Chapitre II :
L'EMERGENCE DE L'INDIVIDU EN DROIT INTERNATIONAL
La doctrine dite « volontariste » était
dominante, autant chez les spécialistes du droit international que chez
les profanes. Le public s'était en effet habitué à
comprendre le monde des Etats comme un monde radicalement séparé
du monde des hommes 65. Tout, dans la vie internationale, semblait
matérialiser cette idée de séparation : les titres,
l'apparat, le protocole, jusqu'aux lieux des réunions internationales,
espaces déterritorialisés, placés en gravitation autour du
monde réel, qui de surcroit, est doté d'une règlementation
et d'une « police » propres.
Le monde des Etats était un monde supra humain : une
sorte d'olympe où les humains n'étaient tolérés que
comme simples spectateurs, au mieux à titre consultatif66.
Lieu de délibération politique, l'assemblée internationale
était réservée aux titulaires de la
souveraineté.
Les individus ne disposant pas de cette qualité
n'existaient de « jure » et de « facto » qu'à
travers l'Etat dont ils possédaient la nationalité, lorsqu'ils en
possédaient une. Le droit de citoyen de l'Etat de pratiquer à la
délibération disparaissait dès lors qu'il
pénétrait dans le saint des saints du temple
interétatique.
C'est cette vision qui, symboliquement, semble s'être
écroulée lorsque le défilé
hétéroclite de la « société civile »
s'est pressé aux portes du sommet de l'O.M.C.à Seattle, en vue
d'empêcher la tenue d'une réunion considérée comme
illégitime parce qu'exclusivement interétatique. Soudain, le
monde des Etats s'est vu assiégé par des individus qui
contestaient aux Etats la qualité exclusive de sujets du doit
international.
A ce titre, il est question de passer en revue les
particularités attachées à l'émergence de
l'individu en D.I(Section1) qui mettent en mal la sacralité
étatique sur la scène internationale, en précisant ainsi
ses domaines d'émergence(Section2) qui reconnaissent à coup
sûr cette évolution de l'individu sur la vie internationale en
tant qu'acteur dudit droit.
31
Section I : LES PARTICULARITES DE L'EMERGENCE DE L'INDIVIDU
EN D.I
L'analyse de cette section sera basée d'une part, au
statut juridique international de l'individu (§1) et d'autre part,
l'action que peut mener l'individu en droit international (§2).
§ 1. Le statut juridique international de
l'individu
Pris comme sujet « émergent » du droit
international, l'individu requiert ce statut au travers les textes juridiques
internationalement adoptés par les Etats. C'est à la suite d'un
des éléments déterminants, la Shoa qui a montré la
nécessité d'envisager un nouvel ordre international qui tiendrait
compte d'une intervention directe dans la souveraineté des Etats.
La charte de l'ONU pose le principe du respect des droits de
l'homme dans son préambule .L'article 1 et 55 de la charte
reflètent cet objectif ; il y a une connexion entre le respect des
droits de l'homme (condition d'un nouvel ordre pacifique) et le maintient de la
paix. La charte est l'acte solennel des droits de l'homme dans le
système international. Les Etats doivent développer et encourager
ce respect, la charte ne garantit pas le respect, elle établit un but
à atteindre ; elle ne dit pas ce que sont les droits de l'homme.
La déclaration universelle des droits de l'homme de
1948 est un document essentiel pour déterminer ces droits de l'homme. La
déclaration de l'Assemblée générale de l'ONU donne
sa contribution au but de la charte, mais c'est une simple recommandation et
elle ne transforme pas le programme en obligation. Elle l'identifie mieux, elle
parle de « but idéal », de « s'efforcer ». Elle
indique les chemins à suivre ; cette déclaration a servi de
modèle à nombre de constitutions nationales, ce n'est pas une
convention, elle n'est donc pas applicable à qui que ce soit (personne
ne l'a ratifiée). Elle est à l'origine d'un mouvement
conventionnel, c'est une source d'inspiration du droit international
général. Il y a des conventions (instruments contraignants),
documents déclaratifs, des résolutions... Différents
organes travaillent sur la base de l'article55 de la charte.
L'individu, sujet émergent du droit international se
voit attributif de la qualité de l'acteur internationalement par la voie
de la charte internationale des droits
32
de l'homme et par voie de conséquence, de la
volonté des Etats comme ce fut le cas pour les organisations
internationales.
Cette possibilité accorde à l'individu la
capacité d'agir internationalement tant activement que passivement.
|