PARAGRAPHE 1ER : LA FAUTE DISCIPLINAIRE
La faute disciplinaire n'a pas fait l'objet de
définition dans les textes législatifs et réglementaires.
Une étude de la jurisprudence administrative permet toutefois de retenir
que la notion de faute est autonome par rapport à la faute pénale
et celle civile.
A : LA NOTION DE FAUTE DISCIPLINAIRE
La notion de faute disciplinaire n'étant pas
définie, on constate qu'il y a faute lorsque l'administration prend des
sanctions généralement la sanction disciplinaire intervient
à la suite d'un manquement à une obligation professionnelle. Pour
savoir s'il y a faute ou non, le juge de l'excès de pouvoir exerce un
contrôle de matérialité des faits. La question qui se pose
est celle de l'existence matérielle des faits reprochés à
la personne qui a été sanctionnée109. Dans une
décision rendue par la Cour Suprême,110 le
requérant avait fait l'objet d'une double poursuite au plan pénal
et au plan disciplinaire. On l'avait accusé d'avoir sollicité et
reçu de l'argent alors qu'il exerçait ses fonctions de gardien de
la paix. Mais le juge pénal a estimé que
l'intéressé n'était pas coupable des faits
109 CS, 23 mars 1963, Amadou Alpha KANE ;
110 CS, 1971, Ismaël FALL
reprochés. A partir de là, le juge de
l'excès de pouvoir en a tiré les conséquences que la
sanction disciplinaire prononcée par l'administration reposait sur des
faits matériellement inexistants111.
Le juge de l'excès de pouvoir exerce, ensuite, un
contrôle sur la qualification juridique des faits en se posant la
question de savoir si les fats sont constitutifs de faute.112 Le
juge a considéré, dans cette affaire, que le fait pour un agent
de la douane d'intervenir en faveur de son frère pris en flagrant
délit de contrebande et arrêté par les douaniers de Dakar
constituait une faute suffisamment grave pour justifier qu'une sanction
disciplinaire soit prise en son encontre. A travers cette décision,
l'autorité qui avait sanctionné le requérant avait
évoqué le motif que le Conseil d'Etat113. La haute
juridiction a, en effet, estimé que le requérant n'avait pas
commis les faits de contrebande qui lui étaient reprochés mais le
simple fait, pour le requérant de voyager sans la permission de son
supérieur hiérarchique était constitutif d'une faute
disciplinaire de nature à justifier une sanction disciplinaire.
Le juge ne peut s'intéresser à
l'appréciation des faits reprochés à l'agent. On lui
reprocherait de s'immiscer dans l'opportunité é des faits. Le
juge peut toutefois s'intéresser au contrôle de
proportionnalité.114 C'est ce qu'a fait le Conseil D'Etat a
fait depuis son arrêt rendu le 26 avril 1995115. Le juge
vérifie l'existence ou non d'une disproportion flagrante ente la
sanction infligée et les faits reprochés au fonctionnaire. Dans
tous les cas, si la sanction est manifestement disproportionnée par
rapport à la faute, le juge annule la décision de
l'administration pour erreur manifeste d'appréciation (EMA).
La faute disciplinaire doit être distinguée de
l'insuffisance professionnelle du fonctionnaire. Il faut également
souligner la nécessité d'un lien entre le service et les faits
reprochés au fonctionnaire. S'il y a des actes qui ont un rapport avec
la vie professionnelle mais qui sont commis en dehors du service, l'agent peut
être sanctionné.
La notion de faute disciplinaire est une notion
autonome.116
B : L'AUTONOMIE DE LA FAUTE DISCIPLINAIRE
En cas de faute disciplinaire, seule la responsabilité
disciplinaire peut être mise en cause. Il n'y aura pas de mise en jeu de
la responsabilité civile du fonctionnaire si aucun préjudice
n'est causé à autrui. La faute disciplinaire est autonome par
rapport à la faute pénale.117 Mais, il peut arriver
qu'un même fait soit constitutif de faute disciplinaire et de faute
pénale. Il peut y avoir une double procédure comme dans
l'arrêt Ousmane SY (5 mars 1969). Il convient, cependant, de
préciser que lorsque les mêmes faits entrainent deux poursuites,
il n'y a pas forcément l'existence de deux fautes.
111 C'est le contrôle de la matérialité des
faits.
112 CS, 5 mars 1969, Ousmane SY
113 CS, 29 avril 1998, Salif FALL
114 CE, 1978, Lebon
115 Cheick Tidiane MBENGUE
116 CE, 1998, Mlle Vignand- L'action pénale demeure
séparée de l'action disciplinaire.
117 Arrêt Mlle Vignand, op. cit.
La faute pénale n'existe que dans les cas
énumérés par le code pénal118. La faut
disciplinaire, n'ayant pas l'objet de définition légale, est plus
large que la faute pénale.
S'il y a deux procédures, c'est- à- dire une
poursuite disciplinaire et pénale, il peut y avoir une interaction.
Mais, il faut retenir donc, dans ce cas, l'autorité administrative n'est
pas liée par l'appréciation du juge pénal sur la
qualification juridique des faits. Cela signifie que le juge pénal peut
estimer qu'il y a une faute et par conséquent de sanction, cela n'oblige
pas l'administration à reconnaître une faute disciplinaire pouvant
entraîner une sanction. L'autorité administrative est, cependant,
liée par l'appréciation du juge pénal sur la
matérialité des faits.119
Si le juge pénal prononce sa décision avant
l'intervention de la décision administrative, l'administration est
obligée de tenir compte de la constatation des faits effectués
par la juridiction pénale. Si le juge pénal rend sa
décision après celle de l'administration, cette dernière
est tenue de reconsidérer sa décision puisqu'elle est liée
par l'existence matérielle des faits constatés par le juge
pénal120. La décision du juge pénal est donc
une décision sui peut influer sur la procédure disciplinaire.
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