Chapitre II : Enjeux et évolution de
l'immigration : le
cas du quartier El Cerezo
Le nombre d'immigrés présents dans El Cerezo en
fait un quartier atypique oül'immigration joue un rôle
majeur. Ce constat peut se lire dans les différents projets et
ouvrages associatifs ainsi que dans les discours politiques,
les événements multiculturels ou encore dans les transformations
urbaines apparues durant l'époque des grandes vagues migratoires
particulièrement depuis les années 2000. "L'arrivée de
population en provenance de pays étrangers durant les dernières
années a participé à l'accélération des
changements sociaux (...) pouvant mener jusqu'au ghetto et aux conflits ou, au
contraire, générer de nouveaux espaces d'interactions et de
richesses socioculturelles" (VECINA MERCHANTE, 2010, p.227). Tous ces
changements affectent les habitants autochtones avec qui les immigrés
partagent les espaces publics. Les projets associatifs essayent de pacifier la
cohabitation dans les espaces multiculturels en évitant qu'il y ait un
cloisonnement immigrés/autochtones. Nous allons tenter de savoir s'ils
facilitent ou non l'intégration des immigrés.
Pour cela nous verrons tout d'abord la participation des
immigrés au sein de la ville de Séville puis nous montrerons
l'importance des acteurs associatifs avant de terminer par
révéler les transformations urbaines induites par les migrations
qui nous amèneront à l'aspect social que nous
développerons dans le chapitre III.
A/ Visibilité des immigrés à
Séville, particulièrement dans le quartier d'El Cerezo
L'importance de l'immigration à Séville, bien
qu'étant relative à côté de certaines villes
espagnoles, peut se lire parmi les différents événements
multiculturels qui ont lieu chaque année. De plus, les immigrés
sont de plus en plus présents dans le discours politique, notamment par
exemple, dans le cadre des élections municipales de mai 2011.
1/ L'investissement des immigrés dans la vie
culturelle de Séville
La multiculturalité est de plus en plus visible au sein de
la ville de Séville. Différents festivals
célébrés tous les ans en sont la vitrine. Constater la
présence d'une diversité
culturelle dans cette agglomération provient de
l'implication d'associations et d'habitants qui mettent en avant des cultures
d'autres pays.
a/ Les associations d'immigrés: nouvelles
dynamiques urbaines
Le centre civique "hogar San Fernando", situé en face
de la faculté de médecine, accueille de nombreuses associations
d'immigrés comme "Asi es mi Peru" qui propose des cours de
danse et musique andine ou celle des Russes à Séville" qui
propose des cours de russe. Ce centre civique est l'un des plus grands de la
ville. Il a été aménagé pour répondre aux
besoins des différentes associations du district. "Le
problème de ce centre est le manque de publicité et
d'informations dans les quartiers, les gens ne savent pas ce qui s'y
passe"(Gabi, équatorien, volontaire ACOGE). Les habitants des
quartiers environnants ne connaîtraient que très peu les
activités qui se déroulent dans ce centre du fait d'un manque de
communication, ce qui ne permettrait pas de maximiser les différents
ateliers proposés. Malgré cela, diverses associations participent
à des festivals qui se déroulent dans la ville.
Rythmée par des festivals multiculturels tout au long
de l'année, la ville de Séville montre ainsi son aspect
pluriethnique. Nous allons en citer quelques uns qui nous permettent de
comprendre comment il est possible pour des immigrés de faire partager
sa culture dans un pays étranger. Ceci revient à lutter contre
les discriminations voire à créer du "vivre ensemble".
Tout d'abord, se déroule la fête des Nations qui
a lieu au début de l'automne dans le parc du Prado de San
Sebastian13 et qui propose des stands de vente d'artisanat et de
nourriture de divers pays du monde ainsi que des spectacles de musiques
ethniques. De plus, en mars et avril 2011, la fête des Nations
(gérée par une fondation du même nom) a organisé le
premier festival solidaire au niveau du pont de Triana en partenariat avec
l'association Terre des Hommes. Le festival solidaire présente, comme le
précédent, différents pays des différents
continents14 aussi bien par la gastronomie que par la musique ou
encore l'artisanat. "Moi je vais chaque année à la fête
des Nations, quand je peux me rendre à des événements j'y
vais mais c'est pas évident avec mon travail. En ce moment il y a le
festival solidaire au niveau du pont de Triana et je ne peux même pas y
aller à cause du travail" (Carlos, Vénézuelien).
13 En 2010 a eu lieu la quinzième
édition de ce festival. Il a changé de zone durant toutes ces
années.
14 28 pays sont représentés dans ces
festivals en fonctions des disponibilités de chacun (ex: Pérou,
Canada, Australie, Maroc, France, Afrique du Sud, etc.)
Par ailleurs, le carnaval péruvien qui se
déroule habituellement en mars15, a pour but de mettre en
avant la culture du Pérou et des pays voisins. Dans ce cadre, des
danseuses équatoriennes ont participé à cet
événement cette année. "Dès qu'il y a une
fête de ma culture, on vient danser avec mon groupe comme au carnaval du
Pérou, durant l'Inti Raymi" (Betty, équatorienne). Ensuite,
l'Inti Raymi, qui est la fête du soleil (ancienne cérémonie
religieuse Inca en l'honneur du soleil qui marque le solstice d'hiver pour les
pays andins), vivement célébré à Cuzco au
Pérou, s'est déroulée en juin 2010 dans le parc Miraflores
au Nord-est de la ville. Cette fête est organisée par
l'association de danse et chant équatoriens "Tungurahua", avec la
participation de l'association humanitaire Acoge16.
D'autre part, chaque année a lieu l'Aïd el-Kebir
qui est une fête musulmane célébrée principalement
au Maghreb où un mouton est sacrifié en l'honneur d'Allah. Elle
se passe en octobre ou novembre selon le calendrier musulman. En 2010, elle fut
organisée dans le quartier el Rocio à côté d'El
Cerezo au niveau de la mosquée : "je vais à la fête du
mouton en novembre, le Aïd el-Kebir" (Zico, marocain). A cette
occasion, la fondation ACCEM a participé à la préparation
et au déroulement de cet événement.
Comme nous pouvons le constater, seul l'Inti Raymi et
l'Aïd el-Kebir se déroulent à proximité du quartier
El Cerezo, ce qui oblige les participants et intéressés à
se déplacer pour se rendre sur les différents lieux de
festivités. Ceci influx sur la création de nouveaux
réseaux, sur les rencontres entre habitants de la ville et donc, ces
déplacements participent à la lutte contre la
ségrégation urbaine. De plus, ces événements
publics rendent visible la multiculturalité de la ville et mettent en
avant les groupes minoritaires. Ce sont des occasions pour découvrir des
cultures différentes, de connaître un peu mieux les
immigrés vivant dans son quartier et une fois de plus, de participer
à améliorer le "vivre ensemble".
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