6.3 Bilan des conclusions et propositions
Nous présentons avant tout une synthèse des
résultats issus des analyses réalisées au niveau global du
PNUD concernant l'application pratique de la gestion des connaissances et des
perceptions de participants sur l'enquête menée au Bureau du
PNUD-Angola. Nous formulons ensuite pour chaque cas des suggestions sous forme
de propositions.
6.3.1 Synthèse au niveau global du PNUD
Il ressort de nos analyses que les réseaux de pratique
et de connaissances qui font office de communautés de pratique sont
institutionnalisés, internes à l'organisation et
auto-organisés par la hiérarchie.
Ce sont des communautés pratiques thématiques
par opposition aux communautés d'innovation /progrès et aux
communautés de pratiques projet ; car, elles ressemblent des membres
intéressés ou travaillant dans les mêmes thèmes
d'intervention ou dans des mêmes pratiques. Elles sont également
stratégiques parce qu'elles ont des buts bien définis et leurs
leaders charismatiques : experts, champions, chefs et responsables des
pratiques.
Ceux-ci ne sont pas choisis par les membres des réseaux
mais désignés par la hiérarchie.
Nous avons également observé que chaque
réseau a son site Intranet avec son propre contenu et son propre
système de régulation. Il rassemble ses membres autour d'un
intérêt et d'un thème communs qui dérivent parfois
vers des sousthèmes. Les membres partagent des ressources communes
(savoirs, expériences, documents) et utilisent des outils communs pour
soutenir la démarche d'une résolution des problèmes.
Tous les réseaux répondent aux critères
énoncés par Etienne Wenger (1998) : engagement mutuel, entreprise
commune et répertoire partagé.
Dans le même ordre d'idées, nous avons
observé dans l'organisation des communautés de pratique du PNUD,
différents niveaux de compétence et un mouvement qui va de la
périphérie vers le centre lesquels traduisent la progression d'un
statut de membre de la communauté (novice) à un expert. Cela nous
a rappelé la perception de Nicolas Michinov (2000) dans la revue des
écrits. Bien plus, les réseaux de pratique et de connaissances
fournissent au PNUD une structure pour la mise en oeuvre de processus
collaboratifs et sont des supports opérationnels au travail collaboratif
et au partage des connaissances. En contribuant au fonctionnement de
l'organisation, ils entrent dans les processus classiques de management
étant donné qu'ils bénéficient de l'allocation des
ressources financières de l'organisation pour leur fonctionnement.
Cependant, si de manière générale, ces
réseaux apportent une plus-value importante au développement
d'une culture de partage des connaissances dans l'organisation, ils
s'apparentent en bonne partie à des communautés
hiérarchiques du fait qu'ils sont constitués et organisés
par une instance hiérarchique qui a fixé les objectifs et les
règles de fonctionnement. D'où, ils sont particulièrement
exposés à un retour de la hiérarchie lié à
une volonté de contrôle de la part des dirigeants laquelle est
incompatible à la nature des communautés de pratique. Ce qui
risque d'affecter le climat et la qualité des échanges et de la
collaboration.
Nous avons vu dans la revue des écrits que parmi les
ressources internes destinées à assurer le fonctionnement d'une
communauté de pratique, il y a un facilitateur, un gestionnaire de la
documentation, d'experts thématiques, etc. Les communautés de
pratique sont constituées au PNUD d'une équipe composée
d'un coordinateur global, d'un conseiller à la mise en application des
pratiques, des champions, des chefs et responsables des pratiques, des
animateurs de réseaux des pratiques et des connaissances.
Mais par ignorance ou méconnaissance, les
autorités du PNUD se passent de gestionnaires de la documentation.
Les activités documentaires sont assumées
non pas par des professionnels de l'information mais par des
responsables de pratique et les animateurs des réseaux.
Ce qui nous paraît une grande lacune qui risque à
la longue de rendre difficile le travail de capitalisation de l'information, de
la conservation et de l'archivage des résolutions
expérimentées ; bref, de la gestion de la documentation.
A ce titre, les participants de l'atelier sur la planification
stratégique de la gestion des connaissances dans les Bureaux de pays du
PNUD organisé à Lomé au Togo du 23 au 26 septembre 2003
par le Centre de Contact SousRégional (SURF) d'Afrique de l'Ouest
avaient tiré la sonnette d'alarme en stigmatisant cette triste situation
tout en reconnaissant que la documentation est l'un des maillons faibles du
PNUD. Selon eux, la fonction de documentaliste n'y est pas bien connue. Ils ont
fait état également du manque de personnel qualifié dans
ce domaine. Ce constat nous pousse à avancer que la réforme de
ses structures organisationnelles n'a pas pris en compte le secteur de la
documentation pour mettre celui-ci au centre des préoccupations du PNUD
au moment ce dernier s'était engagé à devenir une
organisation intelligente. La conséquence est telle que la fonction
Information-documentation est reléguée à l'arrière
zone et n'y est pas bien considérée et valorisée. Le titre
de bibliothécaire ou documentaliste a été d'ailleurs
classifié comme une fonction subalterne de services
généraux (Librarian technician) dans la nomenclature des emplois
utilisés au PNUD contrairement au Secrétariat
Général des Nations Unies ou aux autres agences
spécialisées comme l'UNESCO ou le FAO où il est une
fonction de commandement et de responsabilités.
Propositions
Les nouvelles technologies de l'information et de la
communication (NTIC) ont transformé la société de
l'information dans laquelle nous évoluons. Dans ce contexte, le
métier de documentaliste s'adapte et évolue dans ce nouvel
environnement et comporte plus de responsabilités qu'auparavant.
Outre sa formation classique de base sur les techniques
documentaires, le documentaliste actuel a des compétences techniques
spécialisées qui lui permettent à titre d'exemple
l'utilisation des NTIC dans la création, la gestion et le management des
centres de ressources numériques et des portails. Il est aussi rompu aux
méthodes de recherche des informations sur Internet et aux techniques
telles que la numérisation et l'utilisation des outils de Gestion
Electronique des Documents (GED), le Records Management (RM), le Knowledge
Management (KM), la veille informationnelle et l'Intelligence
économique. A ce titre, il joue le rôle clé de relais de
mémoire, de circulation de l'information, de conseiller technique dans
la définition d'une politique documentaire, de partenariat et de
coopération institutionnelle permettant d'isoler l'information utile et
de la transmettre au bon utilisateur et au bon moment.
Eu égard à ce qui précède, il sied
aux autorités du PNUD de modifier leurs façons de penser et de
s'adapter aux évolutions vers le travail collaboratif et le partage des
connaissances en s'affranchissant de quelques freins naturels qui poussent
certains dirigeants à négliger ou à reléguer au
second ou à l'arrière plan le travail des activités
documentaires. A ce titre, elles devraient comprendre que le métier de
documentaliste n'est plus simplement celui de documentaliste retranché
dans un centre de documentation mais surtout celui de gestionnaire
d'information et des connaissances (Information Management Specialist ou
Information Manager) de tous les services ou de toutes les structures de
l'organisation. La configuration d'organisation en réseaux offre pour
ainsi dire au spécialiste de l'information documentaire des positions et
des rôles nouveaux tels que la gestion des bases de connaissances et des
portails documentaires.
Pour ce faire, au regard de la situation actuelle, il est
vivement conseillé en cette période de transition où le
PNUD est en voie de passer d'un rôle d'agence de financement à
celui de fournisseur de services de connaissances en capitalisant ses
expériences et ses expertises sur base de ses activités dans le
monde, de bénéficier de l'expertise et des compétences des
spécialistes de l'information documentaire en valorisant la fonction
information et documentation (Information Manager) au Siège, dans les
Centres de Contacts Sous-régionaux (SURF) et dans tous les Bureaux de
pays (CO), et en définissant une politique de l'information documentaire
conséquente hors du système de gestion intégré
Atlas.
Pour y parvenir, l'autorité hiérarchique du PNUD
pourrait avant tout recruter un consultant international en système de
gestion de l'information documentaire dont la mission serait d'établir
un diagnostic général sur la manière dont sont
menées actuellement les activités documentaires au Siège
et dans les Bureaux des pays en vue de déceler les forces et les
faiblesses. Les résultats de ce diagnostic permettront la
définition d'une politique de l'information documentaire claire et
cohérente en fonction des objectifs que s'est assigné le PNUD.
Il conviendrait par la suite de créer un service au
Siège composé des spécialistes de l'information
documentaire avec à la tête un expert qui jouerait le rôle
de conseiller technique. Ce service serait chargé de la mise en oeuvre
de cette politique documentaire définie au travers de
l'élaboration des directives, des documents, des règles, des
normes et procédures. Ce service se chargerait également de la
détection des compétences et de l'expertise qui existent
déjà dans l'organisation et de chercher à les valoriser en
leur confiant des postes de commandement et de nouvelles
responsabilités.
Dés lors, il serait judicieux que la fonction
Information-Documentation soit totalement intégrée dans les
structures du PNUD au Siège ainsi que dans les Centres de Contact
Sous-régionaux (SURF) et les Bureaux de pays (CO) en promouvant dans
chaque structure la création d'une unité de gestion de
l'information (Information Management Unit) avec du personnel qualifié
de haut niveau à temps plein (Information Management Specialist ou
Information
Manager). Celui-ci prendrait en charge la gestion de la
totalité de l'information interne de sa structure (rapports, documents
techniques, documents de projets, capitalisation, entrepôt de
données, livres de connaissances, bases de meilleures pratiques,
système à base de connaissances, portail documentaires, recherche
de l'information pertinente sur Internet...). Comme on le voit, cette fonction
ayant pour base la documentation est très pointue et exigerait des
responsabilités qui pourraient se situer au niveau de la
catégorie P3.
Il serait avantageux en fin de compte de mener une bonne
politique de recrutement des spécialistes de l'information documentaire
de haut niveau (master et maîtrise) suivant les besoins de
l'organisation. On trouverait parmi ces spécialistes : des
médiathécaires, des cyberthécaires, des recherchistes, des
documentaliste-ingénieurs, des veilleur-documentalistes, des
administrateurs de données, des records manager, des knowledge
manager... qui pourraient donner une nouvelle impulsion aux activités
documentaires dans l'organisation au Siège et dans les Bureaux des pays.
Tous pourraient occuper des postes de commandement classés aux
catégories d'administrateur selon les fonctions qu'ils pourraient
assumer.
Parmi ces experts, certains veilleur-documentalistes
pourraient être affectés aux réseaux de pratiques et de
connaissances pour travailler en collaboration avec les responsables des
pratiques et les animateurs des réseaux dont les fonctions nous
paraissent surchargées. Ces veilleur-documentalistes auraient pour
principales tâches la création et l'animation des cellules de
veille informationnelle et la gestion de la base des connaissances de chaque
réseau. Parmi les produits documentaires qu'ils pourraient
réaliser, il y a surtout des dossiers documentaires sur des « best
practices ».
Il est aussi vivement conseillé à
l'autorité hiérarchique du PNUD de promouvoir la création
au niveau mondial d'une bibliothèque virtuelle en matière de
développement humain que l'on pourrait nommer « Centre
d'information pour le développement humain ». Celui-ci pourrait
contenir outre toutes les publications du Siège et des Bureaux des pays,
tous les documents sur différents supports
intéressant ses domaines d'intervention. Cette
bibliothèque virtuelle serait accessible gratuitement au public et
pourrait être une grande contribution du PNUD au monde sur les questions
liées au développement humain. L'entrée pourrait se situer
directement sur la page d'accueil de son site Internet. Les compétences
et l'expertise d'un spécialiste d'information documentaire
s'avéreraient primordiales pour parvenir au bon résultat.
Nous pensons aussi qu'il serait de bon aloi de
compléter les espaces de travail des réseaux des pratiques et des
connaissances par un moteur de recherche et d'adopter les trois langues de
travail du PNUD comme c'est le cas du site Internet afin d'élargir le
champ de membres qui comprennent peu l'anglais et dont l'adhésion aux
réseaux, basée sur le volontariat, constitue ce handicap.
Etant donné que le PNUD se veut une organisation
intelligente, il serait également souhaitable de lier les réseaux
des pratiques et des connaissances aux centres de documentation qui existent et
qui sont bien organisés.
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