C- L'Ambassadeur du Cameroun à Paris (1969-1974)
La nomination de Ferdinand OYONO comme chef de la mission
diplomatique du Cameroun en France en novembre 1969 intervient après la
grande crise socio -politique qui a secoué la France à savoir la
révolte de mai 1968 (98). Ferdinand OYONO depuis Paris a
compétence également sur l'Espagne, le Maroc, l'Algérie et
la Tunisie.. La France entretient une vielle amitié de
coopération depuis des lustres.
1 97 98
Au début des années 1970, la politique
étrangère du Cameroun est caractérisée par une
volonté de se débarrasser de la pesanteur des liens avec la
France. Le rôle de l'Ambassadeur du Cameroun à Paris est donc
à la fois de renforcer ces liens et de rassurer les autorités
françaises pour obtenir d'elles plus de compréhension sur la
volonté camerounaise, et à mener une politique
étrangère indépendante.
Dans ce pays où il a acquis sa formation intellectuelle
et professionnelle, Ferdinand OYONO a la délicate mission de
représenter son pays malgré l'état des liens quelque peu
tendus avec la France. En effet, après l'accession des pays d'expression
française à l'indépendance, la France a manifesté
sa volonté de redéfinir sa politique de coopération vis
à vis des dites nations. L'orientation nouvelle que veut donner Paris
à cette coopération n'est pas bien accueillie par le gouvernement
camerounais. Aussi, une politique de distanciation de ce dernier est elle
observée vis à vis des responsables de la France question de
témoigner d'une rupture symbolique par rapport au passé.
`'La conférence franco-africaine de Paris
apparaît sans intérêt réel pour
notre pays, mais encore contraire aux exigences de l'affirmation dans le monde
de notre personnalité nationale (99)''
De janvier 1970 à février 1974 en effet, il
règne un climat de méfiance du Cameroun vis à vis de Paris
; on note le départ du Cameroun de Air Afrique, le refus du gouvernement
camerounais de participer à la conférence franco-africaine
organisée à Paris après la crise de l'organisation commune
africaine et malgache (OCAM), ainsi qu'à tous les sommets
franco-africains. Tout ceci va jeter un peu de trouble dans les relations
franco-camerounaises ; à travers la dénonciation par le
1
gouvernement de Yaoundé des accords de
coopération franco-camerounais conclu en 1960 et la
réorientation, la redéfinition de la philosophie de base de la
coopération entre les deux pays(100).
Dans un tel climat de méfiance et surtout de
revendication du gouvernement de Yaoundé vis-à-vis de la France,
le nouvel ambassadeur à Paris est resté presque inactif.
Toutefois, à son actif, on peut relever le souci permanent de
préserver les intérêts du Cameroun en France. En effet,
suite à la publication de l'ouvrage Main Basse sur le Cameroun
en 1972, par Mongo BETI et sur instruction des autorités de
Yaoundé, Ferdinand OYONO déploya tous les efforts
nécessaires pour que soit censuré ce chef d'oeuvre
anticolonialiste par les autorités françaises.
Son auteur Mongo Beti se souvient de cet acte en ces termes:
`' J'ai été poursuivi en France, mes livres
ont été saisis [....] c'est Ferdinand OYONO qui a
rédigé la demande qui devait aboutir à la saisie et
à l'interdiction de mon livre `'( 101)
Mongo Beti était pourtant un camarade et ami de
Ferdinand OYONO. Mais cela n'empêcha pas ce dernier de faire
exécuter scrupuleusement les instructions reçues de
Yaoundé.
Aucun acte d'éclat n'est à relever dans les
relations franco-camerounaises jusqu'à la date du 21 février 1974
date à laquelle seront signés de nouveaux accords de
coopération entre le gouvernement de la République Unie du
Cameroun et le gouvernement de la République française, notamment
:
- un accord général de coopération technique
en matière de personnel ; - un accord de coopération culturelle
;
- un accord de coopération en matière de justice
(102).
100 2wx101 102
Par ailleurs, sur les plans économiques, militaires et
culturels on assiste à des réaménagements :
- Sur le plan économique, les échanges
commerciaux entre la France et le Cameroun devaient s'effectuer comme par le
passé, selon le régime défini en la matière par
l'association liant le Cameroun et la CEE.
- Dans le domaine militaire, les clauses de l'accord
confirmaient le rôle de la coopération française qui allait
s'exercer comme par le passé et selon les possibilités de la
France par :
· l'assistance du personnel militaire français ;
· la fourniture de matériel et d'équipement
militaires ;
· la formation et le perfectionnement des cadres
Camerounais. - Sur le plan culturel, un accent est mis sur le bilinguisme
franco-anglais, l'africanisation des programmes de même que la
validité des diplômes etc.
Comme nous l'avons vu plus haut, la compétence
territoriale de
l'Ambassadeur Ferdinand OYONO s'étendait aussi à
d'autres pays tels que : l'Espagne, le Maroc et l'Algérie. Les liens
entre le gouvernement camerounais et ces pays étaient peu
avancés. Mais, le diplomate camerounais entretenait la flamme entre le
Cameroun et ces pays.
Au cours d'un dîner offert par le roi Hassan II,
à l'occasion de la célébration de la fête nationale
du Maroc en 1972, le diplomate OYONO échappe à un attentat. Ce
coup d'état militaire appelé soulèvement de Skirhat, va
coûter une grave blessure du doigt au Camerounais.
Après Paris, Ferdinand OYONO est accrédité
aux Nations Unies (103) avant de se voir confier la direction de
l'Ambassade du Cameroun à Alger.
103
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