Les déterminants de la structure d'endettement des PME au Tchad( Télécharger le fichier original )par François DECHEBA Ngaoundéré - Master recherche 2010 |
· II- LE ROLE DE L'ENDETTEMENTDepuis Modigliani et Miller (1958 et 1963), le rôle de l'endettement est sujet à caution dans la littérature financière. Il nous faut donc examiner ses effets sur la valeur. Force est de constater que des effets bienfaiteurs et des effets néfastes coexistent. Par ailleurs il conviendra de s'interroger sur la relation de causalité entre les notions d'endettement et de valeur. En d'autres termes l'endettement est-il à l'origine de la valeur ou en est-il la résultante? A- L'endettement source du processus de création ou de destruction de valeur La littérature financière a depuis longtemps cherché à mesurer les vertus de l'endettement sur la valeur. En se plaçant dans un cadre de symétrie informationnelle, Modigliani et Miller ont montré que l'endettement, en l'absence d'imposition, n'agissait pas sur la valeur (1958) mais que cette neutralité disparaissait en présence d'imposition (1963). L'endettement était alors source de création de valeur. A la suite de ces travaux, de nombreux auteurs ont mis en évidence que l'excès d'endettement conduisait à la fragilisation de la firme et augmentait la probabilité de défaillance de la firme, elle-même génératrice de coûts. Nous présentons tour à tour l'influence de l'endettement sur la valeur et son excès comme source de fragilisation de l'entreprise et de faillite. 1- L'endettement source de création de valeur Modigliani et Miller (1958) ont montré que, sur un marché parfait, la valeur d'une firme était indépendante de son taux d'endettement. Les conditions de validité de cette fameuse proposition reposent sur deux notions essentielles : celles de classes de risque et de marchés purs et parfaits. Admettre que les marchés sont purs et parfaits, c'est considérer que les actifs sont parfaitement divisibles, que l'information est sans coût et disponible pour tous les agents et qu'enfin il n'existe ni coût de transaction, ni fiscalité. De plus, les auteurs supposent que les firmes soient réparties en classes de risque à l'intérieur desquelles le taux de rentabilité requis pour chaque société est le même. Le principe de raisonnement est simple et repose sur des idées sur lesquelles il est aisé de s'accorder ou de se séparer. Comme nous cherchons à bien les dégager, nous insisterons sur la logique du raisonnement plutôt que sur la formalisation mathématique. Comme le soulignent les auteurs, ce qui détermine la valeur de la firme, ce sont ses cash flows futurs. Ces derniers sont le fruit d'investissements. Ils dépendent donc des seuls actifs de l'entreprise et non de la façon dont ils sont répartis entre actionnaires et obligataires. Si l'entreprise est non endettée, l'ensemble des cash flows ira aux actionnaires, dans le cas contraire, seule une partie sera versée aux actionnaires après le remboursement des créanciers. C'est donc l'importance du flux des cash flows qui détermine la valeur de la firme. Après avoir montré que la structure financière n'a aucune incidence sur la valeur de l'entreprise, Modigliani et Miller ont publié un article complémentaire en 1963. En partant du même contexte, mais en levant l'hypothèse d'absence d'imposition, ils arrivent à la conclusion que l'avantage fiscal provenant du caractère déductible des intérêts d'emprunt doit conduire les entreprises à s'endetter. L'effet de levier dû à l'endettement ne concerne pas toute l'entreprise mais uniquement les capitaux propres. Lorsque le taux d'endettement augmente, on constate une augmentation de l'espérance de rendement des capitaux propres (ce qui est un avantage) et une augmentation du risque (risque total et risque non diversifiable) des capitaux propres ce qui est un inconvénient. En d'autres termes, lorsque le taux d'endettement augmente, l'espérance du bénéfice par action augmente. La littérature financière retient donc une relation positive entre la dette et la valeur de l'entreprise, en raison de l'avantage fiscal que représente la déductibilité des intérêts. Cette relation n'est vérifiée que si le bénéfice d'exploitation est supérieur aux intérêts d'emprunts, dans le cas contraire l'effet de levier devient un effet massue. En présence du marché financier, la dette apparaît comme une variable d'action indirecte utilisée par les actionnaires pour s'approprier en interne la valeur à travers la discipline qu'elle impose aux dirigeants (Wanda, 2001). Ce pendant, en tant que créance privilégiée, la dette induit un risque additionnel pour la rémunération des créances résiduelles que sont les capitaux propres. L'endettement réduit le bénéfice par action. Ainsi le taux d'imposition et le degré de déductibilité des intérêts de la dette a un impact sur la valeur de la firme.
2-L'excès d'endettement source de fragilisation de l'entreprise et de faillite L'une des principales critiques faites à Modigliani et Miller (1963) est la non prise en compte des coûts de faillite. Si l'endettement peut, comme nous l'avons vu précédemment, être créateur de valeur, son excès est nuisible. D'autres auteurs dont Beaver (2002) ont montré que l'insuffisance de la rentabilité d'exploitation et l'endettement jouaient un rôle considérable dans la défaillance des entreprises. Il convient ici de bien distinguer d'une part la situation de défaillance et de faillite et d'autre part la situation de détresse (ou de difficulté) financière. Cette dernière caractérise une entreprise dont la situation peut faire craindre une faillite prochaine. La difficulté financière pourrait être associée à la notion juridique de faillite mais les auteurs qui se sont intéressés au problème ont montré qu'une telle définition était trop restrictive. La difficulté financière est un processus qui se manifeste par une série de symptômes sans que l'on puisse dégager clairement un sens de causalité. Ainsi, la difficulté financière est souvent associée à la croissance de l'endettement, même si on ne peut déterminer avec précision si ce dernier phénomène en est une cause ou une conséquence. La faillite d'une entreprise n'est autre que la procédure judiciaire qui suit la défaillance, elle entraîne des coûts supplémentaires, ces coûts comprennent des coûts explicites dits directs (frais judiciaires d'administrations judiciaires, de liquidation) et implicites ou indirects (perte de clientèle, perte de confiance des clients ou des fournisseurs). Il faut noter que les coûts directs sont plus coûteux, car ils dépendent de la situation du marché et de dédommagement exigé par la loi et par les entreprises aux employés comme indemnité de licenciement. Selon Malécot (1984)23(*), les coûts de faillite sont loin d'être négligeables. Le coût de faillite a donc un impact négatif, d'où une réduction de la valeur de l'entreprise par rapport au MM. B- L'endettement outil de contrôle Une relation d'agence apparaît dès qu'un particulier ou une entreprise confie toute ou une partie de la gestion de ses propres intérêts à autrui. Cette délégation de pouvoir de gestion est à l'origine de conflit d'intérêt entre les dirigeant et actionnaires. Dès lors, les dirigeants adoptent un comportement qui consiste à rechercher l'intérêt personnel au détriment de celui des actionnaires en recourant aux différentes formes de tricherie. Ce comportement oblige les actionnaires à contrôler les actions des dirigeants. Ce contrôle engage des coûts appelés coûts d'agence. A cet effet, la littérature nous indique qu'un des moyens de limiter ces coûts d'agence est d'augmenter, au sein même de l'entreprise, le niveau d'endettement dans le but de limiter le caractère déviant des dirigeants. L'augmentation de la proportion de dette a donc une double finalité : d'une part, permet aux actionnaires d'obliger les dirigeants à prendre des décisions de gestion permettant de dégager un résultat d'exploitation suffisant que pour rembourser les charges des dettes et, d'autre part, de renforcer le contrôle des banques au sein de l'entreprise. 1- L'endettement outil de contrôle pour les actionnaires L'endettement des entreprises est considéré traditionnellement dans la littérature financière comme un outil de contrôle des dirigeants (Jensen et Meckling, 1976 ; Jensen, 1986). L'obligation de maintenir l'échéancier des remboursements est censée réduire l'autonomie des dirigeants par rapports aux actionnaires (Stulz, 1990)24(*). Les contrats de prêts astreignent les dirigeants à des versements de fonds réguliers aux créanciers indépendamment du niveau d'activité. L'augmentation des rémunérations fixes de facteurs de production, à valeur créée constante et indépendante de la répartition des flux, réduit l'espace discrétionnaire des dirigeants. Jensen (1986) souligne l'importance du financement par dettes pour réduire les flux de liquidités discrétionnaires. L'endettement de l'entreprise peut être vu comme un moyen efficace de résoudre une partie des coûts d'agence des fonds propres puisque celui-ci favorise la convergence des intérêts des actionnaires et du dirigeant. Toutefois, si l'endettement réduit efficacement les coûts d'agence des fonds propres liés aux conflits entre actionnaires et dirigeant, celui-ci en créait d'autres puisque les relations entre actionnaires et créanciers sont également sources de coûts d'agence. 2- L'endettement outil de contrôle pour les banquiers Plusieurs travaux mettent en avant la qualité du contrôle exercé par les banquiers, comparativement au contrôle que peuvent exercer les actionnaires, sur la gestion de leurs débiteurs (Diamond, 198425(*) ; Stulz, 199026(*) et Hoshi et al., 199127(*)). Ainsi les économies d'échelle dans l'accès et le traitement de l'information, qui peuvent résulter de leur spécialisation dans le métier de banquier ou de la nature des incitations induites par la forme des contrats, constituent autant d'arguments pour justifier de l'efficacité du contrôle bancaire. Celui-ci est censé s'exercer dès que les banques anticipent un comportement de l'entreprise remettant en cause l'occurrence du remboursement (soit par les clauses contractuelles, soit par des pressions durant les périodes économiquement difficiles). Le rôle attribué à l'endettement dans la littérature financière trouve un écho dans le financement observé des entreprises françaises (Paquerot et Chapuis, 2006). Au total, les créanciers sont supposés être des contrôleurs de l'activité des dirigeants à la tête des entreprises à condition de respecter une certaine indépendance entre contrôleur et contrôlé. Or, un risque de collusion peut apparaître entre la direction de l'entreprise et ses créanciers, dont le coût serait supporté par les actionnaires. Pour finir, ce chapitre nous a permis d'énumérer les différents modes d'endettement à la portée des PME et de mettre en évidence la place et d'identifier les théories qui ont expliqué le rôle de l'endettement dans le financement de ces dernières. Le chapitre suivant nous permettra d'étudier la relation entre les déterminants des PME et leur niveau d'endettement.
De nos jours toutes les unités de production en l'occurrence les PME ne peuvent vivre en autarcie. Compte tenu de l'insuffisance de ses propres fonds propres pour s'autofinancer, ces dernières sont contraintes de recourir à l'extérieur pour leur financement. L'endettement s'avère un mode de financement incontournable pour la plupart des PME car d'une part, ces entités de production n'ont pas accès aux marchés financiers compte tenu de leur taille, d'autre part, elles ont une aversion aux capitaux propres à cause de leurs couts jugés importants exigés par les investisseurs. Cependant, le niveau d'endettement des PME n'est pas le même voire même inexistant chez certaines car la plupart de ces dernières sont familiales dont les dirigeants ne préfèrent pas l'endettement de peur de perdre le contrôle de leurs entreprises. Néanmoins, l'endettement est fonction des variables qui leur sont propres, des variables relatives à leurs dirigeants et de leur statut familial. De ce qui précède, nous envisageons étudier dans ce chapitre la relation entre les déterminants des PME et leur niveau d'endettement après avoir identifié les difficultés de leur financement et les variables qui leur sont spécifiques et celles relatives à leurs dirigeants. Section I : DIFFICULTES DE FINANCEMENT ET IDENTIFICATION DES DETERMINANTS DE L'ENDETTEMENT DES PME L'évolution a consisté à lever les hypothèses à la base de raisonnement de 1958 de ces auteurs (Modigliani & Miller, (1963); Stiglitz, (1969) ; Miller, (1977)). La levée de ces hypothèses a conduit progressivement à l'élaboration d'une nouvelle approche de la structure financière connue sous le nom de « théorie moderne de la firme » dans laquelle on retrouve la théorie la théorie d'agence (Jensen & Meckling, 1976) ; la théorie de signal (Ross, 1977 ; Leland & Pyle, 1977) ainsi la théorie de la hiérarchie des préférences de financement (Myers & Majluf, 1984). Sur base de ces théories d'endettement émises par la réflexion académique, des auteurs se sont penchés sur la question de savoir quels éléments déterminant le niveau d'endettement des entreprises. C'est ainsi que la communauté scientifique identifie d'une part, quelques déterminants spécifiques importants de la structure financière des entreprises à savoir la taille, l'âge, la rentabilité, la croissance, la profitabilité, la composition de l'actif (niveau de garantie) et, d'autre part, ceux traduisant le caractère familial des PME. En plus de ces variables précitées, nous avons voulu mettre en évidence les autres liées aux dirigeants. Il s'agit de leur participation dans le capital de l'entreprise, leur nombre et leur âge. Nous présentons dans un premier temps (I), les difficultés liées au financement des PME et dans le second (II), nous identifions leurs déterminants. I- DIFFICULTES DE FINANCEMENT DES PME Malgré leur poids dans les économies locales et en dépit de leur rôle moteur en termes de développement économique, les PME ont un accès très limité au marché des financements. Les difficultés d'accès aux financements sont le premier obstacle au développement des PME, assez loin devant les problèmes de corruption, de déficience des infrastructures ou de fiscalité abusive. Les études menées par Lefilleur (2009) estiment que 80 à 90 % des PME connaissent des contraintes de financement importantes. Cette situation se conçoit aisément si l'on considère la forte réticence des banques vis-à-vis des PME qui transparaît clairement dans les critères d'éligibilité et d'accessibilité définis par celles-là. Sous l'influence de leur actionnariat, de leurs méthodes de travail et de leurs règles de gestion, autant que sous l'effet de réglementations de plus en plus contraignantes, les banques sont à l'aise avec des états financiers fiables et validés par des commissaires aux comptes. Elles souhaitent en outre trouver chez leurs clients des structures bien organisées et encadrées, requièrent en permanence des entreprises qu'elles exposent une vision claire et précise de leur avenir et demandent que celles-ci disposent de fonds propres substantiels capables de faire face aux imprévus. Enfin, les banques espèrent toujours appuyer leurs concours sur des garanties solides leur permettant de satisfaire les exigences de leurs autorités de tutelle. Ces nombreuses caractéristiques sont très difficiles à réunir par la clientèle des PME, quels que soient les secteurs d'activité et les pays que l'on considère. D'après Derreumaux (2009), toutes les sociétés privées à capitaux locaux, y compris celles de grande taille, existant déjà de longue date, affichant un chiffre d'affaires régulier et bénéficiant d'une bonne rentabilité, sont dans l'incapacité de présenter l'ensemble des attributs qui leur permettraient de respecter les critères classiquement requis par les banques. Plusieurs facteurs peuvent expliquer la frilosité des banques à l'égard des PME : l'insuffisance de ressources à long terme des banques, l'asymétrie d'information entre entrepreneurs et banquiers, la difficulté de sécurisation des crédits, le manque de garantie suffisante, L'insuffisance de la structuration des entreprises, le risque et l'insuffisance de moyens dédiés aux PME au sein des banques (Lefilleur, 2009). Nous concentrons sur quelques facteurs ayant un effet dissuasif conduisant les banques à surévaluer les risques. A- L'asymétrie d'information, l'insuffisante sécurisation des crédits et le maque de garantie Nous développons dans cette partie le problème d'asymétrie d'information entre le banquier et l'entrepreneur, l'insuffisante sécurisation des crédits et le manque de garantie comme source de rationnement de crédits. 1- L'asymétrie d'information et l'insuffisante sécurisation des crédits Plusieurs éléments, spécifiques au contexte africain, sont à l'origine de l'asymétrie d'information entre entrepreneurs et banquiers (Lefilleur, 2009). Tout d'abord, la majorité des PME évolue dans le secteur informel et n'est donc pas en mesure de communiquer aux banques l'information minimum habituellement requise par ces dernières (coordonnées, documents légaux, états financiers, ...). De plus, pour les PME qui évoluent dans le secteur formel, l'absence de normes comptables ou au contraire le niveau excessif de l'information comptable exigée dans le cas de l'Afrique centrale et de l'Ouest par les normes OHADA ainsi que l'insuffisance de cabinets comptables indépendants, compétents et crédibles ont un impact sur la qualité de l'information financière transmise aux banques (Kaufmann, 200528(*) ; FMI, 200629(*)). Par ailleurs, les entrepreneurs peuvent trouver un intérêt à diffuser une information financière très restreinte, voire erronée, afin d'échapper à la fiscalité. Enfin, il n'existe souvent aucun outil permettant aux banques de connaître les comportements de paiement de leurs nouveaux clients. Les centrales des risques ou centrales des incidents de paiement sont soit inexistantes, soit inopérantes. Dans ce contexte, la communication informelle entre la banque et l'entrepreneur doit permettre de pallier la déficience des canaux classiques de communication. La réputation de l'entrepreneur et sa proximité au banquier sont des éléments au moins aussi importants que la qualité des états financiers transmis à la banque. Dans ce contexte de forte asymétrie d'information, la prise de garantie devrait permettre d'atténuer le risque encouru par la banque. Néanmoins, les sûretés réelles ont en général une très faible valeur de réalisation : les actifs corporels (hors terrains) ont une valeur marchande quasi nulle car l'étroitesse des marchés fait qu'ils trouvent difficilement des acheteurs tandis que les terrains (quand les titres fonciers existent) ou baux (quand ils ont fait l'objet d'un contrat dûment enregistré) ne peuvent être généralement cédés sans l'obtention d'agréments de la part des autorités publiques, ce qui est dans la plupart des cas long et difficile. La présence d'un collatéral apparaît donc souvent comme une condition nécessaire à l'octroi d'un prêt (Africapractice, 2005)30(*), ce qui exclut une majorité d'entrepreneurs ne disposant pas de ressources suffisantes. Dans tous les cas, la complexité et les délais des procédures d'enregistrement des sûretés et des procédures de recouvrement, notamment par rapport aux montants mis en jeu, ainsi que la faiblesse des systèmes judiciaires et l'incertitude sur l'issue des procédures de recouvrement font que la prise de garantie n'apparaît pas être un bon moyen pour atténuer le risque de la banque (FMI, 2006)31(*). 2- le manque de garantie Prêter aux PME est plus souvent fondé sur les garanties que ce n'est le cas pour les grandes entreprises. Pour la plupart des PME, les garanties sont nécessaires pour obtenir un financement bancaire. Dans ce contexte il est nécessaire de définir quel type d'actifs sont acceptés comme garanties du point de vue des banques. La forme la plus courante de garanties est l'immobilier (soit détenu par l'entreprise, soit détenu par l'entrepreneur lui-même). Il peut aussi arriver que les PME affectent aux banques leur épargne (privée/personnelle), en garantie des crédits bancaires accordés à l'entreprise. D'autres actifs, comme les stocks, sont normalement inadéquats en tant que garantie (par exemple à cause de la rétention de la propriété par les fournisseurs et des difficultés pour les réaliser).Toutefois, les PME manquent généralement des garanties suffisantes, et un ralentissement économique peut avoir un effet négatif sur la valeur des garanties. Selon la commission (2003), une étude suédoise à montré que, dans les zones défavorisées, par exemple, une baisse de la valeur des propriétés a pour résultat une plus faible chance d'emprunter de l'argent. La seconde raison de ne pas obtenir un prêt est une faible performance économique des PME. Une faible performance économique peut s'apprécier suivant un critère tel qu'un faible ratio capital propres/total bilan, des gains insuffisants avant les intérêts et impôts, ou des pertes, et des liquidités insuffisantes. Le manque de garanties suffisantes est le principal frein pour les micros et petites entreprises, tandis que de faibles performances et un flux d'informations insuffisant sont les raisons les plus importantes en ce qui concerne les entreprises de taille moyenne. Le prêt fondé sur une garantie devient moins important quand la taille de l'entreprise augmente, tandis qu'augmente l'importance de bonnes performances économiques et d'un flux d'informations convenable. De plus, les contrôles du crédit par les banques sont plus complexes et détaillés quand les montants de crédit concernés sont plus élevés. Les systèmes de garanties sont un des instruments utilisés pour faciliter l'accès des PME au financement. Dans de tels systèmes, des garanties sont données au financeur en échange d'une commission pour couvrir les risques, aussi bien que les coûts administratifs et de traitement. La Commission Européenne identifie deux principaux types de systèmes de garanties, qui montrent certaines similitudes. - Les fonds de garantie des emprunts sont habituellement financés publiquement par des autorités régionales ou nationales. Ils fournissent des garanties soit directement aux PME, soit indirectement en contre-garantissant les engagements de prêt mis en place par des associations de garantie mutuelle. Certains fonds de garantie proposent également des prêts aux PME. - Les associations de garantie mutuelle sont mises en place par des PME, des fédérations professionnelles ou des Chambres de Commerce, parfois en partenariat avec des banques. En se groupant ensemble sous forme coopérative, les associations de garantie mutuelle sont à même de négocier auprès des banques des prêts dans des conditions financières préférentielles, et elles sont aussi souvent capables de fournir des services professionnels d'appui à leurs clients, en tirant partie de leurs connaissances spécialisées et approfondies des secteurs d'activité dans lesquels elles opèrent. Les garanties fonctionnent sur le principe d'un partage du risque entre la banque et l'association de garantie, réduisant ainsi significativement le degré de risque pour la banque. Dans le contexte d'une politique régionale, les systèmes de garantie peuvent jouer un rôle important pour améliorer l'accès aux finances, en créant un secteur privé de levé de fonds et en encourageant le développement des PME. Les systèmes de garantie sont spécialement adéquats pour les très petits prêts aux micro-entreprises incapables d'apporter au prêteur les garanties requises. Dans certains des systèmes, les projets d'investissement doivent passer un contrôle de faisabilité pour bénéficier des garanties. En conséquence, les entreprises doivent délivrer de l'information aux organisations d'appui. Le but du contrôle de faisabilité est que les garanties soient fournies seulement aux projets réalistes et faisables. B- Un manque de structuration, une insuffisance de moyens dédiés aux PME au sein des banques Un manque de structuration des entreprises et une insuffisance de moyens dédiés aux PME au sein des banques sont aussi d'autres facteurs qui limitent l'accès des PME aux crédits bancaires. 1-Un manque de structuration des entreprises Du côté des entreprises, trois aspects constituent une préoccupation prédominante pour les banques (Lefilleur, 2009). La faiblesse généralisée des fonds propres des PME apparaît comme le premier d'entre eux. Cette faiblesse s'explique à la fois par les réticences des promoteurs à rechercher d'autres actionnaires, la rareté des trésoreries disponibles, les sous-évaluations fréquentes des coûts de fonctionnement et d'investissement dans les budgets, ainsi que la sous-estimation du capital nécessaire pour réaliser le chiffre d'affaires envisagé. En conséquence, le poids des emprunts dans les plans de financement apparaît souvent trop important, ce qui d'une part conduit les banques à durcir une position déjà naturellement réservée ou à multiplier les demandes de garanties, et d'autre part, freine les entreprises dans l'atteinte de l'équilibre financier, les faisant ainsi redoubler de fragilité. Le deuxième obstacle important rencontré par les banques est l'insuffisance d'organisation des PME, notamment en ce qui concerne les ressources humaines, la comptabilité, la gestion administrative et les fonctions de contrôle. Le chef d'entreprise, y compris pour des PME de grande taille, est souvent le seul décideur de la société. La formalisation modeste, voire parfois balbutiante, favorise les erreurs, les fraudes et nuit à la régularité des processus, ce qui peut particulièrement pénaliser les entreprises du secteur manufacturier, notamment celles destinées à l'exportation. L'action est trop rarement précédée d'une réflexion qui permettrait de garantir la stabilité des processus de production et de commercialisation. Le contrôle, tant au niveau interne qu'au niveau des auditeurs, est relégué au second plan. Cela empêche la détection rapide des faiblesses de la société, facilite les éventuelles velléités de non transparence de certains promoteurs et amenuise la sérénité des banquiers face aux PME. Enfin, le manque de vision du futur de l'entreprise constitue le troisième principal obstacle. 2- Une insuffisance des moyens dédiés aux PME au sein des banques D'après Lefilleur (2009), il ya également au moins trois insuffisances notables du côté des banques. La première est la faiblesse du suivi des concours mis en place. La fragilité normale des PME en termes d'organisation et de projection dans le futur devrait contraindre les banquiers à surveiller de près le fonctionnement quotidien de l'entreprise, la pertinence de ses investissements et les difficultés qu'elle rencontre. Les PME étant naturellement peu enclines à donner une vraie place de conseiller à leurs banquiers, ceux-ci devraient prendre systématiquement l'initiative. Or, ce rôle demeure mal assumé. La récente intensification des exigences de suivi des principales clientèles traditionnelles (grandes entreprises et particuliers) imposées par les réglementations, le manque de temps face aux nombreux dossiers de PME souvent tous différents les unes des autres ainsi que la faible rentabilité de telles actions d'encadrement par rapport à d'autres activités sont autant de facteurs qui peuvent expliquer l'insuffisance de suivi de la part des banques. Cela peut créer un cercle vicieux dans la mesure où cette insuffisance de suivi est précisément à l'origine de la dégradation de nombreux dossiers, ce qui renforce alors l'aversion des banques aux PME. La deuxième insuffisance des banques, partiellement responsable de la précédente, est la pénurie au sein des équipes bancaires de cadres de référence spécifiques ayant une expérience approfondie de la gestion des dossiers de financement des PME. La diversité des PME, que ce soit en termes de taille, de secteurs, de caractéristiques ou d'appuis requis, est bien sûr à l'origine de cette situation. Elle explique les difficultés rencontrées pour mettre au point des solutions. Les efforts d'amélioration restent cependant insuffisants. Les banques continuent dans la plupart des cas de souffrir d'une pénurie de départements spécialisés sur les PME, d'un manque de procédures bien adaptées à la modestie des informations financières et des quelques indicateurs de suivi disponibles, d'une faible capacité d'innovation en ce qui concerne les garanties acceptables et de l'inexistence de formations spécifiques au financement des PME pour les analystes de crédit et les chargés de clientèle. Ces facteurs sont autant de handicaps pour que les banques accroissent leur intérêt pour les PME. Enfin, la troisième insuffisance des banques est liée à l'environnement institutionnel dont les déficiences pénalisent l'action de ces dernières. En effet, malgré les réels progrès apportés par l'Organisation pour l'Harmonisation du Droit des Affaires en Afrique (OHADA),certaines faiblesses persistantes du cadre juridique(par rapport à la réalisation des garanties par exemple) et les carences graves et généralisées des appareils judiciaires rendent très difficile la récupération des crédits défaillants. Ces difficultés, amenuisent encore l'attrait des concours aux PME et poussent en même temps les banques à durcir leurs conditions. De même, la multiplicité, la complexité et le caractère parfois peu orthodoxe des pressions de l'administration police économique, fisc, sécurité sociale fragilisent encore davantage les PME prêtes à intégrer le secteur formel sous la pression des banques. II- IDENTIFICATION DES DETERMINANTS DES PME Il s'agit pour nous ici de mettre en évidence les variables propres aux PME et à leurs dirigeants ayant un impact sur leur niveau d'endettement. A- Les variables spécifiques des PME Nous étudions ici les facteurs propres aux PME pouvant définir leur aversion ou propension à l'endettement. Ainsi, nous mettrons en évidence quelques variables suivantes. 1- La taille des PME La taille de l'entreprise peut être exprimée en termes de nombre de travailleurs oeuvrant au sein de l'entreprise ou de son chiffre d'affaires. Les conditions d'accès aux sources de financement externes varient selon la taille des entreprises. En effet, les petites entreprises ont une probabilité de défaut plus importante et l'information disponible à leur sujet est sensiblement réduite, stigmatisant les conflits d'intérêt avec les créanciers (Ziane, 2004). Par conséquent, la taille est supposée être un facteur explicatif important dans le comportement d'endettement des firmes. Nombreux sont ceux qui supposent (et prouvent empiriquement) que la taille est l'un des facteurs les plus discriminants quant aux choix financiers des différentes entreprises (Harris & Raviv, 1990)32(*). Plusieurs arguments conduisent à supposer une relation positive entre la taille et l'endettement. Tout d'abord la probabilité de faillite est réduite dans les entreprises de taille importante car la diversification des activités réduit la volatilité des cash-flows et donc la probabilité de faillite (Titman et Wessels, 198833(*) ; Rajan et Zingales, 1995). Par ailleurs, Ferri et Jones (1979) notent que les grandes entreprises ont plus d'accès aux marchés financiers et peuvent emprunter à de meilleures conditions. Finalement, pour les petites entreprises, les conflits d'agence entre actionnaires et obligataires peuvent être plus sévères puisque les dirigeants sont souvent des actionnaires importants et que ces firmes disposent de plus de souplesse dans leur choix d'investissement (Titman, 1988). Ce problème peut être limité en octroyant aux petites entreprises du crédit à court terme. Néanmoins une approche fondée sur les asymétries d'information peut conduire à supposer une relation négative entre la taille et l'endettement. Il se peut, comme le note Rajan et Zingales 1995, que la taille serve de mesure inverse de l'information obtenue par les investisseurs externes. Toutefois, ils n'observent pas que les grandes entreprises émettent plus de titres sensibles aux asymétries d'information. De plus, la relation négative entre la taille et l'endettement reste spécifique à l'Allemagne. Kremp et Stoss (2001) notent également l'importance du financement bancaire pour les entreprises de petites tailles en Allemagne. Les caractéristiques du droit de la faillite et du système de la banque principale (Hausbank) allemand offrent une explication à l'exception allemande qui ne repose pas sur les asymétries d'information avec tous les investisseurs externes. Le cas allemand mis à part, la relation positive entre la taille et l'endettement est confirmée dans un certain nombre d'études (Rajan et Zingales 1995 ; Booth et al., 2001). D'autres études trouvent des relations faibles (Ozkan 2001)34(*) ou non significative (Kremp et Stoss, 2001) entre la taille et l'endettement et hésitent à conclure. 2- L'âge des PME L'âge de l'entreprise indique sa durée de vie depuis sa création. En effet, l'âge permet de renforcer la relation entre la banque et les PME. Une entreprise qui a vécu pendant un temps est supposée avoir accumulé d'expériences pendant son existence et disposait déjà des informations sur sa santé. Ainsi, une entreprise qui a duré peut disposer des documents de synthèse pouvant faciliter leur accès aux crédits. Par contre, les jeunes entreprises ont souvent de difficulté à constituer de dossiers de crédit car ne disposant pas des informations complètes pour fournir leur demande. Ainsi, la durée de vie de l'entreprise est considérée comme représentative du capital informationnel dont peuvent disposer les créanciers (Ziane, 2004). A ce titre, elle influence la disponibilité du capital par le biais d'une réduction de l'incertitude relative aux capacités de remboursement. D'après Dietsch (2003), les PME doivent pouvoir constituer des relations durables avec les banques pour renforcer leur confiance et ainsi faciliter leur accès aux crédits. L'entreprise ayant une durée de vie importante dispose déjà des informations sur son fonctionnement permettant aux institutions financières d'avoir une connaissance parfaite sur sa santé. Dans une telle option, l'âge de l'entreprise devrait être corrélé positivement avec l'endettement, comme peut l'attester Fischer (1989). Selon cet auteur, le sens positif de cet impact s'explique, par l'intensification de la relation de confiance entre l'entreprise et ses créanciers au fil du temps. Cependant, les auteurs comme Bourdieu et Sedillot (1993) ainsi que de Johnson (1997) ont plutôt démontré une relation négative entre l'âge de l'entreprise et son degré d'endettement. Le signe négatif de cette relation peut être expliqué par le fait qu'une entreprise plus âgée a pu réussir à cumuler, au cours de son existence, un montant important de fonds propres via autofinancement et que, par conséquent, elle doit moins recourir à l'endettement. 3- La rentabilité des PME La rentabilité d'une entreprise est entendue comme sa capacité à produire un bénéfice net satisfaisant par rapport au capital engagé. En effet, les avis sont partagés quant à la relation entre la rentabilité et le niveau d'endettement. Pour les auteurs de la POT, les entreprises les plus rentables devraient avoir une aversion à l'endettement (Myers & Majluf, 1984). Toute chose égale par ailleurs, les entreprises les plus rentables ont alors plus de l'autofinancement par conséquent elles ont une aversion à l'endettement. Au contraire, selon les tenants de la théorie de signal, les banques utilisant la rentabilité passée dans l'évaluation du risque des entreprises augmenteront la capacité d'emprunt des firmes les plus profitables (Ross, 1977). 4- La croissance des PME Selon Ziane (2004), la croissance est un élément moteur dans l'activité d'un nombre important des petites entreprises. Toutefois, des différentes significatives apparaissent entre les firmes selon le niveau de croissance constaté (Hutchinson et Ray, 1986)35(*). A nouveau, deux thèses sont en concurrence, d'où l'hypothèse alternative : selon une approche privilégiant les couts de faillite ou d'agence, les possibilités de croissance sont une source de conflits et donc de réduction de niveau d'endettement ; à l'inverse selon une perspective de financement hiérarchie, l'endettement apparaît comme un moyen efficace de financement et de préservation du contrôle pour le propriétaire-dirigeant de l'entreprise. 5- La composition de l'actif La composition de l'actif exprime le niveau de garantie offert par l'entreprise en termes de disponibilité de fonds de roulement net. C'est un élément important dans la décision d'octroi de crédit aux PME les entreprises qui disposent des niveaux élevés d'actifs corporels sont en mesure de réduire les asymétries d'information et les coûts d'agence. Ainsi, toute chose égale par ailleurs, l'importance des actifs corporels devrait se traduire par un endettement supérieur. 6- Le caractère familial des PME Le concept d'entreprise familiale n'est pas clair car il ne peut pas être défini à partir de formes juridiques spécifiques ou des critères de tailles spécifiques (Colot et Mélanie, 2007). Selon christensen (1953)36(*), une entreprise est familiale lorsqu'elle porte le nom de la famille et est imprégnée de ses valeurs et traditions. La famille doit en outre fournir des dirigeants et être (ou avoir été) propriétaire d'une grande partie des actions. Quant aux Davis et Tagiuri (1982) ; l'entreprise familiale est « une organisation dans laquelle deux ou plusieurs membres de la famille élargie influence la direction de l'entreprise à travers l'exercice de lien de parenté, des postes de management ou de droit de propriété sur le capital ». Les définitions de l'entreprise familiale étant non exhaustives montrent qu'elles sont nombreuses et hétérogènes. Cependant, d'après la littérature, nous retenons qu'il ya trois critères qui permettent de définir l'entreprise familiale. L'entreprise familiale est caractérisée par la participation active de la famille dans la gestion de l'entreprise, le contrôle du capital par la famille et la transmission de l'entreprise à la génération future. De tout ce qui précède, nous pensons que les dirigeants de cette catégorie d'entreprise ne souhaiteraient pas l'endettement de peur de perdre le contrôle de leur entreprise car l'endettement exprime la dépendance de l'entreprise de l'extérieur. Par conséquent, le caractère familial des PME devrait se traduire par une aversion à l'endettement. * 23 _ Macélot J.F. (1984), « La mesure des coûts de faillite : une note », Finance, cité par Olivier C. & Mélanie C. (2007), « Les variables de propriété et de gestion ont-elles une influence sur la structure d'endettement des PME ? » * 24 _ Stulz R. (1990), «Managerial Discretion and optimal Financing Policies», Journal of Economics, vol.26, P. 3-27, cite par Mathieu Paquerot et Jean-michel Chapuis (2006) * 25 _ Diamond (1984), Op.cit. cité par Paquerot et Chapuis (2006) * 26 _ Stulz (1990), Op.cit. cité par Paquerot et Chapuis (2006) * 27 _ Hoshi T., Kashyap A et Scharfstein D. (1991), « Corporate Structure, Liquidity, and Investment:Evidence from Japanese Industrial Groups », Quarterly Journal of Economics, February p.33-59., cité par Paquerot et Chapuis (2006) * 28 _ Kauffmann, c., (2005), Le financement des PME en Afrique, OCDE, Repères n°7, cité par Lefilleur (2009) * 29 _ Fonds monétaire international, 2006. Central African Economic and Monetary Community: Financial System Stability Assessment, including Reports on the Observance of Standards and Codes on the following topics: Monetary and Financial Policy Transparency, and Banking Supervision, IMF Country, cité par Lefilleur (2009) * 30 _ Africapractice, 2005. Access to Finance: Profles of African SMEs, document de travail préparé pour Jetro London, disponible sur http://www.africapractice.com/uploads/JETRO.pdf., cité par Lefilleur (2009) * 31 _ FMI, 2006, op. cit.Cité par Lefilleur (2009) * 32 _Harris & Raviv, 1990, Op.Cit. cite par Ziane (2004) * 33 _ Titman S. & Wessels R. (1988), Op.Cit. cite par Ziane (2004) * 34 _ Ozkan A. (2001), cité par Olivier C. & Mélanie C. (2007) * 35 _ Hutchinson et Ray (1986), « Surviving the financial stress of small enterprise growth », cité par Ziane (2004) * 36 _ christensen (1953), cité par Olivier C. & Mélanie C. (2007) |
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