B- Les
interactions des aides communautaires avec les autres régimes d'aides
existants
La région est véritablement la collectivité
spécialisée dans l'action administrative à
caractère économique, ne serait-ce qu'en raison du fait que
l'article 72 de la Constitution dispose que "les collectivités
territoriales ont vocation à prendre les décisions pour
l'ensemble des compétences qui peuvent le mieux être mises en
oeuvre à leur échelon". Des articles L1511-1 à 5 et
R1511-1 à 5 du Code général des collectivités
territoriales, elle détient une compétence générale
en la matière, voire un leadership. L'article L. 1115-1 dispose que
« les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent,
dans le respect des engagements internationaux de la France, conclure des
conventions avec des autorités locales étrangères pour
mener des actions de coopération ou d'aide au
développement ». Les aides communautaires sont juridiquement
des aides publiques, comme le montre l'article R1511-1, qui dispose que
« les subventions de l'Etat et de ses établissements public,
les aides de la Communauté Européenne et des organisations
internationales, et les subventions des collectivités territoriales et
de leurs groupements constituent des aides publiques ». D'où
une confusion normative possible entre aides communautaires et aides d'Etat. En
ce sens, les aides communautaires sont aussi des aides à
finalités régionales (AFR). La carte des AFR a été
adoptée le 7 mars 2007, et a été approuvée par la
Commission. Sont concernés la prime à l'aménagement du
territoire pour les projets, les aides à l'immobilier d'entreprises, les
exonérations de taxe professionnelle, les aides au tourisme, les aides
à l'investissement des PME, les aides des collectivités à
l'investissement productif des grandes entreprises. La primauté
régionale est reconnue législativement, concomitamment au
régime des aides pouvant être accordés aux entreprises,
comme le montre le schéma de développement économique
qu'elles peuvent édicter. Or, la Commission cherche à restreindre
le champ du zonage AFR, et donc des aides aux entreprises, tout en assurant une
coordination avec le régime des aides tel qu'il est
déterminé au niveau communautaire. Cela n'est pas nouveau,
puisque la Commission, dès 1971, adopte une décision qui
distingue les régions centrales des régions
périphériques, distinguant de fait les possibilités
d'aides entre ces régions. En 1998, elle adopte une nouvelle
décision pour les AFR qui vaut pour la période de programmation
2000-2006. Cette décision est basée sur un principe de
réduction de ces AFR, afin d'assurer une coordination entre les pays
plus pauvres, ceux bénéficiant de la cohésion
communautaire, et les régions plus prospères. Cette
décision repose aussi sur le principe de cohérence entre les
cartes des AFR et les dotations provenant des fonds structurels. Enfin, les
aides favorisées par le droit communautaires sont celles
génératrices d'emploi, et qui sont considérées
comme des investissements au sens qualitatif du terme. C'est la raison
d'être, du reste, de la notification préalable de la Commission,
chargée d'étudier le régime des aides au dessus du seuil
de minimis. On note que certains Etats comme l'Espagne, l'Allemagne ou encore
l'Italie pourront « compenser » une restriction des
régimes d'aides car les territoires éligibles à ce zonage
le sont également aux fonds structurels. Mais la France est relativement
moins éligible aux aides communautaires, d'où l'importance des
interactions normatives entre les aides d'Etat et les aides communautaires, et
des négociations lors d'une nouvelle période de programmation.
Ainsi, l'évolution du régime des aides d'Etat est imputable, du
moins pour partie, à la politique de cohésion communautaires,
à l'évolution des fonds structurels et, de manière plus
générale, à la construction européenne. En France,
le régime des aides locales reflète aussi cette influence qui
n'est pas seulement indirecte.
Sont recherchées des synergies avec les contrats de plan
Etats-régions. Il s'agit là de la déclinaison du principe
de complémentarité. Les fonds interviennent en appui des CPER. Le
CIACT de 2006 a permit de continuer à aligner la durée des
contrats avec celle de la programmation des fonds structurels. Les CPER, qui en
sont actuellement à leur cinquième génération,
devront se conformer aux priorités de Lisbonne, notamment la
compétitivité et l'attractivité des territoires, le
développement durable et la cohésion sociale et territoriale. Ils
concerneront surtout des investissements nationaux importants, pourront
concerner aussi des projets urbains ou ruraux. L'évaluation de la
réalisation de ces priorités sera pilotée au niveau
national par une instance d'évaluation commune aux programmes
opérationnels et aux CPER. Pour les CPER, c'est le GESPER, Groupe
d'étude et de suivi des contrats de Projets Etat-régions, et
institué pas une circulaire du 15 avril 2007 qui en assure
l'évaluation. Elle sera aussi le fait des services
déconcentrés et de la DIACT pour les programmes
opérationnels, ainsi que par un Comité régional de
l'évaluation, pour le niveau régional, donc,
coprésidé par l'Etat et le Conseil régional et commune aux
CPER et aux programmes opérationnels. Les évaluations des CPER
sont donc calibrées sur celles des fonds structurels. Pour la
période de programmation actuelle, les CPER sont renommés
contrats de projets Etats-régions. Cette démarche vise à
assurer une plus grande cohérence administrative à l'ensemble,
afin de respecter l'additionnalité, où des difficultés
quant au zonage des fonds structurels peuvent apparaître, puisque les
CPER ne le sont eux-mêmes que partiellement. Cet alignement est aussi une
manière de redonner un poids symbolique aux contrats de plan,
décriés pour leur valeur juridique plus ou moins contestable, en
leur conférant une ligne stratégique plus claire. Sur la question
de la valeur juridique de ces plans, un arrêt du Conseil d'État du
8 janvier 1988 Ministre chargé du plan et de l'aménagement du
territoire contre Communauté Urbaine de Strasbourg montre que ce sont de
véritables contrats administratifs. Mais l'arrêt Estuaire Ecologie
de 1996 du Conseil d'Etat montre que cela n'emporte aucune conséquence
directe quant à la réalisation effective des actions ou
opérations qu'ils prévoient. Ils ont étés
introduits par la loi du 29 juillet 1982, et sont réputés ne
contenir que des clauses contractuelles. L'article 12 précise que
« la résiliation par l'État du contrat de plan ne peut
être effectuée que dans les formes et conditions qu'il stipule
expressément ». Toutefois, l'encadrement Etatique des
collectivités par l'Etat est bien réel, ce qui pose, une fois de
plus, question quant à la libre administration des collectivités
territoriales et quant à la péréquation financière
entre les régions, puisque c'est une manière pour l'Etat d'y
déroger. Et, à l'inverse, cela peut être une manière
pour l'Etat de faire financer des plans politiques nationaux par les fonds
structurels au niveau régional, comme par exemple le plan de
cohésion sociale et ses pôles de compétitivité, peut
être au détriment des priorités purement territoriales.
En ce qui concerne, par ailleurs, l'article 1 de la loi du 13
août 2004, il permet aux régions, comme dit
précédemment, d'élaborer un schéma de
développement régional. Le Conseil constitutionnel a posé
une réserve d'interprétation dans sa décision du 12
août 2004, en estimant que "toutes les régions pourront
décider d'élaborer un schéma régional de
développement économique". Ce schéma devra respecter les
conditions légales de la loi, c'est-à-dire le principe de la
convention avec l'Etat qui permet la détermination des aides
concernées, leur montant, leur mise en oeuvre, sans que ce ne soit un
transfert de compétence définitif. Il s'agit, comme le souligne
l'actuel Comité des Régions Luc Van Den Brande, de faire des
régions des acteurs « pleinement associées au processus
de prise de décision, de mise en oeuvre et de suivi » des
fonds. Le schéma expérimental est précisé dans la
circulaire ministérielle du 25 mars 2005. Il doit comprendre notamment
les orientations stratégiques de la région, et
« poursuivre les objectifs de promotion d'un développement
économique équilibré de la région, de
développement de l'attractivité de son territoire et de
prévention des risques d'atteinte à l'équilibre
économique de tout ou partie de la région ». Cela ne
doit pas aller à l'encontre des orientations de l'Etat, et être
réalisé dans le respect des règles communautaires. De
plus, cela doit être réalisé en concertation avec les
autres collectivités territoriales et leurs groupements. Ces
interactions sont le reflet de la politique incitative que les institutions
communautaires souhaitent réaliser par l'intermédiaire des fonds
structurels.
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