1.4.4- La chefferie à Koutougou
Il faut dire que les personnes âgées
bénéficient dans notre zone d'étude comme il est souvent
le cas dans les sociétés africaines, d'un respect dû
à leur âge. Ce sont les sources de référence dans
presque tous les domaines de la vie (CHAUVEAU J-P. & RICHARD J., 1983). Ce
sont eux qui décident s'il faut accorder ou non l'hospitalité
à un étranger.
Ils sont également les garants des us et coutumes et
dépositaires des secrets des anciens. Le plus vieux du clan est le
maître des cérémonies, le gardien de la « boîte
médicale » de la famille. Il préside les réunions des
sages.
C'est aussi le critère qui détermine le choix du
chef. Certes ce choix se fait dans la famille royale mais le trône
revient de droit au plus âgé des enfants de chef défunt.
D'ailleurs, un regard rétrospectif sur l'histoire de la royauté
dans ce milieu montre même que le premier occupant du milieu qui est
Owa M'poh n'a jamais été chef. Bien au
contraire, cette tâche a été remplie par un certain
Ottoura, un vieux qui a dû suivre l'élan de
dispersion des Temberma. Installé comme tous ses frères à
Tapountè, il fut choisi comme chef à cause de son âge
avancé.
A sa mort, la régence fut assurée par
M'boukpagou qui lui habitait Koutamagou jusqu'à ce que,
démobilisé de l'armée française, N'tcha
Alfa, descendant du premier chef revint reprendre le trône. Il
régna entre 1957 et 1978 puis mourut. Son premier fils Alfa
Oubati qui vivait jusque là dans l'ouest des Plateaux regagna
la terre familiale et fut fait chef le 14 mai 1979. C'est donc lui qui dirige
le canton de Koutougou jusqu'à nos jours.
Mais outre le chef canton, tous les villages ont un chef qui
doit obéissance et respect au chef canton. Dans l'ensemble, il faut
préciser que l'autorité du chef dans cette société
est encore vivante. Il est de ce fait l'organisateur de la vie de tout le
canton et y représente le pouvoir central. Cependant la plupart des
décisions se prennent en conseil des sages qui réunit tous les
chefs de villages ainsi que les délégués du Comité
Villageois de Développement (CVD). Quelle est la hauteur de
participation de la femme aux prises de décisions dans cette
organisation ?
1.4.5- La femme dans la société Temberma
Quoique dominant en effectif, la femme Temberma est
réduite à jouer les rôles de la ménagère.
C'est elle qui s'occupe de l'éducation des enfants, de la cuisine et
surtout de la cueillette des produits des champs.
Comme tel, elle n'est informée des grandes
décisions même la concernant que pour les exécuter. A son
mariage qui intervient après les cérémonies d'initiation
qui ont lieu autour de 14 ans, elle devient la propriété de son
mari qui s'est acquitté d'une dot de deux boeufs et d'autres objets. En
cas de veuvage, elle regagne le toit d'un des beaux frères qui doit
prendre soin des enfants pour assurer au frère disparu la
postérité de son nom.
Dans l'ensemble, même de nos jours, personne ne semble
s'inquiéter de son sort ; surtout pas les hommes qui trouvent d'ailleurs
qu'elle n'a rien d'autre à faire que de s'occuper de la maison. C'est ce
qui justifie le fort taux de déperdition scolaire au niveau des filles.
En effet, sur les 19 filles inscrites au début de l'année
scolaire 2004-2005, seule 09 ont pu passer les examens de fin d'année
soit une déperdition de 52,6%. On verra par ailleurs que dans le
mode d'accès à la terre, aucun de nos
enquêtés n'a affirmé pouvoir léguer des terres
à une femme. Même s'ils affirment à 97,4% que cette
dernière peut disposer de parcelle d'exploitation, le mode d'acquisition
diffère. Elle peut se voir offrir un lopin de terre par son époux
(93,1% le disent). Mais attention, elle ne peut pas tout mettre en valeur.
Certes, d'autres pensent qu'elle peut tout cultiver (2,6%) mais la plupart
(97,4%) affirment qu'elle ne doit y mettre que des vivriers et surtout des
oléagineux contre 1,8% qui toléreraient la culture du coton par
une femme.
A quoi s'en tenir au terme de la présentation et de
l'analyse des réalités physiques et humaines du terroir de
KOUTOUGOU ?
Au total, le terroir de Koutougou, terroir du versant sud de
la chaîne de l'Atakora abrite environ 2000 Temberma dont
l'évolution en nombre est une des plus lente de la région
(0,18%/an) et qui profitent de la diversité des facteurs physiques pour
mener une vie paisible. Il ne fait plus l'ombre d'aucun doute que la richesse
des sols, le climat tropical sec, le réseau hydrographique lâche
et la végétation de forêt sèche (BRUNEL J-F.1981)
sont autant d'atouts qui ont exercé un attrait sur ce groupe qui a
décidé de quitter son site primaire de Nadoba (versant nord de la
même montagne) pour aller à la recherche du gibier. Ce qui
néanmoins reste encore non expliqué, c'est la façon dont
ce peuple gère ses terres de nos jours de même que l'usage qu'il
en fait. Quels sont donc les liens qui unissent les Temberma de KOUTOUGOU
à leurs terres et comment les aménagent-ils pour en faire en
dernière analyse une unité géographique distincte des
autres ? Quelles activités mènent-ils et quels sont les outils
qu'ils utilisent ? Comment s'organisent-ils entre eux pour créer les
moyens de subsistance qui sont les leurs ? Enfin, quelles sont les structures
agraires en vigueur dans le milieu ?
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