1.8.
Influence des raisons de non utilisation de la PF sur la non satisfaction de
besoin en planification familiale
Dans leurs analyses des données de l'EDS-Niger (1992)
et MICS III (1998), Nomaou et Harouna (2001) montrent que 38 % des femmes ont
cité des raisons relatives à la fécondité,
essentiellement le désir d'enfants et une femme sur quatre (25 %) a
déclaré qu'elle désirait avoir d'autres enfants.
L'opposition à la pratique contraceptive a été
mentionnée dans 29 % des cas et dans 16 % des cas, il s'agit de
l'opposition de l'enquêtée elle-même. On note ensuite les
interdits religieux (6 %). En outre, les raisons liées aux
méthodes ont été globalement citées par 10 % des
femmes : parmi elles, 3 % ont cité les problèmes de santé
et 2 % la peur des effets secondaires.
Ils poursuivent que des différences selon le groupe
d'âges sont à relever. Les femmes de 30-49 ans ont plus
fréquemment cité des raisons relatives à la
fécondité (42 % contre 34 %), en particulier, la sous
fécondité/stérilité (13 % contre moins d'un pour
cent). Cependant, on observe que la proportion de jeunes femmes qui ont
déclaré vouloir autant d'enfants que possible est plus
élevée que parmi les plus âgées (27 % contre 22 %).
De même, la proportion de jeunes femmes opposées à
l'utilisation n'est pas très différente de celle observée
parmi celles de 30-49 ans (17 % contre 15 %). On peut également
souligner que les jeunes femmes de15-29 ans ont plus fréquemment
cité le manque de connaissance que les plus âgées (19 %
contre 14 %).
1.8.1.
Influence des normes traditionnelles des rapports homme - femme dans le couple
sur la non satisfaction de besoin en planification familiale
De façon générale, la famille est en
Afrique le cadre idéal de socialisation et de transmission des valeurs
et normes socioculturelles. Elle définit à ce titre les
rôles et les statuts des individus en fonction de leur sexe et âge
(Abanihé, 1994 ; CERED, 1998 ; cités par Djangoné R.,
1999). Ainsi, les rôles de mère et d'épouse reviennent de
plein droit à la femme lorsque l'homme occupe pour sa part, la position
de chef de famille. De par sa position de cadette au sein du couple, la femme
doit obéissance et soumission à son époux. Par ailleurs,
le respect dû à un homme par ses pairs dépend du nombre de
ses enfants et de ses épouses. La littérature
révèle à ce sujet que les hommes et même les femmes
désirent généralement avoir une nombreuse descendance.
Dans la société africaine, les hommes gagnent au
plan social de par la fierté qu'ils tirent du nombre d'enfants, surtout
de sexe masculin et économiquement par l'importance que constitue
l'enfant en tant qu'une main d'oeuvre agricole bon marché, une richesse
pour les parents, une sécurité pour leur vieux jours. Par
ailleurs, les hommes détiennent le pouvoir de décision dans le
couple et dans la société en général,
contrôlent de ce fait les ressources de la famille à travers les
avantages qu'ils tirent du travail des enfants et des femmes (Caldwell,
1991).
Quant aux femmes, des études (Locoh et
Labouré-Racapé, 1997) attestent que pour la plupart, surtout
celles du milieu rural, la forte fécondité reste le moyen le plus
sûr d'atteindre un statut doté de prestige.
C'est à travers ses enfants qu'une femme peut
espérer hériter d'une parcelle de terre ou des biens de son
conjoint en cas de décès de ce dernier. Selon Assogba (1989),
«au-delà de la satisfaction du groupe, ce rôle de mère
tout en offrant à la femme la possibilité d'améliorer son
statut, lui permet aussi en cas de survie des enfants d'avoir de
l'autorité et des conditions de vie meilleures». Les enfants sont
en effet, garants du statut d'une femme et constituent en outre une aide
précieuse dans les travaux domestiques (surtout les filles) et
champêtres qui accaparent tout le temps des femmes et les empêchent
de développer des activités annexes. Comme le dit Christine
Oppong (1988) les enfants sont de bons atouts et de précieux avoirs pour
leurs parents notamment par l'aide indispensable qu'ils leur apportent.
Vu l'importance de l'enfant dans la société
africaine, la pratique de la contraception reste le plus souvent l'apanage d'un
petit groupe de femmes ayant un statut social et un niveau scolaire
élevé. Pour ces femmes, la contraception moderne peut-être
utilisée pour remplacer les méthodes traditionnelles d'espacement
des naissances. La plupart des pays d'Afrique ont réalisé
d'énormes efforts de scolarisation dont les filles moins que les
garçons ont profité. L'augmentation de la proportion des femmes
à niveau d'éducation élevé est donc l'un des
éléments qui, à la longue, modifiera la fréquence
d'utilisation de la contraception.
On peut aussi relever le fait que les méthodes
contraceptives modernes ne sont pas facilement accessibles sauf dans certaines
grandes villes. Dans tous les cas, même quand ces méthodes
contraceptives modernes sont disponibles, leur éventuelle utilisation
dépend fortement d'une certaine motivation à éviter des
grossesses. Or, très peu de femmes africaines voire des hommes ne
désirent pas une nombreuse descendance. Cela dit, le désir de
limiter la descendance, une fois une certaine dimension atteinte, n'est pas une
attitude courante en Afrique. Les raisons du maintient d'une idéologie
de la famille nombreuse sont d'ordre démographique, historique,
socio-culturel, économique, etc.
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