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La migration andine, rapport à la terre et conquête de la ville. Entre Huancavelica et la Vizcachera. De la Sierra à Lima.

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par Tiphaine POULAIN
Université Paris VII - Denis Diderot - Maitrise Ethnologie 2005
  

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Salcabamba -- district de la province de Tavacaja Qu'y pense-t-on de la migration?

Avec Samuel, el tio de Lourdes ...

J'ai rencontré Don Samuel à Pampas. Il y vient régulièrement, puisque Pampas est la "capitale" de la province de Tayacaja et qu'il habite dans le petit village de Salcabamba -- capitale du district éponyme.

Nous dînions, avec Lourdes, sa nièce, dans la polleria35 de Pampas. Son oncle m'invita à venir connaître son village, sa terre... Lourdes est originaire du coin, mais elle a toujours vécu à Lima. Ayant été nommée responsable de la zone des Wawawasi35 , elle est retournée y vivre : « je viens d'ici, mais je ne connais personne ici ! »

Un homme de la municipalité disait :

« Quand je prend le bus, je regarde combien de personnes je connais : je n'en connais plus que 5/61 La population a changé »

« De ma famille, tous sont parfis. Je suis le seul à être revenu (pour le travail) Parce que les gens partent et de nouveaux arrivent des petits districts alentours... »

Depuis sa retraite, il est retourné vivre dans son village natal de Salcabamba. A huit ans déjà, il partait étudier à Huancayo. C'est la grande ville la plus proche qui attire beaucoup de gens des alentours. Il me raconte son enfance, difficile. Souffrances. Sans père, lui et ses 7 frères ont dû s'en sortir seuls pour étudier, par eux-mêmes, dit-il. Il a habité à la Victoria (« mais à Lima, il y a beaucoup de délinquance »), puis dans un quartier plus en retrait, plus rural, Chaclacayo... Avant d'aller travailler à Lima (instituteur), il a travaillé dans les provinces par ici. Ses autres frères et soeurs sont encore à Lima aujourd'hui, sauf un dont il m'a montré, chemin faisant, son village, au loin....Du versant de montagne que nous dévalions avec sa voiture, on pouvait voir la partie "selva" (prémices de la Selva, végétations, climat plus chaud, moins d'altitude), là. où il habitait et fabriquait de la « cafta », alcool de canne à sucre que j'ai eu loisir de goûter chez Don Samuel, dans sa petite épicerie. Avoir ce petit lieu de vente, chez lui, est une diversion, dira-t-il... (« Je n'ai pas de responsabilité, pas d'enfants à charge ...je n'ai pas besoin de faire du commerce en fait... »).

« En revenant ici, ma maison était abandonnée. Et je vis ici maintenant, avec ma chacra, mes animaux...et c'est comme ça que je suis heureux I Je vais souvent dans mon champ... M'en occuper m'est agréable ... Si je ne sors pas, c'est dur, je m'ennuie ....alors qu'aux champs, non !

« A Lima, il y a un stade de Salcabamba, c'est le seul de tous les districts qui en a ! Et là, on fait les fêtes... Et ils boivent et dansent et chantent et mangent ne travaillent pas pendant ce temps.

« Ici, avant c'était mieux socialement et culturellement. Mais la plupart sont partis [la plupart des gens d'un certain niveau ?I, à cause du terrorisme. Il ne reste que les petits vieux...

Sa nièce ajouta : «Mes grands parents se préoccupèrent du fait que les enfants aient une profession, c'est pour cela qu'ils ont migré à la ville. Ils vécurent à la ville, mais les parents

35 On y mange du poulet â la braise, avec des frites et de la salade. Les pollerias sont plutôt des restos de la côte...

36

Wawawasi : maison (wasa) de l'enfant (wawa). Programme de garderie chez des femmes, "aide maternelle" en quelque sorte...

avaient toujours "la chacra" parce que leurs revenus pour maintenir la famille, provenaient de la production des semences et de l'élevage de bétail. De là-bas. (la chacra), ils leur envoyèrent la pension pour qu'ils puissent étudier, ils allaient par saison vivre un peu à la ville...

Ceux de ma famille qui vivent à Lima et même à l'étranger37 vont toujours en visite sur la terre de mes grands parents. Pendant les fêtes, beaucoup de familles qui résident à la ville, se rerencontrent là-bas. »

Il m'a emmené en disant à sa nièce que ce n'était pas pour que je fasse mon "enquête" sur la migration, mais pour connaître son village (pour le plaisir ?!), pour se promener...

Je ne l'ai pas questionné à dessein sur son histoire de vie. Il racontait et racontait. Assis dans son épicerie. Un peu plus de "Caria" ? Tant de choses. Enfouies quelque part dans ma mémoire... Au village tout le monde le connaissait et le respectait, Don Samuel... Notoriété de sa famille ? Ou parce qu'il venait de la ville, qu'il était professionnel ?

« Don » Samuel

Ce dont je me souviens est que ses parents étaient d'assez grands propriétaires terriens. Avec la réforme agraire, Don Samuel me dira que ses parents ont tout perdu ou du moins une grande partie... Lui et ses frères étaient déjà des "professionnels"... la chacra ne leur était vraiment pas destinée...

Avec le maire de Salcabamba....

« Ceux sont surtout les jeunes qui partent pour étudier ou travailler (mais surtout travailler, c'est dur de pouvoir faire les deux.) Ils ne reviennent pas : ils sont à la ville ...

Pour les fêtes d'octobre, beaucoup reviennent, d'Italie, des Etats-Unis...Alors il y a des "gringos", parce que certains se sont mariés là-bas ...et ont des enfants "gringos"...

« Ici, il n'y a pas de travail... (Qui dira le contraire ?)

Une dame dans le local où se trouve le seul téléphone du village : « comment tu trouves Salcabamba, c'est triste non ? »

Efrain, de retour auprès de sa mère après un long périple...

« Ici, la seule chose qui manque c'est l'éducation. A part ça, on a tout à portée de main »

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37 Beaucoup de familles ont quelques membres à l'étranger

Comme ils sont revenus, ou plutôt comme ils ..,àne du heu (même après 15 ans d'absence I) mais ont habité à rextérieur, ils sont assez "respectés" et l arrive que les gens viennent leur
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En effet, selon lui les gens partent pour "salir cidelante" (aller de l'avant, s'améliorer), pour sobresalir (se surpasser), travailler, étudier : « Ici, la seule chose qui manque c'est l'éducation. A part ça, on a tout à portée de main »

On voyait les gens qui revenaient de Lima ou d'autres coins et avaient réussi. 1h nous montraient les possibilités. Mes parents ne voulaient pas que l'on vive la même situation qu'eux, qui se limitait à la chacra38 et à l'élevage Ils donnaient une autre vision des choses, de ce qu'on n'avait pas... »

« On voudrait améliorer pour qu'au moins les enfants puissent avoir un uniforme bien, etc...Mais d'autres ne cherchent pas à sortir de cette situation.

« Ici on a besoin d'aide ...mais pas le poisson sans apprendre à pêcher. D 'autres programmes sont venus comme ça, donner des choses et à la fin : il n'y a rien ! Il faudrait plus de cuves, plus de bétail etc... Nous aider à nous développer... »

Beaucoup d'habitants de Salcabamba à l'étranger. C'est étrange parce que on se demande comment d'un tout petit village, ils peuvent partir presque directement à l'étranger, alors même que la distance culturelle est encore plus grande ! Et pourtant !! Il paraît qu'aux Etats- Unis, il y a la colonie de Salcabamba, dans une même ville ils y fêtent le Santiago39, etc. D'ailleurs, on parle de ces gringos qui reviennent pour les fêtes ici, accompagnants des anciens habitants de Salcabamba. Mais ces absents semblent appartenir à la communauté : ce sont les habitants de Salcabamba qui habitent ailleurs... Le lieu porte une mémoire qui est inscrite dans les générations qui s'expatrient et qui restent ?

Il est aussi important de noter qu'au Pérou les envois d'argent depuis l'étranger sont très importants (comme dans tous les pays du monde d'ailleurs'"), ils sont même le moteur économique le plus fort... On dit souvent que beaucoup sont là-bas juste pour avoir de l'argent. Travailler, gagner de l'argent, envoyer. "Mais leur pays reste le Pérou". Travailler, amasser et retourner. Rentrent-ils ? À l'occasion des fêtes, certes oui... (Il arrive même souvent qu'ils l'organisent !). Mais reviennent-ils vivre au Pérou ?!

38 La chacra, c'est-à-dire l'agriculture... la vie dans les champs, le travail des champs, mais aussi les insignifiants gains de la chacra...

9

Santiago - dans la région centrale du Pérou c'est la péri(xle qui correspond au marquage du bétail (le

changement des boucles d'oreille de laine) que l'on appelle "sellai" ou "herranza". On chante alors et on danse des "Sanfiaguilos", qui parlent des choses de la nature (plantes, animaux...) et bien sûr d'amour Les gens se promènent la nuit de maison en maison en chantant et en jouant de la "tinya" (un petit tambour). Santiago c'est vraiment la grosse fête à Huancayo et aux alentours...

40 Il est assez interpellant de noter que l'argent qu'envoient les émigrés à leur famille "au pays" représente beaucoup plus que l'aide au développement dans le monde,

Les témoignages de ces deux hommes, de niveaux assez différents, montrent un exemple de parcours de gens qui ont vécu ailleurs, à la ville, en étant devenu "professionnels". Ils semblent assez "respectés" dans la communauté. Est-ce parce qu'ils reviennent de la ville ? Parce qu'ils sont des "professionnels" ? Peut-être d'une certaine façon, ils sont perçus ainsi. Mais peut-être aussi une distance. Du reste, pour beaucoup. l'ailleurs n'est ni envisagé, ni désirable...d'où la question du départ, et de ce qui le provoque, de ce qui le permet...

Le chauffeur de "taxi" de Salcabamba...

...fait tous les jours des allers-retours entre Pampas et Salcabamba. Quel sport ! Il habite entre les deux, à Ayabamba. Mais il dort dans sa voiture, lors du dernier trajet qui le fait rester à Salcabamba, pour repartir avant le lever du jour avec les premiers voyageurs.

Cela ne fait pas si longtemps qu'il y a une route ; avant, il fallait y aller en cheval, ou à pied, cela limitait les départs, mais la construction de la route les a fait s'intensifier.

Comment a-t-il acheté cette voiture ? Un prêt ? "Point du tout, "nous avons des chacras dans la selva .1", ceux sont ses frères qui sont là-bas et cultivent le café. « Les fruits ça ne rapporte pas. La coca, c'est plus bas (en altitude) « Ils sont depuis janvier à la récolte, et vont bientôt revenir se reposer et puis repartir ». Il a un frère qui est à Lima, mais lui « il est à part », il ne revient que tous les 2/3 ans. Un exemple d'économie familiale : les départs stratégiques et les interactions des uns et des autres permettent à ce système de fonctionner. On ne peut pas avoir de prêt, d'ailleurs le système n'existe pas en tant que tel ! Alors on s'organise en famille. L'activité des uns aide celle des autres, l'investissement des uns, l'obtention d'un emploi pour l'autre, et faire le bon choix : le café est une bonne opportunité (hormis celle du coca)

On comprendrait presque comment les gens, grâce à leur réseau familial entre autres, arrivent à se débrouiller dans le néant urbain... C'est aussi multiplier de façon stratégique les activités et saisir les opportunités qui se présentent (départ à Lima, départ à la selva...). Si chacun fonctionnait seul, il n'aurait pas pu acheter de terres dans la selva et donc pas de voiture pour celui qui est resté au village. Ils restent encore liés à leur village et à la famille, et reviennent saisonnièrement (beaucoup de gens entrent dans les processus de migrations temporaires, ou saisonnières, souvent dans les cultures). (Hormis l'activité rotative des mines).

« N'ont-ils pas été, peu ou prou
influencés, mod4fiés, déménagées
en leur for intérieur... ? »
R. Jaulin

Des raisons de la migration aux modèles de l'ailleurs...

Il manque de perspectives pour le futur. Alors on envoie les enfants étudier pour qu'ils aient des possibilités. Ici : il n'y en a pas. Ici : pas de travail, pas de possibilités, rien. Juste la chacra, le ganado41 , lorsque l'on en a... et encore.

Ces expressions --que l'on entend tant à Lima que dans la Sierra, comme "salir adelante", "sobresalir", "superarse" . dénotent toutes l'idée d'amélioration et de « sortie » ; aller de l'avant, c'est partir, pour s'améliorer, avoir des objectifs plus ambitieux.

Le maître mot, l'éducation, devient le modèle qui participe de ce mouvement, pour tous. Si des familles ont pu, il y a un certain temps (cf. Efrain, Don Samuel) permettre à leurs enfants de partir pour devenir "professionnels", il semblerait qu'aujourd'hui, ce soit au moins une aspiration partagée par beaucoup, en essayant de mettre ses enfants dans une "meilleure" école.

Que ce soit ici ou à Lima, cette raison est essentielle dans les discours des gens. On est venu chercher un travail, mais on doit rester pour l'éducation des enfants. Il est préférable de partir, parce que les enfants doivent s'ouvrir sur le monde en étudiant. Besoin inculqué, désir d'éduquer : il faut que les enfants aient de meilleurs possibilités qu'eux n'ont eu, il faut qu'ils étudient à tout prix, peut-être vont-ils devenir « profesionales42 »... Les jeunes semblent en effet être les plus absents. Pourquoi rester s'il n'y a plus rien à espérer ? Bien souvent, on n'a pas les moyens de leur payer des études supérieures, mais l'idée était là. Egalement, lorsqu'ils partent, les jeunes combinent études et boulot, jusqu'à ce que le boulot ne permette plus

l' étude...

« Le bonheur ce n'est pas l'argent, c'est la tranquillité --disait une vieille dame dans un village. Il s'en vont travailler et vont laisser leurs enfants. C'est mal, leurs enfants vont rester seuls, orphelins... »

Si les adultes sont venus pour trouver du travail (dans la petite ville, dans la capitale), ils y restent pour les enfants. La vision n'est pas la même pour tous et évolue avec les générations. Beaucoup racontent que leurs parents sont venus à Lima et ne se sont pas habitués... "Ils sont tombés malades, parce qu'ils n'ont pas supporté" .. . Beaucoup ne peuvent pas partir loin de ce qui les lie avec leurs terres, leurs animaux. Pour rien au monde ils ne choisiraient le chaos de la ville et la dictature de l'argent contre leur vie tranquille riche de sens, et d'appartenances..

Un modèle qui semblerait s'imposer, mais pas directement, on n'oblige pas à éduquer, de l'extérieur (au contraire) : comme une idée qui se "contagionne", qui fait désirer autre chose, qui fait prendre conscience de sa réalité et de ce que peut être l'ailleurs, une idée qu'on s'approprie, un jour. Et l'on se décide.

Cela se fait d'une certaine manière, comme nous l'avons dit, pas le biais de ceux qui sont partis, et reviennent. Mais aussi par d'autres voies (encomiendas, échanges, communication,

41 Les champs, et le bétail

42 Devenir professionnel, en tant que statut social meilleur, et situation économique.

etc.) C'est dans cette mesure que l'on peut s'interroger, de la même manière que l'a fait Jaulin43 en Afrique, en parlant de "l'homme du lieu". Puisque l'identité de ceux qui sont partis prend nécessairement d'autres visages, qu'en est-il de ceux qui sont restés ?

Pour ceux qui sont partis, "ceux qui sont restés" appartiennent au monde d'avant inscrit dans la durée à un horizon qui précéda leur départ, inscrit dans un temps long. Mais on ne peut enfermer dans cet horizon ceux qui ne sont pas partis ; et d'ailleurs peut-on dire qu'ils ne sont partis en aucune façon? « N'ont-ils pas été, peu ou prou influencés, modifiés, déménagés en leur for intérieur » par les répercutions du monde global et surtout par les horizons "découverts" et véhiculés par ceux qui sont partis ?

« Les gens qui ne sont pas physiquement partis, ont cependant également été emmenés ; ils l'ont été en demeurant en retrait, mais ils l'ont été! Aussi les départs ne doivent être qu'en dernier ressort référés à l'identité ».

On peut suivre la démarche de Robert Jaulin et se poser la question de cette "part du non lieu".

Conquête d'un ailleurs : quête d'un futur ?

Ces modèles de l'autre, de l'ailleurs, du possible semblent en grande partie véhiculés par "les gens du retour", qui reviennent plus nantis, voir « émancipés », qui montrent --et parfois de manière ostentatoire, l'image de la réussite ? Preuve que c'est possible ? Désir que l'on transmet ? Etudier, c'est s'ouvrir des voies, celles du futur ? C'est pouvoir percer à la ville... ? Pour cela, il faut la conquérir...

Jaulin parle de l'identité culturelle dont les hommes sont porteurs (dont nous sommes tous porteurs 0, et éventuellement d'une identité "totalitaire" de laquelle sont porteurs les hommes, en cela qu'elle s'est imposée à eux. Les hommes du retour n'en seraient-ils pas d'éventuels porteurs de cet univers qui se situe entre départ et retour?

Le départ peut être lié à l'ouverture culturelle, là où la présence au monde est la plus forte, mais aussi être fonction de la déchirure d'une expulsion identitaire, présence d'un non lieu, d'un univers de l'entre-deux. Cette constatation, ou plutôt cette interrogation, nous pourrions plutôt la transposer pour les émigrés à Lima.

Néanmoins, on peut considérer qu'en deçà de cet entre-deux culturel et identitaire qui entraîne déchirure (« de l'expulsion identitaire »), coupure et désintégration de la personnalité, se met en oeuvre une volonté de vivre activement : aller de l'avant, déceler les opportunités, ne pas être redevables, et faire fi de l'indifférence d'un pays ingrat. En d'autres termes, une culture qui ne se sclérose pas. Peut-être, comme le laissait transparaître le poème de Lida Aguirre, la communauté choisit stratégiquement le départ pour se redonner vie. Et ce, en sachant que des membres resteront sur leurs terres. Faut-il que certains partent pour que les autres continuent ? N'est-il pas moins douloureux de partir lorsque l'on y laisse quelque chose de soi. Les liens symbolisent peut-être l'existence de ces absents.

Pour considérer la rupture que peut engendrer ces départs, la vision idéale n'est pas suffisante. Il serait erroné de penser que le lien avec la communauté d'origine est indestructible, quand pour certains, il s'agit d'une véritable rupture, parfois choisie pour mieux supporter l'éloignement, ou parfois subie malgré soi.

43 Robert JAULIN, Exercices d'ethnologie.

Ces quelques témoignages nous donnent peut être des idées de la vision de certaines personnes sur la migration, sur les migrants et laissent transparaître les aspirations des villageois aujourd'hui. Pour beaucoup, certes, mais pour tous ? Je ne crois pas. Pour qui ? Là est la question, je n'ai pas de réponses. Si tant est qu'à une époque les métisses des villes et les propriétaires terriens ont décidé d'aller chercher une meilleure vie à la ville (Lima D, en gardant leurs lopins et bénéficiant de gains, ou bien en permettant à. leurs enfants d'être professionnels, les choses semblent avoir changé aujourd'hui. Les gens de petits villages descendent vers la vallée puis se dirigent vers la ville. Les gens des hauteurs viennent-ils plus bas ? Rappelons que le terrorisme a fait bougé beaucoup de population contre son gré

Voici maintenant l'exemple des fêtes, patronales ou de carnaval. Comme on en fait dans toutes les provinces, tous les districts, à chacun sa tradition. Elle est souvent le moment de retour des émigrés. On verra peut-être à partir de cet exemple comment sont considérés ceux qui sont partis. Sont-ils des « lâches » ou au contraire, font-ils encore partie intégrante de la communauté ? Sont ils des exemples ?... sont-ils encore « présents » malgré leur absence... ? Qu'expriment ces retours : un réel attachement aux terres ? Qui revient ?

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille