I-3 Les objectifs de la recherche
Ces objectifs sont de deux ordres. Il s'agit de l'objectif
scientifique et de l'objectif d'application pratique.
I-3-1 Objectifs scientifiques
Objectif principal :
Identifier les diverses motivations d'orientation des nouveaux
bacheliers vers les écoles de BTS.
Objectif secondaire :
Montrer les acteurs qui interviennent dans l'orientation des
nouveaux bacheliers vers les écoles de BTS.
I-3-2 Objectifs d'application pratique
Objectif principal :
Aider à l'orientation des nouveaux bacheliers.
Objectif secondaire :
Donner une vision pour l'installation des écoles de
BTS afin de régulariser cette situation.
I-4 Revue de la littérature
Dans ce contexte, nous allons essayer de décrire
brièvement les sous thèmes se rapportant à notre question
de recherche.
- La représentation de l'avenir
La représentation de l'avenir que font les adolescents
montre des différences importantes lorsqu'on passe d'une
catégorie socioprofessionnelle à l'autre ou d'une filière
scolaire à l'autre. On envisagera ici le niveau des aspirations
professionnelles et des déterminants.
D'après les résultats de l'enquête
conduite par J ; ROUSSELET (1975), chacun des élèves
interrogés tend à viser le niveau socio - économique juste
supérieur à celui de son père et rarement plus haut. En
outre, les jeunes conçoivent la réussite professionnelle en
fonction de leur origine sociale. Tandis que les fils des cadres et des membres
de la profession libérale mettent l'accent sur l'intérêt
des tâches ou la perspective d'une vie responsable et
indépendante, les enfants d'ouvriers spécialisés attachent
plus de prix aux avantages matériels et à la
sécurité de l'emploi face aux aléas de la conjoncture
économique. Outre la catégorie socio professionnelle, l'attitude
éducative du père parait influencer la représentation de
l'avenir professionnel des adolescents. Ainsi, l'existence de relation
étroite entre le père et le fils se traduit par un plus grand
intérêt vis-à-vis des valeurs traditionnellement
liées au travail et à la réussite chez l'adolescent. Par
contre si le père est « absent », les jeunes
attachent plus de prix aux valeurs matérielles et à la
réussite professionnelle.
A l'intérieur du système scolaire, de nouveaux
facteurs comme la durée de formation, la nature du métier attendu
conjuguent leurs effets avec ceux des facteurs socio économiques
précédemment évoqués pour déterminer
l'orientation scolaire de l'adolescent. Ainsi chez les étudiants des
écoles de BTS, la représentation de l'avenir professionnel parait
se structurer autour de la durée de la formation et du diplôme
attendu au terme de cette formation. A. CHASSIGNAT (1980) nous démontre
cela à la page 166. Les jeunes qui espèrent obtenir le BTS se
distinguent de leurs camarades par l'espoir plus affirmé de trouver un
emploi dans la spécialité apprise et de s'élever dans la
hiérarchie professionnelle, grâce à la formation
reçue. Ils expriment en outre un plus haut niveau d'aspiration
concernant l'emploi escompté à l'âge de 25 ; 30 ou 40
ans.
Il s'agit là de simples représentations et attentes
que l'expérience pourra ébranler ou dissiper.
- Illusion des élèves et portée
professionnelle des écoles de BTS
Les élèves des établissements
d'enseignement technico - professionnel formulent en général des
appréciations nuancées concernant la valeur et la portée
de la formation qu'ils reçoivent. Mais ils ne peuvent échapper
à l'emprise des stéréotypes de l'opposition entre
formation générale et formation professionnelle. Selon J.
MARKIEWIEZ-LAGNEAU (1985), lorsqu'on demande à ces étudiants de
comparer leur institution avec les autres formes d'enseignement
supérieur, on relève une tendance à rejeter les
Facultés de Lettres et de Sciences. Pour ces élèves qui se
sont exprimés, tandis que les disciplines de l'enseignement moderne
seraient vouées à l'enrichissement de la personnalité
morale, les disciplines de l'enseignement technico-professionnel sont
considérées comme répondant le mieux aux besoins des
élèves.
Quand à la fonction de différenciation sociale,
elle semble se refléter dans la manière dont les
élèves des écoles professionnelles se situent par rapport
à leurs camarades de l'enseignement général. En raison de
l'étendu des programmes de l'enseignement technico-professionnel, ces
élèves se jugent plus cultivés que les autres. Ils
espèrent en outre bénéficier de meilleurs salaires et de
plus grandes possibilités de promotion professionnelle qu'eux.
Cependant cette portée socioprofessionnelle est
perçue d'une manière plus limitée, plus critique à
mesure que les élèves se rapprochent du terme de leurs
études. Ainsi à la question de savoir la valeur culturelle de
l'enseignement technico-professionnel, les élèves ont
répondu :
« On nous fabrique comme des
robots »
« On nous apprend à être asocial,
inhumain, à ne penser qu'aux bénéfices, aux prix de
revient »
« On nous apprend à faire une
ségrégation ouvrier - cadre, stupide et bien
capitaliste »
Ces réponses paraissent illustrer la fonction
« d'inculcation idéologique » qui
caractériserait le système scolaire en général et
l'enseignement professionnel en particulier. En outre la perspective d'entrer
dans le monde du travail paraît susciter une prise de conscience de
certaines insuffisances dans l'enseignement dispensé par les
écoles professionnelles. Ces insuffisances concernent tant la
préparation aux exigences techniques et sociales du travail que les
problèmes des débouchés, des salaires ou de la promotion
professionnelle. Un rapport analogue du MENR (Ministère de l'Education
Nationale et de la Recherche) et du METFP (Ministère de l'Enseignement
Technique et de la Formation Professionnelle ;2002), met en relief les
rapports entre l'éducation et le marché de l'emploi. Le rapport
s'est d'abord intéressé à la performance des formés
quand ceux-ci ont quitté le monde éducatif et sont entrés
dans leur vie d'adulte sociale et productive. Il s'agissait pour cette
équipe d'étudier les éléments d'efficacité
externe. Autrement dit, il fallait voir si ce que les jeunes ont appris dans
ces écoles de formation les ont effectivement préparés
à une vie sociale et économique favorable pour eux. De cette
étude, il ressort du bilan formation - emploi que le système dans
sa partie haute présente une structure
déséquilibrée. Le rapport souligne que l'augmentation
considérable des effectifs dans l'enseignement supérieur en
général et dans l'enseignement technique en particulier n'est pas
en relation avec les demandes de l'économie qui ont été
pour ce niveau de qualification très réduites. Chiffres à
l'appui, environ 300 emplois sont disponibles annuellement alors que le
système produit en moyenne par année 1500 diplômés.
Cela fait donc une production qui vaut plus de 5 fois le niveau d'absorption du
marché d'emploi.
Bref, l'ensemble des formations menant au métier est
« disparate », mal adapté aux besoins des
entreprises.
- Influence du monde du travail
On peut penser que l'on ouvre des sections qui offriraient des
possibilités de débouchés pour les élèves
des écoles professionnelles. Et qu'ainsi l'existence des
établissements ou des sections correspond assez près des
réalités de la vie économique et dépend du
marché de l'emploi. Cela est vrai si l'on considère globalement
l'ensemble des emplois et l'ensemble des options offertes. On prépare
bien à des métiers qui existent, qui sont définis et pour
lesquels on a tenté de préciser les compétences requises
et les possibilités de débouchés.
Mais en fait, certains élèves travaillent
ensuite dans des professions autres que celles pour lesquelles ils ont
été formés. Sur le marché de l'emploi, les
diplômes ne sont pas toujours reconnus. Il n'y a pas donc une
adéquation parfaite entre l'enseignement technico-professionnel et le
monde du travail. Il n'est pas automatique qu'à la sortie des
études professionnelles, l'emploi est garanti. Il ne s'agit pas ici des
problèmes de chômage. Cette inadéquation peut s'expliquer
par le fait que le marché du travail évolue pendant la
scolarité et que les conditions ne sont plus les mêmes quand
l'élève sort de son étude.
C. GRIGNON (1987), à la page 364 ; montre que ce
défaut d'adaptation à la demande de main d'oeuvre renforce les
déséquilibres entre l'offre et la demande et permet le
« bon » fonctionnement du système économique.
Quoi qu'il en soit des raisons profondes de cette inadéquation,
l'enseignement dans les écoles de BTS fournit tout de même aux
employeurs une partie de la main d'oeuvre qualifiée. En
conséquence il subit de sa part un certain nombre de pressions à
différents niveaux.
- La spécificité de l'enseignement
technologique et professionnel
La spécificité d'un établissement
technico-professionnel réside en ce qu'il prépare à un
métier. Dans les établissements d'enseignement professionnel, on
distingue les disciplines d'ordre pratique et théorique. La brochure de
l'ONISEP (Office National d'Information Sur les Enseignements et les
Professions) en France précise à ce propos :
« C'est le passage constant du concret à l'abstrait, du
pratique au théorique et inversement qui parait en être la
principale caractéristique ». Cette division entre
pratique et théorique est fréquemment évoquée. Et
elle découlerait de l'idée plus ou moins explicite, qu'il y a des
esprits abstraits et des esprits concrets et que l'enseignement
technico-professionnel est destiné aux seconds. N. BOUSQUET
(1990 :p.126), exprime en ces termes que « l'on justifie la
séparation entre travail manuel et travail intellectuel en isolant par
des pratiques pédagogiques le concret et l'abstrait ».
Ainsi un autre regard distingue l'élève des
écoles de BTS des autres adolescents scolarisés. Sa semaine
à l'école se rapproche des horaires du monde du travail. S'il
prépare un BTS il peut avoir jusqu'à 35 heures de cours par
semaine contre 15 à 20 heures s'il envisage une licence à
l'Université. Ses semaines scolaires sont chargées. La brochure
de l'ONISEP précise à ce sujet que la comparaison entre
l'élève de l'enseignement modèle ou classique et
l'élève des écoles professionnelles relève une
« variété des tâches, leur intensité et la
quantité du travail hors de l'école » pour le dernier.
Pour un étudiant qui entre dans un établissement de BTS, les
cours pratiques en atelier exigent de lui plus d'attention qu'un cours de
français dans l'enseignement général.
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