CHAPITRE IV : INTERPRETATION DES RESULTATS ET
VERIFICATIONS DES HYPOTHESES
Chapitre IV :
INTERPRETATION DES RESULTATS ET VERIFICATIONS DES HYPOTHESES
Le présent chapitre
est constitué de deux sections. La première section
s'intéresse à l'interprétation des résultats de
notre enquête et la deuxième section sera consacrée
à la vérification des hypothèses.
I.
Interprétation des données
I.1. La gestion des ordures
ménagères
La gestion des ordures à Bertoua comme dans d'autres
métropoles du Cameroun est quotidiennement confrontée à
des multiples contraintes sur les plans financier, technique, institutionnel et
physique.
Les obstacles financiers et
techniques
La gestion des ordures ménagères souffre en gros
de l'absence ou de la faiblesse des taxes recouvrées, de
l'étroitesse de l'assiette fiscale, et du principe de l'unicité
des caisses et de trésorerie qui occasionne souvent des retards de
paiement ou une réorientation des fonds destinés à la
collecte des déchets. En effet, la Taxe d'Enlèvement des Ordures
Ménagères (TEOM) fixée par les décrets n°
77/220 du 1er juillet 1977 et n° 80/017 du 15 janvier 1980,
représentant 0,5% des contributions totales est une des sources de
financement de la filière de traitement des ordures par l'Etat.
Les conclusions de la Commission Interministérielle de
1995 sur l'enlèvement des ordures ménagères qui
proposaient l'instauration de la TEOM indexée sur les factures
d'électricité n'ont jamais été
entérinées par le Gouvernement, bien que les analyses de cette
commission montraient que c'était l'un des moyens les plus efficaces
pour mobiliser la contribution effective des ménages au financement de
service de gestion des déchets.
Comme obstacles techniques, on peut citer entre autres :
L'augmentation accélérée de la population qui à son
tour augmente la quantité d'ordures à collecter; La
répartition spatiale des bacs à ordures ne tient pas souvent
compte des besoins des usagers (quantité de déchets produits par
personne ou par foyer, distance à parcourir, accessibilité,
habitudes diverses...) ; leur conception ne prend pas en compte les
préoccupations d'environnement et de cadre de vie des populations
avoisinantes. L'analyse des résultats obtenus au cours de
l'enquête fait état de ce que 75,5% des enquêtés
affirment qu'il n'existe pas de bacs à ordures publics à leur
disposition. Seuls ceux qui sont abonnés à des structures de
pré-collecte en disposent de façon privée et ces bacs sont
le pus souvent placés devant la porte. Les résultats du tableau
10 sur le mode de traitement des ordures ménagères montrent que
62,5% des enquêtés traitent les ordures par incinération et
par la mise en décharge sauvage dans les quartiers. Le risque de
pollution atmosphérique et la dégradation de l'environnement sont
les conséquences qui peuvent découler de telles pratiques. Les
méthodes de traitement des ordures restent étrangères aux
chefs de ménages des différents quartiers. A la question de
savoir si les ordures sont ramassées par les services compétents,
il en ressort que le ramassage des ordures est périodique dans les axes
principaux de la ville et quasi inexistant dans les quartiers mal loties et
périurbains. La raison évoquée est le manque du
matériel roulant, le mauvais état des voies de desserte. Face
à cette situation, 69,1% des répondants ont trouvé utile
de jeter leurs ordures ménagères dans la broussaille et plus
grave cette gestion reste dans la plupart des ménages assurée par
les enfants.
S'agissant de la sollicitation des ménages par les
services de pré-collecte, 57% des enquêtés affirment ne pas
entretenir des rapports avec les services d'hygiène et salubrité
de la commune. La seule activité à laquelle les
enquêtés prennent part est le « Jeudi
Administratif » obligatoire à tous et répressif en cas
d'indélicatesse des ménages. L'insuffisance et la
sous-utilisation du staff technique au niveau des municipalités ;
L'absence de données précises sur les ordures
ménagères au niveau des municipalités. L'autre cause de
dysfonctionnement du système de gestion des ordures est le manque de
communication entre les acteurs, qu'ils soient publics ou privés et les
usagers. Les populations ne sont pas toujours au fait des opérations
menées et ne peuvent donc ni respecter les directives, ni prendre part.
Les rares campagnes d'information, de sensibilisations menées jusqu'ici
sont restées trop partielles, formelles et bureaucratiques, sans
réelles actions sur le terrain. De ce fait, les usagers et les
autorités se jettent mutuellement la responsabilité de
l'insalubrité de la ville.
Les obstacles institutionnels
et physiques
Le secteur de l'enlèvement des ordures
ménagères souffre d'une absence de textes juridiques qui
réglementent la pré-collecte, la collecte et le transport des
ordures aux points de décharge. La ménagère qui jette ses
ordures en milieu de chaussée n'a peur d'aucune
pénalité.
L'on assiste aussi à une multiplicité des
intervenants dans le secteur de l'enlèvement et du traitement des
ordures à savoir : les acteurs étatiques, les
collectivités locales, les acteurs non étatiques (ONG, GIC, GIE)
et les partenariats publics privés. Au niveau étatique, bon
nombre de départements ministériels se retrouvent
impliqués dans la gestion des ordures ménagères à
des degrés divers. Nous pouvons citer: le Ministère de
l'Administration Territoriale et de la Décentralisation (MINATD), tuteur
des collectivités ; le Ministère de l'Agriculture et du
développement rural (MINADER), responsable du contrôle des engrais
; le Ministère de l'Energie et de l'Eau (MINEE), responsable des
problèmes de nuisance et de rejets industriels, notamment du
contrôle de la pollution, des déchets industriels et de
l'assainissement; le Ministère de l'Environnement et la Protection de la
Nature (MINEPN), responsable de la protection et de la gestion de
l'environnement ; le Ministère du Développement Urbain et de
l'Habitat (MINDUH), responsable de la planification urbaine et de la gestion de
l'hygiène et de la salubrité ainsi que de l'esthétique
urbain ; le Ministère de la santé publique (MINSANTE),
impliqué dans les aspects sanitaires des ordures ménagères
; le Ministère des Finances (MINFI), responsable en partie des
financements des activités liées aux déchets ;
etc.
Au niveau des collectivités locales, il existe depuis
et toujours un conflit de compétence entre les communautés
urbaines et les communes d'arrondissement. La loi n° 87/015 du 15 Juillet
1987 portant création des communautés urbaines accordait aux
communautés urbaines la compétence en matière
d'hygiène et salubrité alors que pendant ce temps, les communes
d'arrondissement se chargeaient de l'enlèvement et du traitement des
ordures ménagères. En attendant le décret d'application de
la loi n° 2004/018 du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables
aux communes qui confère les compétences de gestion au niveau
local des ordures ménagères, l'insalubrité et la
promotion des activités de production agricoles ; le flou
institutionnel n'est pas de nature à rendre aisée la gestion des
déchets urbains.
Il faut toutefois mentionner le déficit de
frontières nettes à l'exercice des responsabilités des
différents intervenants par des lois et textes particuliers. Les
imprécisions notées sont source d'incompréhension, de
luttes d'influence, de contre-performance dans la gestion des ordures
ménagères. Le déficit de coordination de l'action des
différents intervenants et la multiplicité des centres de
décision sont source de fuites de responsabilités ou de conflits
de compétence. L'habitat non structuré héberge près
de 80% de la population de la ville et le taux d'urbanisation de la ville est
très faible, ce qui rend difficile l'accès des camions de
ramassage dans certaines zones
I.2. Le compost, une
source de richesse
On parle de plus en plus de compostage des ordures
ménagères. Cela consiste à les transformer en compost, une
sorte d'engrais naturel de plus en plus utilisé dans le maraîchage
autour des grandes villes. Ce type d'engrais est pour le moment presque inconnu
des agriculteurs de la ville de Bertoua. La fabrication du compost est
appelée à se développer à cause du nombre sans
cesse croissant de maraîchers dans la périphérie de
Bertoua. L'enquête relève que 69,5% des répondants
pratiquent de l'agriculture en milieu urbain. La raison évoquée
par les enquêtés au cours des entretiens informels fait
état de ce que cette activité permet aux populations de subvenir
à certains besoins primaires. Les types de cultures pratiquées
sont les tubercules, les légumes, le mais, le plantain, les cultures de
rente et quelques arbres fruitiers. Le mode d'acquisition des parcelles de
terrain n'étant pas assez aisé au regard des résultats des
enquêtes (32,6% achat, 28,6% location et 24,4 héritage), les
populations sont amenées à utiliser les intrants agricoles.
L'exploitation quotidienne des parcelles de terrain et le lessivage
causé par l'érosion ont fini par rendre le sol très peu
fertile. Ainsi, les résultats de l'enquête montrent que les
populations utilisent plus les engrais organiques (47,5%) et de moins en moins
les engrais chimiques. Elles avancent comme raison, le coût
élevé des engrais chimiques sur le marché. Les produits
organiques utilisés sont la fumure (46,5%), le compost (13,9%) et les
excréments des animaux (15%). La forte utilisation de la fumure
s'explique par le fait que son mode d'appropriation ne nécessite pas
trop d'efforts et de moyens. Les agriculteurs vont se les approprier en les
récupérant à la poubelle et en utilisant leurs propres
ordures. Toutes ces informations nous permettent de confirmer que les engrais
organiques participent à l'amélioration de la productivité
agricole dans la ville de Bertoua.
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