6.4 Densité du peuplement et qualité de
la régénération naturelle
Plusieurs communautés rurales protègent les
jeunes pousses de karité et les arbres matures lors des
défrichements, mais si la densité des semis et des souches est
assez élevée au début, elle est souvent réduite
lors de l'installation des cultures (VUILLET, 1911). Ainsi, les densités
moyennes des parcs à karité étudiés au Bénin
se répartissent en trois groupes selon le test de TUKEY:
· Parcs à fortes densités : parc de Kandi 31
tiges/ha et parc de Bembéréké 43 tiges/ha
· Parcs à moyennes densités : parc de Parakou
26 tiges/ha et parc de Savè 27 tiges/ha
· Parc à faible densité : parc de Bohicon
15 tiges/ha
La densité augmente avec le gradient
pluviométrique du sud vers le nord, comme c'est le cas de la
répartition en classes de diamètre à hauteur d'homme.
Les parcs à karité étudiés
diffèrent selon la grosseur et la densité (nombre de tiges/ha)
des arbres: Ces variables évoluent avec le gradient
pluviométrique du sud vers le nord du pays.
Comme l'indique les différentes figures sur la
régénération et la densité du peuplement dans le
présent document, les densités obtenues dans les champs et les
jachères sont parfois très élevées. Quatre vingt
dix huit (98) tiges ont été comptées en moyenne par ha
dans les jachères au sein du parc à karité de
Bembéréké contre 25 tiges dans celui de Parakou et 60
tiges pour le parc de Bohicon. Dans les champs cultivés, ces
densités sont plus faibles; ce qui est dû aux espaces
créés pour les cultures. On compte entre 10 tiges/ha à
30tiges/ha.
S'agissant de la régénération naturelle,
elle est importante dans le cercle concentrique de 2m de rayon autour du
semencier, où elle a atteint 140 brins/m2 dans le parc de
Bembéréké par exemple contre seulement 2 brins dans celui
de Bohicon; ce qui traduit bien l'impact des actions anthropiques sur la
régénération.
Dans le cercle concentrique de 4m de rayon du semencier vers
l'extérieur, la régénération est moyenne puis
à 6m elle est quasi nulle. Le coefficient de détermination
R2 entre la densité de régénération et
les distances précitées est égal à 1 dans tous les
parcs à karité étudiés. L'allure de ces courbes
traduit celle de JANZEN (1970).
Discussions 87
Tableau XXI : Meilleurs ajustements de la
répartition des individus par classes
Parcs à karité de :
|
Bohicon
|
Savè
|
Parakou
|
Bembéréké
|
Kandi
|
R2 (%)
|
Variables
|
Meilleurs ajustements
|
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
Log (y)=
|
Log (y)=
|
R2B
|
R2S
|
R2P
|
R2Be
|
R2K
|
hauteur de poitrine
|
7.1429x2 - 52.391x
|
-0.1411x2 + 0.6427x -
|
0.058x2 +0.3036x
|
-0.167x2+0.5802 +
|
-0.2196x2 + 1.3772 +
|
100
|
92
|
99
|
94
|
94
|
|
+104.76
|
0.3024
|
-0.0848
|
3.0041
|
0.6515
|
|
|
|
|
|
Classes de diamètre cime
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
R2B
|
R2S
|
R2P
|
R2Be
|
R2K
|
|
-0.3684x2+1.3947x -
|
0.7057x2+2.9194x
|
-0.61x2+2.55x -
|
-0.5227x2+2.0591x -
|
-0.1792x2+0.9528x -
|
100
|
100
|
100
|
100
|
100
|
|
0.1368
|
+2.1935
|
1.92
|
1.3455
|
0.7358
|
|
|
|
|
|
Classes de hauteur totale
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
R2B
|
R2S
|
R2P
|
R2Be
|
R2K
|
|
7.1429x2 - 52.391x
|
0.7458x2 - 3.058x -
|
-0.61x2 +2.53x
|
-0.5946x2 + 2.4324x -
|
-0.4118x2 + 1.8039x
|
100
|
100
|
100
|
100
|
100
|
|
+104.76
|
2.2881
|
-1.88
|
1.7568
|
+1.3529
|
|
|
|
|
|
Classes de hauteur fût
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
R2B
|
R2S
|
R2P
|
R2Be
|
R2K
|
|
-0.0147x2 -0.25x
|
-0.0169x2 +0.2542x -
|
-0. 43x2 +1.87x -
|
0.26x +0.11
|
-0.2317x2 +1.1098x -
|
100
|
100
|
100
|
100
|
100
|
|
+0.7647
|
0.2542
|
1.4
|
|
.8040
|
|
|
|
|
|
Classes de densité des
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
Y=
|
*
|
R2B
|
R2S
|
R2P
|
R2Be
|
R2K
|
sauvageons
|
0.9x2 -5x +6.9
|
10.7x2 -60x +83.8
|
5.55x2 -31.45x
|
38.871x2 -221.11X +
|
|
100
|
100
|
100
|
100
|
-
|
|
|
|
+44.5
|
314.08
|
|
|
|
|
|
|
|
R2B = R2 Bohicon; R2S =
R2 Savè; R2P = R2 Parakou;
R2Be = R2 Bembéréké; R2K
= R2 Kandi. * La régénération n'exsite pas
La régénération du karité suit donc
le processus d'espacement des semis de JANZEN (1970) et l'hypothèse
émise à ce sujet est bien confirmée.
Dans les formations végétales (champs
cultivés, jachères de 4 à 5 ans et jachères de 10
ans et plus), la densité de la régénération suit la
même tendance que précédemment. Elle est nulle dans le
cercle concentrique de 6m dans toutes les formations et dans l'ensemble des
parcs étudiés. Dans le cercle concentrique de 2m du pied
mère, la régénération est la plus
élevée. La distance moyenne d entre semencier et son plus proche
voisin est également de 2m. Cela veut dire que le recrutement est plus
important à 2m du semencier dans l'ensemble des parcs
étudiés.
La régénération est plus importante dans
les jachères de 10 ans et plus, mais moins importante dans celle de 4
à 5ans et faible dans les champs cultivés.
Ainsi les formations les plus fermées (jachères
de 4 à 5ans) et sujettes aux différentes manipulations (mise en
culture, pâturage, feu de brousse, piétinement des animaux etc.)
compromettent la régénération à moins que l'homme
contribue autrement à l'assurer.
La régénération est fortement compromise
dans les jachères de 4 à 5ans pour deux faits fondamentaux,
toutes choses égales par ailleurs. Il s'agit de:
· L'importante quantité de litière
accumulée au pied des arbres en début de saison sèche et
qui brûle abondamment pendant les feux de brousse,
· La forte végétation graminéenne
qui colonise les parcs de cet âge et qui empêche la survie des
jeunes plants et la forte quantité de chaleur dégagée par
cette végétation pendant le passage des feux.
Ces faits montrent bien que l'étude de la
régénération naturelle du karité, donc de sa
densité dans les différentes formations doit tenir grand compte
non seulement du tempérament de l'espèce, mais également
des variables suivantes:
· Type de végétation
· Existence de jachère ou non
· Age de la jachère
· Ramassage systématique des noix fraîches
(cas de Birni - Lafia par exemple)
· Pratiques anthropiques (travail du sol, culture
permanante)
· Feu de brousse, intensité et actions favorisantes
(présence de fortes végétations graminéennes qui
activent fortement les feux de brousse)
· Pâturage
· Piétinement des animaux
En revenant au tempéramment de l'espèce, on peut
dire que les formations végétales plus ou moins fermées
(espèce fortement héliophile, espèce destructurante) ne
peuvent offrir de meilleures chances de survie à l'espèce car
elles engendrent une faible possibilité de recrutement dans la
régénération.
Seule la jachère de 10 ans et + permet la
régénération statique du karité, si des actions
anthropiques ne viennent pas inhiber le processus naturel.
Selon (OUEDRAOGO et DEVINEAU, 1996), les peuplements de
karité sont largement inféodés à l'utilisation des
sols. La distribution de l'espèce si elle est conditionnée par
des facteurs mésologiques, dépend en effet fortement aussi des
activités humaines. La taille des arbres, leur densité, la
production fruitière et la capacité de
régénération des peuplements varient en fonction de
l'ancienneté et de la permanence de l'utilisation du sol. En zone
soudanienne comme en zone soudano-sahélienne, les parcs de village aux
vieux parcs sans descendance, s'opposent aux parcs des champs de brousse, plus
densément peuplés d'individus plus jeunes. Les premiers
traduisent l'effet d'une longue occupation du sol, les seconds sont
engendrés par l'alternance des cultures et de la jachère. La
culture permanente peut maintenir les arbres préexistants, mais elle
porte préjudice à l'avenir du peuplement en ne permettant pas sa
régénération. La jachère en revanche offre une
protection, favorable aux germinations si les paramètres cités
plus haut n'en constituent pas des freins. Ces résultats confirment bien
les observations faites par OUEDRAOGO et DEVINEAU en 1996 tant à
Watinoma qu'à Bondoukuy au Bukina-Faso ainsi que les
expérimentations sur la germination et la survie des plants de
karité dans les champs et les jachères. L'éclaircie du
peuplement ligneux pratiquée par l'ouverture d'un champ favorisera
ensuite la croissance et la productivité des individus
préservés. La jachère et le champ apparaissent ainsi comme
deux étapes dans la dynamique du parc à karité. Au moment
du défrichement, ne sont préservés que les arbres utiles.
Pour le karité, la productivité de l'arbre ou la qualité
des fruits sont des critères de sélection. Ces caractères
sont très variables dans les peuplements naturels et ne peuvent
s'apprécier que sur les individus relativement âgés.
Actuellement seule la jachère de longue durée en permet le
contrôle pour la constitution du parc.
La jachère apparaît ainsi comme une technique
d'intégration du karité, et d'une façon plus
générale, de l'arbre, dans les champs. La jachère permet
en effet d'intégrer aussi de nombreuses espèces d'arbres utiles
dans les champs autorisant ainsi une certaine exploitation de la
biodiversité forestière.
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