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L'organisation de la lutte contre la piraterie par les entreprises distributrices de logiciels informatiques : le cas de Hiperdist Cameroun S.A

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par Eric Géraud NOUPOUWO
Ecole Supérieure des Sciences Economiques et Commerciales de Douala  - Master professionnel en organisation et management  2009
  

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2. Section 2 :
Mise en évidence des pratiques de piraterie des logiciels au sein des entreprises

Les logiciels sont l'une des technologies les plus stratégiques de l'ère de l'information. Ils permettent de faire fonctionner l'ensemble du système d'information, des postes de travail individuels aux systèmes interconnectés les plus complexes. Malheureusement, en raison de leur caractère intangible et parce que les ordinateurs permettent de réaliser facilement une copie exacte d'un programme en quelques secondes, la contrefaçon des logiciels est largement répandue. De la duplication "artisanale" à la contrefaçon à échelle "industrielle", le piratage informatique peut revêtir les aspects les plus divers. Cette section vise, dans un premier temps, à mettre en évidence les différentes formes de pratiques de piraterie des logiciels, puis de nous pencher, dans un second temps, sur les différentes causes pouvant justifier les pratiques de piraterie au sein des entreprises.

1. Les causes de la pratique de la piraterie des logiciels

a) Causes au niveau de l'Etat

i. Manque de politique de vulgarisation de l'informatique

Sur le plan de la politique nationale, il n'existe pas de véritable stratégie de promotion, de développement et de vulgarisation de l'informatique au Cameroun. En effet, le matériel informatique (y compris les logiciels) ne bénéficie d'aucune protection particulière visant à encourager les investisseurs à s'y intéresser davantage, que ce soit en matière d'importation ou de protection fiscale. C'est la raison pour laquelle Antony SAME, Responsable Partenaires Microsoft Afrique Centrale pense qu' « après avoir raté le développement industriel du 20e siècle, le Cameroun est entrain de passer à côté du développement technologique ». Pourtant le Magistrat MOUNOM MBONG, Président de la Cour d'Appel d'Ebolowa, qui a par ailleurs participé à l'élaboration de la loi n° 2000/011 du 19 décembre 2000 relative à la gestion des droits d'auteurs au Cameroun, pense que l'Etat devrait y accorder un point d'honneur, puisqu'« Il s'agit d'un domaine éminemment important, qui influe sur le développement social, intellectuel, industriel et économique de la nation». Le rôle de l'Etat est d'autant plus ambigu que non seulement il est le garant de la bonne application du droit en matière d'utilisation de logiciels, mais il est aussi le plus grand pourvoyeur de la piraterie. Pour Anthony SAME, « l'Etat camerounais est le premier fraudeur ». En effet, en consultant le fichier des appels d'offre d'entreprises informatique en 2008 chez Hiperdist Cameroun SA, près de 82% d'ordinateurs achetés pour le compte des entreprises étatiques (ministères, mairies, entreprises publiques, etc.) ont été livrés sans système d'exploitation.

ii. Absence de culture du respect de la Loi 

Nombre d'utilisateurs Camerounais restent enclins à la perte des valeurs morales et éthiques, ce qui justifie la propension des fléaux comme la corruption, les détournements, la piraterie, etc. Pour Mme Elise MBALLA, Présidente du conseil d'administration de la SOCILADRA, «dans notre pays, il y'a un fort développement de la banalisation de la fraude, et c'est pourquoi la fraude gangrène l'économie nationale. Le vrai problème du développement de la piraterie, c'est le refus de payer. Il faut que les gens apprennent à payer les droits d'utilisation des logiciels, comme ils le font pour l'électricité ou l'eau». Cette situation est d'ailleurs généralisée dans la plus part des pays émergeants ou en voie de développement. D'après le rapport 2008 de la Business Software Alliance, il existe plus de logiciels piratés dans ces pays que dans les pays développés, comme nous pouvons l'apercevoir à travers le graphe ci-dessous :

Figure N° 7 : Proportions de la piraterie entre pays émergeants et pays développés

iii. Une Opposition entre les secteurs formels et informels

Une autre cause de la piraterie est celle de l'opposition entre les secteurs formel et informel. En effet, la propension de la piraterie au sein des entreprises au Cameroun est développée par des jeunes ingénieurs sans emploi, qui sont prêts à tout pour gagner un peu d'argent. L'un d'entre eux que nous avons rencontré, et qui a souhaité garder l'anonymat déclare : «J'ai fini mes études à l'école polytechnique depuis trois ans et je n'ai pas trouvé d'emploi. C'est grâce aux copies de logiciels que j'installe dans les entreprises que je parviens à vivre». Parallèlement, les entreprises formelles se disent incapables de recruter ces ingénieurs par manque d'opportunité de marchés ; Pour Auberlin TAKUGANG, Expert Microsoft et Directeur Général de la société SIGA, « à cause de la piraterie nous ne sommes pas en mesure de recruter de nouveaux ingénieurs ». Nous nous retrouvons donc dans un cercle vicieux dans lequel le secteur informel prime sur le secteur formel, au détriment de l'économie nationale.

b) Causes au niveau des éditeurs de logiciels

i. Faibles présence locale des gros acteurs de l'informatique mondiale

La plupart de grands éditeurs de logiciels n'accordent pas une grande importance au marché de l'Afrique, et préfèrent se concentrer sur les grands marchés européens et américains. Au Cameroun, seul Microsoft, CISCO et ORACLE sont effectivement représentés ; aucune présence de leaders tels que IBM, ADOBE, SAGE, SAP, Macro Média, etc. Cette absence ouvre la voix à un laissé aller flagrant ou chacun pirate en toute quiétude.

ii. La complexité du concept de licence

Chez les éditeurs de logiciels, les produits se déclinent en un ensemble de contrats de licences complexes et parfois très difficilement compréhensibles, qui tiennent compte du nombre d'ordinateurs, du nombre de licences, de la nature des produits, etc. Chez Microsoft par exemple, ces contrats sont regroupés dans un programme dénommé «Microsoft licensing Program» dont voici les principaux détours :

- La licence OEM : (Original Equipment Manufacturer)

Elle est commercialisée uniquement avec un ordinateur neuf, et est liée pour la vie à la machine avec laquelle elle est vendue. Ceci signifie que lors d'un changement de machine, la licence OEM est perdue. Ce mode de licence présente deux avantages : une économie sur le coût d'acquisition, et une simplicité de mise en oeuvre. En effet, en termes de cout d'acquisition, OEM représente la solution la moins couteuse de tous les programmes de licences Microsoft. Seulement, elle est soumise à un certains nombre de limites et de conditions ; par exemple, l'installation d'une copie sur un autre ordinateur n'est pas autorisée, et le changement de langue est interdit.

- La licence FPP (Full Packaged Product)

Commercialisée en boite dans les magasins et autres grandes surfaces, la licence FPP est la formule la plus couteuse à l'achat des logiciels Microsoft. Le produit est conditionné dans un emballage esthétique, comportant des CDs d'installation et une documentation complète. En général, FPP est destinée aux particuliers qui font des achats ponctuels, et aux entreprises pour des quantités très faibles (inferieures à cinq licences).

- La software assurance (SA)

La SA est une offre d'assurance et de maintenance logicielle souscrite par une entreprise (ou un particulier) pendant une période, afin de bénéficier d'un certain nombre de services supplémentaires. Il s'agit des services tels que la formation, les supports en ligne sur Internet ou sur sites chez le client, les mises à jour gratuites des logiciels assurés, le droit d'utilisation gratuite des logiciels sur les ordinateurs à domicile ou sur les ordinateurs portables, etc. Pour Microsoft, « la SA permet de rentabiliser l'investissement réalisé sur les logiciels à travers de nombreux avantages permettant de gagner du temps et de l'argent tout en améliorant l'efficacité». En termes de prix, la software assurance représente environ 25% de la valeur du produit par an.

- Les contrats en volume

Microsoft a mis en place des programmes de licences en volume conçus spécialement pour répondre aux besoins des entreprises. Avec ces programmes, l'entreprise peu mieux planifier et gérer son budget informatique de façon plus fiable. Ces programmes se déclinent en quatre options, soit l'achat au contant (Open), l'achat à crédit avec une couverture totale ou partielle du parc informatique (Open Value), l'achat à crédit avec une couverture totale du parc (Open value Entreprise), ou la location (Open Value Subscription). La compréhesion de ces programmes de licence peut etre facilitée par l'ordinogramme ci-dessous :

Source : Le guide des licences Microsoft 2008

Figure N° 8 : Ordinogramme du programme des licences Microsoft

c) Causes au niveau des décideurs d'entreprise

i. L'aspect non physique des logiciels

L'aspect non physique des logiciels n'encourage pas les décideurs d'entreprises à y engager de grands moyens financiers. Le logiciel est ainsi géré comme une charge et non un investissement.

ii. La problématique du prix 

Avec les 38,27% de taux de douane, le cout d'acquisition des licences revient très élevé au Cameroun par rapport aux autres pays de la sous-région. Par exemple, une licence Windows XP Professionnel achetée chez Microsoft à 88 Euros, revient au Cameroun chez Hiperdist (Grossiste), en tenant compte de 5% environs pour le transport, à
(88 x 656) x 1,3827 x 1,05 = 83 811 Francs.


Or en ajoutant une marge de 5%, les 19,25% de TVA et 1% de précompte, le prix de vente chez les revendeurs est de : 83 811 x 1,05 x 1,1925 X 1,01 = 106 000 Francs CFA TTC. Et si le revendeur doit y ajouter sa marge à 10%, on aura donc comme prix de vente officiel 106 000 x 1,1 = 116 590 Francs CFA. Actuellement sur le marché camerounais, le prix public de Windows XP est de 120 000 Francs TTC, alors qu'au Gabon voisin, la même licence est facturée à 85 000 Francs TTC.

iii. L'absence de politique de gestion du système d'information au sein des entreprises

Beaucoup d'entreprises fonctionnent de nos jours sans véritable politique de gestion du système d'information. Chacun achète, chacun installe, chacun télécharge, etc. Cet état de chose s'est empiré avec l'explosion de la technologie Internet au sein des entreprises. En effet, Internet est un réseau informatique mondialement ouvert. Perçu comme un espace nouveau de liberté d'expression et d'échange, il est devenu pour les entreprises un média stratégique de communication, et activé sur la quasi-totalité de portes de travail au sein des entreprises. Cependant cette aubaine c'est très vite transformée en source de problèmes du fait de l'absence de politique réel de son utilisation. Cette absence de politique entraine : Des pertes énormes de temps de travail sur des sites de messagerie et de dialogue en direct (MSN, yahoo messenger, etc.), l'utilisation à titre personnel et non professionnelle de la connexion Internet, La saturation des bandes passantes par des téléchargements des logiciels piratés ou en provenance de sites Internet malsains etc. D'après une analyse publiée en 2006 par l'Agence PANEL, en France, 40% environ de mails envoyés par des travailleurs aux heures d'ouvertures, sont à caractère personnel, alors que 52% de personnes qui se connectent volontairement sur un site Web n'y vont pas pour des raisons professionnelles.

Tout au long de ce premier chapitre, nous nous sommes attelés à bien cerner les contours du problème de la piraterie, en analysant en profondeur l'approche conceptuelle du phénomène dans les entreprises camerounais. Ceci nous a permis, dans la première section, de comprendre les concepts de base comme ceux du logiciel, de la licence, et de la piraterie, puis de dégager les différents niveaux d'implications de la pratique de la piraterie des logiciels sur l'entreprise. Nous avons ainsi compris que ces implications pouvaient être de plusieurs ordres, et notamment financier, technique, d'image, et légal. Dans la seconde section, nous avons mis en évidence les différentes formes des pratiques de piraterie dans le marché du logiciel informatique, et par la suite, en cherchant à déterminer les causes de la pratique de la piraterie des logiciels au sein des entreprises, nous avons trouvé qu'elles pouvaient se situer soit au niveau de l'Etat, soit au niveau des décideurs d'entreprises, ou alors au niveau des éditeurs de logiciels eux-mêmes. Cependant, la question qui continue à parcourir nos esprits est celle de savoir qui est Hiperdist Cameroun S.A, quelle est sa place dans le canal de distribution des logiciels, et quelles solutions d'organisation propose-t-elle pour la lutte contre la piraterie des logiciels au sein des entreprises ?

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984