TROISIEME PARTIE : PROPOSITIONS DE REFORMES POUR UNE
RELANCE ECONOMIQUE POST-CRISE OPTIMALE EN COTE D'IVOIRE
Confrontés à une liste de réformes
nécessaires, les décideurs ont été couramment
tentés soit de résoudre tous les problèmes
simultanément, soit d'engager des réformes qui en
réalité ne sont pas indispensables au potentiel de croissance de
leur pays. Le plus souvent, les réformes se sont contrariées
à terme : la réforme conduite dans un secteur créant des
distorsions imprévues dans un autre (HRV, 2006). Face à la
difficulté politique d'engager des réformes globales et, souvent,
l'incapacité de ces réformes de stimuler la croissance,
l'approche innovante du diagnostic de croissance a été
proposée pour offrir un nouveau cadre de la réforme
économique axée sur les entraves majeures à la croissance
et nettement plus subordonnée au climat économique du pays
considéré.
La troisième partie de cette étude s'appuie donc
sur les résultats pertinents du diagnostic de croissance de
l'économie ivoirienne pour proposer les réformes prioritaires
à mener en vue de lever les principaux obstacles à
l'investissement privé et l'entreprenariat en Côte
d'Ivoire20. En leur adjoignant des mesures d'accompagnent
ciblées, ces réformes devraient impulser à
l'économie nationale une nouvelle dynamique de croissance au sortir de
la crise.
I. REFORMES EN VUE DE L'AMELIORATION DE L'APPROPRIATION
PRIVEE I.1. Remédier aux défaillances des politiques
publiques
I.1.1. Assainir le cadre macroéconomique et
garantir sa stabilité
L'assainissement et la maîtrise du cadre
macroéconomique sont, nul doute, la première des réformes
pour réinstaurer un environnement des affaires porteur en Côte
d'Ivoire, dans lequel toute entreprise privée à capitaux
nationaux ou étrangers peut prospérer sans craintes ni faveurs.
Pour cela, les autorités gouvernementales sont appelées à
:
- poursuivre l'assainissement des finances publiques, dans le
respect des conditionnalités du programme économique et financier
accompagnant l'admission au point de décision de l'initiative PPTE, afin
d'atteindre dans les meilleurs délais le point d'achèvement ;
- assurer l'efficacité de l'aide internationale qui
connaîtra forcément une affluence vers le pays pour le financement
des projets dans le cadre de la reconstruction ;
- continuer à contenir durablement l'inflation à
moins de 3%, conformément à la norme en vigueur dans l'UEMOA ;
- enrayer toutes les spirales inflationnistes d'origine non
monétaire par l'instauration de mécanismes de surveillance des
prix des biens et services sur les marchés, assortie de compte rendus
périodiques au Gouvernement ;
20 Voir l'arbre à solutions en Annexe 18.
- définir clairement une politique d'endettement public
soutenable, en parachevant la création du Comité National de la
Dette Publique (CNDP) et en le rendant opérationnel sans délai,
afin de s'approprier le règlement n° 09/2007/CM/UEMOA du 4 juillet
2007 portant cadre de référence de la politique d'endettement
public et de gestion de la dette publique dans les Etats membres de l'UEMOA
;
- définir une politique transparente
d'exonération fiscale sectorielle ou globale, selon le cas, pour tenir
compte du poids de la crise sur le secteur privé et redonner confiance
aux investisseurs afin de contribuer au retour des capitaux et des entreprises
délocalisées, notamment dans les zones CNO. Ainsi,
l'administration fiscale devra rechercher des voies et moyens pour
élargir l'assiette fiscale afin d'améliorer les mesures
d'incitation à l'investissement.
Toutes ces mesures requièrent un préalable sans
équivoque qui est celui de l'instauration de la paix et la
stabilité sociopolitique en Côte d'Ivoire, car pour les
entreprises les conflits et les tensions sociales de toute nature accroissent
les coûts et l'incertitude, et freinent les opportunités
d'investissements tant nationaux qu'étrangers. La persistance de la
crise ivoirienne, à l'instar de beaucoup de conflits armés du
monde entier, s'oppose en premier lieu au développement du secteur
privé national parce que conduisant à la tragique destruction du
capital humain, à la mauvaise allocation des ressources publiques rares,
à la dévastation des terres, à la destruction massive du
capital naturel et physique, à l'accaparement d'une partie significative
des ressources naturelles et financières du pays ainsi qu'à
l'élimination de l'accès à divers marchés.
Dès lors, les conditions d'un redressement du cadre
macroéconomique national exigent du Gouvernement de restaurer dans les
meilleurs délais l'autorité de l'Etat sur l'ensemble du
territoire national et de prévenir l'éclatement de nouveaux
conflits en promouvant la cohésion sociale et en encourageant la gestion
participative, dans une volonté affichée de réconciliation
nationale au sortir de la crise. L'assainissement du cadre
macroéconomique doit aller de pair avec la quête de la bonne
gouvernance économique et politique par la suppression, à tout le
moins la réduction significative, des hauts risques
microéconomiques pesant sur l'appropriation privée et qui ont
détérioré les rendements de l'activité
économique en Côte d'Ivoire ces dernières années.
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