La critique existentialiste du rationalisme chez Sàśren Kierkegaard( Télécharger le fichier original )par Eric MBOCK ABOUBAKAR Grand Séminaire Saint Augustin de Maroua - Mémoire fin de cycle de philosophie 2008 |
III.1.2.4. Le rôle mal cerné de la raison et de l'abstractionAyant en éveil la vieille thèse conceptualiste selon laquelle nos concepts n'ont aucune valeur réelle parce qu'ils sont abstraits et n'expriment jamais adéquatement la réalité, les existentialistes n'ont jamais voulu accorder la moindre valeur aux concepts et à l'abstraction. Or les concepts ont toujours leur fondement dans les choses et ce en raison de leur nature abstraite. Les concepts ne sont pas des pures constructions de l'esprit ; ils ne sont pas formés a priori ; ils sont tirés des expériences que leurs présentent les individus, les existants. De là nous pouvons voir que la question des concepts et de leurs valeurs dans le quotidien n'a pas su être étudiée par les existentialistes. Car les concepts, loin d'être le fruit de notre imagination, représentent certains caractères du réel ; ce que les hommes ont de commun entre eux : leur essence. En ces êtres concrets que sont Médard, Olivier, Cyrille, il existe réellement des traits fondamentaux commun qui font qu'ils soient précisément des choses ; l'esprit les abstrait et c'est avec eux qu'il compose le concept d'homme. Cela va de même quant à la valeur de la raison. La raison ne fait qu'appliquer le principe premier, et spécialement le principe de raison suffisante110(*) pour expliquer les faits. Or à ce sujet, l'existentialisme tient une position idéaliste. On pourrait même être tenté de croire que l'existentialisme implique le réalisme ; mais pas du tout. Et cela en ce sens que l'existentialisme refuse de reconnaître la valeur ontologique de la raison et des principes sur lesquels elle se fonde, parce que l'individu existant est contingent. De même, abstraire ne saurait être une activité qui pourrait nuire à la reconnaissance de la valeur de l'existant car faire abstraction, c'est prendre une partie d'un tout que l'on étudie de façon séparée. Si l'on prend cela comme une partie de l'élément, il n'y a pas d'erreur possible. Mais l'erreur viendrait du fait qu'on veuille prendre la partie pour le tout car comme le dit déjà saint THOMAS la partie n'est pas plus grande que le tout et elle ne peut donner une information totale sur la chose étudiée. D'où l'abstraction étant la base de toutes connaissances, ne peut saisir que les caractères et les manifestations d'un objet donné. III.1.2.5. La subjectivité est la véritéSuite à la déclaration de KIERKEGAARD faisant mention de la valeur de la subjectivité au détriment de l'objectivité, il est juste de reconnaître que ce qui est subjectif n'est pas nécessairement vrai et ce qui est objectif n'est pas nécessairement faux. Ce qui est vrai pour moi peut l'être aussi pour l'autre ; parce que nous participons à la même existence, et nous pouvons avoir la même vision d'une chose. Mais aussi, faudrait-il remarquer que ce qui est vrai pour moi peut être faux pour l'autre et voir même faux dans la réalité ; car nous pouvons tous être dans l'erreur, et la réalité est la seule à être vraie. Et cela, parce que la vérité est l'adéquation de la pensée et de la chose pensée111(*). Il suit donc qu'il y a une vérité objective parce que ce que je dis correspond au réel qui est là ; et que le sujet ne peut pas être le centre de la vérité, le centre, l'infaillibilité. Même si nous venions à admettre que dans sa pensée subjective, KIERKEGAARD voulait parler d'une vérité qui a de la valeur pour moi, il faudrait reconnaître que puisque le sujet étant dans un univers, dans un monde il ne pourrait aller à l'encontre des réalités de ce monde dans lequel il vit et ne doit pour autant pas juger selon ce qu'il ressent, selon son état d'âme du moment, mais selon la vérité des choses. * 110 _ Cf. chapitre I, p. 9. * 111 _ J. et R. MARITAIN, Les degrés du savoir, OEuvres complètes, Vol. IV, Paris, éd. Saint -Paul/Fribourg, éd. Universitaires Fribourg Suisse, 1929-1932, p. 422. |
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