CHAPITRE III : CONTRAINTES DIVERSES
La politique récente de l'Etat a favorisé la
péche artisanale qui connaIt, ces dernières années, un
développement rapide. Cependant, de nombreux problèmes existent.
L'analyse stratégique de ce sous secteur a permis de mettre en exergue
un certain nombre de contraintes majeures a relever pour permettre un
développement des activités de pêche16.
I- Les contraintes techniques et les problèmes
d'aménagement
Le long de la petite Côte, ces contraintes sont
relatives a la faiblesse du niveau d'équipement, aux problèmes
d'aménagement des sites, au manque d'organisation et a l'absence de
formation qui hypothèquent le financement du sous-secteur.
1. Au niveau de la transformation artisanale
Les contraintes techniques et les problèmes
d'aménagement sont plus manifestes au niveau de la transformation
artisanale des produits. Cette activité, principalement feminine,
consiste au fumage et au séchage du poisson. Cependant, elle
éprouve d'énormes difficultés liées : a
l'écoulement des produits, a l'accès des transformatrices au lieu
de travail surtout en hivernage,
16 Ministère de la pêche et des transports
maritimes, octobre 1998, Analyse descriptive et politiques
stratégiques, Plan directeur des pêches maritimes
volume I, république du Senegal, 96 pages
l'insuffisance de magasin de stockage et a la gestion des
ordures et déchets de transformation (Cf. Photo 1).
Photo 1: Déchets et ordures de la
transformation jetés par terres sur le site de Khelcom
Source: TINE M., Juin 2009, Khelcom
Les sites de transformation de Khelcom et de Mballing
présentent aussi certaines insuffisances et manquements dont :
· le manque d'hygiène et de salubrité des
sites, des équipements (claies, bacs, bassins) et des outils de travail
(Cf. Photo 2),
Photo 2: Claie de séchage rudimentaire
et non hygiénique
Source: TINE M., juin 2009, Khelcom
37
· l'insuffisance en équipements (exemple :
claies de séchage, Bac de salage, fours de fumage...) a
été signalée par 100% des transformatrices
interrogées dans les deux sites enquêtés.
· le manque d'aménagement (occupation anarchique
et absence d'équipements) des sites conformément aux principes du
codex alimentarus en la matière a savoir la marche en avant, le non
entrecroisement des courants de circulation, la séparation des secteurs
souillés des secteurs non souillés est noté a Mballing et
a Khelcom;
· le manque d'eau courante, d'électricité
caractérise les sites ;
· l'absence de cloture des sites;
· l'absence d'infrastructures d'accompagnement :
Infirmerie, garderie d'enfants, abris de repos,
· salle de réunion, entrepôts, magasins
etc.
Outre ces contraintes, toutes les techniques utilisées
par les femmes transformatrices passent par l'emploi des radiations solaires.
Les produits sont exposés a l'air libre avec tous les risques de
l'environnement (humidité, poussière, pluie, insectes,...). Par
ailleurs, ces techniques ne permettent pas une grande production; ce qui
explique l'importance des pertes post capture et ceci malgré la
surexploitation de la ressource. L'absence de maItrise de certaines techniques
et technologies utilisées, a généré des
déficiences dans l'exploitation optimale de la ressource.
Donc dans l'ensemble, les conditions dans lesquelles les
poissons sont transformés ne sont pas toujours hygiéniques et les
technologies utilisées sont empiriques. Le stockage du poisson se fait
dans des lieux non aménagés (Cf. Photo 3).
Ces limites réduisent aujourd'hui l'accessibilité
de la production nationale au marché européen du fait des normes
tres restrictives et tres contraignantes imposées par l'Union
Européenne.
Au-delà de cet environnement technique, l'insuffisance
des mesures sécuritaires en mer et l'inadaptation du système de
crédit appliqué a la péche artisanale, constituent aussi
une autre source de pesanteurs dans la rationalisation et l'optimisation des
conditions d'exploitation. A côté de ces contraintes qui
pèsent plus sur la transformation artisanale existent d'autres qui sont
spécifiques a la péche proprement dite.
Photo 3 : lieu de stockage des produits
Source: Tine M, juin 2009, Mballing 2.
Au niveau de la pêche
Les technologies utilisées contribuent a la degradation
des ressources halieutiques. Par consequent, certains stocks montrent des
signes de sensible surexploitation.
La zone maritime de la Petite Côte se caractérise
par une grande diversité biologique. Les ressources exploitées
comprennent quatre groupes dont les caractéristiques
bioécologiques et socio-économiques sont différentes. Il
s'agit des ressources pélagiques hauturières et
côtières, et des ressources démersales
côtières et profondes. Ces ressources sont aujourd'hui
surexploitées. La généralisation de la motorisation et
l'introduction de la Seine tournante coulissante dans la période
1963-1991 ont augmenté la capacité de prélèvement
sur la ressource pour répondre a une demande grandissante. Il en a
résulté une surexploitation de la ressource.
Le long de la Petite Côte et particulièrement a
Mbour et a Joal, cette surexploitation de la ressource commence a se faire
sentir avec la raréfaction du poisson et la migration des
pécheurs vers des zones plus prometteuses comme les côtes
mauritaniennes, gambiennes et méme guinéennes. De l'avis des
pécheurs, elle est inquiétante et des mesures doivent être
prises car des zones autrefois très riches sont aujourd'hui en situation
différente. Par exemple, les ressources pélagiques
côtières ne sont surexploitées que dans la Petite
Côte.
39
Par ailleurs, la dégradation de l'environnement marin
est un handicap au développement de la péche artisanale dans la
Petite Côte. Le déversement de polluants (IT(AGEL, des
Hotels,...), des déchets domestiques, la dégradation de l'habitat
naturel des poissons par certaines techniques de péche menacent
l'écosystème marin et littoral. La péche souffre aussi
d'un manque d'équipements et d'un problème de financement. Ces
difficultés sont imputables aux insuffisances notées dans
l'organisation des acteurs.
II- Les facteurs socio-organisationnels : une
contrainte au développement de la Pêche artisanale à Mbour
et à Joal
Les contraintes au développement de la péche
artisanale a Mbour et a Joal ne sauraient s'expliquer uniquement par des causes
d'ordre technique. << En effet, la péche artisanale comme en
témoigne de nombreuses expériences du passé, souffre de
pesanteurs et de soubassements a dominante sociologique, lesquels inhibent bien
d'initiatives de structuration et de dynamisation du sous-secteur
é.17
La configuration sociologique du secteur de la péche,
au niveau des pratiques et au niveau des acteurs demeure un des points
saillants pour toute forme d'intervention et de redynamisation du secteur.
Cette configuration sociologique basée sur des considérations
familiales hypothèque le financement du secteur.
Longtemps considérée comme une activité
vivrière, la péche artisanale sénégalaise a
aujourd'hui, beaucoup évolué pour devenir un des piliers de
l'économie du pays. Cependant, si les techniques de péche se
modernisent pour répondre a une demande qui croIt, l'organisation
sociale des acteurs n'en fait pas autant. En effet, comme dans le passé,
cette organisation est basée sur des considérations familiales.
Moins que les transformatrices qui se regroupent le plus souvent dans de petits
GIE, les pécheurs s'organisent autour d'entités familiales qui
détiennent des pirogues. A Mbour et a Joal, la totalité des
pécheurs enquêtés travaille sur des exploitations
familiales. Ce mode d'organisation sociale est un handicap au
développement du sous secteur. Il ne permet pas un bon financement du
secteur. Or, le niveau et les capacités organisationnels des acteurs
dans
17 MSA (MS et associés), juillet 2002, Etude
préalable des composantes sociologique des sites des sites ou des futurs
aménagements du PAPA-SUD, Programme d'appui a la
pêche artisanale du 8Éme FED, page 9
leurs diversités continuent d'être les vecteurs
de réussite probable dans toute politique de développement du
sous secteur. En matière de financement par exemple, le credit
corporatif comme modèle de financement du secteur a échoué
grace a ce mode d'organisation sociale inadaptée.
Les autres facteurs et contraintes majeures du sous-secteur de
la pêche artisanale se déclinent aussi en termes de renforcement
de capacités qui est actuellement caractérisé par une
insuffisance de la formation des acteurs dans les différentes
filières d'activités, et en dotation factorielle qui ne peut
être comblée que par la mise en place d'équipement et
d'infrastructures18.
L'essentiel des acteurs de la pêche artisanale
sénégalaise est constitué d'analphabètes. Cette
absence de formation génère non seulement des défaillances
dans l'organisation, mais également des réticences dans toute
initiative venue d'ailleurs. Par exemple, les transformatrices déplorent
une insuffisance de leur capacité politique, professionnelle et
organisationnelle. Au plan politique, elles sont confrontées a un
deficit de capacité en négociation, communication et lobbying. La
faiblesse des organisations est perceptible dans leur structuration, leur
fonctionnement et dans la definition claire de leur perspective en terme de
développement. A Mballing, les femmes font face a des difficultés
pour mettre en place un comité de salubrit fonctionnel. En outre, les
G.T.E ne détiennent suffisamment pas de petit materiel (pelle, balaie,
brouette, bac a ordure) en quantité suffisante pour assurer la
propreté du milieu.
Le role socio-économique de la pêche artisanale
dans la Petite Côte est reel. Cependant, de nombreuses contraintes
pèsent sur son développement. Le diagnostic de ces contraintes
dans la Petite Côte et particulièrement a Mbour et a Joal a
révélé des facteurs techniques et socioorganisationnels.
Pour promouvoir le développement du sous secteur, il fallait surmonter
ces contraintes. C'est dans ce contexte que le gouvernement appuyé par
les partenaires au développement a mis en oeuvre le Programme d'Appui a
la Pêche Artisanale (PAPA SUD) dont la zone géographique
d'intervention s'étend de la Petite Côte étendue au delta
du Sine Saloum et a la region de Ziguinchor.
18 MSA (MS et associés), juillet 2002, Etude
préalable des composantes sociologique des sites des sites ou des futurs
aménagements du PAPA-SUD, Programme d'appui a la
pêche artisanale du 8Éme FED, 173 pages
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DEUXIEME PARTIE : AMENAGEMENTS DU PAPASUD DANS LA PETITE COTE :
MBOUR ET JOAL
Le gouvernement du Sénégal a inscrit au
programme indicatif national du huitième FED, un Programme d'Appui a la
Péche Artisanale (PAPA-SUD) d'un coüt global de 5,1 milliards de
francs CFA. Ce programme est cofinancé par l'Union Européenne
(63%) et l'AFD (Agence Francaise de développement) (37%).
Le PAPA-SUD a pour objectif global de contribuer au
développement durable de la péche artisanale en utilisant au
mieux les ressources halieutiques, et en améliorant les conditions de
travail des professionnels de la péche.
Le Projet a construit une série d'ouvrages et
d'aménagements dont la gestion est transférée aux
groupements d'intérêt économique interprofessionnels. Ces
aménagements s'inscrivent dans la politique de mise a niveau des
équipements et des installations de péche, engagée avec
l'application des normes européennes au traitement des produits de
mer.
Les bénéficiaires des aménagements sont
les professionnels du secteur de la péche ainsi que les riverains et
usagers du littoral a proximité des centres de débarquement et
aires de transformation aménagés, les agents des péches et
les élus des collectivités concernées.
Confiée a la cellule nationale de coordination, la
réalisation du projet a vu la participation nombreux partenaires dont :
le cabinet inter-technique, le groupement CDE SOECO, le Cabinet MIDAS, le
Cabinet APCO, le Cabinet MSA, le cabinet Tropica ... La synergie des forces de
ces différents partenaires a permis la réalisation
d'aménagements et la mise en place d'un dispositif socio-organisationnel
qui assure la gestion et l'exploitation des ouvrages.
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