Le travail des enfants au Cameroun: le cas de la ville de Yaoundé (1952-2005)( Télécharger le fichier original )par Allamine Mariam Université de Yaoundé I - Cameroun - Master 2010 |
B- LE POIDS DES TRADITIONS ET DES VALEURS CULTURELLESUn des facteurs les plus influents de l'engagement des enfants sur le marché du travail concerne l'environnement immédiat des enfants. Cet environnement est dans tous les cas fortement tributaire de la structure familiale et de ses habitudes culturelles et traditionnelles en premier lieu. Notons ainsi la mauvaise exploitation des traditions et le dysfonctionnement de certaines valeurs culturelles par certaines familles. 1- Tradition de confiage Les diversités culturelles, le contexte socio-économique et l'organisation traditionnelle propre à certaines régions, constitueraient un autre pilier des motivations quant au choix de la mise au travail des enfants. Une coutume fortement établie dans les cultures camerounaises est de confier son enfant à un proche parent pour qu'il s'occupe de son éducation43(*). Ce fait correspond à ce que les démographes appellent `'confiage''. Généralement et dans les pratiques, l'enfant quitte désespérément son village par la force de l'oisiveté et se retrouve en zone urbaine espérant un avenir meilleur. Seulement, le tuteur use de tout ce pouvoir pour introduire l'enfant dans des circuits d'activités lucratives sous le déguisement d'une mise en apprentissage d'un métier quelconque. Cette mise en apprentissage revêt quelquefois une mise précoce de l'enfant au travail. Le flux migratoire des enfants de la campagne vers la ville s'explique aussi par de faibles possibilités de scolarisation dans le site de départ. Aussi, une fois arrivé en ville, l'enfant se retrouve pris au piège et détourné de ses ambitions scolaires au profit de son tuteur qui exploite abusivement la force de son travail. 2- La mise en apprentissage La pratique de mise en apprentissage intervient dans le cadre de l'éducation religieuse. En effet, les parents confient leurs enfants à des personnes qu'ils connaissent à peine, avec la seule garantie que cette personne qui reçoit les jeunes se présente comme un religieux44(*). Seulement, la tête de religieux cache un réseau de trafic d'enfants destinés à l'exploitation de leur travail. Dans ce cas, la structure familiale joue un grand rôle dans le travail des enfants. Les familles incapables d'assumer le coût de l'éducation de leur progéniture, contraignent leurs enfants d'approcher et d'expérimenter d'autres alternatives parmi lesquelles le travail. Pour la majorité des enfants, le travail prend initialement la forme d'une simple contribution aux activités familiales, mais quand ils partent travailler à l'extérieur, c'est pour le compte d'autrui. Dans de nombreuses sociétés notamment au Cameroun, les valeurs culturelles et le poids de la tradition considèrent comme légitime et normal le travail des enfants, car il permet de les sensibiliser aux rôles et aux responsabilités incombant à chaque membre de la famille tout en favorisant leur développement. Mais, certains parents ont abusivement exploité ces valeurs pour faire de l'enfant un véritable acteur de production au même titre que l'adulte. De ce fait, la mise en apprentissage, effectuée généralement par les familles, est une façon significative d'augmenter les chances d'un enfant d'alimenter le marché du travail. A l'issue de ce propos, l'on peut affirmer que le cadre coutumier de confiage et de mise en apprentissage présente beaucoup de risques et cache une forte mise au travail des enfants dans les grandes métropoles comme Yaoundé. * 43 _ S.C. Abéga, `' Le trafic des enfants au Cameroun : étude d'une forme d'abus à l'égard des cadets sociaux'', Sociétés et jeunesses en difficulté, N°2, Yaoundé, 2007, p.7. * 44 _ T.M. Atangana, `'Etude sur le renforcement des capacités de la chaîne d'intervention à l'application du cadre juridique de la lutte contre la traite des enfants à des fins d'exploitation de leur travail au Cameroun'', Yaoundé, mars 2005, p.14. |
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