La pin-up et ses filles: histoire d'un archétype érotique( Télécharger le fichier original )par Camille Favre Université Toulouse Le Mirail - Master 2 Histoire des civilisations modernes et contemporaines 2007 |
1.3 Un nouveau corps normé, maîtrisé et contrôlé.Les images publicitaires invitent par conséquent à se former un système de représentations à leur ressemblance. D'où un épuisement de l'originalité au profit d'une espèce d'imaginaire consensuel composé chez tous de mêmes éléments formatés par la vision de ces images publicitaires. A travers les pin-up un nouvel imaginaire du corps est proposé : ce corps doit être contrôlé, maîtrisé, épilé, poudré, verni, soyeux, parfumé, érotisé selon les canons esthétiques et les normes de séduction en vigueur au cours des décennies. On voit alors combien le corps, à partir des années cinquante, au travers l'exemple des pin-up, est étroitement mêlé aux finalités de la production comme support (économique), comme principe d'intégration (psychologique) dirigé de l'individu, et comme stratégie (politique) de contrôle social. La norme se dit et se montre. La pin-up est un exemple représentatif du processus de mise en place de nouvelles normes esthétiques (donc érotiques et économiques) au sein d'une société de consommation. On arrive à une fixation de traits esthétiques qui deviennent universels. La pin-up devient alors un mythe référence. « L'utopie s'y accomplit dans sa perfection, mais cette perfection est un spectacle, son harmonie est une représentation. De ce point de vue, le travail de la fiction utopique se transcrit dans une figure idéologique où il s'immobilise79(*) ». Mais la norme ne s'énonce pas de manière autoritaire et absolue comme dans une société disciplinaire, société dans laquelle la maîtrise sociale est construite à travers un réseau ramifié de dispositifs ou d'appareils qui produisent et régissent les coutumes, les codes vestimentaires, les habitudes et les pratiques productives. Elle s'édicte par un glissement subtil d'intériorisation de celle-ci, de méthodisation comme le pratique la société de contrôle. « On doit comprendre la société de contrôle comme la société qui se développe à l'extrême fin de la modernité et ouvre sur le postmoderne, et dans laquelle les mécanismes de maîtrise se font toujours plus démocratiques, toujours plus immanents au champ social, diffusés dans le cerveau et le corps des citoyens80(*) ». La société de contrôle pourrait être ainsi caractérisée par une intensification et une généralisation des appareils normalisants de la disciplinarité qui animent à l'intérieur nos pratiques communes et quotidiennes ; mais au contraire de la discipline, ce contrôle s'étend bien au-delà des sites structurés des institutions sociales, par le biais des réseaux souples, modulables et fluctuants, notamment avec l'apparition de nouveaux médias comme la télévision. La norme peut être élaborée mais celle-ci ne sera vraiment effective que si en même temps la méthode de conformité est énoncée afin que la norme y soit incorporée. Ce rôle est tenu par les magazines féminins qui prennent alors le relais. * 79 MARIN Louis, Utopique : jeux d'espace, Paris, Minuit, 1973, p.310. * 80 HARDT Michael, NEGRI Antonio, Empire, Paris, 10/18, 2000, p.48. |
|