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Croissance des dépenses publiques et incidence sur le développement au Cameroun: le cas du secteur éducatif

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par Romuald sostaine Foueka Tagne
Université de Yaoundé 2 soa - Master/ dea NPTCI 2009
  

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INTRODUCTION

La décennie 1990 peut être considérée comme celle du plaidoyer du développement humain durable sous l'impulsion des différentes agences du système des Nations Unies. Après la chute du mur de Berlin, le monde en développement, est profondément marqué par le changement des structures économiques. Cette dynamique du changement qu'accompagnent la remise en cause de l'interventionnisme étatique et la prise en main par les peuples de leur propre destinée, témoigne du triomphe de l'esprit de l'homme. Le Cameroun a toujours affirmé sa grande préoccupation en ce qui concerne le bien être de ses populations. C'est pour cela qu'il adhère aux dispositions énoncées dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme et du Citoyen. Cette volonté a été réitérée lors du sommet mondial sur le développement social tenu à Copenhague en 1995 auquel le Cameroun était représenté. En reconnaissant que l'éducation occupe une place importante dans la résolution des problèmes liés à la pauvreté, à l'environnement et au développement humain, cette volonté s'est traduite par une allocation croissante au profit de l'éducation. Cette mobilisation a d'ailleurs débouché sur des actions concrètes faisant appel à la participation et à l'implication de tous les intervenants. Ainsi, la loi d'orientation de l'éducation a été votée en 1998 et stipule que : « l'éducation a pour mission générale la formation de l'enfant en vue de son épanouissement intellectuel, physique, civique et moral et de son insertion harmonieuse dans la société, en prenant en compte les facteurs économiques, socioculturels, politiques et moraux ». De même plusieurs autres actions d'envergure furent mises sur pied pour la promotion du développement à travers l'éducation66(*).

Mais L'absence de coordination et de concertation qui a prévalu lors de la préparation de ces stratégies ministérielles, a eu pour conséquence de mettre en relief des visions fragmentées et non cohérentes de l'ensemble du secteur éducatif. Toutes choses qui ont rendu nécessaire l'élaboration d'une stratégie sectorielle globale pour refléter une vision unitaire et cohérente de l'éducation au Cameroun. Ainsi, en février 2005, les Ministres en charge du secteur de l'éducation67(*) ont pris l'engagement d'y oeuvrer.

Cette stratégie unifiée s'inscrit dans la perspective d'une mise en oeuvre des dispositions pertinentes de la Constitution, des lois d'orientation de l'éducation et de l'enseignement supérieur, des orientations majeures du DSRP ainsi que des engagements du Cameroun68(*) en faveur de l'éducation pour tous et plus particulièrement de l'universalisation de l'enseignement primaire comme objectif à atteindre par le système éducatif en 2015.

Nous allons commencer par analyser les aspects théoriques qui sous-tendent le rôle de l'éducation dans le développement avant d'examiner les caractéristiques du secteur au Cameroun.

Section I - CONSIDERATIONS THEORIQUES.

Dans la littérature économique, il existe des théories qui mettent en avant le rôle primordial de l'éducation dans la promotion du développement. Nous présenterons deux théories qui nous paraissent essentielles, à savoir la théorie du capital humain et les théories de la croissance endogène.

II-3-1-1- La théorie du capital humain

Selon cette théorie, toute dépense susceptible d'améliorer le niveau de formation d'un individu a pour conséquence d'augmenter sa productivité et donc ses revenus futurs, de la même façon que l'achat de biens de capital par une entreprise permet à celle-ci d'augmenter sa production et ses recettes ultérieures. Cette théorie reprend une idée ancienne, présente par exemple chez Marx, qui expliquait la rémunération des travailleurs qualifiés par le coût, notamment en temps de travail de leur formation. Toutefois, c'est au début des années soixante que l'idée de capital humain a été popularisée chez certains théoriciens néo-classiques, suite aux travaux de Schultz (1962) et Becker69(*) (1964), qui ont vu en elle un cas particulier de choix inter temporel.

Dans l'approche de la qualité de la population, Schultz traite cette qualité comme une ressource rare, ce qui implique qu'elle a une valeur économique et que son acquisition entraîne un coût. La clé de l'analyse du comportement humain, celle qui détermine le type et le volume de qualité acquis sur une période donnée, réside dans le rapport existant entre les recettes provenant de la qualité additionnelle et son coût d'acquisition ; si les recettes sont supérieures aux coûts, la qualité de la population s'élève. Ce qui signifie que l'accroissement de l'offre d'une composante de la qualité n'est que la réponse à l'une des demandes accrues de cette composante. Dans cette approche des marchés, des investissements en qualité de la population, toutes les composantes de la qualité sont traitées comme des ressources durables et rares dont l'utilité s'étend sur un certain laps de temps. C'est à l'éducation que l'on doit une grande partie de l'élévation de la qualité de la population.

L'investissement en capital humain consiste à combiner du temps et d'autres ressources matérielles en vue d'accroître le stock de capital humain c'est-à-dire les aptitudes à avoir des revenus monétaires et des gains non monétaires (psychiques) additionnels. Sera appelé investissement humain, toute activité qui nécessite un coût c'est-à-dire une mobilisation des ressources rares et qui améliore les capacités physiques et intellectuelles (habilité, connaissance, santé,...) des individus. L'augmentation de la productivité qui en découle se manifeste par des revenus accrus ou par un bien être supérieur.

L'investissement humain peut provenir d'une décision collective, c'est le cas par exemple de la scolarité obligatoire ou des campagnes de vaccination. Il peut aussi découler d'une décision individuelle70(*). L'investissement en capital humain peut prendre des formes multiples. Si l'on retient l'ordre chronologique selon lequel les individus acquièrent tout au long de leur vie des capacités physiques et intellectuelles, il apparaît que le milieu familial est le premier cadre où les individus favorisent l'éclosion et le développement de leurs aptitudes. Cette acquisition du capital humain par l'intermédiaire de la famille entraîne des coûts pour les parents et rapporte des bénéfices pour la famille et pour les enfants. Après la famille, l'école représente le second milieu où s'acquièrent et se développent les aptitudes et les connaissances. En effet, l'éducation est coûteuse pour ceux qui en bénéficient. Ses coûts directs sont l'ensemble des dépenses additionnelles entraînées par la fréquentation d'un établissement scolaire (frais de scolarité et de transport, fournitures scolaires, ...). Ses coûts indirects sont les revenus qu'auraient eu l'élève s'il avait travaillé. Ce sont donc le prix du temps consacré aux études. Les coûts de l'éducation sont croissants avec le niveau éducatif : pour un élève d'âge non actif, le manque à gagner est nul ; pour un élève d'âge actif, le revenu sacrifié est autant plus élevé que le niveau éducatif est élevé.

L'utilité que l'on retire de l'éducation est d'abord immédiate, elle se présente comme une consommation de culture. Au-delà, l'éducation développe de façon durable les compétences. Elle favorise les aptitudes à apprendre davantage, à mieux profiter des temps de loisir, à entreprendre plus efficacement des activités non marchandes, à réaliser des activités plus passionnantes, à s'adapter plus efficacement aux changements ... Elle augmente donc les revenus psychiques des individus tout au long de leur vie ; elle est à ce titre, un bien de consommation durable. Enfin, l'éducation développe surtout les aptitudes à réaliser les activités marchandes plus lucratives, elle augmente la productivité et les revenus monétaires, c'est donc un bien d'investissement. Ainsi, l'école contribue largement au développement des aptitudes et des compétences. Mais le processus de l'accumulation du capital humain ne s'arrête pas là, l'entreprise le poursuivra ou s'y substituera71(*).

Weisbrod (1932) est le premier à avoir analysé les effets externes positifs de l'éducation. Pour lui, ces effets justifient l'intervention de l'Etat en matière d'éducation. Ils profitent à la famille72(*) et aux voisins du bénéficiaire de l'éducation, à ses collègues au travail et à la société en général73(*). Blaug (1970) ne partage pas cet avis et critique vivement cette analyse. Il qualifie la plupart de ces effets d'atmosphériques. Pour lui certains effets doivent être manipulés avec beaucoup de prudence74(*). Blaug insiste sur l'idée que l'éducation peut engendrer des externalités négatives75(*).

Néanmoins, les premiers travaux sur le capital humain montrent que l'éducation a effectivement un effet externe important sur les investissements en capital humain qui lui sont postérieurs76(*) et pour Becker, le facteur sans doute le plus important de la demande d'investissement en capital humain est le taux de rendement de cet investissement. D'autres travaux, à l'occurrence ceux de Romer (1986) et Lucas (1988), vont faire ressurgir un nouveau développement de la théorie du capital humain. En apportant des réponses satisfaisantes aux questions posées par la croissance77(*) et en orientant les recherches vers les caractéristiques internes de l'économie.

* 66 Entre autres nous relevons la tenue des Etats Généraux de l'Education de 1995, l'élaboration en l'an 2000 de la stratégie du secteur de l'éducation, la participation au forum de Dakar sur l'éducation pour tous (E.P.T), la conclusion d'un Document de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DRSP)

* 67 Respectivement ministère de l'éducation de base, ministère des enseignements secondaires, ministère de l'enseignement secondaire, ministère de l'emploi et de la formation professionnelle.

* 68 L'éducation pour tous (EPT), l'initiative fast-track (FIT), les objectifs du millénaire pour le développement (OMD), etc.

* 69 Prix Nobel d'économie 1992

* 70 Cas de l'élève qui choisit entre poursuivre ses études au-delà de la scolarité obligatoire ou bien rejoindre la population active.

* 71 Les stages de formation, l'apprentissage, l'expérience acquise par le travail ou « learning by doing ».

* 72 La scolarisation des enfants libère les mères et leur permet d'accéder au marché du travail. D'un autre côté, les enfants profitent de l'éducation de leurs parents parce que ceux-ci leur transmettent des attitudes et des motivations et éveillent leur esprit.

* 73 En élargissant l'horizon intellectuel des citoyens, en accroissant leur rationalité économique et en rendant plus cohérent leurs choix.

* 74 La réduction des différences de gains entre travailleurs due à l'éducation d'une élite est un exemple où est entretenu une confusion entre un effet temporaire de variation des offres relatives de travail pour différents niveaux éducatifs et un effet à long terme de l'augmentation de la productivité engendrée par la formation de capital humain.

* 75 En effet, certains types d'éducation peuvent : entraver la découverte de talents potentiels ; diminuer la capacité d'adaptation de la population active au progrès technique ; encourager une recherche purement académique

* 76 Becker s'étant basé sur les travaux de Dénison, qui attribue 23% de croissance à un effet direct de l'éducation et 20% à un effet indirect, conclut que la prise en compte des effets externes double le taux de rendement de l'éducation.

* 77 La question de convergence et de l'accroissement continu du stock de capital par tête.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore