1.2. Situation et évolutions historiques du Jardin
des Plantes et de la Nature dans ce contexte réglementaire
Logé au coeur du quartier OUENLINDA II, à l'est
du quartier administratif entre le siège de l'Assemblée
Nationale10 du Bénin et le centre hospitalier
départemental de l'Ouémé et du Plateau. Ce jardin qui se
trouve à l'entrée de la ville de Porto-Novo, capitale du
Bénin, se situe au sud-est du pays à une dizaine de
kilomètres au nord de l'Océan Atlantique.
Le Bénin est un pays de l'Afrique de l'Ouest qui couvre
une superficie de 114.763 km2. Il s'étend sur 670 km, du
fleuve Niger au nord à la côte atlantique au sud. Le Bénin
de nos jours, compte près de 9 millions d'habitants. Il a comme voisins
le Togo à l'Ouest, le Nigeria à l'Est, le Niger et le Burkina
Faso au Nord. Le Bénin est divisé en douze
départements11, constitués de deux grandes aires
géographiques : le nord frontalier avec le Niger et le Burkina
Faso12, le centre et le sud marqués par une même
histoire, celle du Golfe de Guinée13. Selon les informations
sur les ressources forestières nationales et la couverture
forestière collectées en 2000 , le Bénin a une couverture
végétale modérée d'environ 42% avec une couverture
forestière de 2.650.000 ha. Il enregistre les plus forts taux de
forêts au monde avec une perte annuelle de 70.000 ha. L'Organisation des
Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture - FAO - en 1999
évalue la couverture forestière totale du Bénin en 1995
à 4.625.000 ha soit 41,8% de la superficie totale du pays. Le pays vient
ainsi en deuxième position après le Libéria dans le
classement des pays de l'Afrique de l'Ouest humide. Pour la même
année de 1995, les forêts naturelles occupent une superficie de
4.611.000 ha.
Ayant accédé à l'indépendance le
1er Août 1960 sous la dénomination de République du
Dahomey, devenue République du Bénin depuis 1975, le Bénin
a connu une riche évolution historique. « Au début du XVIIe
siècle, trois frères se disputent le royaume d'Allada qui a
prospéré, comme la toute proche royauté de Savi (ville de
Ouidah), grâce à la traite des esclaves. Alors que l'un des
princes héritiers s'empare d'Allada, Tê-Agbanlin [prince d'Adja
Tado migré d'Allada] part au sud-est fonder Hogbonou (baptisé
Porto-Novo par les Portugais [et respectivement Ajashè, Xogbonou par les
Yoruba et Goun]), sur la côte orientale de Ouidah, tandis que
Dô-Aklin crée au nord Abomey, qui deviendra le coeur du futur
Royaume de Dahomey. Les trois souverains font serment d'allégeance au
grand royaume yoruba
10 Ancien palais des gouverneurs.
11 Alibori, Atacora, Atlantique, Borgou, Collines, Donga, Couffo,
Littoral, Mono, Ouémé, Plateau et Zou
12 Un ensemble comprenant les groupes lingustiques, bariba,
baatombu, dendi, djema, groussi, haoussa, mossi, paragourma, peulh et
fulbé.
13 Un groupe comprenant les groupes linguistiques, fon, adja,
ewé, gen, mina et yoruba.
d'Oyo, à l'est. »
Ainsi riches de la mixité de leurs peuples venus de
tout horizon, les villes côtières et satellites du Bénin
telles que Porto-Novo, Cotonou, Ouidah et Abomey connaîtront à
travers leurs sites un métissage historique multiple et varié
pendant plus de trois siècles. Entre histoire de la traite des esclaves,
histoire coloniale et histoire des résistances, se trouve en bonne place
aussi, la palpitante histoire des forêts sacrées et jardins
coloniaux. Dans la plupart des espaces occupés par les fortifications
coloniales (Français, Anglais, Portugais, Hollandais, Danois)
était conçue une petite structure de gestion administrative des
jardins coloniaux. Ainsi la côte d'or de l'Afrique de l'ouest en a
été une parfaite illustration avec les jardins coloniaux d'Axim ;
Dixcove ; Sekondi-takoradi ; El-mina ; Cape-Coast au Ghana, ainsi que les
jardins de Bingerville en Côte-d'Ivoire et jardins des forts
européens de Ouidah au Bénin; y figure également le jardin
d'essai de Porto-Novo. En effet le jardin d'essai de Porto-Novo, aujourd'hui
Jardin des Plantes et de la Nature, (JPN) fut une ancienne forêt
sacrée du royaume.
En Afrique notamment au Bénin, l'on ne peut concevoir
un royaume sans forêts ni temples sacrés à cause de la
dimension spirituelle du pouvoir. Avant l'occupation française, la
forêt sacrée de Porto-Novo fût administrée par le
"Migan". Ce dernier a reçu son autorité d'administration en
qualité de justicier et chef de cultes du roi de Hogbonou. Sous
l'autorité du Migan, cet important espace de culte vodoun et de
communication spirituelle entre les "aziza" génies de la forêt et
les hommes n'était pénétré que par les personnes
initiées ou recevant autorisation. La consultation du Fá (art
divinatoire) qui tenait une place importante dans les décisions du
pouvoir royal dans la cité, se faisait périodiquement dans cette
forêt sacrée. L'hysope, arbre liturgique et de purification,
l'Iroko, arbre vénéré, le kolatier, arbre de libation :
autant d'espèces végétales dont les forces et vertus
spirituelles sont utilisées dans cet espace protégé et
craint. Mais la domination coloniale et l'occupation de cette forêt
sacrée par l'administration coloniale va transformer la vision locale de
fréquentation de cet espace.
Devenu en juillet 1896 jardin d'essai, la forêt
sacrée va changer de fonction pour devenir un jardin d'acclimatation. A
ce titre, des essences végétales à valeurs
esthétique, d'ornementation (florale) et économique tels que le
cacaoyer, le caféier, le muscadier, l'anacardier, le laurier sauce, le
camphrier et bien d'autres espèces à valeur médicinale et
d'exploitation forestières sont testés. L'évolution de ce
jardin et son rayonnement dans l'Afrique Occidentale Française en a fait
un creuset de formation pédagogique en agriculture pour les
élèves issus de toutes parts de la sous-région Africaine.
La rigueur de gestion des lieux observée par le Gouverneur et son
équipe a permis aussi l'enrichissement et la conservation de cet espace
jusqu'à l'indépendance nationale du Bénin en 1960.
Après les indépendances, la disparition soudaine des structures
de gestion et la réorientation du pôle d'activité national
sur Cotonou, la ville économique, le jardin d'essai de Porto-Novo cesse
d'être l'ombre de son passé glorieux pour se réduire
à une pépinière d'essences à fort potentiel
économique. Il s'en est suivi un vrai appauvrissement de l'espace qui
désormais est passé dans le giron de gestion publique avec un
État alors instable du fait de ses nombreux coups d'État.
Une décennie plus tard, c'est à dire vers les
années 1970, on assistera à une baisse qualitative et
quantitative de la biodiversité de l'espace, accentuée par la
régression de l'équipe technique commise par les pouvoirs publics
à l'entretien du site. Cette régression des espaces verts s'est
faite en faveur de la colonisation des bâtiments administratifs. Avec le
renouveau démocratique en 1990, et pour mettre un terme à cette
régression croissante de l'espace, le service des parcs et jardins
initia un projet de sauvetage, financé par la coopération
technique allemande (GTZ). Ledit projet, baptisé jardin botanique, a
pour objectif de repeupler et de réorganiser le jardin, afin de lui
redonner une fonction scientifique axée sur les champs de recherches
universitaires. Ce premier travail qui a permis d'inventorier et de signaliser
de façon taxonomique les espèces ligneuses, n'a malheureusement
pas été durable. Plusieurs contraintes et impondérables
comme celle d'une vision à long terme ou une planification insuffisante
entre les ressources (humaine compétente et professionnelle,
matérielle, financière, naturelle) ont conduit ce projet à
terme. Face au grand chaos qui se réinstallait et dont les
conséquences fâcheuses se faisaient de plus en plus visibles avec
la perte drastique des espèces et le prélèvement abusif
des organes végétatifs, l'École du Patrimoine Africain
alors PREMA (prévention dans les musées africains) lança
un nouveau projet de restauration de cet espace jardin botanique sous
l'appellation Jardin des Plantes et de la Nature.
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