Le travail des enfants au Cameroun: le cas de la ville de Yaoundé (1952-2005)( Télécharger le fichier original )par Allamine Mariam Université de Yaoundé I - Cameroun - Master 2010 |
II- DETERMINANTS D'ORDRE ECONOMIQUE ET STRUCTURELLa conjoncture économique des années 1980 est marquée par la crise économique qui s'accompagne dans la décennie suivante d'un violent vent de la mondialisation. De plus, on note aussi une forte informalité de l'économie ainsi qu'un changement progressif des statuts féminins. L'ensemble de ces circonstances historiques a considérablement influé sur la mise au travail des enfants. A- LES FACTEURS LIES AU CONTEXTE ECONOMIQUE CAMEROUNAIS.Comme nous l'avons noté dans les lignes précédentes, le contexte économique camerounais est empreint de deux faits, la crise économique et la mondialisation de l'économie, deux faits qui semblent contrastés, mais qui cachent l'un et l'autre une forte mise au travail des enfants. 1- La crise économique des années 1980 S'agissant de la situation socio-économique, elle est alarmante au Cameroun. La crise est ainsi latente au Cameroun depuis 1985. Cette crise est indissociablement politique, sociale et surtout économique. En effet, le pays a traversé pendant les décennies 1980 et 1990 une crise économique qui s'est traduite par des déséquilibres macro-économiques et financiers importants, l'effondrement des revenus des ménages et la détérioration des conditions de vie des populations45(*). La paupérisation exponentielle enregistrée pendant cette période de l'histoire du Cameroun exprime une situation inquiétante. Les indications suivantes l'expliquent : le PIB par habitant a décru de 0,6 % entre 1975 et 2000 et de 0,8 % entre 1990 et 200046(*). La dégradation accélérée des conditions de vie des ménages camerounais est illustrée par le tableau ci- dessous47(*) : Tableau n°4 : Evolution de la consommation des ménages au Cameroun, 1983-1993.
Source : `'La traite des enfants à des fins d'exploitation de leur travail au Cameroun'', BIT, Genève, 2005, p.50. Ce tableau indique qu'entre 1983 et 1993, le niveau de consommation a baissé de 44.5 %. Ceci explique la transition difficile qui se visualise avec la détérioration du tissu économique. Au regard de ce qui précède, peut-on dire que la dégradation des conditions de vie des ménages expliquent une mise au travail des enfants ? Face à cette situation économique difficile caractérisée par une baisse drastique des revenus des ménages, les chefs de familles en général sont appelés à déployer des stratégies de survie. L'une d'elles consiste à multiplier les sources de revenus dans les ménages en faisant quelquefois recours au travail des enfants. Face à cet imbroglio, les ménages sélectionnent des alternatives de lutte contre la crise. L'une de ces alternatives est de solliciter les apports des enfants dans la vie économique du ménage à travers leur implication de plus en plus poussée sur le marché du travail48(*). Cette alternative vise essentiellement les segments qui ne nécessitent pas une qualification particulière. Le travail des enfants prend donc un essor considérable. La finalité est que chaque enfant doit contribuer de manière productive à l'élargissement de l'assiette familiale. Plus une famille s'appauvrit, plus aucun de ses membres doit contribuer à gagner ce qu'il coûte, en argent ou en produits vitaux et alimentaires, y compris les enfants. Cette conjoncture s'accompagne progressivement du phénomène de la mondialisation qui pourrait davantage intensifier la mise au travail des enfants. 2- Les effets pervers de la mondialisation La mondialisation est une intégration économique mondiale qui va au-delà de l'internationalisation des échanges de marchandises, de services ou de capitaux et qui se caractérise par une mobilité parfaite des capitaux et par une concurrence accrue entre les firmes et les nations49(*). Parmi ceux qui sont mis au travail pour faire fructifier les capitaux, on compte aussi des enfants. La globalisation économique pousse les grandes structures à se délocaliser pour trouver la main d'oeuvre la moins chère et la plus flexible afin de remporter les marchés. Les enfants sont alors une cible privilégiée. L'exploitation des enfants, pour être rentable, obéit à des règles inhumaines de l'économie qu'il faut savoir respecter50(*). L'exploitation du travail des enfants renvoie à une classe sur laquelle se concentrent tous les maux touchant les couches sociales les plus démunies. La mondialisation renforce donc les risques d'exploitation auxquels peuvent être exposés les enfants économiquement actifs, leur employeur cherchant à dégager un avantage comparatif sur les marchés mondiaux51(*). Le concours de la mondialisation dans le travail des enfants se reflète au lourd profit que génère leur exploitation abusive52(*). A cet effet, c'est négativement que la mondialisation affecte le développement social. La concurrence ambiante et le flux d'investissements étrangers stimulent l'exploitation et la mise au travail des enfants de façon croissante. * 45 _ INS, `'Rapport national sur le travail des enfants au Cameroun'', Yaoundé, BIT-IPEC, décembre 2008, p.1. * 46 _S. C., Abéga, et al., La traite des enfants..., p.49. * 47 _ Ibid, p.50. * 48 _ INS, `'Rapport national sur le travail des enfants au Cameroun'', Yaoundé, BIT-IPEC, décembre 2008, p.2. * 49 _ E. De Wismes, `' Mondialisation et travail des enfants'', mémoire de troisième année en économie et gestion, université de Panthéon Sorbonne, 2006. * 50 _ C. Meillassoux, `'Précis d'exploitation des enfants'' L'Afrique (Centrale) des droits de l'homme, Paris, Karthala, 2001, p.153. * 51 _ BIT-IPEC, `'Guide pratique à l'usage des parlementaires, éradiquer les pires formes de travail des enfants'', n°3, Genève, 2002, p.27. * 52 _ Ibid, p.159. |
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