b/ De 2000 à 2010, entre changement et
adaptation
La population d'El Cerezo a augmenté de 4% entre 2000
et 2008. De plus, durant cette période, la population autochtone «
a perdu 713 individus ce qui correspond à une perte de moins 30% pour le
quartier » bien que « 820 personnes nouveaux habitants, espagnoles et
immigrées sont venues s'installer» (TORRES, 2011, p.87) ce qui a
maintenu le solde migratoire positif. La population autochtone qui est partie
l'a fait majoritairement en direction de l'aire métropolitaine pour les
raisons précédemment énoncées.
Graphique 7 : Evolution démographique des
habitants du quartier El Cerezo entre 2004 et 2010
400
900
800
700
600
500
300
200
100
0
0 à 15 ans 15 à 29 ans 30 à 44 ans 45
à 59 ans Plus de 60 ans
Evolution démographique des habitants du
quartier El Cerezo entre 2004 et 2010
2004 2006 2008 2010
Source : élaboration personnelle, Excel, données de
l'INE.
Le graphique ci-dessus nous renseigne sur l'évolution
démographique de la population du quartier El Cerezo entre 2004 et 2010.
Il indique une légère baisse de la population de plus de 60 ans
ainsi qu'une hausse importante de celle ayant entre 30 et 44 ans. Cela montre
également la nouvelle dynamique démographique de ce quartier
revitalisé par des nouveaux arrivants, principalement des
immigrés, dans cet espace où la population autochtone est
vieillissante.
c/ La multiculturalité: une
réalité
Ce concept définit les sociétés
multiculturelles comme étant celles où il y a des situations de
coprésence et d'interactions entre différentes communautés
dans un contexte donné (Lévy et Lussault, 2003). Il
caractérise les situations du "vivre ensemble" dans des
sociétés plurielles. De surcroît, d'après la
chercheuse Cynthia Ghorra-Gobin, une ville multiculturelle désigne un
espace où vivent différents groupes culturels. L'adjectif
"multiculturel" lui sert à « identifier une réalité
pluriethnique ou encore multiethnique » (1999, p.2). Ces termes
correspondent à la définition du quartier El Cerezo ainsi que du
district de la Macarena. Ce concept est un fait qui permet d'identifier et
qualifier un espace en fonction de ses habitants et des transformations
urbaines et sociales auxquelles ils ont contribué : le quartier d'El
Cerezo en est une parfaite illustration.
En effet, dans les villes qui accueillent des migrants et
c'est le cas de Séville, il apparaît primordial de passer du
« savoir vivre au singulier au savoir vivre au pluriel » (CONSTANT,
2000 p.88). Par conséquent, l'espace public multiculturel apparaît
comme un
lieu de construction de l'altérité et de
l'identité de l'individu par des pratiques liées au « vivre
ensemble » (GHORRA-GOBIN, 1994). En politique, ce concept est
utilisé pour parler d'espace où le mélange des cultures
serait positif par souci de tolérance et de respect, il est question ici
de multiculturalisme utilisé essentiellement comme une doctrine.
« La question multiculturelle lorsqu'elle se
décline dans le champ urbain exige de définir les
caractéristiques et les enjeux de ce nouvel espace public »
(GHORRA-GOBIN, 1999, p.2). Car, dans la ville, « l'urbanité est
indissociable d'un devoir d'exposition qui exige des compétences
sociales relatives à la présentation de soi en public et à
la considération de l'autre en tant que personne humaine » (STEBE,
2010 p.109). C'est en cela qu'il apparait important de lutter contre les
discriminations et pour l'amélioration du "vivre ensemble" en donnant
des opportunités aux habitants de se connaître.
Pour finir, la diversité culturelle abordée dans
le « traitement politique, soulève des enjeux importants, notamment
en ce qui concerne la citoyenneté » (DORTIER, 2004, p.575). C'est
pourquoi l'écrivain et journaliste J-F Dortier remet en cause le terme
« citoyen » qui ne prend pas en considération les
spécificités de chacun et qui, toujours selon sa
définition, devrait être protégé par des lois.
D'ailleurs, pour le chercheur Michael Walzer, « la communauté peut
être le lieu d'apprentissage de la citoyenneté » (DORTIER,
2004 p.576). Il est important de prendre en considération ce terme
puisqu'il permet d'intégrer les immigrés dans le pays
d'arrivée (ici l'Espagne) en leur donnant la possibilité de voter
et d'être considérés comme des personnes du territoire dans
lequel ils vivent.
Nous utilisons les termes d'espace multiethnique,
pluriethnique ou encore diversité culturelle pour parler de zones
où se rencontrent différents groupes d'origines
différentes. Celui d'interethnique nous sert à indiquer des
regroupements entre personnes d'origines étrangères. Quant
à la multiculturalité, elle illustre des espaces où se
retrouvent aussi bien des populations autochtones qu'immigrées.
Le concept de multiculturalité nous permet d'introduire
nos prochains chapitres qui parlerons davantage du quartier El Cerezo, de ses
transformations (urbaines et sociales), des associations et bien
évidemment des habitants. Nous verrons aussi les représentations
des habitants et comment se construit le "vivre ensemble" dans les quartiers
multiculturels où se concentrent de nombreux immigrés sujets au
phénomène de ségrégation.
Comme nous venons de le constater, Séville est une
ville où l'immigration a une place importante, aussi bien dans les
politiques publiques que par son impact dans certaines zones de la ville.
L'intérêt que les politiciens de la ville portent à
l'immigration est assez récent puisque l'importance de la
présence de personnes d'origines étrangères date des
années 2000, période durant laquelle se sont créés
divers organismes de défense et de soutien des étrangers tel
l'ODI ou encore SOMAÏ.
Nous pouvons à présent annoncer et valider notre
problématique:
Dans quelle mesure les interactions entre
habitants de quartiers multiculturels peuvent-être
révélatrices de mise à distance des populations
immigrées et quels sont les enjeux des politiques locales et des
initiatives associatives pour fabriquer "du vivre ensemble"?
Pour y répondre, nous tâcherons de comprendre
comment se créé du "vivre ensemble" au sein de ce type d'espace
en utilisant comme exemple le quartier d'El Cerezo et en nous appuyant sur
certains projets associatifs tout en tenant compte du discours des
habitants.
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