Esquisse de Solutions au Problème
Le Discernement des Esprits
Le Seigneur appelle son Eglise à exercer le
discernement spirituel. Cette tâche n'est pas de la responsabilité
unique des ecclésiastiques ; elle est celle de tous les
chrétiens.
69 «Charisme» dans Nouveau
Dictionnaire Biblique révisé et augmenté, Ed.
2004.
70 «Simonie» dans Le Nouveau Petit
Robert de la langue française, Ed. 2007.
C'est pourquoi, l'apôtre Paul s'adressant aux
chrétiens de Thessalonique les invita à examiner toutes choses et
de retenir ce qui est bon (1 Th 5. 21). Examiner
signifier «discerner», «éprouver»,
«sonder». C'est « le procédé qui consiste
à éprouver quelque chose afin de révéler son
authenticité »71. C'est une invitation aux
chrétiens « à examiner minutieusement tout ce qu'ils
entendent afin de déterminer si cela est authentique, de distinguer
entre le vrai et le faux, de séparer le bon du mauvais
»72. Il faut cependant faire la différence entre le
discernement recommandé par Paul et le jugement proscris par
Jésus (Mt 7. 2-5). Le discernement n'est pas en effet synonyme de
jugement.
James A. Beverley propose une méthode d'évaluation
appelée « les dix tests de la vérité
»73. Le test de Dieu : il faut se demander si le groupe ou
la personne concerné (e) reconnaît le Dieu qui s'est
révélé en trois personnes. Le test christologique porte
sur Christ : Sa personne, Son oeuvre Sa gloire, Son enseignement, Sa mort, Sa
résurrection et Son retour. Le test biblique porte sur la confession de
l'autorité de la Parole de Dieu. Le test de l'amour moral est
l'expression verticale et horizontale de l'amour selon 1 Corinthiens 13. Le
test de la spiritualité pose la question de l'aspiration à la
direction du Saint-Esprit et à la pureté. Le test de la
liberté : la liberté est-elle offerte aux individus ? Les
dirigeants acceptent-ils de se soumettre à la correction et à la
discipline ?
71 John MacArthur, Spiritualité en crise.
Comment discerner le vrai du faux (CH Préverenges : La Maison de la
Bible, 1996), 94.
72 Ibid.
73 James A. Beverley, La bénédiction
de Toronto. Enquête (Floride : VIDA, 1995), 29.
Le test de l'église pose des questions telles que : «
Le groupe religieux en question s'inscrit-il dans la continuité avec
la foi classique ? Ou bien se montre-t-il sectaire, rigide et étroit
d'esprit ? »74 Le test socio - politique : la jonction
entre l'action sociale et l'évangélisation est-elle effective ?
Le test prophétique consiste à se demander : « les
dirigeants du groupe ont-ils été de faux prophètes, dans
le sens qu'ils ont énoncé de fausses prophéties ou qu'ils
se sont rendus coupables de dogmatisme prophétique insouciant ?
»75 Le test de la raison : « Une idée ou une
pratique donnée semble-elle raisonnable, et en accord avec le sentier de
la sagesse et de la vérité ?»76. Je pense
qu'il est nécessaire de ne pas s'en tenir seulement aux dons
spirituels.
Au-delà des Dons de l'Esprit
En mettant l'accent sur les dons spirituels, les prieurs ont
tendance à négliger le fruit de l'Esprit et la sanctification.
Or, s'il est vrai que le dernier est preuve de maturité spirituelle, on
ne saurait en dire autant du premier. Il peut se trouver au niveau des
pentecôtistes un certain orgueil « fondé sur un sentiment
de supériorité à cause des révélations et de
leur expérience »77. Cela a pour conséquence
de les éloigner d'autres aspects des Saintes Ecritures qui appellent le
chrétien à la maturité spirituelle. À mon avis, il
faut aller au-delà des dons de l'Esprit.
Je pense qu'un équilibre est nécessaire entre dons
de l'Esprit et fruit de l'Esprit. Rien ne sert de mettre l'accent sur les dons
spirituels si leur exercice n'est pas accompagné du fruit de l'Esprit et
d'une sainteté de vie.
74 Ibid., 30.
75 Ibid.
76 Ibid.
77 Frank Bartleman, Azusa Street - 1906. Une autre
vague déferle (Saint-Hubert : Ministères Multilingues,
1997), 165.
L'enseignement des apôtres, particulièrement celui
de l'apôtre Paul a consisté à mettre entre deux chapitres
parlant des dons spirituels (1 Co 12 et 14), un chapitre sur l'amour (1 Co 13).
L'exercice des dons spirituels doit être effectué dans l'amour :
« Quand je parlerais les langues des hommes et des anges, si je n'ai pas
l'amour, je suis un airain qui résonne, ou une cymbale qui retentit.
» (1 Co 13. 1). On ne peut parler de 1 Corinthiens 13 sans se
référer à Galates 5. 22, parce que l'amour est la porte
par laquelle le chrétien peut vivre la sainteté et
développer tous les paramètres du fruit de l'Esprit.
Le fruit de l'Esprit est une oeuvre spirituelle de longue
haleine. Il demande de la part du chrétien une vie
éprouvée, une vie de communion avec le Seigneur, un abandon de sa
propre vie afin que se développe en lui la vie du Seigneur.
JésusChrist, le vrai cep avait dit que tout sarment qui porte du fruit
doit être émondé « afin qu'il porte encore plus de
fruit » (Jn 15. 2). C'est par cet émondage que le chrétien
peut porter le fruit de l'Esprit. Soulignons à présent la
question relative à la reconnaissance des dons et/ou ministères
par l'église.
La Reconnaissance des Ministères et des Dons par
l'Eglise
J'ai relevé le fait que la prière n'est pas un
ministère. Mais, j'ai aussi souligné le fait que les prieurs ne
s'occupent pas uniquement de la prière ; ils font parfois office de
recours en matière de relation d'aide. Ils prétendent exercer
aussi les ministères de prophète et de délivrance. Il est
vrai, la Parole de Dieu ne fait en aucun moment cas d'un certain
ministère de délivrance. Encore, faut-il que les uns et les
autres soient enseignés et en arrivent à une telle
compréhension des choses. Dans ce contexte, on ne peut passer sous
silence le rôle important qu'ils jouent auprès des
chrétiens.
C'est pourquoi, je pense qu'il est nécessaire pour les
églises de reconnaître leurs ministères dans un cadre
biblique ou si l'on veut leurs activités spirituelles, dans le cas
où l'appellation ministère peut porter à confusion. Cela
pourrait permettre un investissement de manière pratique dans leur
encadrement et leur formation afin que des erreurs soient
évitées. Selon Wolfgang Bühne, « l'église
peut avertir et reprendre un ouvrier du Seigneur, elle peut exprimer des voeux
et faire des recommandations, mais elle ne doit jamais s'interposer entre le
serviteur et son Maître »78. Elle peut et doit
discipliner quand il y a une faute doctrinale. En effet, lorsque l'Eglise
reconnaît les ministères comme les dons, elle a aussi un droit de
regard sur la manière dont ils sont exercés.
Quoiqu'il en soit, l'ouvrier ne doit en aucun cas avoir un esprit
vindicatif. La reconnaissance du ministère ou du don d'un frère
ou d'une soeur n'est pas une obligation pour une église. Elle peut le
faire comme dans Actes 13. 3 ; mais, elle peut pour des raisons
précises, soit attendre que la personne en question ait produit des
aptitudes claires accréditant son don et/ou ministère, soit ne
même pas les reconnaître79.
A cet effet, l'exemple de la Région de Koudougou est un
cas d'école. Elle a tenté de réglementer le
développement des communautés de prière sous l'impulsion
du Pasteur Zongo Etienne. Cette tentative qui s'est avérée un
succès a été motivée par plusieurs raisons. Selon
le Docteur Zongo, des plaintes avaient été exprimées de la
part des chrétiens dont les églises sont dirigées par des
pasteurs prieurs. Selon ces chrétiens, leurs églises seraient
sans berger, leur pasteur étant chaque fois en déplacement pour
des prières.
78 Wolfgang Bühne, La troisième
vague...le plus grand Réveil de l'Histoire de l'Eglise ? (Bilefeld
: Editions Christlische Literatur-Verbreitung, 1992), 125.
La deuxième raison est que les prieurs qui se
déplaçaient dans les églises ou qui recevaient les
chrétiens chez eux, se seraient adonnés à des pratiques
indécentes pour avoir de l'argent. Aussi, ils détourneraient
à leur profit les dîmes et les offrandes des églises. La
troisième motivation est qu'il y aurait en leur sein des pratiques qui
allaient à l'encontre de l'éthique chrétienne.
Pour parer à tous ces facteurs négatifs, la
Région de Koudougou a convoqué tous les prieurs. Dans un premier
temps, ceux-ci n'ont pas répondu à l'appel. Une seconde
convocation leur fut adressée avec l'obligation d'obtempérer sous
peine d'exclusion de l'Eglise des Assemblées de Dieu. Ils ont alors
répondu à l'appel. La Région, tout en reconnaissant leur
ministère, les invita à l'exercer sous le contrôle des
églises.
Les conditions étaient les suivantes. D'abord, que tous
les prieurs qui occupent la fonction de pasteur principal dans une
église acceptent recevoir à leurs côtés un pasteur
assistant qui va les aider dans le ministère pastoral au regard de leurs
fréquents déplacements. Ensuite, qu'il soit mis fin à
l'exercice de la prière à domicile pour que tout se fasse dans
les églises. Enfin, que ces derniers acceptent collaborer avec des
pasteurs qui s'occuperont du volet enseignement. Certes, tous les prieurs n'ont
pas accepté ces conditions. Mais la majorité d'entre eux exercent
aujourd'hui leur ministère avec la bénédiction de la
Région. A l'endroit des chrétiens, il convient de
réaffirmer la nécessité d'une relation personnelle avec
Dieu.
Cultiver une Relation Personnelle Avec Dieu
La prière occupe une place importante dans la Parole de
Dieu, si bien qu'on peut parler de priorité de la prière : «
je veux donc que les hommes prient en tout lieu » (1 Tm 2. 8), «
priez sans cesse » (1 Th 5. 17). Dans Matthieu 6. 6, Jésus-Christ a
dit :
« quand tu pries... ».
Cela sous entend « lorsque tu pries... », et non «
si tu pries... ». Pour le chrétien, la prière n'est pas une
option, mais une activité spirituelle qui découle de sa vie,
d'une relation personnelle avec Dieu. La prière nécessite une
régularité. Nous ne pouvons donc que l'inscrire dans le cadre
d'une relation entretenue et enrichie avec le Seigneur.
A mon avis, si chaque chrétien avait une vie de
prière et de méditation personnelle de la Parole de Dieu, le
développement de l'activité des prieurs n'aurait pas aujourd'hui
une telle ampleur. C'est justement parce que cet aspect personnel de la vie
chrétienne manque que beaucoup ont recours aux prieurs. Cela ne veut pas
dire qu'il est malséant de demander une aide dans la prière
auprès d'une personne qui jouit d'une grande proximité avec le
Seigneur ou qui connaît une plus grande maturité spirituelle. Cela
est possible. Mais cela ne doit pas devenir une règle, un modus vivendi.
En effet, lorsqu'on se promène de lieu de prière en lieu de
prière, il y a un danger à se confier plus à des hommes
qu'à Dieu.
Il n'existe aucune relation privilégiée avec le
Seigneur que la relation personnelle. C'est ce à quoi chaque
chrétien doit parvenir. Déjà dans l'Ancien Testament, le
jeune serviteur de Moïse, Josué nous donne un exemple frappant. Il
est le seul avec Moïse dans la tente d'assignation dressée hors du
camp (Ex 33. 7). Mais quand Moïse quittait la tente pour retourner au
camp, Josué cependant « ne sortait pas du milieu de la tente »
(Ex 33. 11). Par cet exemple, nous voyons un serviteur qui marche sur les pas
de son maître, en ayant cependant les yeux rivés sur Celui qui
conduit son maître, le Divin Maître. Pour lui, sa relation
personnelle avec Dieu primait sur toute autre chose. Quel bel exemple pour nous
aujourd'hui !
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