DEUXIEME PARTIE : CONTRAINTES ET OPPORTUNITES DU
SECTEUR PRIVE EN COTE D'IVOIRE
Dans cette deuxième partie de l'étude, il
s'agira d'une part de repérer en utilisant l'approche du diagnostic de
croissance les principales contraintes qui pèsent sur le secteur
privé en Côte d'Ivoire, et d'autre part d'explorer les
opportunités offertes au monde des affaires par l'économie
ivoirienne dans la perspective de relance économique post-crise.
I. CONTRAINTES A L'INVESTISSEMENT PRIVE ET A
L'ENTREPRENARIAT EN COTE D'IVOIRE : LES EVIDENCES DU DIAGNOSTIC DE
CROISSANCE
Le diagnostic de croissance repose sur un modèle de
croissance simple selon lequel la fonction générale de production
dépend de plusieurs facteurs pouvant être contraints : capital
financier, capital humain, institutions, géographie, infrastructures,
diversification productive (auto-découverte), etc. Cette approche a
été formalisée dans un modèle complet
développé par Ricardo HAUSMANN, Dani RODRIK et Andrés
VELASCO (HRV) en 2005. Elle s'inspire des principes de base de la croissance :
incitations du secteur privé pour investir, adoption de nouvelles
technologies et recherche de nouveaux produits.
Les facteurs exogènes tels que les changements
technologiques (théories de la croissance exogène) ne sont pas
les déterminants de la croissance à long terme, selon cette
approche. Le modèle du diagnostic de croissance est plutôt
endogène, c'est-à-dire faisant l'hypothèse que
l'accumulation du capital par le secteur privé est le facteur qui
détermine in fine la croissance, tout en montrant que les
externalités négatives peuvent influer fortement en contraignant
les décisions d'investissement, les niveaux de productivité, de
connaissance et d'innovation. Les facteurs sont supposés
complémentaires et avoir tous une influence déterminante sur la
croissance. La difficulté réside dans l'identification des
facteurs offrant le taux de rentabilité marginale le plus
élevé - ce qui montre qu'ils sont effectivement des
contraintes majeures - ou qui impactent fortement la croissance et que
toute politique les affectant pourra avoir de fortes implications positives sur
la croissance économique11.
Dans la pratique, le diagnostic de croissance suit une
procédure discriminante matérialisée par un arbre
décisionnel (arbre à problèmes) afin d'évaluer tous
les goulets d'étranglement potentiels qui empêchent le
décollage de la croissance. Cette procédure définit
en premier lieu un ensemble de contraintes majeures
potentielles associées à tous les facteurs de production
possibles, mais regroupées en trois catégories :
(i) les contraintes de financement (faible
niveau d'épargne nationale, faible intermédiation sur les
marchés financiers nationaux, accès limité aux
financements extérieurs ou insuffisance des investissements directs
étrangers) ;
(ii) la faiblesse du taux de rendement social des
facteurs de production (facteurs géographiques
défavorables ou investissements insuffisants dans les facteurs
complémentaires comme le capital humain et les infrastructures) ;
11 Banque Mondiale, Rapport No. 32948-MOR,
Mémorandum économique pays du Royaume du Maroc, Mars 2006 (page
15).
(iii) et la faiblesse de la capacité
d'appropriation privée (hauts risques macroéconomiques
et microéconomiques, fiscalité inefficace, droits de
propriété et application des contrats défaillants,
très peu ou pas d'innovations de produits ou absence
d'auto-découverte, externalités importantes).
En second lieu, la procédure analyse
chaque contrainte majeure potentielle identifiée afin de s'interroger
sur sa validité. Ce qui suppose un examen détaillé des
possibilités en suivant l'arbre décisionnel. Le fait de descendre
les branches de l'arbre permet de supprimer de manière
séquentielle les contraintes les moins importantes jusqu'à ce
qu'il ne reste que quelques choix possibles qui retiendront notre plus grande
attention dans le cadre de la définition des axes stratégiques de
la réforme économique à engager (Graphique 5).
Graphique 5: Diagnostic de croissance de
l'économie ivoirienne - Arbre à problèmes
ProloL~vvte cevl.traL
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Niveaux bas de l'investissement privé et de
l'entreprenariat en Côte d'Ivoire
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Coût de financement
élevé
Faibles rendements de l'activité
économique
Déficiences des politiques
publiques
Faibles rendements sociaux des facteurs de
production
Mauvais contexte de financement interne
Déficiences des marchés
Faible capacité d'appropriation
privée
Mauvais contexte de financement
international
Faible épargne intérieure
Géographie défavorable
Capital humain faible ou inadéquat
Infrastructures déficientes
Faible compétitivité
Risques macro :
Instabilité sociopolitique Instabilité
financière
Instabilité budgétaire
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Risques micro :
Faible respect du droit, Impunité Corruption,
Criminalité, Fraude Contrebande, Informalité
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Externalités d'information
Absence de diversification productive ou d'innovations «
Absence d'auto-découverte »
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Défaut de coordination
Insuffisante intermédiation
Rationnement de crédit sur le marché
financier
Constitue une contrainte majeure à la croissance Ne
constitue pas une contrainte à la croissance
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