PARAGRAPHE II : L'OBLIGATION ESSENTIELLE : REFLET DE LA
THEORIE DE L'OBJET DU CONTRAT
Cette idée est reçue de la thèse
(précitée) de M. Delebecque. En effet cet auteur explique
l'obligation essentielle par la notion d'objet du contrat. Dans ce cas l'objet
du contrat cesse d'être considéré comme le simple contenu
du contrat mais plutôt comme le contenu essentiel et fondamental du
contrat. Ainsi, l'auteur donne une définition de ce nouvel objet du
contrat : « l'objet du contrat désigne la prestation à
propos de laquelle l'accord de volontés intervient , autour de laquelle
s'ordonne l'économie du contrat. Quand le contrat est conclu, il
devient l'objet d'une obligation : c'est donc toujours bien de l'objet d'une
obligation qu'il s'agit, mais cette prestation est l'élément en
l'absence duquel les parties n'auraient songé à former le
contrat, c'est à elle que se rapporte les autres obligations que le
contrat ne peut créer ; elle absorbe, en quelque sorte,
l'utilité économique du contrat. On est fondé à
dire en ce sens que elle est l'objet du contrat. »
Cette définition a le mérite de mettre en
valeur l'objet du contrat. Elle contribue à créer un renouveau de
la théorie qui jusque là était considérée
comme le simple contenu du contrat. Dans cette nouvelle perception on constate
que l'objet du contrat ne se compose que d' « essentialia ». De ce
fait, cette vision se démarque de la composition triptyque que Pothier
avait établi à propos du contenu du contrat. Le raisonnement de
M..Delebecque assimile l'objet du contrat à l'obligation essentielle. Ce
point de vue est partagé par un autre auteur qui précise que
« à la prestation essentielle correspond la notion d'objet du
contrat ».
Dans l'arrêt du 2 décembre1997, la Cour de
cassation a abondé dans ce sens en parlant d'obligation substantielle.
La substance du contrat renvoie sans aucun doute à la notion d'objet
mieux qu'à la notion de cause. De plus la dite décision
n'était pas fondée expressément sur la notion de cause
comme l'arrêt Chronopost1 ou Securinfor. Il est évident que
l'objet du contrat peut être reçu comme un reflet de la notion
d'obligation essentielle surtout si l'on tient compte que l'objet renvoie aux
aspects quantitatifs du contrat et que ces aspects sont d'une très
grande nécessité quand on doit apprécier l'obligation
essentielle. Mais est-ce que l'objet du contrat peut être pris comme un
fondement inébranlable de la notion d'obligation essentielle ?
Il semblerait que non. La notion de l'objet est très
vague. Avec elle, l'on ne sait pas avec précision quand le contrat sera
anéanti pour non respect de l'obligation essentielle. Aussi,
l'incursion de nouvelles obligations dans le champ contractuel tend à
étendre la notion d'objet du contrat, ce qui fait qu'on ne peut plus se
fier complètement à cette notion comme fondement sûr de
l'obligation essentielle. Cela n'a pas échappé à cet
auteur qui a fait remarquer que « le contenu du contrat a
été étendu à l'extrême par la jurisprudence
qui y a ajouté certaines obligations accessoires comme l'obligation de
sécurité qu'il convient de rejeter comme appartenant au contenu
obligatoire du contrat ».
Parlant justement des insuffisances de la notion ici
étudiée, M.Delebecque, considère que les failles de la
notion d'objet du contrat « dévoileront que seul le concept de
la cause est capable de regrouper en totalité les idées que
renferme le nom générique d'obligation fondamentale et de donner
ainsi la compréhension de cette notion ».
La théorie de la cause du contrat est-elle le
fondement le plus sûr de la notion d'obligation essentielle comme
l'affirme cet auteur ?
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