IV-4 : Les sources d'information qui influencent
l'orientation vers les BTS
La question du processus d'orientation des étudiants
vers les BTS peut permettre de comprendre et d'analyser la vision des
étudiants eux même vis-à-vis de leurs études et de
leur devenir professionnel. Car il nous semble que les étudiants
n'arrivent pas à déterminer ce qui leur plait, et ce dans quoi
ils ont des chances de réussir. Ils se trompent souvent de parcours
après s'être fait des illusions face à certaines
disciplines universitaires. Les futurs étudiants se font donc des
représentations souvent faussées. De ce fait l'avenir peut
devenir une angoisse pour ces étudiants qui sont appelés à
devenir l'élites de la société. C'est pourquoi des
informations suffisantes sur les filières sont nécessaires aux
futurs étudiants. Ces derniers reçoivent souvent ces informations
des mass médias, de leur réseau amical et de leurs parents. Les
données de ces acteurs s'entremêlent pour influencer le choix des
filières des futurs étudiants.
Partant des parents, les étudiants
reçoivent d'eux différentes sortes d'influences. Leur statut
socioprofessionnel est un déterminant fort dans le choix des
filières de leurs enfants (Tableau 8). Ils
sont par ailleurs influencés dans leurs décisions de formation
par le statut financière de leur parent. Hormis ces facteurs imposants,
certains parents interviennent dans la vie estudiantine de leurs enfants en
prenant à leur place la décision de leur formation sans tenir
compte du goût, de la formation antérieure et de la
capacité de réussite de ces derniers. Concernant cette situation,
le degré d'implication des parents dans la vie de leurs enfants est
délicat. C'est l'étape où se façonnent
progressivement les intentions professionnelles et sociales. C'est aussi un
cheminement vers la vie adulte qui s'opère durant cette période.
Et dépendre encore de ses parents de tout point de vue suscite
frustrations, gênes et parfois désapprobations pour les jeunes
adultes en quête de reconnaissance sociale et d'affirmation de soi. A
travers ces sentiments, l'accès au monde du travail représente
véritablement une affirmation de soi, une reconnaissance sociale et
l'affirmation d'un statut d'adulte. Cela est très présent dans
les propos de nos enquêtés et principalement chez les
étudiants qui ont quitté le domicile des parents depuis le
début de leur cursus universitaire et qui se sont construits une vie
singulière, une vie d'adulte (Tableau 4).
Ensuite la dimension affective n'est pas sans
relation avec les choix de formation des nouveaux bacheliers. La
rationalité et l'utilitarisme n'expliquent pas toujours les
comportements et les réflexions des étudiants dans l'orientation
scolaire. La relation affective joue sur les décisions, oriente les
parcours scolaires et professionnels. Au regard des trajectoires scolaires des
étudiants enquêtés et tout particulièrement de leurs
orientations après l'obtention du baccalauréat, les relations
amicales prennent toute leur importance (Graphique
15). En ce sens, les entretiens réalisés avec nos
enquêtés font des réseaux de sociabilité une
dimension importante qui influence les choix d'orientation scolaire. La famille
et le groupe des pairs constituent certainement les deux principaux
réseaux de sociabilité de l'étudiant. Pour ce qui est de
la famille, nous l'avons dit précédemment, les relations
entretenues par l'étudiant avec son milieu familial joue un rôle
évident sur le rapport entre l'étudiant et ses études, sur
son processus d'orientation scolaire et professionnelle, comme sur le processus
de construction des identités personnelle et sociale. Eu égard au
réseau amical, la sociabilité qui se tisse entre pairs
apparaît également dans les interviews comme une dimension majeure
vis-à-vis de la question de la recherche. Les étudiants
enquêtés fréquentent d'autres étudiants. Les
relations entre amis s'articulent autour d'activités de loisirs, de
soirées entre amis, des sorties culturelles et d'autres. Ces cercles de
relations amicales et affectives représentent une aire de discussion,
d'échanges, et d'informations où les questions de l'orientation
scolaire et de l'avenir professionnel sont évoquées. Il s'y est
échangé des perceptions du monde, du monde du travail, des
études et des expériences diverses. On fait part à ses
amis de sa connaissance des orientations des études supérieures,
de sa connaissance des concours d'entrée dans diverses écoles,
etc...La question des débouchés professionnels y est
abordée. On discute de la valeur des diplômes sur le marché
du travail. C'est tout un échange sur l'orientation scolaire et l'avenir
qui fait discussion. Les perceptions, les représentations et les
expériences se transmettent et viennent s'intégrer comme
connaissances dans une réflexion personnelle sur son avenir. L'affectif
qui supplante certains échanges fait de ceux-ci un moyen
d'appréciation loin d'être négligé par
l'étudiant lors de ces choix. Les connaissances et les perceptions qui
s'échangent ont un rôle certain dans le processus de prise de
décision et dans l'appréciation que chacun se fait de sa
situation. Lorsque du réseau de sociabilité (groupe d'amis)
auquel appartient l'étudiant, beaucoup d'amis travaillent la pression de
l'accès à l'emploi, les questions financières accentuent
l'envie et le désir d'entrer dans le monde professionnel. Le besoin de
reconnaissance sociale que permettent l'emploi et l'autonomie financière
s'intensifie. De ce sentiment découle l'envie d'une orientation
permettant l'accès rapide à l'emploi.
Par ailleurs, dans le processus d'orientation
scolaire, l'étape de l'information a vu son importance s'accroître
ces dernières années compte tenu de la multiplication des
sources. A chaque rentrée scolaire, l'orientation scolaire et
professionnelle offre un business à la masse des sources d'information.
Les imprimeries produisent des supports auxquels s'ajoutent les informations
sur les sites d'internet. Ces sources sont venues agrandir les champs
traditionnels d'information que sont les radios et les
télévisions. Parmi ces sources de renseignement, l'internet prend
de l'ampleur, mais joue encore un rôle marginal dans ce processus
d'orientation. Auprès de nos enquêtés, les magasines ou les
brochures sont encore plus citées dans ce processus comme sources
d'information. Au dessus de ces sources, les télévisions et les
radios sont plus consultées à l'approche des rentrées
scolaires par les étudiants (Graphique 16)
dans leur processus d'orientation. Ainsi on ne peut nier l'influence que
produisent ces publicités sur le choix des filières des
étudiants. L'information est largement accessible et libre
d'accès. C'est ce qui produit l'amalgame dans l'esprit des
étudiants. Ils n'interprètent pas de la même manière
les informations issues de ces différentes sources. L'information n'est
pas considérée lorsqu'elle est issue des sources ne faisant pas
autorité. Et l'autorité accordée aux sources varie selon
l'origine sociale des étudiants. Toutefois nombre de ces
étudiants n'accordent pas complètement confiance aux sources
écrites. Ils préfèrent les sources reposant sur
l'oralité.
V SUGGESTIONS
Il existe dans des universités
développées des mécanismes permettant de suivre les
étudiants et de leur fournir une aide lorsqu'ils semblent avoir du mal
à se maintenir à un niveau. C'est une approche interventionniste
qui confère à l'institution la responsabilité d'assurer la
progression des étudiants. Mais dans les universités des pays
sous développés comme l'université de Lomé, les
étudiants semblent de ce point de vue laissés à
eux-mêmes. Les activités de conseils scolaires sont passives,
sinon non fonctionnelles. La fourniture d'informations en vrac,
caractéristique des pratiques de conseils les plus répandues, ne
donne aucunement aux étudiants la possibilité de se
préparer à la prise de décision efficiente. La
conséquence est de laisser les étudiants se perdre dans des
variétés de programmes sans idées claires sur les
objectifs et sur les moyens de les atteindre. Les écoles de BTS
accueillent aujourd'hui de nombreux étudiants qui n'ont qu'une
idée approximative de ce que seront leurs études. Par ces
orientations, par défaut d'informations, un nombre important
d'étudiants se retrouvent dans les écoles de BTS alors que leurs
parcours scolaires ne les ont pas préparés à ce type de
cursus.
Ainsi, il s'agit de définir les activités de
l'orientation scolaire en fonction des besoins et des priorités
réellement identifiés. Cette définition doit donner aux
intéressés conscience du fait qu'il s'agit d'une étape
basée, non seulement sur l'étude des notes du secondaire, mais
aussi de la connaissance de la psychologie, de l'environnement
économique, son évolution ainsi que ses règles de jeu. Les
professionnels de l'orientation devront être préparés
à restituer ce contexte global non seulement aux étudiants, aux
familles, mais aussi aux communautés enseignantes. Les conseillers
d'orientation jouent un rôle nécessaire pour les étudiants.
De toute évidence, les étudiants sont aujourd'hui, dans la
majorité des cas mal orientés. Les conseillers d'orientation
n'ont pas grande connaissance des réalités de l'enseignement
supérieur et surtout du monde du travail avec ses
débouchés. Il est donc urgent de repenser leur formation.
S'il est vrai que nos conseillers d'orientation sont moins
formés, il est aussi vrai que les étudiants ne recherchent pas
assez d'informations sur les options de formation pressenties. Les
étudiants ne peuvent s'orienter vers les filières à leurs
besoins. L'information de base sur les conditions requises pour réussir
les filières est nécessaire. Le choix réfléchi
d'une filière doit faire intervenir des aspects comme ; une bonne
connaissance de soi, de ses aptitudes, de ses capacités, de ses
intérêts, de ses ambitions, de ses ressources ainsi que de ses
limites. Une connaissance des conditions de réussite, des avantages et
inconvénients, des opportunités et des perspectives s'attachant
à cette filière est importante.
Aussi, dans cette étude, l'influence des parents et
d'autres membres de la famille est généralement
considérée comme l'un des facteurs les plus importants dans le
choix des filières des étudiants. Cette influence peut dans
certains cas être bénéfique, par exemple lorsque les
parents offrent à leurs enfants des perspectives sur une grande
variété de formations et sur les conditions de réussite
correspondantes. Par contre, dans d'autres cas, cette influence joue un
rôle négatif dans la mesure où elle réduit les
options auxquelles peut prétendre leurs enfants. La répression
des aspirations de l'enfant peut avoir lieu aussi bien dans les familles, par
exemple lorsqu'un père contraint son fils à emprunter la
même voie que lui. Dans d'autres cas encore, les parents ne disposent pas
d'une connaissance suffisante du monde qui les entoure pour aider leurs
enfants. C'est dans ce cadre qu'une information sur les filières, et les
débouchés auxquels elles aboutissent est nécessaire aux
parents, ainsi que l'importance des services d'orientation.
Par ailleurs l'OBTS a un rôle déterminant
à jouer dans ce processus de revitalisation des services d'orientation
des nouveaux bacheliers vers les BTS. Il serait d'abord intéressant que
l'OBTS revoit les programmes avec les chefs d'entreprises, les professionnels
du marchés du travail et avec les promoteurs d'écoles de BTS afin
d'adapter les programmes de formation sur les réalités du
marché d'emploi togolais. Ensuite l'OBTS doit reconsidérer son
objectif qui est de répondre aux besoins économiques et sociaux
du Togo en tenant compte de la vie professionnelle future des étudiants.
Ceci dit, l'office doit mettre en place un service d'information et
d'orientation qui sera chargé d'informer et de conseiller les nouveaux
bacheliers sur les tenants et les aboutissants de chaque filière de BTS.
Sa mise en accusation serait donc de ne pas s'interroger sur la part qu'il a
aux dysfonctionnements du système des BTS. Il lui faut donc s'interroger
sur les défaillances des mécanismes mis en place pour satisfaire
les objectifs que le système s'est donnés et sur les effets de ce
dysfonctionnement sur la société et les individus à court
et à long terme.
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