plupart des institutions de micro finance sont issues du
monde des ONG en raison de leur forte orientation en ce qui concerne le
développement.
L'essentiel de leurs programmes et de leurs projets, vise
à soutenir les personnes défavorisées des zones où
elles opèrent.
En tant qu'institutions de micro finance, elles peuvent
fournir les capitaux nécessaires pour améliorer
productivité et autosuffisance des populations pauvres, et changer ainsi
la vie de ces dernières.
Ces ONG se sont donc, transformées en IMF (institution
de micro finance) car elles avaient pour ambition de ne pas se contenter de
fournir une éducation informelle aux plus pauvres, mais aussi celle de
sensibiliser leurs groupes cibles.
Les moyens par lesquels ont été mises en place
des activités de Micro finance sont extrêmement variés et
il n'existe pas de modèle unique qui serait parvenu à s'imposer
comme la référence incontournable. Et comme l'a si bien
signifié Marc LABIE : « En termes
opérationnels, il ne nous semble pas vraiment possible de
privilégier tel ou tel modèle car, dans les faits, il y a des
exemples de succès et d'échecs dans chacun d'entre
eux ».
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