La critique existentialiste du rationalisme chez Sàśren Kierkegaard( Télécharger le fichier original )par Eric MBOCK ABOUBAKAR Grand Séminaire Saint Augustin de Maroua - Mémoire fin de cycle de philosophie 2008 |
II.3. LES SPHERES D'EXISTENCECes sphères traduisent le développement spirituel de KIERKEGAARD. Le philosophe danois le fait suite à sa jeunesse où il a mené une vie de dissipation et de jouissance. En réalité, chaque stade définit un type d'existence d'où l'on ne peut sortir que par un acte d'absolue liberté. Voilà pourquoi sphère est le terme juste. Cette évolution à travers les différents stades de la vie n'est pas la même chez tous les hommes. KIERKEGAARD ne veut pas dire que « tout homme suit la même évolution que lui, encore moins que tout homme parcourt nécessairement les trois stades du seul fait qu'il vieillit. Au contraire, sa thèse est que les stades sont comme des plans qui ne se coupent pas, ou comme des sphères extérieures les unes aux autres »89(*). Ce qui est contraire chez les rationalistes ; car pour eux, toute vérité ou résultat obtenu est applicable à tous les êtres et valable pour chacun. Cela est établi en règle universelle. Chez l'auteur des Miettes philosophiques les sphères sont extérieures les unes aux autres, exclusive l'une de l'autre ; on se situe dans l'une ou dans l'autre par la manière d'exister. C'est pourquoi toute la pensée de KIERKEGAARD pourrait s'organiser autour de cette doctrine donc nous esquisserons quelques traits. II.3.1. La sphère esthétiqueKIERKEGAARD définit l'esthétique chez l'homme comme « ce pourquoi il est immédiatement ce qu'il est, en opposition à l'éthique, qui est ce pourquoi l'homme parvient à être ce qu'il parvient à être »90(*). De là, le développement chez l'esthétique consiste simplement à une transformation de ce qu'il est déjà. La sphère esthétique est une sphère caractérisée par une vie de jouissance et de légèreté. Ceux qui s'y trouvent refusent de s'engager dans une tâche sérieuse. Célibataires, ils vivent dans le présent mais un présent n'ayant aucune grande portée. Ils accueillent tout mais ne choisissent rien. Ils pourraient avoir pour devise : le carpe diem d'Horace. Il faut noter que ceux qui vivent dans ce stade de vie peuvent bien se représenter les deux autres types d'existence, mais s'ils le font, ce sera juste pour jouir de ces vies et non pour y rester. Tel est également le comportement des rationalistes qui parlent de vie de l'être humain et de son existence sans l'intégrer dans leurs modes de vie et dans leurs agirs quotidien. C'est pourquoi l'ayant constaté, VERNEAUX dira à propos que « toute spéculation abstraite et objective appartient à ma sphère esthétique, puisque le spéculant n'opère pas la réduplication, le penseur n'essaie de s'approprier et de vivre la vie qu'il contemple »91(*). Donc pour KIERKEGAARD, l'esthète n'existe pas, il n'est que possible. Cependant puisqu'il y a pas de médiation entre les sphères d'existence, il y a une sorte de préparation possible qui assure le passage d'une sphère à l'autre. Ici c'est l'ironie qui assure le passage de la sphère esthétique à la sphère éthique. L'ironie est l'incognito de l'existence de la morale dans l'existence dissipée. Elle consiste à conduire l'esthète jusqu'au bout du désespoir pour lui permettre de prendre conscience que la jouissance à laquelle il s'est consacré ne peut le satisfaire, mais n'installe en lui que pur dégoût. « L'ironie parait quand on rapporte sans cesse les particularités du monde fini à l'exigence éthique infinie et qu'on laisse éclater la contradiction »92(*). « L'ironie pousse l'homme jusqu'au désespoir pour lui permettre de prendre conscience que la jouissance à laquelle il s'est consacré, ne peut le satisfaire, mais ne lui apporte que du dégoût »93(*).Mais le désespoir qui naît, pense KIERKEGAARD, n'est pas suffisant pour le convertir en une vie meilleure puisque l'esthète peut se complaire dans son désespoir. * 89 _ R. VERNEUAX, Histoire de la philosophie contemporaine, op. cit., p. 30. * 90 _ E. VILANOVA, op. cit., p. 449. * 91 _ R. VERNEUAX, Histoire de la philosophie contemporaine, op. cit., p. 31. * 92 _ P.-H. TISSEAU et JEAN BRUN, op. cit., p. 115. * 93 _ Ibidem, p. 116. |
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