Conclusion partielle
En définitive, on constate qu'il y a une
complexité du dispositif institutionnel liée à
sa transversalité, à la multiplicité de structures
intervenant dans la PME avec des relations timides voire inexistantes ce qui
limite l'efficacité de la portée de leurs
actions. En effet l'inexistence de concertation, de
cohérence complique la tache des PME, ce qui peut mener à
l'inefficacité.
En outre, le secteur est caractérisé par
l'absence de vision et d'une stratégie claire et partagée par
l'ensemble des acteurs du secteur, ce qui complique davantage la coordination
des appuis des différents intervenants. Face à ces multiples
problèmes, il est urgent de rationaliser la dispositif institutionnel
pour permettre une utilisation optimale des ressources financières et
humaines afin de booster le secteur des PME. La lettre de politique sectorielle
élaborée par la Direction des PME est une opportunité qui
est venue à point nommé pour apporter une solution à la
rationalisation du dispositif institutionnel.
CHAPITRE 2 : Accompagnement à la création
des Entreprises
L'aide à la création d`entreprises s'est
développée depuis les années 80. L'échec des
politiques Africaines macroéconomiques de lutte contre le chômage,
la redécouverte des vertus de la petite entreprise sur les dynamiques
locales de l'emploi, ainsi que la nécessité croissante pour de
nombreux chômeurs de créer leur propre emploi ont conduit les
pouvoirs publics à développer des initiatives d'aide à la
création d'entreprise. Cependant, il est intéressant de noter une
particularité de la situation ouest africaine : le développement
de systèmes d'appui aux créateurs n'a pas fait l'objet d'une
politique sous régionale. Plusieurs études ont effectivement
montré que ce sont les acteurs locaux ou régionaux, tant
privés que publics, qui ont pris le relais et créé leurs
systèmes d'appui, pour relever les enjeux en terme d'emplois, de
renouvellement des tissus économiques locaux. Il en résulte
aujourd'hui un très grand nombre d'acteurs et une large diversité
des actions engagées, qui se structurent autour de trois axes : le
développement de réseaux d'accompagnement, le soutien logistique
et l'appui financier. Ces axes pourraient être croisés avec les
publics ciblés (chômeurs, chercheurs, ...) pour aboutir à
une segmentation plus pertinente des acteurs présents. Parmi ces
derniers, l'économie sociale tient une place singulière, comme en
témoigne le marché Béninois que nous étudions ici.
Associations, ONGs, Coopératives (Coopérative d'Activité
et d'Emploi)..., autant de structures de l'économie sociale
implantées sur le territoire Béninois qui offrent aujourd'hui des
services d'accompagnement et de financements à des entrepreneurs
s'inscrivant majoritairement dans l'économie classique. Ces structures
de l'économie sociale cherchent, au delà de la création
d'entreprises, à valoriser le droit à l'initiative. Elles
revendiquent ainsi une insertion possible par l'économique, remettant en
cause une logique de l'assistanat induite par le traitement social du
chômage. Pour ce faire, elles ont, depuis plusieurs années,
introduit des innovations sociales dans le champ de la création
d'activités pour des publics en difficultés en se plaçant
aux confins de plusieurs problématiques : celle du développement
économique, du développement local, de l'insertion
économique et de l'insertion sociale. Cherchant à déployer
leurs services en réseau, elles s'appuient sur la mobilisation d'acteurs
pluriels (publics et privés), dont les logiques et rationalités
peuvent entrer en conflit. L'analyse de ces structures présente un
intérêt
majeur tant elle concentre de questionnements qui
émaillent régulièrement les recherches à propos de
l'économie sociale, ses rapports avec l'économie dite classique,
sa professionnalisation, son inscription territoriale, ses tendances à
l'isomorphisme organisationnel, ou la spécificité de son «
utilité sociale ».
Section I : Politiques d'accompagnement à
l'entreprenariat dans l'UEMOA
I.1. Dispositifs d'appui à la création
Les dispositifs d'appui à la création
d'entreprises, notamment en direction de publics en difficulté,
connaissent un essor particulier depuis une dizaine d'années. Ces
structures associatives et publiques côtoient désormais dans le
champ de la création d'entreprise les acteurs historiques et
institutionnels que sont les chambres de commerce et d'industrie et les
chambres des métiers, ainsi que des acteurs privés
spécialisés (experts comptables, avocats).
I.1.1. Soutien et accompagnement des
entrepreneurs
L'objectif de ces dispositifs locaux, nationaux mais aussi
ouest africain, est d'inciter les chômeurs ou les sans emploi à
créer leur entreprise pour favoriser leur retour à l'emploi. Ils
sont en cela aidés par des associations, coopératives et
structures publiques, dont les métiers s'articulent autour de
l'accompagnement et/ou du financement de projet. OEuvrant pour l'insertion par
l'économique, ces dispositifs présentent une double facette. Ils
apparaissent comme une voie possible de lutte contre le chômage et
l'exclusion, et constituent un maillon de la politique de l'emploi : ils
s'inscrivent donc dans le champ de la politique sociale.
L'OCDE (2001) présente un tableau synthèse des
dispositifs de promotion de l'entrepreneuriat chez les jeunes (voir le tableau
1). Les jeunes constituent en effet un public cible très soutenu par les
différents programmes. Outre quelques nuances, la grande partie de ces
dispositifs sont aussi utilisés auprès des autres publics. Bien
qu'il faille admettre qu' « aucun pays ne le met en oeuvre dans son
intégralité », le
tableau présente la totalité du processus,
implanté de façon optimale, systématique et
idéal.
Tableau 1 : Caractéristiques des dispositifs de
promotion de l'entrepreneuriat
Formation hors du système d'enseignement
ordinaire
|
Compétences en gestion des entreprises Qualités
d'entrepreneur
|
Aide au démarrage
Aide au développement de l'entreprise
|
Financement :
Capitaux : prêts, subventions, prix Accès au
crédit
Soutien logistique
Locaux
Équipements
Idées
Conseils et encadrement
Soutien opérationnel
Planification
Gestion opérationnelle
Gestion financière
|
Formation de réseaux
|
Associations nationales et internationales
|
Transferts entre génération
|
De connaissances à travers le conseil D'entreprises et
activité lors du départ à la retraite
|
Tiré d'OCDE (2001)
Pour Howard (1990) trois types de soutien facilitent le
démarrage : le soutien financier, le soutien stratégique et le
soutien commercial. De son côté Barès (2004) identifie
trois axes pour faciliter l'accès à la création
d'entreprise : l'appui financier, le développement d'un réseau
conseil et le soutien logistique. Dans le cas d'une création ex-nihilo,
le soutien fait appel aux conseils stratégiques, financiers, juridiques
et fiscaux et à la mise en place de toutes les politiques fonctionnelles
(production, communication, vente, gestion ou ressources humaines) (Kokou
Dokou, 2001). Pour Maggioni et al. (1999), les mesures peuvent
chercher deux objectifs : d'une part former et encourager les gens à
devenir entrepreneur, et d'autres part diminuer les coûts liés aux
activités entrepreneuriales (réduction de taxes, incubateur,
information, prêts garantis et des subventions). On peut ainsi dire que
les mesures visent l'accès à trois types de capital : 1- le
capital financier, 2- le capital humain et 3- le capital social. Le premier
relève davantage de mesures
gouvernementales nationales, qui permettent aux entrepreneurs
d'avoir accès à des fonds divers sous formes de subventions ou
autres. Les deux autres, quant à eux, sont souvent l'affaire du milieu
local. Ce sont donc les agents locaux qui ont la responsabilité de cette
acquisition. Par le biais des programmes de formation et de suivi par des
conseillers par exemple, les entrepreneurs peuvent acquérir de nouvelles
compétences (capital humain) de même qu'être mis en relation
avec divers réseaux (capital social). Sous l'influence croisée de
ces agents, le territoire peut connaître de notables transformations pour
s'assurer une dynamique économique favorisée par les pratiques
d'accompagnement (Albert et al. 1994; Saporta, 1994). Cet
accompagnement entrepreneurial, il s'inscrit dans la perspective de l'aide au
conseil à la création et au management stratégique. Il
s'agit d'une méthode fondée sur l'heuristique de décision
et sur la systémique (Julien, 1997). Les démarches
d'accompagnement à la création d'entreprise sont désormais
courantes et font partie des préoccupations socio-économiques
locales (Fourcade, 1991). Les actions collectives de sensibilisation à
la création d'entreprise et d'accompagnement des créateurs
émanent de cette nécessité de dynamiser le territoire
local
(Johannison, 1988).
I.1.2. L'accompagnement : une pratique
aux multiples visages
Bien que l'accompagnement ne soit pas une pratique nouvelle,
elle a gagné dans les dernières années en
popularité. L'accompagnement n'est pas limité au champ de
l'entrepreneuriat, bien au contraire. On pratique l'accompagnement dans
plusieurs milieux : en éducation, en formation professionnelle, dans le
domaine sportif, juridique, social ou encore socio-économique, dans le
contexte hospitalier, et bien d'autres. Cette pluralité des domaines
d'application rend l'accompagnement parfois difficile à cerner, d'autant
plus qu'il s'agit d'une pratique devant être adaptée selon les
situations. Certains en parlent d'ailleurs comme d'une « nébuleuse
» (Paul, 2002). La sémantique utilisée pour parler
d'accompagnement illustre bien cette réalité. Dans la langue
française, il est souvent synonyme d'aide, de conseil, de soutien, alors
qu'en anglais, on en parle aussi avec des termes tels que counselling,
coaching, tutoring, sponsoring ou encore mentoring. La
figure 1 reprend la nébuleuse telle que schématisée par
Paul (2002).
Malgré tout, ces différents visages de
l'accompagnement présentent des caractéristiques commues et
reposent sur une même logique. Sa véritable essence est une
question de position relationnelle, de valeurs et d'éthique (Roberge,
2002, p.2) .Accompagner, dans son sens strict signifie « se joindre
à quelqu'un pour aller où il va en même temps que lui
» (Paul, 2002, p.54).
Au-delà d'une pratique, il s'agit à la fois un art
et un métier. En effet, « le métier
I.2. Impacts et recommandations
La confiance générée et la
légitimité acquise permettent aux organismes de l'économie
sociale d'engager les entrepreneurs dans une dynamique d'apprentissage de leur
métier de manager et contribuent à façonner leur capital
social et humain. Le dispositif d'aide est aujourd'hui bien établi et
permet de répondre à la diversité des besoins à
chaque étape du processus de création de l'entreprise, depuis la
sensibilisation à la question « pourquoi pas moi ? » aux
premières commandes des clients. Force est de constater
que l'offre de conseils, de formations et de financements a
considérablement évolué au cours des deux dernières
décennies. Des premiers rendez-vous individuels donnés dans une
boutique de gestion aux effectifs bénévoles et réduits, on
est passé à des cycles de formation très structurés
délivrés par des professionnels.
Mais au delà de cette capacité à former
des managers, les associations et organismes régionaux doivent
développent par leurs outils d'accompagnement de véritables
capacités à gérer un trajectoire professionnelle. Ceci est
particulièrement vrai lorsque l'activité créée
n'est finalement qu'une activité de survie ou une activité qui
permet tout juste de faire vivre la famille, sans avoir un véritable
potentiel de développement (Richez-Battesti, 2003). La
création d'entreprise est alors susceptible de limiter
l'intégration économique. D'autant que le
créateur est confronté à l'isolement du chef d'entreprise
et la faiblesse de ses revenus ne permet pas toujours l'accès à
la protection sociale. Il doit aussi affronter les risques de
défaillance de son entreprise. Le créateur risque alors de
continuer à s'inscrire dans cette précarité,
déjà largement expérimentée dans sa trajectoire
sociale et professionnelle antérieure (récurrence de petits
boulots, instabilité professionnelle...). Ici, créer son
entreprise c'est sortir de la précarité, mais c'est aussi rentrer
dans un autre type d'incertitude. Les entrepreneurs de leur propre emploi, en
réalisant leur projet, rentrent dans un « espace
intermédiaire » (Roulleau-Berger, 1999). RichezBattesti (2003)
préfère parler d'espace de transition en ce sens qu'il
débouche sur plusieurs configurations : soit la pérennisation de
l'activité entrepreneuriale avec une logique de professionnalisation,
soit un accès à l'emploi salarié exprimant ainsi pour eux
une reformulation des règles d'accès à ce travail
salarié, soit le retour à la situation initiale, voire à
une forme d'isolement social. On voit ici que le projet d'insertion est
largement corrélé à la nature de l'accompagnement. Et que
la diversité des situations et des projets personnels requiert une
diversité des formes d'accompagnement. C'est probablement dans cette
capacité à se représenter cette diversité et
à y répondre que l'économie sociale fait preuve d'une
grande capacité d'innovation. Au-delà de la création d'un
réseau de confiance qui permette aux entrepreneurs de s'insérer
dans l'économie, elle va développer des outils de management de
projet qui concernent à la fois le projet entrepreneurial et le projet
personnel. Ceci se traduit par un souci d'expertise, d'accompagnement global,
de professionnalisation.
Section II : Caractéristiques et impacts du
système d'accompagnement à la création des PME/PMI au
Bénin.
En ce qui concerne la promotion des PME/PMI dans le cadre des
économies locales décentralisées, il s'agit de recenser
les potentialités de développement de nos localités, qui
en raison des contraintes diverses (absence ou état défectueux
des voies d'accès, faibles capacités des administrations locales,
fiscalité locale inadaptée à la petite entreprise, absence
d'une manière générale de structures d'appuis, et
particulièrement de services financiers offrant des produits
adaptés aux PME/PMI, etc.) ne sont valorisées et d'initier des
actions appropriées pour promouvoir l'entreprenariat local. Les actions
inscrites ici visent à accompagner le mouvement de la
décentralisation au Bénin.
II.1. Différenciation des acteurs et des
secteurs formel et informel
II.1.1. Repérage des acteurs et
proposition de classification
Au-delà d'une simple énumération des
principaux acteurs présents dans la phase d'accompagnement ante
création et proposant différents appuis en matière de
création d'entreprise, nous avons tenté - à partir des
entretiens réalisés auprès des acteurs de la ville Cotonou
au Bénin - de construire une classification ; elle a été
réalisée, à partir de plusieurs critères, à
savoir leur forme juridique (publique / privée et associative ou
coopérative) et leur métier (spécialiste de
l'accompagnement / généraliste) (Cf. tableau 2) et les types de
publics accompagnés (Cf. tableau 3).
Vu qu'il existe peut de statistiques sur les organisations
opérant dans le secteur de l'accompagnement au Bénin, une
ébauche de structuration des aides s'impose.
Tableau n°2: Structures d'aide à la
création d'entreprises par statut / métier
Organisations publiques ou parapubliques
|
Organisations privées
|
|
Economie Sociale
|
|
Généralistes
|
Généralistes
|
Spécialisées
|
Chambre de Commerce et d'Industrie du Bénin
Chambre des Métiers
Information, formation, mise à disposition de
conseillers Hébergement du centre de formalité des
entreprises
ANPE Spécialisées
|
PADME
Formation, accompagnement Public défavorisé
/ chômeurs Compétences
Bénévoles, conseil en structuration,
financement, démarches administratives
Entente des Générations pour l'Emploi
et l'Entreprise Bénévoles, Conseil et
Parrainage
Coopérative d'Activité et d'Emploi
Portage salarial PAPME
Financement et accompagnement
PADME
Plate forme d'initiative locale, accueil,
accompagnement, prêt d'honneur
Fonds de Développement Solidaire
Publics en difficulté, accompagnement
Association pour le Droit à l'Initiative
Economique Financement Nouvelle Economie
Fraternelle
Financement Vital Finance
Financement
|
Ordre des Experts
comptables
Ordre des Avocats
Cabinets conseils spécialisés dans
l'accompagnement
Banques
IMFs
|
Acropole
Technopole, accueil des porteurs de projets
innovants, conseil,
formation, club
d'entrepreneurs
|
Tableau n°3 : Structures d'aide à la
création d'entreprise par public / projet
Caractéristiques du public/projet
|
Structures concernées :
|
Tous publics, l'activité est commerciale ou
industrielle
|
La CCIB
La BRS
Compétences
Ordre des Experts Comptables
|
Tous publics, l'activité est artisanale
|
La Chambre de métiers
Ordre des Experts Comptables
|
Tous publics, l'activité est agricole
|
La Chambre d'agriculture Ordre des Experts Comptables
|
Le projet est porté par un demandeur d'emploi
|
L'ANPE propose une information et des services d'aide à
l'élaboration du projet La BRS
Compétence
Important travail en relais avec autres services
d'aide à l'insertion par l'économie tels la
Plate
Forme d'Initiative Locale
|
Le projet est porté par un demandeur d'emploi
cadre
|
L'APEC qui organise des réunions d'information et des
services d'aide à l'élaboration de projets
La BRS
Compétence
Important travail en relais avec autres services
d'aide à l'insertion par l'économie tels la
Plate
Forme d'Initiative Locale
|
Le projet est porté par une ou plusieurs personnes
exclues du marché du travail et du
système bancaire classique
|
- L'ADIE, qui aide les personnes en difficulté à
créer leur propre emploi
- FODEFCA
|
II.1 .2.Réponses aux besoins des
entrepreneurs par une dynamique de réseau
La problématique de l'accompagnement nous renvoie
implicitement au débat autour des interactions Individu / Structures
socio-économiques, à savoir est-ce l'entrepreneur qui tire le
développement économique ou est-il porté par la dynamique
des marchés (Boutillier et Uzunidis 1995) ? Quels que soient les pays et
la nature de leur politique économique, force est de constater que les
pays plus libéraux ont toujours favorisé des mesures d'appui
à la création d'entreprise, car il existe de nombreuses
interactions entre l'acteur et le système.
Aussi, pour le petit entrepreneur, devenu aux yeux des
pouvoirs publics, créateur d'emplois (le plus souvent son seul emploi),
si la création d'entreprise peut être assimilée à un
réflexe de survie (créer son propre emploi), il ne peut faire fi
du contexte concurrentiel dans lequel s'inscrit son projet de création.
D'où l'intérêt de développer des démarches
d'accompagnement d'ordre socio-économique, afin d'accompagner des
porteurs vers une création qui leur permettra de sortir de la
précarité et d`acquérir un statut ainsi qu'une
reconnaissance sociale.
Du héros mythique de l'histoire économique
schumpetérienne, les économistes français, depuis
Cantillon18 et surtout Jean Baptiste Say, ont très vite montré
combien il se différenciait du capitaliste. L'analyse du profit comme
rémunération du risque et des « talents » de
l'entrepreneur les conduisent à examiner de plus près ce «
travail » singulier de l'entrepreneur. Une importante littérature
lui a été depuis consacrée mais puisque nous traitons ici
de l'économie sociale, laissons Charles Gide (1919, p.607-608) nous
rappeler comment l'économiste conçoit les principales fonctions
de l'entrepreneur :
« - l'invention, [...] le rôle de l'entrepreneur
est justement d'avoir des idées - non pas nécessairement des
idées de génie mais des idées commerciales-
c'est-à-dire surtout de découvrir ce qui plaira au public.
[...]
La direction, [...] le travail collectif est plus productif
que le travail isolé - mais à condition d'être
organisé, discipliné, commandé. Il faut donc quelqu'un qui
distribue les tâches et assigne chacun à sa place : c'est le
rôle de l'entrepreneur [...]
- la spéculation commerciale. Ce n'est rien de produire
: l'important c'est de vendre, c'est de trouver des débouchés.
Voilà encore un des traits caractéristiques du travail de
l'entrepreneur, et de la plus haute importance sociale, puisque par là
il tend,
quoiqu'inconsciemment, à rétablir sans cesse
l'équilibre entre la production et la consommation. »
Encore faut-il, aurait ajouté J.B.Say (1803)19, qu'il
puisse trouver des fonds pour financer son entreprise et que pour ce faire
« il soit solvable, connu pour un homme intelligent et prudent ».
Depuis la crise de 1975, ces repères théoriques et
économiques relatifs à l'entrepreneur se sont brouillés,
pour aboutir à une distinction entre deux catégories
d'entrepreneur, à savoir, l'entrepreneur routinier et l'entrepreneur
innovateur, dont les possibilités d'action changent en fonction de
l'état de la technologie, de la concurrence, de la
réglementation, du niveau de production industrielle, du degré de
socialisation des rapports marchands (Boutillier et Uzunidis 1999). C'est
précisément cette caractérisation préalable des
difficultés et contraintes propres à chaque période qu'il
importe de prendre en compte pour mieux cerner la nature des besoins des
entrepreneurs.
II.1.3. Des idées nouvelles qui
rencontrent un marché
- Vers une démarche socio-économique
Schumpeter a donné une lecture assez dramatique de
l'innovation qui reste encore très prégnante dans la
littérature et dans les esprits. Nous voudrions ici rompre avec cette
lecture mythique tant la réalité de la création
d'entreprise comme les analyses théoriques de l'innovation s'y opposent.
Les dernières ont montré son caractère cumulatif,
localisé, et tendent de plus en plus à valoriser les innovations
incrémentales et leur rôle incomparable dans le
développement technologique et le développement des
marchés. Les créations d'entreprises concernent majoritairement
des entreprises individuelles (création ex nihilo et auto-emploi)
largement centrées sur la reproduction d'activités
déjà existantes (entrepreneuriat routinier), ce que Sallais et
Storper (1993) nomment le « monde de la petite production de
proximité ». Il ressort, d'un dialogue entre la
réalité et la théorie, la nécessité de
relativiser le lien entre innovation et création d'entreprise pour ne
considérer celle-ci que de façon très
générale comme l'aboutissement d'un projet personnel, concernant
une idée plus ou
II.2. Diagnostic et Impacts sur la nouvelle Economie
sociale
II.2.1. Les innovations introduites par les
structures de l'économie Sociale
A ce jour, ces structures de l'économie sociale
constituent des acteurs clés du dispositif d'appui à la
création d'entreprise et d'insertion par l'économie, dès
lors que l'on contextualise les données sur la création
d'entreprise (Cf. encadré 1, qui montre le poids de l'auto emploi dans
les statistiques sur la création). Elles doivent leur succès
à une stratégie de réponse adaptée aux besoins
spécifiques des entrepreneurs qu'elles accompagnent, à savoir
majoritairement des chômeurs et des déflatés. C'est en
analysant les besoins des porteurs de projet, que nous montrerons quelle peut
être la spécificité des besoins de ces entrepreneurs
singuliers qui constituent le public des structures de l'économie
sociale. Puis nous montrerons comment la capacité de l'économie
sociale à gérer des logiques diverses et à
s'insérer dans des réseaux lui permet de répondre de
façon adéquate à ces besoins.
II.2.2. Les spécificités des
services d'accompagnement de l'Economie Sociale
Si l'entrepreneuriat s'inscrit dans un dynamique de
réseau, la question qui se pose à nous est celle de la
spécificité de l'économie sociale au regard d'autres
organismes publics ou para publics.
A la question « Pourquoi l'économie sociale ?
», la littérature consacrée répond par une analyse
des défaillances du marché et des contrats (Hansmann, 1980) ou
par celle des carences des pouvoirs publics dans l'offre de biens publics
(Weisbrod, 1988). Elle considère que les parties prenantes (Ben-Ner, Van
Hoomissen, 1993) d'une association sont réunies pour s'offrir et fournir
à d'autres des biens ou services qui ne sont pas fournis de façon
adéquate par le marché ou le secteur public ; elle
affirme en outre que la structure singulière des droits de
propriété et des modalités de gouvernance permet de
résoudre des difficultés de coordination (Enjolras,
2000).
Hite (2005) souligne que c'est la caractéristique des
relations de réseau qui vont influencer la façon dont les
opportunités et les ressources vont être identifiées,
mobilisées et exploitées par les entrepreneurs. Il s'agit donc
pour nous d'examiner dans quelle mesure les relations de réseau
entretenues par les associations peuvent fournir de façon
adéquate des moyens d'identifier, de mobiliser et d'exploiter des
ressources et des opportunités et si la spécificité des
organisation l'économie sociale et de leur gouvernance peut aider les
entrepreneurs à résoudre certaines difficultés de
coordination avec les réseaux adéquats.
Les dispositifs de soutien à la création et au
développement des entreprises sont nombreux au point tel d'engendrer
certains problèmes. Dans le cadre de cette étude, les
intervenants ont soulevé le manque d'arrimage et de concertation entre
les différentes entités. L'organisation générale de
l'offre en matière de soutien à l'entrepreneuriat pourrait donc
être améliorée. D'une part, il est proposé de
renforcer la cohésion entre les divers organismes d'intervention.
D'autre part, en raison de la multitude d'intervenants existants, il semble que
les promoteurs ont une méconnaissance des organismes existants et ne
savent souvent pas toujours vers qui se tourner.
|