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La forme de l'Etat sous la Constitution du 24 juin 1967 dite de la deuxième République

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par Archange Musitu Mabaya
Université de Kinshasa RDC - Graduat en droit publique interne 2009
  

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2. Le système institutionnel de la République Démocratique du Congo

La nouvelle Constitution congolaise se classe aisément et d'ailleurs volontairement parmi les Constitutions que l'on peut qualifier d' « africaines ». L'originalité africaine dans ce domaine réside essentiellement en ce que le chef de l'Etat est le principal organe du pouvoir en fait, dans le cadre formel d'un système présidentiel plus ou moins classique. Partant de cette remarque, nous somme amenés à envisager particulièrement les trois caractéristiques suivantes : un système présidentialiste une Etat unitaire ; une restriction rationalisée des partis politiques.

I. -- Un système présidentialiste.

Un système politique doit pour réussir trouver un appui dans les traditions de la société où il s'applique. Montesquieu lui-même souligne que : « les lois politiques et civiles doivent être tellement propres au peuple pour lequel elles sont faites que c'est un très grand hasard si celles d'une nation peuvent convenir à une autre ». En Afrique, où les divisions ethnico sociales font la loi, dans une société en pleine transformation, l'unité du peuple est considérée comme le premier pas vers le nationalisme. Mais cette unité ne peut se réaliser que sous l'autorité d'un véritable chef jouant le rôle de guide dans le nouvel Etat. A partir de cette observation, on se trouve mieux placé pour expliquer le choix, par la presque totalité des pays africains, du système présidentialiste. Le Congo, après l'expérience malheureuse du passé, a voulu, par la nouvelle Constitution, « s'adapter aux réalités africaines » en se dotant d'un système présidentialiste fondé sur l'autorité prépondérante d'un chef de l'Etat, qui pour mériter ce titre devra prouver ses qualités dans la conquête de cette nouvelle forme de la chefferie (élections universelles et directes) et dans l'exercice effectif d'un pouvoir qui ne saurait être l'objet de discussions. L'exécutif qu'incarne le Président est ainsi la clef de voûte du système44(*). Mais on peut néanmoins distinguer dans ce système les trois fonctions classiques du pouvoir : exécutive, législative et judiciaire.

1. Pouvoir exécutif.

Le pouvoir exécutif est monocéphale appartient totalement au président de la République qui l'exerce avec une autorité dépassant celle qu'auraient ensemble le Président des Etats-Unis et le Président français de la Ve République.

Le Président est élu au suffrage universel direct pour une longue durée de sept ans indéfiniment renouvelable. Il est à la fois le chef de l'Etat et le chef du gouvernement dont les membres sont nommés et révoqués par lui-même. Les ministres sont donc responsables devant le chef de l'Etat seul sans aucune intervention parlementaire45(*). Mis à part le cas de la haute trahison prévu par l'article 34, le

Président de la République, malgré son immense pouvoir, n'est responsable que devant le peuple congolais. Le principe de la séparation des pouvoirs avec son allure plus accentuée dans un régime présidentiel, met l'exécutif à l'abri de tout contrôle direct de la part du législatif. Cependant, au Congo, cette séparation entre les pouvoirs est tempérée au profit du Président de la République, qui dispose de tous les moyens de pression pour imposer sa propre politique au législatif. Dans ce domaine le Président détient, de même que dans l'exécutif français, un pouvoir réglementaire autonome qui s'étend à toutes les matières non comprises dans le domaine limité de la loi. Donc les actes du Président pris dans le cadre du règlement autonome ne doivent se conformer qu'à la Constitution et non pas à la loi (9). L'intervention du Président dans l'activité du législatif est également possible, car, si la notion de séparation des pouvoirs ne lui permet pas de dissoudre le Parlement (d'une chambre unique cette fois-ci) il dispose d'autres moyens pour intervenir aux différentes étapes de la procédure d'élaboration des lois. L'article 45, comme ministres d'Etat, des ministres et des vice -ministres. Les ministres d'Etat et les ministres forment le cabinet et sont les chefs effectifs de leurs départements.

Quant aux vice-ministres ils exercent normalement leurs attributions sous l'autorité des ministres titulaires auxquels ils sont adjoints. L'action du Gouvernement se manifeste dans le cadre suivant :

1. Le Comité interministériel restreint réunit, sous la présidence du chef de l'Etat, les ministres d'Etat afin de préparer le Conseil hebdomadaire des ministres.

2. Le Conseil des ministres se réunit une fois par semaine sous la présidence du Président de la République. Il se compose strictement des membres du cabinet qui englobe les ministres d'Etat et tous les autres ministres.

3. Le Conseil des ministres élargi comprend les membres du- cabinet et tous les membres du Gouvernement y compris les vice-ministres. Il se réunit autour du Président afin d'étudier les problèmes qui se posent. C'est au Président de décider si un problème doit oui ou non être étudié par le Conseil élargi.

4. Les commissions interministérielles : au terme de l'article 19 de ladite ordonnance tout département ministériel doit normalement relever des quatre commissions interministérielles suivantes :

A. La commission politique, judiciaire et administrative.

B. La commission économique et financière.

C. La commission de la planification.

D. La commission sociale.

Le but de la création des commissions interministérielles est surtout de permettre aux membres de ces commissions d'échanger leurs points de vue et de discuter les problèmes de leurs départements respectifs une fois par semaine afin d'harmoniser et de coordonner leurs activités. Chaque commission est normalement dirigée par un ministre d'Etat.

5. Les départements ministériels : dans le cadre de l'exécution du programme du Gouvernement, les ministres d'Etat veillent à la coordination des activités des départements regroupés au sein de leurs commissions et informent le Président de la République du fonctionnement de ces départements.

Quant aux ministres délégués à la présidence du Conseil, ceux-ci assument les fonctions de secrétaires du Gouvernement et sont chargés à ce titre de ras sembler la documentation considérée comme utile à la réunion du Comité inter ministériel restreint ; ils tiennent en outre les comptes-rendus des réunions du Conseil des ministres et se chargent de communiquer avec la presse. L'article 90 de la Constitution de 1964, lui donne le droit d'initiative des lois concurremment avec les membres du Parlement ; il peut, à l'instar du Président des Etats-Unis, refuser la promulgation d'une loi votée par le Parlement en exerçant un droit de veto suspensif (art. 26) qui ne saurait être levé que par un vote contraire obtenu à la majorité des deux tiers des membres composant l'Assemblée.

Quant à l'élaboration de la loi, le Président dispose de deux moyens de pression ; d'une part, en déclarant urgent un projet de loi, il contraint l'Assemblée à l'examiner par priorité (article 50), d'autre part, il peut se passer de l'Assemblée, si celle-ci s'avère peu « gouvernable », en faisant approuver, par la voie du référendum, non seulement un projet de loi ordinaire mais tout un programme de matière législative (art. 28) et même tout un programme de révision de la Constitution elle même (Art. 75). Par ailleurs le Président de la République peut, selon l'article 52, recevoir une délégation de l'Assemblée afin de légiférer, durant un certain temps, par ordonnances lois dans le domaine réservé à la loi selon l'article 46. Enfin, le Président, qui convoque et clôture les sessions extraordinaires de l'Assemblée, doit communiquer au moins une fois par an avec celle-ci par des messages qui y seront lus sans être l'objet d'un débat (article 25). En outre la Constitution réserve encore, selon le modèle (généralement adopté en Afrique) de l'article 16 de la Constitution française de 1958, un pouvoir exorbitant au Président de la République proclamant l'état d'urgence (article 54).

Devant l'étendue de ces pouvoirs du Président dé la République on est amené à s'interroger sur ce que peut être le rôle du Parlement ; ne sera-t-il pas celui d'un simple collaborateur qui se contente d'assurer, du point de vue technique, l'élaboration des lois que le Président propose ou accepte au préalable ?

2. Le pouvoir législatif.

Dans le domaine législatif la Constitution congolaise de 1967 se rapproche encore plus de la pratique de la plupart des Etats d'Afrique francophone ; un parlement monocaméral exerçant un pouvoir dont le domaine est circonscrit. L'article 36 précise que le Parlement est composé d'une chambre unique appelée Assemblée nationale, dont le rôle est de représenter toute la nation et qui -- ajoute l'article 45 -- exerce le pouvoir législatif.

Les députés sont élus au suffrage universel direct pour une durée de cinq ans. Ils se réunissent en session ordinaire deux fois par an, chacune (comme dans la Constitution précédente), d'une durée de trois mois.

Dans le cadre d'une rationalisation du parlementarisme la nouvelle Constitution a innové en ce que le député perd automatiquement son mandat à l'Assemblée nationale s'il cesse d'appartenir à un parti politique.

Il sera dans ce cas remplacé par son suppléant conformément à l'article 39.

L'Assemblée voit son pouvoir législatif circonscrit par l'article 46. Son action sur l'exécutif est bien réduite et ne consiste qu'en un timide contrôle sur le Gouvernement, envisagé par l'article 32 qui prévoit « la question orale ou écrite, l'interpellation, l'audition par les commissions, la commission d'enquête, l'avertissement ou la remontrance ». Mais étant donné que les membres du Gouvernement ne dépendent que du Président et de lui seul, il est à prévoir qu'un tel contrôle n'aura qu'une portée morale, surtout quand on doit tenir compte du fait que le Gouvernement est effectivement dirigé par le Président de la République lui-même. Il nous reste à souligner que, bien que les institutions de la nouvelle Constitution entrent en vigueur à compter du 24 juin 1967, le titre IX de celle-ci prévoit une période transitoire qui s'étendra jusqu'en 1970.

Durant cette période, le Président actuel de la République reste en fonction cumulant encore en sa personne aussi bien le pouvoir exécutif que législatif. Ce dernier est exercé par voie d'ordonnances lois jusqu'à l'élection de la nouvelle Assemblée dont la date sera ultérieurement fixée par le Président lui-même.

3. Le pouvoir judiciaire.

« Le pouvoir judiciaire est indépendant des pouvoirs législatif et exécutif ». « II est dévolu aux cours et tribunaux » (art. 56 de la Constitution). Dans son ensemble la structure judiciaire n'a pas subi de grand changement par rapport à ce qu'elle était dans le régime de 1964. Le système judiciaire reste un système moniste qui ne fait généralement pas de distinction entre les cours judiciaires et les cours administratives.

A. Cour suprême : Au sommet de la hiérarchie du pouvoir judiciaire on trouve la Cour suprême de justice qui comprend deux sections : la section judiciaire et la section administrative. La section judiciaire joue surtout le rôle d'une Cour de cassation d'une part, et est compétente, d'autre part, pour juger éventuellement les membres du Gouvernement lorsque leur responsabilité pénale (prévue dans l'article 35 de la Constitution) est mise en cause. La section administrative est considérée comme première et dernière instance pour les recours en annulation.

La Cour joue en outre le rôle d'une Cour d'appel compétente pour examiner les décisions rendues par les sections administratives des Cours d'appel sur les recours en annulation formés contre les actes réglementaires ou administratifs.

Elle est en troisième lieu compétente pour connaître des recours de pleine juridiction pour réparation du dommage matériel ou moral causé par « les autorités de la République », pourvu que ce domaine ne relève pas de la compétence d'une autre juridiction (art 60).

Enfin, en attendant la formation de la Cour constitutionnelle prévue par le titre VII de la Constitution, la Cour suprême, qui vient d'être installée le 22 novembre 1968, exerce les attributions de la Cour constitutionnelle (dispositions transitoires).

B. La Cour constitutionnelle : La Constitution de 1967, suivant l'exemple des deux régimes précédents, prévoit un organe de contrôle de la constitutionnalité des lois sous forme d'une Cour constitutionnelle. Elle est composée de neuf membres nommés, pour une durée de neuf ans non renouvelable immédiatement, par le Président de la République : un tiers sur sa propre initiative, un deuxième tiers sur proposition de l'Assemblée nationale et le dernier tiers sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature (art. 70).

La Cour constitutionnelle a une large compétence et connaît en particulier des recours suivants :

- Appréciation de la constitutionnalité des lois et des actes législatifs en général ;

- Interprétation de la Constitution, pour trancher les conflits de compétence entre l'exécutif, le législatif et le judiciaire et afin de préciser l'étendue des pouvoirs et des obligations de chacun fixés par la Constitution;

- examen de la régularité des élections présidentielles ou parlementaires ;

- jugement du Président de la République dans les conditions prévues par l'article 34 de la Constitution qui prévoit la responsabilité du Président en cas de « violation intentionnelle de la Constitution » et dans celui de la haute trahison.

Quant aux actes du Président de la République pris en vertu de son pouvoir « réglementaire autonome » ils sont, malgré le silence de la Constitution, susceptibles d'un recours devant la section administrative de la Cour suprême de justice. En outre, comme le fait remarquer M. Marcel Lihau, auteur du mémoire explicatif et Premier président de la Cour suprême de justice46(*), les cours et les tribunaux ordinaires faisant application de l'article 57 alinéa 2 de la Constitution47(*), s'abstiendront d'appliquer ces actes contraires à la loi suprême qu'est la Constitution. Cependant il nous semble que lorsque la section administrative de la Cour suprême de justice, qui est l'organe compétent en matière d'annulation des actes administratifs, se trouve, devant un problème d'interprétation d'un texte constitutionnel, la Cour suprême doit, avant de se prononcer, saisir la Cour constitutionnelle qui est le seul organe compétent en matière d'interprétation de la Constitution. Il faut savoir que ne peuvent saisir, selon l'article 72 de la Constitution, la Cour constitutionnelle en matière d'interprétation, que le Président de la République, le bureau de l'Assemblée nationale ou la Cour suprême de justice.

En matière d'appréciation de la constitutionnalité des actes législatifs le même article 72 précise que la saisine de la Cour constitutionnelle est réservé :

- au Président de la République s'il s'agit d'un recours contre les actes de l'Assemblée nationale ;

- au bureau de l'Assemblée nationale s'il s'agit d'un recours contre les actes du Président de la République ayant valeur de lois ;

- à la Cour suprême de justice pour tous les actes ayant valeur législative.

Donc la personne privée ne peut en aucun cas saisir, d'une manière directe, la Cour constitutionnelle. Cependant l'alinéa 4 de l'article 72 de la Constitution précise que le particulier, en conflit devant le juge, pourrait demander, par voie d'exception, à la Cour suprême de constater le caractère inconstitutionnel de la loi, en introduisant auprès d'elle, un pourvoi en cassation48(*). La Cour suprême a, dans ce cas, le droit d'appréciation. Elle décide, ainsi, de saisir ou non la Cour constitutionnelle.

Enfin, les décisions de la Cour constitutionnelle sont obligatoires « erga omîtes » et ne sont susceptibles d'aucun recours ; elles s'imposent

- Donc à tous les organes de la République (article 73 de la Constitution).

* 44 « II est nécessaire, disait le Général de Gaulle, que l'Etat ait une tête, c'est-à-dire un chef, en qui la nation puisse voir au-dessus des fluctuations, l'homme en charge de l'essentiel et le garant de ses destinées... », Mémoires de

Guerre, t. III, 1959, p. 240.

* 45 L'article 4 de l'ordonnance n° 69/70 du 5 mars 1969, précise que le

Gouvernement est présidé par le Président de la République et est composé des

* 46 Etudes Congolaises, n° 3, 1968, p. 35.

* 47 « Les Cours et les tribunaux », dit l'ai. 2 de l'article 57 de la Constitution, « n'appliquent les actes des autorités administratives que pour autant qu'ils soient conformes aux lois ».

* 48 Mémoire explicatif article 72.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand